~3~
— Il en est hors de question, l'ermite.
— Tu n'es plus un enfant, tu as vingt et un an, je te signale. Alors comportes toi comme un adulte.
— Ça n'a rien avoir avec mon âge. Tu ne peux pas me forcer à faire quelque chose que j'ai pas envie.
— Je cherche à t'aider, tu ne le vois pas ?
— Je te remercie infiniment, mais je n'ai pas besoin de ton aide. Je me sens bien ici.
— Et tu penses que c'est normal pour un garçon de ton âge de rester enfermer du matin au soir dans une baraque ?
— Je te signale, si tu l'as zappé que je ne peux plus étudier comme les autres.
— Justement, c'est pour ça que je te propose un boulot.
— Mais j'en veux pas de ton boulot.
Alors qu'il lisait tranquillement un bouquin pour passer le temps, son grand-père, sorti de nulle part, était venu lui annoncer lui avoir trouvé un job dans la boutique de ramen de Teuchi. Un homme, qui au delà de son apparence de rustre, était aimé et respecté par presque tous les habitants de Konoha. Dans d'autres circonstances, Naruto aurait sauté de joie à l'idée de travailler dans le restaurant et manger gratuitement autant de ramen qu'il désirait, mais il était un criminel, il n'avait aucun droit à se mélanger au reste du monde. C'était un fléau, un banni.
— Écoute, tu ne peux plus continuer à fuir le monde extérieur comme tu le fais. Ça ne te sers à rien, tout le monde est au courant.
— Un grand merci à Ino pour ça, soupira l'ex-détenu, se levant du canapé sur lequel il était allongé pour faire les cent pas sous le regard sérieux de son grand-père.
— Ça ne change pas grand chose que ce soit elle ou non, ils devaient finir par savoir de toute façon. Et puis franchement, depuis quand tu es poltron?
Les poils de son cou se hérissèrent et un frisson de froid lui traversa tout entier. Naruto n'aimait pas qu'on le traite de peureux, poltron ou tout ce qui était semblable. Il fronça des sourcils et s'adressa au sexagénaire d'une voix sombre :
— Je ne suis pas une mauviette.
— Ô, vraiment ? fit Jiraya, les mains sur les hanches. Oui, parce que fuir la société comme tu le fais c'est pas être une mauviette peut-être ?
— Je ne fuis pas, d'accord ? C'est juste un peu trop tôt. J'ai pas envie d'attirer plus d'ennuis que ça.
— C'est ce que je disais, un peureux, conclut l'aïeul enlevant la main. Et moi qui croyait que la cellule te rendrait plus fort, tu en es ressorti chiffe molle.
— Ça n'a rien avoir avec moi.
— Alors quoi ?
— Je ne veux pas apporter la poisse à Teuchi, admit l'ex-prisonnier. D'accord, c'est gentil à lui de vouloir me prendre sous son aile et de m'embaucher à Ichiraku, mais je ne lui apporterai que des emmerdes. J'ai pas envie qu'il perde sa clientèle sous prétexte que je travaille là-bas.
— Depuis quand t'as des réflexions aussi censés ?
Naruto poussa un juron, exaspéré par son grand-père, plus préoccupé par son Q.I que par la véracité de ses propos.
— Très drôle, vas-y, marre toi !
— Écoute, tu n'as absolument rien à craindre. On en a longuement discuté Teuchi et moi et crois moi, il n'y a aucun soucis. Il t'accueille les bras ouverts. D'ailleurs, il n'y a plus de gangs qui traînent dans les parages, je ne vois pas de quoi tu as peur.
— Pour la énième fois je te le répète, je n'ai peur de rien.
— Oui oui, c'est ça.
Jiraya balaya sa réponse d'un geste de la main, purement amusé par la réaction de son petit-fils à chaque fois qu'il le traitait de poltron.
— Mais, puisque je te le dis, s'entêta Naruto.
— Qu'importe. De toute façon, quoique tu dises, ma décision est prise. Tu vas bosser dans le restaurant de Terrence. Et puis franchement, ça te donne l'occasion d'apprendre à préparer ces plats de ramen que tu aimes tant. Je ne vois vraiment pas ce qui te rebutes.
Jiraya sortit finalement de la pièce, laissant derrière lui un Nabil dépité qui, dans un geste de résignation, s'avoua vaincu. Quand cette vieille carcasse avait une idée derrière la tête, rien ni personne ne lui faisait changer d'avis.
