Chapitre 16 - Insistance et entourloupe
Comme prévu, Rogue reste absent toute la journée, mais au repas du soir, Harry a la surprise de le découvrir assis à sa place. Le professeur ne lui accorde pas un seul regard de tout le dîner et ça le rend fou. Alors, quand celui-ci se lève pour se diriger vers la porte de la grande salle, Harry bondit de son siège et lui court après sous l'œil étonné de Ron et suspicieux d'Hermione.
— Professeur ! Professeur ! insiste-t-il alors que l'homme ne se retourne pas.
En arrivant à son niveau, il lui attrape le bras, puis le relâche aussitôt, sentant les regards choqués des Serpentards tout autour de lui.
— Potter, soupire Rogue. Que me vaut le déplaisir de votre insistance ?
— Ma... mes blessures... elles...
— Elles vous font souffrir à nouveau, s'inquiète immédiatement le professeur en le regardant enfin en face.
Par précaution, Harry détourne le regard.
— Non. Enfin, pas plus que d'habitude, mais je n'ai plus de... euh... potions. Oui, c'est ça, je n'ai plus de potions.
Il voudrait juste lui demander des nouvelles des blessés de l'Essex, mais c'est impossible avec autant d'élèves dans le couloir. Il ne doit pas oublier qu'ils n'ont aucune raison d'être proches au point de discuter ensemble en dehors des cours. Rogue aussi en a conscience, probablement plus encore que lui, et il sait également qu'il a donné assez de potions à Harry pour tenir jusqu'à lundi. Mais s'il l'éconduit, il ne doute pas que le garçon viendra de toutes façons, à une heure probablement ridicule et à un moment où il n'aura aucune envie de le recevoir. Autant fixer le rendez-vous lui-même.
— Venez à 21 h, Potter, je vous en fournirai plus.
— Merci, professeur.
— En attendant, vous devriez retourner travailler, il vous reste beaucoup de choses à faire pour lundi et vous avez à peine commencé.
— Comment savez-v...
Harry ouvre la bouche, ses yeux verts plongés dans ceux du professeur.
Son souffle sur sa bouche, ses lèvres douces...
Bondissant en arrière, il rompt le contact.
Évidemment, ce sale serpent lit encore et toujours dans ses pensées.
Pourvu qu'il n'ait rien vu de compromettant.
Pourvu que ces images finissent par disparaître.
— Alors ? Comment vont les blessés ? Ils ont reçu les mêmes sorts que moi ?
À l'heure dite, Harry est retourné voir Rogue et, assis avec lui et une tasse de thé devant le feu, il ne tient plus. Il a besoin de savoir.
— Deux des trois semblent souffrir de la même chose. Leur état n'est pas bon, mais pas critique non plus. Je dois rester en contact avec Sainte Mangouste pour que l'on puisse échanger sur nos découvertes.
— Ils ignorent ce qu'est ce sort ?
Le professeur approuve en silence.
Il a fouillé les souvenirs des blessés cet après-midi et y a trouvé le même sort qu'il a vu la fausse Bellatrix utiliser sur Harry, mais celui-ci lui est inconnu, comme il l'est pour toutes les personnes avec qui il en a parlé aujourd'hui.
— J'ai bien peur d'être aussi près de réussir à vous soigner que le ministère de parvenir à expliquer la véritable raison de ses attaques.
— Ils n'ont pas interrogé les mangemorts qu'ils ont arrêté ?
— Bien sûr que si. Des dizaines de fois. Mais il semble qu'ils soient sous l'effet d'un puissant sort de confusion. Aucune de leurs réponses n'a de sens. La plupart de ceux qui ont été attrapés n'étaient même pas connus comme étant au service du Seigneur des Ténèbres.
Presque rien de neuf, en somme. Harry est déçu. Ses blessures ne lui font pas vraiment mal, ou pour être plus exact, disons qu'il est habitué à ressentir de plus fortes douleurs, mais savoir son torse cicatrisé et pouvoir reprendre une vie « normale » lui plairait assez.
