CHAPITRE 4 - Shio
Je ne sentais rien. Je ne voyais rien. J'étais bien. Je pouvais oublier ce souvenir terrible qui me hantait et me terrorisait. Je ne voulais pas quitter ces abysses silencieux. Pourtant, une présence autour de moi semblait être la source du sentiment de bien-être qui m'habitait. Je sentis ensuite l'air frais de la patinoire pénétrer dans mes poumons, puis le contacte dur du banc contre mon dos, et enfin, cette main qui tenait la mienne. Je battis des paupières pour apercevoir la personne près de moi. Yuzuru me regardait avec une inquiétude qui se changea vite en soulagement lorsqu'il vit que je m'étais réveillée. Je me redressais lentement en tentant de mettre toutes mes idées en place.
– Ça va mieux ? s'inquiéta Yuzuru.
Je hochais lentement la tête tout en baissant les yeux.
– Désolée, murmurai-je.
– Ce serait plutôt à moi de m'excuser, contra-t-il. J'aurais dû me rende compte que c'était plus qu'une peur de tomber que tu avais.
Je tournais mon regard vers lui. Il était vraiment gentil avec moi. Je pensais qu'il me poserait des questions ou quelque chose comme ça, mais il s'est contenté de s'excuser.
– J'imagine qu'il déjà tard maintenant, fis-je en tournant les yeux vers l'extérieur.
– Il va être 17h. Ta mère est dehors en train de parler au coach.
Quelques secondes après, maman arriva et me serra dans ses bras. Elle s'inquiéta pendant une bonne vingtaine de minutes avant de m'aider pour rentrer.
Le lendemain, je fis une pause et n'allais pas à la patinoire. La journée s'écoula lentement. Je repensais à tout le temps que Yuzuru avait pris pour moi depuis notre rencontre. Grâce à lui, j'avais pu remonter sur la glace en un temps record. Certes en restant immobile, mais c'était un début.
Le jour suivant, je vins un peu plus tard que d'habitude. J'aperçus Yuzuru s'entraîner. Il venait de faire un triple axel. Le voir patiner me donnait encore plus envie de pouvoir reprendre.
Après un petit moment, Yuzuru me remarqua et me sourit. Je lui rendis son sourire et partis me changer. Lorsque je revins vers la glace, Yuzuru m'attendait.
– Shio, lança-t-il. Est-ce que tu serais d'accord pour que je t'aide à surmonter ton traumatisme ?
Je le fixais d'un air surpris. Je hochais la tête en bredouillant un vague « oui », prise au dépourvu. Yuzuru sembla soulagé de voir que j'acceptais.
– Mais... et toi ? demandai-je. Tu ne dois pas t'entraîner aussi ? Et ton entraîneur, il est d'accord ?
– Oui ne t'en fais pas pour ça. Et puis c'est un peu comme un entraînement aussi, répondit-il en souriant.
Je n'avais pas encore mis mes patins, mais ce fait sembla donner une idée à mon nouvel entraîneur. Il se mit à réfléchir intensément, tant et si bien qu'on aurait presque pu voir de la fumée sortir de ses oreilles. En attendant, je m'assouplissais. Du coin de l'œil, je remarquais que Yuzuru marmonnait encore quelques instants dans sa réflexion avant de hocher vigoureusement la tête, visiblement convaincu de ce qu'il avait imaginé.
– Je pense avoir trouvé la meilleure façon de procéder, affirma-t-il en se tournant vers moi. Pour tout ce qui est des sauts, des pirouettes et des positions, on va les travailler au sol et pour le reste, à ton rythme, sur la glace. Qu'est-ce que tu en penses, Shio ?
– Ça pourrait marcher.
Et ainsi commença mon entraînement intensif.
Ce matin-là, nous avons commencé par retravailler au sol mes positions de base. Si elles étaient parfaites lorsque j'étais statique, elles ne devraient pas trop changer une fois sur la glace. C'était assez simple, d'autant que même si je n'avais rien travailler pendant deux ans, tous mes automatismes se remirent d'eux-mêmes en place. Après une bonne heure et demi de travail, nous avons décidé de faire une pause. Je m'assis sur un banc et Yuzuru s'accouda à la balustrade en face de moi. Soudain, son ventre gargouilla. Ses joues devinrent rouges et il détourna les yeux en se frottant la nuque d'un air gêné. Je ne pus me retenir de rire devant cette bouille d'enfant trop mignonne. Puis, se fut à mon estomac de manifester, ce qui m'arrêta immédiatement dans mon fou rire, déclenchant au passage celui de Yuzuru.
– C'est pas drôle, m'exclamai-je. Viens, on va manger au lieu de te marrer.
Yuzuru me suivit vers les vestiaires sans pour autant s'arrêter de rire.
Une fois changer – et une fois le fou rire de Yuzuru passer – nous sommes allés acheter des ramens. Après avoir bien mangé, nous sommes revenus à la patinoire en parlant de tout et de rien. En arrivant, ma mère était là et semblait me chercher. Lorsqu'elle nous vit arriver, elle me donna mon portable que j'avais oublié.
– Je pense que tu pourrais en avoir besoins, me dit-elle. Sur ce, je ne vous dérangerai pas plus longtemps.
