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Chapitre 4

Lorsque le réveil sonne aux aurores, j'ai l'impression d'être écrasée par une chappe de plomb. Je me redresse difficilement dans mon lit, le crâne assailli par les relents de l'alcool qui ont déshydraté jusqu'au dernier pore de ma peau. J'agis machinalement. Mes affaires sont déjà rassemblées dans un coin de la chambre : une valise ainsi qu'un sac.

C'est tout.

C'est étrange de voir sa vie résumée en deux petits bagages. J'ai l'impression de peser bien léger ici-bas. De ne représenter qu'un des nombreux grains de sable qui façonnent le désert de l'Entre-Deux monde.

Après avoir défait les draps de mon lit et les avoir repliés sur le matelas, j'enfile les vêtements que j'ai laissés sur mon bureau la veille.

Bientôt, je suis prête à partir.

Je n'ai plus rien à faire dans cette chambre. Je la contemple d'un regard distant, me remémorant tous les souvenirs qu'elle recèle. Mes premiers amis, premières amours, mes premiers chagrins et premières déceptions. Je me souviens de mon arrivée ici, de Minh tenant ma main potelée entre ses doigts.

Je me souviens de la peur qui ne me quittait pas, accrochée à moi comme un chewing-gum à une semelle.

Je me souviens de la solitude.

Je me souviens de l'absence d'avenir.

Quand mon mentor m'a amenée à l'Académie, il n'y avait pas d'horizon qui se profilait devant moi. Mon existence, terne et dépourvue de sens, semblait sur le point de se briser sans que je puisse lutter. Je pensais, à ce moment-là, que je n'aurais jamais ma place nulle part.

Cette chambre, c'était le symbole d'un renouveau. D'un lieu où le danger ne me guettait plus et où j'avais le droit de baisser la garde. À présent que j'ai retiré les photos collées aux murs, les dessins empilés sur le bureau, le miroir que Minh m'a offert à mon seizième anniversaire, elle m'apparaît froide et blême.

Ignorant la mélancolie qui m'envahit, je m'empare de la valise et du sac, et sors sans demander mon reste. Je longe le corridor en tentant de ne pas m'attarder sur les infimes détails qui en font mon corridor, et non n'importe quel corridor. Je détourne les yeux de l'alcôve réservée à mes après-midis lecture, nichée contre la fenêtre. J'évite également la tablette en osier à l'entrée, d'où Agate à renversé son infâme sirop de fraise impossible à nettoyer. Il nous avait fallu des heures et des heures pour nous débarrasser du liquide poisseux et rosâtre qui maculait le bois tressé.

Un triste sourire traverse mon visage.

Agate.

Je ne parviens pas à m'imaginer la vie sans elle...

J'atteins enfin les escaliers et me dirige vers l'entrée du bâtiment, où m'attendent Noah et Agate, ainsi que Minh, les autres diplômés, leur mentor et quelques autres amis. Un car s'est garé dans la cour, prêt à nous emmener loin d'ici. Nous sommes en tout vingt-deux diplômés cette année, et nous serons affectés aux agences d'Éveillés les plus proches : celles de Paris. Perdue dans un petit manoir de Bourgogne, l'Académie se trouve isolée du reste du monde et nous laisse peu de doutes quant à la destination de notre déménagement. La question reste à savoir : qui sera envoyé dans une agence de Traque et qui sera envoyé dans une agence de Veille ?

— Allez, dans mes bras, petite fleur ! s'exclame Minh en me voyant débouler.

Je lâche mes bagages au pied des marches et lui fonce dessus, enfouissant ma tête contre son cou.

— Tu vas tellement me manquer, Minh.

— Toi aussi.

Une pression envahit soudain mon corps et enserre ma poitrine. J'ai mal à la gorge et les paupières qui brûlent. Pire que cela, une enclume s'effondre sur mes épaules et me fait ployer sous la douleur.

La peur est revenue.

Intense.

Incandescente.

Je ne peux pas vivre sans Minh, je ne peux pas avancer sans lui. J'en suis incapable.

Incapable.

Incapable.

Incapable.

Sentant sûrement que je me tends contre lui, mon mentor s'écarte de moi et me force à le lâcher. Puis, il tourne la tête sans un mot et pars retrouver un autre groupe. C'est sa façon à lui de me forcer à grandir. De m'aider. Je le sais. Pourtant, en le voyant se détourner de moi, je souffre. J'ai l'impression qu'un étau assiège ma cage thoracique et appuie sur mes côtes, au point de me couper le souffle.

— Myo !