Soupirant, il repose sa tasse vide sur la table basse et se lève du canapé.
— S'il n'y a rien de plus, professeur, je vais vous laisser.
— Demandez-lui, Severus. Vite, avant qu'il ne soit parti !
Assis de l'autre côté de la cheminée, le fantôme de Dumbledore s'agite, incitant par de grands gestes Rogue à se lever également. Celui-ci roule des yeux, mais rattrape quand même Harry juste avant qu'il ne pose la main sur la poignée de porte.
— Harry! Il pourrait être intéressant que je revoie l'attaque, la vôtre. Je n'ai pas fait attention aux détails la première fois, à cause de la situation, mais il se pourrait que j'aie raté quelque chose d'important.
C'est faux. Enfin, en partie. Disons qu'il n'a nullement besoin de revoir la scène via les souvenirs d'Harry pour pouvoir l'analyser, celle-ci étant dorénavant inscrite en lui-même. Car, contrairement à ce qu'il vient de dire, il a fait très attention aux détails. Mais il y a une autre chose qu'il aimerait vérifier, et le visage soudain blafard du garçon le renseigne déjà pas mal sur la réponse.
— Je... je ne sais pas si ce serait vraiment utile...
— Je ne suis pas de cet avis.
Son visage à quelques centimètres du sien, et cette flamme dans ses yeux...
Harry détourne le regard, encore. N'osera-t-il vraiment plus jamais le regarder dans les yeux plus de quelques secondes ?
Et d'ailleurs, quelques secondes, n'est-ce pas déjà trop ?
— Je vous ai dit que je ne voulais plus que vous vous insinuiez dans mon esprit.
— En général, je n'ai même pas à le faire.
Harry est mortifié. Qu'est-ce qu'il insinue ? Avec difficulté, il articule :
— Ce n'est pas vrai...
La mine dubitative, Rogue se rapproche et vient se planter devant son élève, mais celui-ci fait soudain mine de s'intéresser à la décoration quasi-inexistante de la pièce.
— Ça alors, s'exclame-t-il pourtant, honnêtement étonné. On dirait le piano de l'autre nuit.
Et, échappant au professeur, il se dirige vers l'instrument miniature posé près de la porte de la chambre.
C'est une réplique exacte du splendide piano à queue noir que Rogue a fait apparaître la nuit où ils ont dansé ensemble devant la grande salle. Relevant le couvercle, Harry pose un doigt sur une touche et confirme ce qu'il soupçonnait : Le piano est fonctionnel et, pour ce qu'il peut en juger, accordé.
— Je ne l'avais jamais vu, vous venez de le faire installer ?
— En effet.
Harry bondit de surprise en découvrant que Rogue, non seulement l'a suivi, mais s'est arrêté juste derrière lui. Pour un peu, il aurait senti son souffle dans sa nuque.
Son souffle sur s...
NE PAS PENSER À ÇA !
— Et, euh, vous jouez souvent ?
— Jamais.
— Ah bon ? Mais...
— Il peut très bien jouer seul.
Et, d'un coup d'œil couplé à un informulé sans baguette, Rogue fait démarrer la musique. La même que celle qui jouait cette fameuse nuit dans le couloir.
— Et maintenant, soupire-t-il, si nous en revenions à...
— Et il ne chante pas ? tente Harry en dernier recours, n'ayant aucune envie de revenir sur la discussion précédente.
— C'est un piano, s'agace Severus. Évidemment qu'il ne chante pas. C'est un objet moldu, vous devriez connaître.
— Mais il chantait l'autre fois ! Enfin, ce n'était pas le même, c'était le banc métamorphosé, mais si vous parvenez à faire chanter un banc, vous devriez y arriver avec un piano...
Abasourdi, Rogue le regarde comme s'il avait devant lui le plus crétin de tous les élèves qu'il ait un jour vu passer dans cette école. Pourquoi, de tous, a-t-il fallu qu'il se rapproche de celui-là ? Et en même temps, il n'est pas non plus trop tard pour abandonner et le foutre dehors avec sa potion de soin et une autre d'endormissement.
