Chapitre 25 - Travail et retrouvaille
Toute la journée, Harry rumine ce qui s'est passé. Rogue a répondu à ses baisers. Il en est sûr, il ne l'a pas inventé. Il l'a vu, tout aussi excité qu'il l'était lui-même, ça ne fait aucun doute. Mais alors, qu'est-ce qui a pu le faire changer d'avis en plein milieu de... enfin, de... ce à quoi ils étaient occupés ? Il n'en revient toujours pas, comment l'homme a-t-il pu lui faire ça après avoir répondu à ses caresses ?
— Harry, tu es sur la même page depuis vingt minutes ! Ne me dis pas que tu n'as pas compris ça, c'est du niveau de quatrième.
Il lève les yeux sur Hermione, surexcitée, qui a trois livres différents sous les yeux. Choisissant de détourner la conversation, il les désigne d'un mouvement du menton et répond, d'un ton acerbe :
— Tout le monde n'est pas aussi intelligent que toi. Comment peux-tu étudier trois matières en même temps ? C'est impossible.
Elle le dévisage les yeux grands ouverts, incrédule, puis reprend contenance. Attribuant sa mauvaise humeur à une chose qui le trouble probablement, elle jette un œil à sa montre.
— OK, tu as cinq minutes pour m'exposer ton problème, pas une de plus. Après, je te jure que je te ferais réviser, de grès ou de force.
— Mais Hermione...
— Le chrono est enclenché, Harry, évite de perdre du temps.
Il secoue la tête. Comme s'il pouvait lui parler de ce qui s'est passé hier. C'est bien trop personnel, trop gênant.
— J'ai embrassé Rogue, hier soir.
Raté.
OK, c'est bien plus grave qu'elle ne l'imaginait, et elle met trois bonnes secondes avant de réagir, moins scandalisée que ne l'aurait été Ron, mais en état de choc tout de même.
— Tu as fait QUOI ? Mais Harry, c'est, c'est...
— Et il a répondu à mon baiser.
— ... merveilleux... Je suppose ? bredouille-t-elle, les yeux plissés d'indécision.
Cette histoire n'a aucun sens. Ou alors, elle n'a pas toutes les cartes en main. Mais dans tous les cas, il lui reste quatre minutes et demie pour la régler. Après, elle utilisera l'imperium s'il le faut, mais elle fera réviser cet abruti d'Élu de ses deux.
— Au début, il a répondu, murmure Harry pour n'être entendu que par son amie et non par l'entièreté de la bibliothèque, dont leur amis qui révisent à quelques chaises de là. Mais après, il m'a foutu dehors.
— Harry, reprend-elle d'une voix adoucie. J'avais raison, alors ? Tu es amoureux de lui ?
Il lui lance un regard dégoûté, boudeur. Pourquoi est-ce si important pour elle d'avoir toujours raison ? Alors qu'il lui raconte un truc aussi important, en plus. Mais, en même temps, elle semble sincèrement inquiète, alors, il soupire et continue sur le même ton.
— Je sais pas, Hermione... J'arrive plus à rêver à cause de la potion de sommeil, je crois que ça m'est monté à la tête. Enfin, si, cette nuit, j'ai rêvé... mais c'était trop tard, j'avais déjà... été chez lui.
— Je ne veux même pas savoir de quel genre de rêve il s'agissait.
— Je te le confirme, ajoute-t-il avec un demi-sourire niais, les yeux dans le vague.
— Harry, le rappelle-t-elle à l'ordre. Tu ne peux pas embrasser un professeur comme ça, sans qu'il n'y ait de conséquences. C'est... grave.
— Pour l'instant, il n'y en a pas eu, infirme-t-il en haussant les épaules. Et de toutes façons, on n'a plus cours, tu le sais bien. On va passer les derniers jours à réviser.
— Tu devrais aller le voir, insiste-t-elle. Pour t'excuser. Il doit avoir une heure de creux à 15 h, puisque c'était notre créneau.
Elle a perdu la tête, se dit Harry en la dévisageant.
— Je te rappelle que je vais le voir ce soir pour qu'il refasse mon bandage, je crois que c'est pas trop la peine que j'y aille plus tôt. Et je ne m'excuserai pas, ajoute-t-il avec une moue boudeuse. Il a répondu à mon baiser, je ne l'ai pas forcé.
Il est inutile d'insister et Hermione le sait, alors elle laisse tomber, choisissant de revenir sur le sujet des révisions.
En sortant de la bibliothèque pour se rendre dans la grande salle, leurs estomacs criants famine, les Gryffondors tombent sur Dennis Crivey, le frère de Colin, mort lors de la bataille de Poudlard, qui vient à leur rencontre.
— Harry ! crie celui-ci. J'ai un message pour toi du professeur Rogue. Je l'ai croisé alors que je sortais du cours de divination, il avait l'air pressé, c'est une chance qu'il soit tombé sur moi, sinon je sais pas comment il aurait fait pour te dire ce qu'il avait à te dire. En plus, il semblait soucieux. Je sais toujours pas si on peut lui faire confiance, tu sais, l'année dernière, il a vraiment pas été un bon directeur, mais puisque tu as l'air de t'être réconcilié avec lui, je suppose que c'est vrai ce qui a été dit dans la Gazette du Sorcier, tu sais, qu'il était un espion pour Dumbledore et qu'il a trahi Tu Sais Qui pour...