Au fond, l'idée était plaisante de travailler à Icharaku. Le restaurant aux allures de taverne médiévale ne lui était pas inconnu. Enfant, c'était le restau où il allait manger son dîner en attendant le retour de sa mère. Adolescent, c'etait le quartier général où il passait beaucoup de temps avec ses vieux amis à chaque sortie des cours. Et quand il s'y rendait à seul, Ayame, la fille de Teuchi lui tenait toujours compagnie. C'était sa deuxième maison en quelque sorte. Naruto savait d'avance qu'il serait bien accueilli. Cependant, il ne voulait aucunement se confronter aux autres. Non pas par peur, mais simplement pour les protéger de lui. Mais comme son grand-père l'avait dit, sa décision était prise.
— Je commence quand ? s'écria Naruto pour que le vieil homme, dans une pièce adjacente, l'entende.
— Aujourd'hui même. Tu as une heure pour t'y rendre.
— Non, mais tu te fous de ma gueule ? T'aurais pas pu me le dire plus tôt ?
— C'est toi qui a voulu argumenter, entendit-il.
N'ayant plus le courage de débattre inutilement avec l'aïeul, Naruto quitta le salon et remonta l'escalier pour sa chambre. Il prit une douche rapide, enfila un jogging orange ainsi qu'un sweat à capuche noir pour camoufler son visage, des converses puis sortit à la hâte après avoir saluer son grand-père au passage.
Sans se soucier de son environnement, il mit le cap sur Ichiraku Ramen. Évitant la route trop bondée, le jeune homme empreinta les petites ruelles de quartier pour se rendre au centre-ville de Konoha. Cela lui prit une bonne trentaine de minutes. C'est donc aux environs de dix heures qu'il arriva devant la façade parée d'un superbe habit sombre comme on en taille à Iwa et qu'il détailla longuement. Le néon à son nom sur la façade avait disparu, mais celui au dessus de « Ramen » était resté en signature.
Naruto eût un pincement au coeur au moment où ses souvenirs ressurgirent des tréfonds de sa mémoire. Il hésita à franchir la porte, s'apprêtant à faire demi-tour et à rentrer chez lui quand il entendit crier Ayame, une jeune femme de taille moyenne, aux yeux noisettes et aux cheveux bruns. Elle lui sauta au cou. Il l'attrapa fermement, évitant de tomber comme la dernière fois avec Hinata.
— J'y crois pas, s'écria-t-elle, en tirant sur ses joues. C'était donc vrai, t'es bien de retour. C'est vraiment toi ?
— Bah oui c'est moi. Et puis arrêtes, tu me fais mal.
Ayame cria de joie si fort que le jeune homme fût obligé de mettre la main sur sa bouche et de l'entrainer à l'intérieur du restaurant qui, pour son plus grand bonheur, hormis quelques coups de pinceaux, n'avait pas changé. Car c'etait bien ces fresques dmurales, ces tables de bois disposées en rangs d'oignons, ces affiches de ramen en métal étain, ces plaques publicitaires au style rétro, ce four à bois et ce service à l'ancienne efficace qui faisaient tout le charme désuet du lieu.
Naruto fit rapidement le tour de la salle. Comme il s'y attendait, l'établissement était vide à cette heure de la journée. Soulagé à l'idée de ne faire face à personne pour le moment, le jeune homme lâcha un soupir et se détacha de sa captive.
— Non, mais t'es malade ? C'est quoi qui te prends ?
— Bah quoi ? Je suis simplement heureuse de te voir. Tu nous as énormément manqué. C'etait devenu calme ici, sans toi.
— Ouais bah ce n'est pas une raison, rétorqua-t-il, tentant d'effacer le sourire qui se nichait au coin de ses lèvres. Lui aussi était content de la revoir. Ayame, contrairement aux autres filles qu'il fréquentaient auparavant, était comme une grande soeur pour lui. Parfois, elle jouait aussi le rôle de sa mère. Et bien qu'il détestait ce côté intrusif de sa personnalité, il l'aimait bien.
— Allez, raconte. C'etait comment en tôle ?
— La misère, répondit-il, se remémorant ce qu'il avait traversé. Je veux plus jamais y remettre les pieds.