— Vous êtes...
Stupide. C'est ce qu'il a envie de répondre. Idiot. Un parfait abruti. Le plus lent des élèves de Gryffondor, alors qu'entre Pettigrew et Londubat, la barre a déjà été placée bien haut.
— ... trop peu observateur pour votre propre bien.
Trop de diplomatie en une seule personne. Trop de diplomatie pour lui-même. Severus sent la nausée lui picorer la gorge, il faut qu'il arrête de se ramollir comme ça. Harry est un crétin et il aurait dû le lui dire.
Au lieu de ça, il se pince l'arête du nez. Ce garçon le fatigue.
— Vous me cachez quelque chose, Harry, et je découvrirai de quoi il s'agit. Alors épargnez-nous du temps à tous les deux et expliquez-vous.
C'est sa dernière tentative pour ce soir, il en a marre.
Les yeux fixés sur les touches noires et blanches, Harry a arrêté de respirer. Rogue va savoir. Même s'il ne le regarde pas dans les yeux, ses pensées sortent de tous les pores de sa peau et l'excellent legilimens qu'est Rogue va savoir... Il va savoir...
Il n'existe rien de plus compliqué que de ne pas penser à une chose à laquelle on ne doit pas penser. Et en cet instant, toutes les pensées du jeune homme sont concentrées sur ce rêve absurde et ridicule qu'il ne parvient pas à se sortir de la tête. Un rêve où il... Ou Rogue... NON ! Il ne doit pas penser. IL NE DOIT PAS Y PENSER. Ne pas penser. Ne pas penser. Ne pas penser à... Fred !
Une illumination. Les yeux d'Harry s'ouvrent plus grands. Par Merlin, ça peut marcher.
Ne pas penser à Fred, il ne doit surtout pas penser à Fred. À ses retrouvailles avec Ron, à ce qu'il lui a dit. Oh non, il ne doit pas y penser, surtout pas maintenant.
— Fred ? Fred Weasley est revenu en fantôme ? Quelle horreur ! Comme si on n'avait pas assez de Peeves pour faire n'importe quoi, s'exclame Rogue en le dévisageant.
Yes ! Harry jubile. Il a réussi à détourner son attention.
Par contre, ses pensées dégoulinent vraiment de partout, il faut qu'il règle ce problème.
Dans son lit, deux heures plus tard, Rogue sourit. Fred Weasley de retour au château. Certes, l'infatigable jumeau risque de ne pas lui faciliter la vie, mais imaginer la tête de Minerva, et mieux encore, celle de Rusard, quand ces deux-là s'en rendront compte, l'amuse beaucoup. Il faut qu'il s'arrange pour être présent quand la nouvelle sera rendue publique.
Il se retourne pour s'installer plus confortablement et, les paupières closes, est déjà en train de se laisser glisser dans le sommeil, quand ses yeux se rouvrent d'un coup.
Leurs bouches liées en un baiser intense...
Le petit... futé. Il est parvenu à détourner son attention avec cet imbécile de Weasley et, du coup, Rogue ne sait toujours pas d'où proviennent ces images perturbantes qu'il a capté plusieurs fois en sa présence. Ses images et ses sensations qui polluent désormais aussi son esprit.
**
Hey les gens !
Puisqu'on en reparle dans ce chapitre, j'ai décidé de vous partager la musique sur laquelle Harry et Severus ont dansé plusieurs fois depuis le début de cette histoire et qui se joue encore dans ce chapitre.
Elle vient d'un artiste que j'ai découvert en septembre de l'année passée, au moment où j'ai perdu ma chienne, quand une partie de mon âme a été réduite en poussière.
Ce n'est pas celle qui me donne le plus de frissons, mais ses paroles et son rythme conviennent pleinement à l'ambiance quand je les imagine danser.
Vous connaissez probablement déjà toustes, je ne pense pas qu'il soit très underground comme chanteur, mais si ce n'est pas le cas, je vous conseille aussi Habibi (qui est son chef d'œuvre, à mon humble avis) et Indigo Night.
Des bisous.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro