Vacarme
Une déflagration subasonique s'abattit sur la ville d'Onveur ce matin-là.
C'était à la fois une surprise et en même temps l'on s'attendait bien à ce que quelque chose arrive. C'était la guerre entre la fédération et Aryar depuis toujours semblait-il. Et le front avait avancé vers la planète Onédo où se situait la ville, ville qui produisait des technologies militaires pour la fédération.
Pourtant qui pouvait se réveiller un matin en pensant qu'aujourd'hui sa ville serait bombardée ? Même quand on savait la guerre proche cela gardait tout de même un côté lointain, non palpable. Avant ce matin-là.
Lida encaissait un client venu lui acheter du lait à ce moment-là. Il n'y avait pas encore grand monde en ce début de matinée, un étudiant venu acheter son repas de ce midi, un employe venu chercher à boire et à grignoter sur le chemin du travail, deux amies venue acheter une récompense après leurs séances de sport comme tous les jours à cette heure-ci, et cet homme qui n'avait plus de lait. Cet homme dont elle ne saurait jamais rien. Cet homme qui fut le dernier visage qu'elle vit de sa vie.
Car la puissante déflagration s'abattit sur la ville à ce moment-là. Elle entendit juste le bruit immense et les vitres comme les murs éclatèrent tandis que le toit se fracassa sur leur tête les tuant tous d'un coup. Lida n'eut pas le temps de penser à ses deux filles déjà grande en classe à cette heure-ci, à tous les moments tendres qu'elles avaient passés ensemble, à leur père qui les avaient quittés emporté par la maladie quelques années plutôt et qu'elle rejoignait, à leur pauvre animal de compagnie si peureux et seul à la maison. C'était arrivé trop vite. Elle était morte avant de comprendre ce qui arrivait.
Grid était au travail depuis qu'il faisait encore nuit. Un travail éprouvant, où il devait porter combinaisons et masque de protection, où la chaleur était intense, où était moulés les matériaux des armes qui rendait la ville si précieuse à la fédération. Le vacarme régnait toujours ici. Et pourtant il entendit quand même la déflagration, sentit le sol trembler sous ses pieds et le mur qui s'effritait petit à petit. La panique saisit tout le monde. Il fallait sortir. Ils se bousculèrent en hurlant, se précipitant vers la porte mais tout s'effondrait en gravas autour d'eux. Bientôt ils furent ensevelis. Grid était retenue au sol par une plaque de pierre sur ses jambes. Il était entièrement enseveli. Il faisait noir, un noir total, un noir comme il n'en avait jamais connu. Cela raviva ses peurs d'enfants. Il respirait mal aussi. Il tenta de bouger mais il était totalement enseveli. Il appela à l'aide, au début, il hurla jusqu'à ne plus avoir de voix. Alors il attendit. Dans le noir et le silence total. Il pensa à ses parents. A sa pauvre mère quasi infirme. Loin d'ici, loin de la ville. Savaient-ils déjà qu'il y avait eu une explosion ? S'inquiétaient-ils déjà de son sort ? Ou vivaient-ils leur vie en ignorant que leur fils vivait les plus durs moments de la sienne. Il pensa à sa jolie et gentille voisine qu'il avait si souvent pensé inviter mais n'avait jamais eu le courage de faire, il se promit que quand il sortirait il le ferait.
Il attendit des heures ainsi à ressasser des pensées qui ne faisaient que le déprimer, avant de mourir asphyxié.
Batakia jeta un coup d'œil à sa montre en soupirant. Comme tous les matins le vaisseau public était coincé dans les transports. Elle espérait ne pas être encore en retard à un énième nouveau travail. Elle observa les gens autour d'elle, certains lisaient, écoutaient de la musique, des étudiants discutaient entre eux. Elle, elle ne sentait que le stress. Elle était éprouvée, la vie malgré son jeune âge l'avait déjà plus que maltraitée, elle n'avait aucun ami, n'était jamais tombé amoureuse, ne parlait plus à sa famille et elle était incapable de conserver un travail. Elle aurait voulu ne pas perdre celui-là. Mais si elle arrivait en retard dès le premier jour ce ne serait pas de bon augure.