La voix de Noah me ramène dans le présent. Je me tourne vers mes deux amis, et découvre sur leur visage ce regard brillant qui reflète le mien. Je me bats silencieusement contre les larmes qui menacent de me noyer. La sensation est affreuse, amère, elle s'empare de moi et refuse de me libérer de son emprise. Comme un chien dont les crocs ne veulent abandonner leur os, elle me tenaille et me torture.

Nous nous serrons tous les trois, fort. Très fort. Pendant l'espace de quelques secondes, nous nous enfermons dans notre bulle, dans notre pays imaginaire, bien loin des responsabilités qui nous accablent à l'Académie.

Puis l'heure du départ arrive et il nous faut nous séparer.

Je déteste les adieux.

Après un dernier signe à ma famille, je monte dans le car et prends place. On démarre, baignant dans un silence maussade, et l'Académie s'éloigne rapidement, jusqu'à ne plus être qu'un point à l'horizon.

Ça y est.

C'est fini.

Bizarrement, cela me soulage.

Je peux enfin regarder devant moi.

Quatre bonnes heures s'écoulent avant que nous atteignions Paris et, lorsque nous nous arrêtons, mon cœur bat la chamade.

— 48 rue du Roi de Sicile ! s'écrie le chauffeur. Sont convoqués : Alan, Camille, Myosotis...

J'entends cinq prénoms suivre le mien, mais je ne les écoute plus. J'observe le bâtiment haussmannien en tremblant.

J'y suis.

En mode pilote automatique, je quitte mon siège et m'avance dans les rangs jusqu'à sortir. Je vais prendre mes bagages et rejoins le petit groupe qui a commencé à se former devant l'immeuble.

J'ai un goût acide qui miroite sur la langue. Personne ne parle.

Une fois les huit membres réunis, le chauffeur sonne à la porte et remonte dans son véhicule. On nous ouvre sous le ronronnement du moteur qui annonce le départ des autres diplômés. Nous n'avons même pas pu nous dire au revoir.

Je me sens vide.

— Eh bien, on dirait que les petits diplômés de Saint-Martin en Bourgogne sont arrivés !

Une femme d'une quarantaine d'années, les cheveux tressés et le visage chaleureux émerge de l'intérieur. Sa peau, d'un brun doux, est mise en valeur par l'uniforme traditionnel des agents de la section Traque : cargo noir et veste jaune.

Avant même qu'elle n'entame son discours de bienvenue, nous savons où nous avons été affectés, et mon cœur chute à mes pieds tant l'appréhension monte.

— Bonjour à tous ! Nous sommes ravis de vous accueillir. Vous avez su vous démarquer à l'examen par votre courage et votre capacité à affronter vos peurs en faisant face à votre première Mare. Vous serez donc, lors de cette année de formation, encadrés par des mare-triers. Entrez, maintenant, chers amis.

Elle s'efface du passage, nous laissant la voie libre.

C'est un bâtiment moderne qui s'offre à nous : un long couloir vitré, donnant sur des salles de conférences, dont une en pleine activité, et menant à un vaste hall au sol en marbre blanc, baignant dans un puits de lumière.

Nous nous avançons au centre de la salle et, lorsque la femme s'est assurée que nous nous étions tous réunis, elle se perche sur le bureau d'accueil en bois de cèdre, nous contemplant un à un de son regard clair.

— Je me présente, je suis Alice Durand, la directrice de l'agence de Traque de Paris. Afin de revenir sur des informations importantes que, je suis sûre, vous connaissez déjà, j'aimerais vous rappeler un peu comment fonctionne la SAE.

Alice Durand croise les jambes et nous scrute avec attention, comme si elle étudiait nos réactions. Du coin de l'œil, je vois Diego pousser un petit soupir las, peu enclin à entendre une énième fois l'exposé de la Société des Âmes Éveillées. Ce détail est loin de passer inaperçu pour Alice, qui semble prendre note de l'information en inclinant la tête dans sa direction.

— La SAE se compose de quatre sections. Vous vous trouvez dans celle dite de la « Formation », c'est-à-dire que tout au long de l'année qui va suivre, vous serez considérés comme apatrides. Pour l'instant, bien que vous soyez formés par des mare-triers, vous n'en restez pas moins de jeunes diplômés à la recherche du bon département et ce sera à nous de déterminer votre orientation l'an prochain. Des questions à ce sujet ?

Nous secouons la tête, pressés de mettre un terme à ce long monologue que l'on nous a déjà délivré un nombre incalculable de fois.

— Bien. Il existe, en plus de la section spéciale de la Formation, trois autres sections. L'Instruction, dirigée par les instructeurs, est celle que vous connaissez le mieux puisque les agences des instructeurs ne sont autres que les Académies, telle que celle dont vous venez. Il existe cent-soixante-cinq Académies disséminées dans le monde et chaque Académie abrite les Apprentis. C'est clair ?