— Dennis ! l'interrompt Harry, qui craint qu'il ne se taise jamais, le gamin débitant ses salades à une vitesse deux fois supérieure à celle à laquelle son frère, déjà hyperactif, parlait. Qu'est-ce qu'il t'a dit ? C'est quoi son message pour moi ?
— Ah oui ! En fait, il quitte le château pour quelques jours et il veut que tu fasses refaire ton bandage par Madame Pomfresh pendant qu'il n'est pas là.
— QUOI ? Mais... Tu l'as vu quand ? Il est déjà parti ?
Dennis recule de deux pas sous l'assaut de son idole. Il ne pensait pas que cette nouvelle sans importance mettrait Harry dans un tel état.
— C'était il y a dix minutes, bredouille-t-il. Après, il est parti vers les cachots.
Les cachots, répète mentalement Harry, alors il n'est peut-être pas encore parti.
Abandonnant Dennis et ses amis, il pique un sprint dans le couloir, dévale les escaliers quatre à quatre, emprunte au moins trois raccourcis différents et arrive enfin devant la porte des appartements du Maître des Potions.
Sans plus réfléchir, il abat ses poings contre celle-ci
— Professeur ! Professeur ! s'acharne-t-il plusieurs minutes durant.
Mais sans réactions. Plusieurs élèves l'ont vu s'énerver contre la porte de bois, mais ils ont tous préféré déguerpir au plus vite. Si Rogue est chez lui, il va annihiler toute vie dans ce couloir en ouvrant la porte au vu de la façon qu'à Potter de la frapper avec rage.
Profitant d'être enfin seul, mais toujours énervé et ne croyant pas une seule seconde que ça va fonctionner, Harry tente de reproduire ce qu'il a fait des dizaines de fois il n'y a pas si longtemps. Posant sa main à plat contre le bois, il chuchote :
— Alohomora.
Et le déclic caractéristique se produit. La porte s'ouvre pour le laisser entrer. Rogue n'a pas enlevé son nom de la liste ultra réduite de personnes pouvant entrer sans son autorisation.
Alors il se glisse dans le salon et ferme derrière lui. Ainsi, seul, dans cette pièce qu'il connaît si bien, il se calme, et très vite, se demande ce qu'il fiche là. OK, Rogue part pour quelques jours alors que les examens sont sur le point de commencer, et ce, juste après qu'ils se soient embrassés, mais en même temps, il n'a pas besoin d'être là pour assister aux ASPIC. Il n'a même jamais dit qu'il le ferait. Quant au baiser, eh bien, il a encore moins promis quoi que ce soit. Ce serait même plutôt le contraire.
Las, Harry va jusqu'au canapé et se laisse tomber dedans. Le feu n'est pas allumé, on est déjà en juin après tout, mais il fait toujours un peu cru dans les cachots, alors, il ouvre la porte de la chambre et appelle à lui la couette reposant sur le lit.
Il ne devrait pas être là, et il ne devrait pas faire ça. S'enrouler dans la couverture qui porte l'odeur de Rogue, c'est lamentable. Et s'il n'avait pas encore quitté le château, qu'il revenait pour chercher quelque chose et qu'il le trouvait là ? Il serait furieux.
Incertain, Harry reste blotti une dizaine de minutes sous l'épaisse couette avant de quitter les appartements, la laissant sur le canapé. Qu'il sache que je suis venu, se lamente-t-il, qu'il sache que je n'apprécie pas qu'il parte comme un voleur moins de vingt-quatre heures après... après ce qu'il s'est passé.
Rejoignant les autres dans la grande salle pour sustenter son ventre gargouillant, il n'évite les questions gênantes que grâce à Hermione qui a enjoint tout le monde à se taire au sujet de sa réaction pour le moins inattendue. Au moins pour ce soir, a-t-elle ordonné, surtout s'il revient la mine basse.
Les deux jours qui suivent, personne n'entend parler du professeur Rogue. Les septième année révisent plus intensément que jamais, et toute l'école semble marcher sur des charbons ardents. La tension est palpable chez les élèves qui ont clairement l'impression d'être sur le point de jouer leur vie.
— C'est demain que ça commence, annonce Hermione, ce soir-là, devant la cheminée éteinte des Gryffondors.
— Sans blague ? grimace Ginny, relevant le nez de son manuel avancé de sortilèges. Je croyais qu'il nous restait toute une année !
— Ferme-là, Ginny, riposte Ron en tendant les bras vers sa douce. On est tous stressés, c'est pas la peine d'en remettre une couche. Viens, Hermione, un câlin devrait t'aider à te détendre.
— J'en doute, Ron, soupire-t-elle en refermant son livre de runes anciennes. Mais ça ne peut pas non plus faire de mal.