Elle jeta un regard par la fenêtre, un autre vaisseau aux couleurs chatoyantes stagnait dans les bouchons. Elle s'imaginait possédait un tel véhicule avec un léger sourire. Et l'explosion retentit et souffla son vaisseau loin, très loin, à une vitesse ahurissante, il vrillait, percutait d'autres modules avant de s'écraser. Batakia elle était tombée et avait glissé tout le long des vrilles du vaisseau. Quand il s'écrasa, elle s'écrasa elle-même contre une femme, un corps massif tomba sur son dos lui arrachant un cri de douleur et sa tête était en sang. Mais elle était vivante. Elle entendait les bips d'alerte du vaisseau qui sonnaient encore et encore. Elle entendit le vacarme dehors, l'agitation dans les rues. Elle tenta de se dégager. Réussi en rampant à s'extirper des autres. S'assit un moment pour reprendre son souffle, ses esprits. Elle tremblait de panique et ne parvenait pas à se calmer. Puis elle vit une des étudiantes qui pleurait en gémissant, une vieille femme dans une position anormale, leur chauffeur évanoui sur son volant et trouva le courage de se lever, de remonter vers l'avant pour appuyer sur l'alarme de détresse et toujours tremblante tenta d'extirper et d'aider le plus de passager possible. Il fallait aider tous ces gens. Il fallait.... Elle s'écroula inconsciente et ne se réveillerait que quelques heures plus tard dans un service d'urgence
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Yovard était au tableau à écrire un exercice quand la déflagration intervint.
— Sous les tables ! cria-t-il à ses élèves.
Ils lui obéirent et se mit lui-même sous son bureau sentant tout trembler autour de lui. Ils attendirent que la pluie de débris cesse. Son cœur tambourinait dans la poitrine. Il n'arrivait pas à croire qu'il vivait ça. Il n'arrivait pas à croire qu'une explosion venait d'avoir lieu. Et il avait une vingtaine d'enfants sous sa responsabilité. Il appela chacun de ses élèves un à un, demandant si ça allait. Beaucoup pleurait, la plupart voulait rentrer, tous avait une détresse énorme dans la voix. Lui-même aurait bien voulut pleurer et appeler sa mère mais il devait se montrer fort pour eux.
Il respira doucement, pour se calmer, pour reprendre ses esprits.
Il sortit le premier de son bureau quand la situation semblait s'être calmée. Il entendait de nombreuses alarmes dehors, des hurlements, des appels. Mais rien qui ne semblait plus être un danger. Il observa la salle de classe, des petits débris jonchaient le sol mais ils étaient relativement épargnés. Il autorisa ses élèves à sortir de sous les tables. Trois étaient trop effrayés pour parvenir à bouger et dû les y aider. Certains s'étaient faits dessus. Mais tous étaient en vie, en bonne santé et le fixait avec des yeux désespérés.
— On va à la cantine. Là-bas on sera plus à l'abri ! décida-t-il.
Il encadra ses élèves, les fit se mettre deux par deux et leur ordonna de se donner les mains, pour que chacun ait un petit compagnon, qu'ils sentent ne pas être seuls. Il les guida dans les couloirs, passa dans toutes les classes. Certains avaient eu le réflexe de se mettre à l'abri tardivement et avaient des blessures graves, certaines salles étaient entièrement effondrées, certains couloirs complètement bouché. Mais il parvint à mettre tous les enfants à l'abri dans la vaste cantine, à moitié enterrée et donc intacte.
Il se mit à la fenêtre et aperçut le chaos qui régnait dehors. Il ne restait plus qu'à attendre. Il se tourna vers les enfants la gorge serré et se mit à leur conter une histoire pour tenter d'emmener leurs esprits loin d'ici.
Grina tendait une cuillère au bébé tandis que les deux plus grands courraient partout dans la maison profitant que leur père soit à la douche. Elle souhaiter le clame être loin de tous pendant un instant. Elle eut plutôt une explosion bruyante qui fit s'effondre la maison. Elle eut le réflexe de couvrir le bébé de son corps. Cela trembla un moment, la terre gronda et elle sentit des petits poids s'abattre sur son dos et ce fut fini. Elle se releva, d'une main elle réussit à écarter les débris autour et sur d'elle, elle avait été relativement épargnée et serrait le bébé dans ses bras. Mais en se retournant vers ce qui avait été chez elle, elle ne vit que des décombres, ni enfants, ni mari.