Nouvelle approbation collective.

— Quelqu'un peut me dire quelle est la prochaine section ?

Camille, l'élève chevronnée de notre promotion, lève haut la main. Dès le feu vert d'Alice reçu, elle se lance dans une explication détaillée, étalant au passage sa motivation à la directrice. Il est clair qu'elle cherche à marquer des points.

— Il y a la section Veille, celle des éclaireurs. Cinq-cents agences existent dans le monde. Les éclaireurs possèdent un talent accru pour repérer les nouveaux Éveillés encore égarés. Ils les aident à revenir dans le Monde Réel et à trouver le chemin de l'Académie, soit en leur apparaissant directement, soit en donnant leur localisation à un instructeur, afin qu'il leur serve de mentor. Tant que le jeune Éveillé n'a pas été pris en charge, ils assurent sa protection dans l'Entre-Deux monde et tentent de trouver sa localisation dans le Monde Réel. Comme les trois autres grandes sections, la Veille est présidée par le haut-conseiller des éclaireurs, lui-même nommé par le dirigeant de son département. Chaque agence est ensuite composée d'un directeur, éclaireur, à la tête d'une équipe réunissant un service de santé — constitué d'Endormis —, un service administratif — Endormis également —, et un service de veille. La SAE a été créée en 1949 à Paris par Henri Laborit et Pierre Huguenard, alors que l'utilisation de la lobotomie faisait...

— C'est très bien, merci Camille. Je n'en demandais pas tant, la coupe gentiment Alice.

Je me mords la lèvre pour ne pas éclater de rire. C'est toujours comme ça, avec Camille : à force de zèle, elle finit par pousser à bout la totalité de nos formateurs.

— Maintenant, si vous me le permettez, je vais vous présenter la section à laquelle vous avez été affiliés cette année : la Traque. Nous sommes ici une agence de mare-triers, et notre rôle est de chasser les Mares dans l'Entre-Deux monde pour protéger les Endormis et les jeunes Éveillés qui n'ont pas encore pu être recueillis. Les mare-triers ont une appétence particulière pour débusquer et vaincre les Mares. Vous allez donc suivre une formation plus axée sur le combat et la chasse, et moins sur le pistage des nouveaux Éveillés ou l'analyse de l'acte d'Éveil en lui-même. Vous serez amenés à entrer dans le feu de l'action et à vous battre. Mais ne vous inquiétez pas : vous serez accompagnés aussi longtemps que nous estimerons cela nécessaire et, surtout, si vous vous êtes retrouvés dans cette agence, c'est que vous avez su vous démarquer par votre courage et votre réactivité lors de l'examen de fin de formation. Vous êtes donc tout à fait à votre place ici. Des questions ?

Le silence règne dans la salle. Après un rapide coup d'œil sur un petit calepin qu'elle tient entre ses mains, Alice saute de son perchoir et reprend :

— Parfait, je vais vous indiquer vos tâches de la journée. Tout d'abord, sachez une chose : ici, je préfère favoriser l'intégration. Je vais donc vous séparer les uns des autres et vous affecter à des groupes de mare-triers différents, de façon à m'assurer que vous vous investirez pleinement dans notre agence.

Ce n'est pas une surprise : nos instructeurs nous ont prévenus à ce sujet. Alice a beau prétendre que c'est sa politique personnelle, il semblerait que ce soit le cas dans toutes les agences : on ne laisse jamais les nouveaux diplômés ensemble.

Question de principe.

— À présent je vais faire l'appel. Chacun sera invité à venir chercher le papier lui indiquant son aile de résidence ainsi que son emploi du temps. Je vais couper court au suspense : aujourd'hui, vous allez effectuer une première plonge, pour que nous puissions évaluer vos capacités dans l'Entre-Deux monde, puis vous profiterez d'un pot d'arrivée avec l'équipe à laquelle vous avez été assignés et pourrez faire la connaissance de ceux qui formeront votre quotidien.

Sans attendre, Alice nous appelle un par un. En entendant mon prénom, je m'avance vers elle et m'empare des fameux papiers qui me sont réservés. Les informations, gribouillées au marqueur, sont succinctes : « aile C, troisième étage, porte 15 ». Six petits mots et pourtant tant de sens : à eux seuls, ils incarnent l'endroit où je vais vivre.

J'attrape mes deux bagages et m'attelle à suivre le plan dessiné de l'autre côté de la feuille, le cœur battant.

Ça y est, je vais découvrir mon nouveau chez moi. 

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