Chapitre 13 : Retours de Guerre (non corrigé)
Le silence pesait à mes oreilles et pourtant, rien ne m'était plus agréable que de l'entendre. Les longs sanglots qui m'avaient secoué ces dernières heures avaient été épuisants, durs à encaisser. A présent que je n'avais plus de larmes à verser, que seuls mes tremblements faisaient vibrer la tente, je pouvais enfin respirer.
Sinna, George, Jeane, Kaï, ma mère, mon père... Tous m'avaient menti. Et ce depuis ma naissance. Je n'avais personne à qui faire pleinement confiance. Ni même à moi-même, qui libérait un Dragon incontrôlable au moindre saut d'humeur.
Blottit dans le coin de toile usée, j'avais rabattu mes pattes contre mon flanc et me trouvais roulé en boule, tel un pauvre animal meurtri, couvert de sang et tremblant. De quoi avais-je l'air, ainsi ?! D'une bête faible et peureuse. J'étais furieux contre moi-même et contre tout le monde.
J'entendis alors des pas. Timides et lents, ils s'arrêtèrent une seconde. L'animal s'assit à mes côtés et une patte douce et tremblante me caressa le haut du crâne, comme hésitante. Les larmes roulèrent de nouveau sur mes joues ; ce geste faisait remonter en moi les souvenirs d'enfance, où ma mère me consolait enfant.
[NDA : chanson en haut !]
J'écarquillai les yeux lorsque la voix de mon père fredonna tendrement, d'une voix humide, tout en continuant à frotter doucement mon pelage hérissé :
-Je rêve d'un moment qui ne finit pas,
Je rêve d'une histoire sans fin.
Il suffit de croire à l'amour,
Il ne se cache pas bien loin.
Je rêve de capturer le bonheur,
Et je rêve d'arrêter le Temps !
L'amour fait battre nos cœurs,
Depuis longtemps...
Les larmes ruisselaient sur mes joues. Je connaissais cette berceuse. Elle m'était si familière, et pourtant je ne gardai aucun souvenir de ma mère me la chantant. Mon cœur s'arrêta de battre lorsque je compris que Julie ne me l'avait jamais bercée. Seul mon père m'endormait avec alors que je n'étais qu'un bébé, jusqu'à mes cinq ans, où il nous abandonna. Je me blottis contre lui et je sentis ses larmes goutter sur mon pelage.
-Je suis désolé, mon fils, murmura-t-il d'une voix rauque.
Je ne voulais rien répondre. Le silence me suffisait.
Que pouvais-je faire de plus qu'encaisser ? Kaï avait été clair concernant le futur. C'était à moi de sauver les Mondes.
-Kaï a décidé d'avancer l'attaque, déclara Aïru, grimaçant.
Je me raidis ; voilà qui n'améliorerait pas mon état.
-Qu'est-ce que cette vieille tortue a encore décidé ? feulai-je, la boule au ventre.
-Nous partons demain, à l'aube.
Je fus pris d'un haut-le-cœur et bondis sur mes pattes. Je n'étais pas prêt ! Et si le Dragon sortait au milieu des combats ? Et si l'un de mes proches perdait la vie ? Et si les Changers remportaient la bataille, s'emparaient de Phoenix ? Que deviendrons-nous ?
Ma gorge se serra tandis que mes pattes étaient secouées de tremblements. Je n'avais aucune envie de me battre. L'envie de fuir me pris subitement : que pouvaient-ils faire si je décidais, à l'instant, de quitter Phoenix ? De rester en Homme dans l'ombre des populations massives d'Enohr ?
-Je sais que c'est dur, me consola Aïru, une grimace au visage. Mais nous n'avons pas le choix...
-C'est ça, le problème ! hurlai-je, le coeur serré. Nous n'avons jamais le choix !
-Alors qu'est-ce que tu veux faire, hein ?! s'emporta subitement le vieux panda-roux, l'expression douloureuse. Te défiler et abandonner tous ceux que tu aimes à la mort ?!
Je me tus, le cœur battant. Aïru disait vrai. Il serait lâche de ma part de les abandonner. Qu'avais-je ressenti au départ de mon père ? Jamais je ne me permettrai de commettre la même erreur que lui. Il fallait rester, qu'importe le prix à payer.
-Les aviateurs sont de retour ! cria une voix à l'extérieur de la tente, hystérique.
Je croisai un instant le regard de mon père, puis nous détalâmes à l'extérieur. Mêlés à la foule oppressante qui se précipitait vers le centre du camp, je dus me frayer un chemin parmi les Erkaïns. Je dépassai enfin la mer de créatures en furie et tombai net sur un groupe de Erkaïns imposants, me doublant de taille. Leurs costumes d'aviateurs couleur crème étaient tâchés de sang et de suie, mais leurs sourires démontrait de leur soulagement d'être rentrés vivant et en un seul morceau.
J'écarquillai les yeux lorsque mon regard se posa sur deux silhouettes qui m'étaient familières : Jack et Bort, le lynx et le crocodile du bar du Festival des Récoltes ! Je ne les avais pas recroisés après la bataille contre les Changers, les évènements s'étant quelque peu précipités.
-Regarde qui nous avons là, sourit Jack à son ami.
Je vins à leur rencontre, un sourcil levé.
-Je savais pas que vous étiez là haut pendant les bombardements.
-Oui, nous sommes aviateurs mon p'tit ! répliqua Bort, un sourire en coin.
-Sans blague, raillai-je en levant les yeux au ciel. Vous êtes pas plutôt deux idiots qui s'amusent à mettre un déguisement d'aviateurs et à s'asperger de jus de tomate pour faire croire à du sang ?
Ils pouffèrent.
-Toujours aussi insolent, c'est pas possible... s'amusa Bort.
-Tu m'as l'air déjà plus aimable, remarqua le lynx, une moue approbative au visage.
Je me renfrognais. Ca n'était pas vraiment mon but. Aïru déboula à nos côtés et nous coupa à court dans la conversation :
-Kenfu, laisse les tranquille ! Ils doivent se reposer parce qu'ils repartent demain !
Je levai les yeux au ciel et feulai :
-Je crois que je suis assez grand pour décider quoi faire, et eux aussi.
Le vieux panda-roux autoritaire agita les moustaches, mécontent, et tourna les talons.
-Ah ouais, grommela Bort, les dents serrées. J'avais oublié que ce foutu Roi raccourcissait encore le peu de temps de repos qu'on avait.
-Sois pas ronchon, tempéra Jack, lui amusé. Tu sais aussi bien que moi qu'on aurait pas supporté d'attendre une semaine pour partir à nouveau.
Son ami hocha la tête, convaincu, et tous deux me saluèrent avant de rejoindre les autres aviateurs. Je restais pour ma part assis là, le cœur serré. Ces deux-là s'étaient bien trouvés. Ils étaient nés pour la guerre et mourraient probablement sur un front.
A l'inverse de mon cas. La boule au ventre, je réalisai subitement que j'étais terrorisé.
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