Elle hurla ! Appela les noms qu'elle chérissait, de ses mains creusait les décombres. Jusqu'à qu'elle entende des pleurs et des « mamans ». Elle se dirigea vers la source du bruit, posa le bébé au sol et creusa, creusa, encore et encore, pleurant, appelant ses enfants. Ses mains étaient en sang mais peut lui importait, il lui fallait ses enfants. Elle déblaya une main qu'elle serra en pleurant. La joie la parcourut une infime seconde avant de remarquer que la main ne réagissait pas. Elle appela sa fille. Qui répondit d'une voie étouffé et elle continua de creuser. Elle aperçut alors sa tête et continua avec plus d'acharnement tandis que son enfant pleurait, de soulagement. Elle finit par la tirer des décombres et la serra contre son cœur. Elle l'embrassa encore et encore, partout et cette dernière se laissa faire pour une fois, contente de retrouver sa mère après ces moments d'horreurs sous les décombres. Elle lui demanda de rester avec le bébé pendant qu'elle déblayait autour de la main toujours inerte pour retrouver son frère. Elle découvrit un bras, une épaule, son visage inconscient. Elle plaqua son oreille contre et entendit qu'il respirait toujours. Elle demanda de l'aide à sa fille et elles purent déblayer le haut du corps de son garçon. Elles ne tentèrent pas de l'extirper heureusement car en découvrant un peu plus elles découvrirent qu'il était embroché au niveau de sa hanche qui se teintait de rouge et qu'une immense plaque de métal coinçait sa jambe droite.
Grina se sentait totalement paniquée. Elle tournait la tête en tous sens, cherchant de l'aide qui ne venait pas. Elle appela son fils, espérait qu'il se réveillerait ou au moins s'accrocherait à sa voix pour rester en vie.
Des voisins accoururent, s'enquirent de son mari, soulager ses mains, tentèrent à plusieurs de soulever la plaque sans succès, fouillèrent les décombre pour chercher le père des enfants.
Les secours arrivèrent au bout d'une heure. Elle était alors effondrée, la main de son fils dans la sienne, sa fille et le bébé contre elle et toujours aucunes traces de son mari. Il fallait emmener d'urgence son fils à l'hôpital pour soigner sa plaie béante mais la plaque empêchait de le déplacer tandis que les robots chercheurs flottaient au-dessus des décombres à la recherche de son compagnon.
Il fallut couper la jambe de son fils, seul moyen de le sauver. Au moins ils emmenèrent sa fille et le bébé avant pour qu'ils n'aient pas à voir ça. Elle, elle resta près de lui, sanglotant. Le bruit de l'appareil dont ils se servirent fut horriblement bruyant. Elle se remémorerait à jamais ce bruit, celui de la lame coupant la chaire et l'os de son fils. Détournant la tête elle vit qu'on déblayait une zone bien précise. Avaient-ils trouvé son époux ?
Ce fut fini on posa son fils sur un brancard, l'entuba et le mena directement vers un vaisseau transporteur d'urgence. Elle, debout elle regardait les décombres qu'on continuait de creuser. On lui enjoignait d'aller à l'hôpital mais elle voulait son mari. Ce qu'on déterra était un cadavre, gris de poussière la tête complètement explosée. Elle hurla et tomba sur ses genoux, bouche grande ouverte comme pour crier, mais aucun son n'en sortait. On la transporta à son tour à l'hôpital.
Dev faisait son jogging matinal, courant la musique sur les oreilles quand la déflagration retentit. Il fut projette contre une vitrine sous le souffle de la bombe et perdit connaissance, sonné. Il ouvrit les yeux en plein cauchemar. Devant lui c'était l'apocalypse, des gens courraient en tous les sens, des bâtiments étaient partiellement ou entièrement effondrés, les décombres étaient fouillés et on en sortait des blessés et des morts. Au sol, à quelques pas, des cadavres étaient étendus. Des vaisseaux allaient et venaient à une vitesse faramineuse. Et il n'entendait plus rien.
