Le petit garçon et le petit blond courent aussi. De pont en verre en pont en verre, ils sont chanceux de ne pas être encore repérés. Mais il faut dire qu'ils sont agiles, et puis qui penserait que quelqu'un serait assez fou pour s'introduire dans la Détresse...

Mais le petit garçon restait perdu dans ses pensées, avant d'être repris par le petit blond. Il fallait se concentrer, car ils risquaient leur vie. Après l'avoir remercié, le petit garçon lui pose une question. Qu'est-ce que c'était, toutes ces gouttes de sang ? 

Le petit blond lui explique. La Milice menait des recherches secrètes pour renforcer le royaume du Bois d'Épique. Comme ils n'avaient pas les remèdes du royaume voisin, le royaume de Cœur, la Milice a proposé une autre solution : les Animaux d'Épique. 

Les quoi ? Les Animaux d'Épique, reprit le petit blond. Dans cette forêt interminable, les animaux étaient autrefois prospères. Maintenant, pour se déplacer, il fallait emprunter des animaux du royaume de Cœur, qui coûtent très cher. Dans la forêt, il y avait les animaux communs, et les Animaux d'Épique. Plus beaux et grands que les autres, ceux-là étaient connus pour leur intelligence particulière : certains disaient même que leur sang avait des propriétés curatives... Vous connaissez la suite. Comme il n'y avait pas d'endroit plus approprié, ils ont décidé des les amener à la Détresse. Tout le sang qui s'égoutte ici est destiné à étudier son effet sur le sol, et sur les humains... 

Mais il voient bien que cela ne mène à rien ! Le petit garçon retourne sur ses pas en suivant les cris bestiaux. Le petit blond le prend pour un fou, mais sa fougue l'amuse. Il se dit que ce n'est pas une mauvaise idée de créer une distraction pour les gardes. Après l'avoir aidé à subtiliser des clés, ils se rapprochent d'une cage, dorée cette fois. Rien à voir avec celle des humains. 

En ouvrant la cage, une Bête, belle, puissante, à la fourrure blanche et tachetée de couleurs vives, avec une branche de cerisier non loin d'elle. C'était elle qui avait mangé le dernier des cerisiers lorsque le petit garçon était encore près de chez lui. C'était la Bête aux Cerises. Comprenant qu'elle était libre, elle s'élança d'un bond terrifiant mais plein de grâce vers les gardes et guida ses deux bienfaiteurs vers les autres Animaux d'Épique. Elle avait encore son sens du discernement, car elle était nouvelle : peu de son sang avait été pris. Elle pouvait se battre contre les gardes, même dans ces hauteurs de verre. 

Pendant ce temps, d'autres Animaux, plus fous et agiles encore, se ralliaient à la bataille grâce au petit garçon et au petit blond. Pendant que les bêtes détruisaient les gardes comme de la porcelaine, ils en ont profité pour libérer les humains enchaînés dans des cubes moins prestigieux : en leur confiant les clés, d'autres humains allaient les rejoindre. La Milice, désorientée, perdait la bataille. 

Le petit garçon et le petit blond se frayèrent un chemin dans toute cette cacophonie ! Des gens tombaient du ciel, des bêtes faisaient des acrobaties. Et tout cela dans le ciel. C'était impressionnant. Ils arrivèrent enfin au lieu de rendez-vous.

C'était le cube le plus haut placé. La hauteur était vertigineuse. Contrairement aux autres, il était complètement fait en or. Ce devait être l'Ancienne Chambre Royale, qui a dû être transformée en tour de contrôle par la Milice. Le petit garçon et le petit blond étaient les premiers arrivés. Ils inspectèrent la pièce. Des livres, des choses inutiles, des dossiers, des bibelots. Et un levier. 

Le petit roux, la vieille femme et les deux fils entrent dans la pièce. Ils préviennent de ne surtout pas toucher avant de trouver... Les Palmiers de Cœur ! Ces longues machines faites à base de feuilles ressemblaient à des cerfs-volants, les plus modernes de l'époque. Servant à se déplacer, ils étaient parfaits en cas de fuite. Les deux fils de la vieille femme avaient été emprisonnés après avoir découvert ce secret en fraternisant avec de jeunes recrues de la Milice. 

Tout le monde à présent équipé et les instructions données par les deux fils, on pouvait actionner le levier. Tous ensemble : trois, deux, un...

Dans un tremblement, une porte immense s'ouvrit sur la face arrière du cube doré.