Elle partit en faisant un clin d'œil.
Yuzuru était reparti s'entraîner tandis que moi, je revoyais mes positions, mes arabesques et je me préparais psychologiquement à sauter. Comme je n'avais pas encore mis mes patins, je décidais de tenter quelques sauts simples au sol. Je pourrais normalement en faire des simples et peut-être même des doubles. J'ai toujours eu une assez bonne détente. J'ai commencé doucement pour ne pas me brusquer : le saut de valse. Démarrage jambe droite et atterrissage jambe gauche par l'arrière, avec un demi-tour. Je n'eus aucun problème à réaliser ce saut. Je le refis plusieurs fois en faisant attention à ce que mes bras soient bien décollés de ma poitrine lors du saut. Voyant que tout allait bien, je tentais autre chose : le salchow. Un trois sur la jambe droite et un demi-cercle sans poser la jambe en finissant comme pour le saut de valse. Je réussis aussi. Répétant l'opération plusieurs fois, je pris de plus en plus d'assurance jusqu'à tester des sauts plus complexe comme l'axel.
Après trois bons quarts d'heure, j'étais à bout. J'avais perdu en endurance. Je décidais de voir où en était Yuzuru. Il répétait une énième fois son programme. Il s'interrompit en me voyant approcher, puis se dirigea vers moi.
– Alors, tout va bien ? s'enquit-il.
– Oui, oui. Je peux faire tous les sauts simples et quelques sauts plus complexe sans problèmes sur le sol et en basket. Je vais juste faire une petite pause et après, j'essayerai avec des patins.
– OK ! Surtout ne force pas si tu ne le sens pas.
Sur ces mots, je partis m'asseoir sur le banc. Après une courte pause, je chaussais finalement mes patins et recommençais mes sauts. Cette fois-ci, pourtant, je m'arrêtais au saut de valse. Je venais d'avoir un vertige. Évidemment, mon traumatisme n'allait pas disparaître aussi facilement.
En fin d'après-midi, après de multiples tentatives, Yuzuru et moi avons décidé d'échanger nos numéros de téléphone pour faciliter les choses. Heureusement que ma mère me l'avait rapporté. Je me demande comment elle avait fait pour savoir que j'en aurai besoin. Sûrement l'instinct maternel.
Une semaine s'était finalement écoulée au fil de cet entraînement. J'avais fait plus de progrès que ce que j'imaginais. J'étais capable de patiner en avant et en arrière sans l'aide de Yuzuru. Je pouvais également faire des croisés, des chassés et des fentes latérales. C'était un grand pas en avant pour moi. Au cours de cette semaine, Yuzuru et moi étions devenus de très bons amis. Je savais que je pouvais compter sur lui quel que soit la situation et vice versa.
Même si on se voyait bien plus souvent à la patinoire qu'autre part, il nous arrivait de sortir en ville pour manger un morceau. Ces petits moments étaient toujours accompagnés de fou rire. Je n'avais jamais été aussi heureuse depuis mon accident. Au fond de moi, j'espérais que tout reste comme cela pour toujours. Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et je me doutais que le vent tournerait à un moment ou un autre.
Un lundi après-midi, alors que je patinais lentement à travers la piste, la tête dans les nuages, je m'emmêlais les patins et tombais. Je me retrouvais tout à coup assise sur la surface froide de la glace. Un frisson remonta le long de ma colonne vertébrale et mon cœur manqua un battement. Je me revis chuter puis j'eus l'impression de sentir du sang s'écouler de mon crâne, exactement comme ce soir-là. Je ne savais plus où j'étais et je commençais à paniquer. Ma respiration s'accéléra et mon rythme cardiaque aussi. Alors que j'étais sur le point de perdre connaissance, une voix me parvint. Je reconnus Yuzuru à travers les larmes qui emplissaient mes yeux. Une de ses mains se posa sur ma joue et l'autre se posa sur mon épaule.
– Calme-toi Shio, me dit-il. Tout va bien, je suis là.
Je n'arrivais pas à me calmer.
– Regarde moi, continua-t-il doucement. Concentre-toi sur ma voix et respire profondément.
J'écoutais sa voix rassurante attentivement et plongeais mon regard dans le sien. Ma respiration ralentit peu à peu tandis que Yuzuru continuait de me murmurer des mots apaisants. Les larmes continuaient malgré tout à rouler le long de mes joues.
Au bout d'un moment, je ne sais pas combien de temps exactement, je finis par me calmer. Yuzuru m'aida à me relever et j'allais m'asseoir sur le banc. Voyant que j'avais été vraiment secouée par ma petite chute, Yuzuru appela ma mère pendant que je retirais lentement mes patins.
J'étais rentrée en voiture avec ma mère. Je passais toute la soirée dans mon lit en tentant de remettre de l'ordre dans ma tête. Je pris finalement mon téléphone pour dire à Yuzuru que j'allais sûrement faire une pause de quelques jours. Cela sembla le rassurer. Je reposais mon portable et tentais de m'endormir.
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Et voilà le deuxième chapitre dont je vous avez parlé^^
N'hésitez pas à me donner votre avis ou faire des réflexions constructive pour que je puisse m'améliorer!
Sur ce, bonne journée/soirée/nuit et la prochaine pour la suite ^^
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