Il pensa à sa femme à ses enfants et courut direction la maison. Un agent de police l'arrêta d'un geste de la main, lui disant quelque chose qu'il ne pouvait entendre. Il dit qu'il devait rentrer voir les siens et continua de courir jusqu'à son immeuble. Mais ce dernier n'était plus là. Il n'y avait qu'un tas de décombre à la place. Ce fut comme un coup au cœur. Il savait en plus que cet immeuble n'était pas solide, qu'il tombait en ruine. Mais il n'avait jamais eu les moyens d'en partir. Il y avait une équipe de sauvetage. Il demanda sa femme et ses deux enfants. On lui répondit, il montra ses oreilles. On l'emmena vers un vaisseau médical où il fut transporté vers l'hôpital le plus proche et il l'espérait vers sa famille. On le déposa rapidement aux urgences qui étaient une autre scène d'apocalypse. Des blessées partout, parfois très graves, des gens pleuraient, certains avaient un membre en moins, le visage déchiqueté, du sang partout. Il appela sa femme et ses enfants, espérant qu'ils l'entendraient et le rejoindrait. Il lui semblait voir son fils dans la foule, il bouscula les gens sur son passage peu importe leur état, mis la main sur l'épaule du garçon et pleura de soulagement en le serrant contre son cœur lui qui n'avait que une vilaine plaie au bras. Il lui demanda de l'amener à sa sœur et sa mère. Il le traina vers un brancard où était allongée sa femme le visage totalement défiguré, le corps totalement déformé et contre elle leur petite fille, si menue, une main totalement broyée, des larmes coulant sur ses joues, et le dos zébrés de larges coupures. Il posa un baiser sur son front brûlant et caressa les cheveux de sa femme en priant qu'on vienne s'occuper d'eux au plus vite.
Minza braqua le volant vers la droite et rentra quasiment dans un autre vaisseau forçant le passage. L'autre conducteur avait beau être énervé elle n'en avait rien à faire. Elle était en retard. Pourtant c'était une patronne consciencieuse et travailleuse et elle avait beaucoup de choses à faire alors au diable le code de la route. Elle tournait quand la déflagration explosa, l'aveuglant et propulsant son vaisseau dans un autre. Ils s'écrasèrent tous les deux au sol. La colonne sectionnée elle ne pouvait plus bouger. La douleur était terrible, ses jambes étaient broyés par l'avant du vaisseau, la pointe de l'autre vaisseau rentrait dans sa poitrine et ressortait dans son dos inondant de sang son ventre et lui donna l'impression d'étouffer. Elle avait peur, terriblement peur. Elle pleurait, voulut appeler à l'aide mais la panique l'avait rendue muette. Elle attendait des secours qui ne venaient pas en se sentant mourir, petit à petit. Elle eut le temps de regretter. Le renvoi de son assistante, les critiques envers ses employés à la moindre faute, le vide de sa vie personnelle. Elle mourut dans la douleur et les regrets.
Les sœurs du prieuré de la terre étaient en prière au sous-sol au moment de la déflagration. Elles n'en entendirent donc que le bruit. Un bruit immense, terrifiant. Mais pas une secousse ne fut ressentie. Surtout que le bâtiment était des plus résistants pas comme ces bâtiments modernes.
Elles se regardèrent et leur Grande sœur se leva et déclara :
— Allons voir ! On peut avoir besoin de nous.
Les sœurs la suivirent en file indienne, en silence. Elles montèrent jusqu'aux fenêtres des étages pour voir la ville totalement dévastés. Les rues détruites, les immeubles effondrés et les gens courant en tous sens.
— Il faut faire quelque chose ! dit sœur La.
— On ne peut pas laisser les gens comme ça ! approuva sœur Vercal.
— En effet. Ouvrez les portes ! Faites venir les blessés à l'infirmierie pour qu'on les soigne. Et celles qui le désirent peuvent partir dans les rues aider et amener quiconque en a besoin vers nous.
Les sœurs descendirent d'un pas rapide jusqu'au porte. La grande sœur les ouvrit en grands et les bruits de la ville parvinrent jusqu'à elles toutes. Les cris, les pleurs, les vaisseaux qui allaient trop vite, les alarmes qui sonnaient partout.
Elles se mirent en cercle, les mains serrées pour se donner du courage et certaines d'entre elles partirent affronter le chaos et le vacarme, tandis que les autres attendaient les réfugiés qui ne tarderaient pas.
Il y avait eu une déflagration supersonique ce matin-là sur la ville d'Onveur, elle s'était répandu sur toute la ville et l'avait détruite aussi bien que le cœur de ses habitants.
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