Chapitre 35.

Quelques temps plus tard...

— C'est aujourd'hui le grand jour, souffla Thor en regardant par la fenêtre.

Asgard était magnifique. Encore plus que dans ses souvenirs.

— Tu veux que j'ouvre le champagne et que je crie « youpi » ? répliqua Loki, blasé, assis un peu plus loin sur le lit, les yeux rivés sur un bouquin fort intéressant traitant d'astronomie : il y avait tant que les humains ignoraient.

Le Dieu du Tonnerre sourit, puis secoua la tête.

— Ce serait trop t'en demander. Comment me trouves-tu ?

Il se tourna pour faire face à Loki. Il était vêtu avec plus de soin qu'à l'habitude. Après tout, le peuple asgardien entier allait avoir les yeux rivés sur lui. Il voulait leur faire honneur, être digne d'eux.

— Pas plus laid qu'à l'habitude.

— Tu m'aides vraiment, Loki.

Le littéraire haussa les épaules avec une nonchalance à peine déguisée.

— Et toi ? le questionna à nouveau Thor. Que vas-tu porter ?

— Je n'ai prévu rien de spécial...

Même si c'était un jour extraordinaire et que Loki accordait toujours une grande importance à son apparence, pour l'occasion, il n'avait rien prévu de particulier. Ses vêtements asgardiens suffiraient, croyait-il. Après tout, c'était Thor qui allait être encensé sur le devant de la scène, pas lui.

— Approche, lui dit son frère.

Fatigué de se faire interrompre en plein milieu d'une phrase, le Dieu de la Malice soupira avec dédain, puis posa son livre à côté de lui pour fixer son frangin avec agacement.

— Pourquoi ?

— Parce que. Approche.

— Je n'ai pas envie de bou –...

— C'est moi qui viens à toi, dans ce cas.

Le blond s'approcha et vint dans le lit en se plaçant juste derrière lui. Il entoura sa taille de ses jambes musculeuses pour l'empêcher de fuir.

— Il faut faire quelque chose avec ces cheveux, insista Thor sans être négociable. Ils sont rendus si longs – presque autant que les miens –, alors c'est impossible que tu les laisses comme ça sans rien ! Tu dois suivre les traditions d'Asgard !

Loki allait rouspéter qu'il n'était pas un Asgardien, mais il avait la sensation que cette excuse ne fonctionnerait pas et que Thor se contenterait de lui marteler à l'oreille qu'il avait grandi et été élevé à Asgard. Ne suis-je pas ton frère ? l'entendait-il déjà dire dans sa tête.

Thor plongea ses mains dans la chevelure de Loki et attrapa quelques mèches.

— N'y touche pas ! s'exclama le cadet en gigotant pour s'évader.

— Si tu bouges, ça va tirer ! prévint Thor du tac au tac.

Si le blond détestait que l'on touche à ses cheveux par-dessus tout, son frangin trouvait déplaisant qu'on le touche tout court, lui ou son apparence. Enfant, Thor laissait néanmoins sa mère tresser ses cheveux. Il avait l'impression, d'à présent, revivre un moment similaire avec Loki qui, petit, n'avait jamais eu les cheveux assez longs pour se livrer à un pareil exercice. Les petites mèches noires entre ses grands doigts, le Dieu du Tonnerre tressa avec une délicatesse surprenante. Loki cessa éventuellement de vouloir s'échapper à tout prix et se résigna. Après tout, ce n'était pas si terrible.

Au final, le Dieu de la Malice eut droit à trois ou quatre fines tresses qui se mêlaient à sa chevelure. Maintenant son travail accompli, il s'était attendu à ce que Thor le laisse en paix, mais son frère ne bougea pas d'un iota. À la place, le blond passa ses bras sous les aisselles de Loki et l'enlaça, déposant sa tête contre son épaule.

— Lâche-moi.

— Toujours aussi sentimental, mon frère, se moqua Thor avec ironie.

— Je t'ai gracieusement laissé jouer à la poupée avec moi, alors tu pourrais au moins éviter de m'écraser.

Il aurait pu se transformer en serpent et échapper aux attentions de son frangin en lui filant entre les doigts, mais il n'en avait rien fait. Le rire de Thor résonna dans la pièce et Loki en ressentit les vibrations jusqu'à ses os.

— Tu parles comme si tu m'avais offert un cadeau ! Les tresses te vont bien... n'es-tu pas content ?

Comme le Jotun ne répondait pas, le blond poursuivit en soupirant de nostalgie :

— Cela ne te rappelle pas quand Frigga voulait brosser mes cheveux et les tresser convenablement ?

Loki haussa les sourcils, puis un bref sourire moqueur éclaira ses traits.

— Je me souviens surtout que tu faisais des crises et que tu hurlais dès qu'elle tirait un peu trop.

Ces moments de tendre affection étaient plus glorieux dans les souvenirs du Dieu du Tonnerre...

— Pourquoi n'as-tu jamais laissé pousser tes cheveux, plus jeune ?

Loki haussa les épaules. Peut-être ne s'était-il jamais véritablement senti Asgardien... jusqu'à il y a quelques années. Il avait commencé à les laisser allonger un peu avant le Ragnärok.

— Ne bouge pas, lui dit Thor.

— Outch ! cria le Dieu de la Malice. Tu es tombé sur la tête ?! Qu'est-ce que tu as... !?

Loki se frotta la tête: son frère venait de lui arracher une mèche de cheveux.

— La touche finale, expliqua son frangin sans réellement expliquer quoique ce soit.

Thor s'appliqua à tresser la mèche de cheveux noir de Loki dans ses propres cheveux, puis une fois que ce fut fait, il prit son courage à deux mains et s'arracha lui-même une mèche en grimaçant. Le Jotun tourna la tête, interloqué. Il savait mieux que personne à quel point son frère tenait à sa chevelure, alors le geste était profondément signifiant. Le Dieu du Tonnerre lui attrapa la nuque et le força avec gentillesse à regarder devant lui. Il tressa la mèche dans les cheveux de Loki, puis lui tapota l'épaule, l'air de dire : « Voilà, c'était la touche finale ».

Intrigué, Loki attrapa la fine tresse où s'emmêlait le noir et le blond entre ses doigts. Entre temps, Thor s'était relevé et, sortant du lit, l'avait libéré.

— Bon, tu viens. Tout le monde doit déjà nous attendre.

Le Dieu de la Malice laissa tomber la tresse, puis releva les yeux sur son frère qui se tenait debout à quelques pieds de là.

— Je viens.