— Je suis contente que tu sois sorti indemne.
Malheureusement tout le monde n'était pas de cet avis, songea Naruto, les pensées tournées vers Ino.
L'homme robuste d'un mètre quatre vingt dix qu'était Teuchi apparut finalement, les bras chargés de caisses de boissons, suivit de près par un jeune homme brun, les mains tout aussi occupées. Naruto s'empressa de les aider à s'en débarasser. Et fut ensuite chaleureusement accueilli par le gérant du restaurant.
— Non, mais je rêve !
Tous les regards convergèrent sur l'adolescent svelte avec qui Teuchi était venu. Vêtu du même uniforme que Ayame, à savoir une veste de cuisine vintage et d'un pantalon noir, le garçon avait le doigt pointé sur Naruto qu'il dévisagea sans scrupule. Ce dernier fronça des sourcils.
— Vous vous souvenez du mec dont je vous ai parlé, un peu bizarre que j'ai rencontré dernièrement ? demanda-t-il au gérant et à sa fille. Bah c'etait lui.
— On se connaît ?
— Bah ouais, on s'est rencontré une fois en pleine nuit. Je t'ai proposé une clo...
Le jeune homme s'arrêta de justesse, se rendant compte de la portée de ses paroles. Naruto comprit tout de suite où il voulait en venir. Il s'agissait du garçon brun au visage harmonieux qui ressemblait à Shibuki par son look.
— Eh bah je te présente Naruto Uzumaki, dit le gérant du restaurant. Naruto, voici Konohamaru Sarutobi.
— La vache ! C'est donc toi la supernova dont tout le monde parle, même au lycée. T'en as pas l'air. Et moi qui m'attendais à mieux, se plaignit Konohamaru.
Naruto tiqua.
Supernova. Encore ce surnom grotesque.
Pourquoi tout le monde tenait à lui rappeler cette partie de sa vie qu'il tentait de mettre derrière lui ? À croire que l'on s'acharnait sur le bouton « retour » pour que le passé reste gravé sur sa peau alors qu'il se démenait pour s'en débarrasser. Mal à l'aise, il se massa la nuque.
— Ne l'écoute pas. Il en fait des tonnes comme d'habitude. Je pense pas que tu sois aussi populaire, renchérit Ayame.
— Non, mais tu blagues ! La nouvelle fait le tour de la ville.
— Maru, la ferme ! S'ecrièrent père et fille.
— Vous en faites pas, j'ai l'habitude. Ce qui m'inquiète c'est plutôt la réputation de ton restaurant, Teuchi. Avec moi qui travaille désormais ici, t'auras moins de clients.
Teuchi pouffa de rire, loin du monde affecté par les dires de ce garçon qu'il avait vu grandir et qui était devenu un homme à présent.
— J'en ai pleinement conscience si tu crois que c'est ça qui va m'empêcher de t'embaucher. J'ai ce petit morveux de Maru et pourtant, je survis bien.
— Je t'ai entendu tu sais, fit le concerné.
— Et puis s'ils ne sont pas contents, personne ne les empêche de partir. On n'abandonne pas la famille, renchérit Ayame.
— Merci beaucoup, fit Naruto, touché par leurs paroles.
— Mince, je crois que notre starlette va pleurer, renchérit Maru.
Teuchi et sa fille éclatèrent de rire tandis que Naruto vit rouge.
— Te jure, je vais te faire la peau.
— Comme si j'avais peur de toi. T'as peut-être fait la prison, mais t'as rien d'un dur, petite starlette.
— Ok ok ça suffit comme ça, interrompit le gérant avant que la situation ne dérape. On a pas que ça à faire. La clientèle débarque bientôt et on est pas encore prêt. Ayame va rejoindre les autres en cuisine s'il te plaît, et toi Maru, donne à notre nouvelle recrue sa tenue et montre lui le vestiaire pour qu'il se change. Ensuite, vous irez tous les deux me faire l'inventaire dans la réserve.
— Crois pas que tu vas t'en sortir aussi facilement, dit l'ex-prisonnier à l'encontre de Maru qui lui tira la langue.
Tous se séparèrent ensuite dans les différentes pièces de la bâtisse. Teuchi, resté seul dans le grand hall, les observa partir.
Avec la venue du petit Naruto, la vie de ce restaurant prenait désormais une nouvelle tournure.
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