— Un câlin, grogne Harry, seul dans son fauteuil. Comme si ça pouvait améliorer quoi que ce soit.
— T'es jaloux, c'est tout, rétorque Ron en enlaçant sa petite-amie et en plongeant le nez dans sa nuque.
— À propos de ça, ajoute Hermione, Gin', Neville, vous ne passez pas la soirée avec Tobias et Luna ? Ça m'étonne, un tel sérieux.
Tobias Macleon, le nouveau petit-ami de Ginny, est un Serdaigle de sixième année, nouvellement attrapeur dans l'équipe de quidditch de sa maison.
— Comme si on avait le temps pour ça, grince Ginny sans relever la tête cette fois. Enfin, au moins ne pas être dans la même maison nous aide à ne pas perdre un temps précieux chaque soir à se bécoter au lieu d'étudier.
— Tu deviens plus terrifiante qu'Hermione quand tu stresses, se plaint Neville qui, lui, aurait préféré passer la soirée à câliner Luna que de réviser encore une fois.
— Je vais me coucher, annonce Harry, n'en pouvant plus des discussions, des révisions, des bécotages et, surtout, de ne pas savoir où Rogue est parti, ni s'il pense revenir avant la fin de l'année scolaire.
— C'est une excellente idée, approuve sa meilleure amie. Nous devrions tous faire la même chose.
Et en quelques minutes, le petit groupe a rejoint ses différents dortoirs. Laissant aux plus jeunes Gryffondors la place tant convoitée devant la cheminée.
Assis dans son lit, Harry hésite. Il ne lui reste plus assez de potion qui laisse rêver. Doit-il terminer ce qui lui reste et peut-être se réveiller à 4 h du matin ? Ou alors prendre la précédente, celle qui l'empêche de rêver, mais avec le risque que ses pensées se perdent encore dans d'insondables fantasmes en plein milieu de son premier examen ? Indécis, il sort la carte des maraudeurs de sa cachette et, à tout hasard, jette un œil sur les appartements de Rogue. Il faudra bien qu'il revienne un jour, alors pourquoi pas aujourd'hui ?
Les yeux rivés sur la petite étiquette qui s'active dans la cuisine, il hoquette de surprise. Rogue est de retour.
Sans réfléchir davantage, Harry saute bas de son lit, emporte sa cape d'invisibilité et se précipite dans les couloirs sombres du château.
Arrivé devant la porte du Serpentard, il hésite une brève seconde avant de finalement poser la main dessus. Si Rogue ne veut pas qu'il entre chez lui, il n'a qu'à enlever son autorisation.
L'homme qui s'affaire au-dessus d'un chaudron en cuivre est de dos et ne l'entend tout d'abord pas arriver à cause du sifflement, probablement dû à de l'extrait de mandragore, en sortant. N'osant pas signifier sa présence, Harry reste planté derrière lui, absorbé dans sa contemplation.
Il a retiré sa cape et ses robes, travaillant juste habillé d'une chemise blanche sous laquelle le jeune homme devine ses muscles fins et secs se mouvoir. Il est en train de se dire qu'il pourrait rester à le regarder toute la nuit, quand l'homme se redresse. Il n'a pas encore terminé de se retourner que déjà un prénom se dessine sur ses lèvres.
— Harry ?
Oh merde. Il a l'air si heureux de le voir que le Gryffondor a envie de lui sauter au cou. Et s'il recommençait ? S'il l'embrassait à nouveau ? Est-ce que Rogue se fâcherait ?
— On doit parler.
Quelle maturité. Ah, il se déteste, il aurait dû lui sauter dessus. Laisser libre cours à ses pulsions.
— Tu as raison, Harry, mais pas ce soir.
Harry veut riposter, mais Rogue fait un pas vers lui et pose deux doigts sur ses lèvres pour le faire taire.
— Tes examens commencent demain, on ne peut pas passer la nuit à parler. Pas celle-ci. Mais on le fera, je te le promets.
— Où étiez-vous ? essaie-t-il quand même, à deux doigts de lécher ceux qui se trouvent sur sa bouche.
— Pas aujourd'hui. Je suis sérieux. Va dormir.
— Je n'ai plus de potions.
— Alors, dors sur le canapé. Moi, je reste ici, je veillerai sur ton sommeil.
Le jeune homme voudrait opposer plus de résistance, mais il sait que le professeur a raison, il ne peut pas prendre le risque de gâcher tous ces mois d'études pour une nuit blanche.
— N'espérez pas vous en sortir comme ça à chaque fois. Je veux ma discussion.
— Et tu l'auras, sourit, Rogue en le regardant s'éloigner vers la cheminée.
— Professeur ? ajoute Harry, avant de se laisser tomber dans le canapé. J'aime quand vous me tutoyez.
S'enroulant dans la couette qui n'a pas bougé de là depuis sa petite incursion quelques jours plus tôt, il ne voit pas la surprise se peindre sur le visage de Rogue qui n'avait pas remarqué jusqu'alors qu'il ne le vouvoyait plus.
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