chapitre 10
Après la douleur lancinante, Anna ressentit un vide énorme en elle. Comme si toute énergie avait quitté son corps, comme si plus aucune sensation ne pouvait habiter son être. Cette sensation ne dura qu'un court instant, pourtant Anna eut du mal à respirer ensuite. Elle haletait, au fond de la classe de métamorphose, et se rappela ce que la petite voix lui avait murmuré, au fond de son esprit, quelques secondes auparavant : Timothy. Cela ne pouvait pas être une coïncidence, ce nom avait forcément un rapport avec l'aîné des Richards : pourquoi maintenant ? Elle se le demandait bien. La douleur l'avait épuisée, mais elle avait désormais disparue, après cette sensation de vide.
Alors que McGonagall allait annoncer la fin de son long cours sur les métamorphoses élémentaires, quelqu'un débarqua en trombe dans la salle, sans même prendre la peine de frapper. Il était grand, brun, élancé, et au teint légèrement halé ; Anna aurait reconnu Timothy entre mille. La douleur oubliée, Anna se leva d'un bond.
- Tim ?
- Anna ! s'exclama-t-il en croisant son regard.
Il s'approcha d'elle, déboussolé. Puis il chercha le regard de sa professeure pour lui adresser la parole.
- Madame, je peux vous emprunter Anna ? Enfin la faire quitter le cours en avance.
- En quel honneur, Mr Richards ? Vous débarquez sans frapper et vous m'enlevez mon élève ?
- Mme Pomfresh m'envoie. Elle vous expliquera, expliqua-t-il.
McGonagall savait que Mme Pomfresh avait toujours une bonne raison de lui enlever ses élèves ; de plus, il ne restait que cinq minutes à son cours.
- Très bien, admit-elle.
Pendant ce temps, Anna avait commencé à rassembler ses affaires, un peu affolé. Qu'est-ce que Mme Pomfresh lui voulait-elle ? Elle n'était encore jamais allée à l'infirmerie de Poudlard, bien qu'elle sache où elle se situa. Et pourquoi la convoquer maintenant ? Et pas pendant la pause ? Son esprit fonctionnait à toute vitesse, avant qu'une idée lui parvienne.
- Amalia ! s'écria-t-elle en sortant en courant de la salle.
Timothy eut du mal à rattraper la brune qui courait dans les couloirs du château, toute sensation d'épuisement envolée. Elle n'osa même pas demander à Tim ce qui se passait, elle était désormais persuadée qu'il était arrivé quelque chose à sa sœur jumelle. A sa sœur à qui elle n'avait pas pensé de la matinée. A sa sœur qu'elle n'avait pas vu depuis la veille et qui devait être morte d'inquiétude. L'infirmerie n'était plus très loin et Timothy réussissait enfin à la rattraper, à bout de souffle.
- Eh Anna, attends ! réussit-il à dire.
La jeune fille ne prit pas la peine de se retourner pour lui répondre, troquant sa course pour une marche rapide. Elle savait qu'elle était arrivée, en haut de l'escalier. La porte était entrouverte. Elle ralentit son rythme de marche et s'approcha doucement et jeta un coup d'œil à l'intérieur avant de s'engager. Elle eut du mal à se retenir de courir après avoir regardé.
***
Amalia était allongée dans un grand lit blanc. Elle était inconsciente, les paupières closes, les bras croisés sur la poitrine. Elle avait le teint habituellement pâle, mais elle paraissait encore plus blanche que d'habitude. Ses cheveux roux se distinguaient de l'oreiller blanc éclatant où l'on pouvait distinguer de petites gouttes vermeille.
La vue d'Amalia dans cet état affola Anna, qui se rua, le moins bruyamment possible vers elle. Louis était déjà à son chevet, et Timothy l'accompagnait. Tous deux avaient la mine grave ; Anna n'avait pas remarqué cette expression sur le visage de l'aîné, peut-être n'avait-elle pas pris assez le temps de l'observer.
- Que s'est-il passé ? s'enquit-elle de demander, sûrement trop fort pour le calme de l'infirmerie.
- Elle est tombée, répondit rapidement Louis.
- Elle a fait un malaise, on sait pas trop pourquoi, compléta Timothy.
- Elle avait l'air d'avoir mal à la tête... dit Louis en fixant les paupières closes de la rousse.
- Ca fait combien de temps qu'elle est comme... Attends ! Moi aussi j'avais mal à la tête pendant tout le cours de métamorphoses !
Les frères Richards se regardèrent, intrigués.
- Tu avais mal à la tête en même temps ? s'écria Louis, partagé entre la surprise et la curiosité.
Mme Pomfresh entendit leurs paroles et se précipita sur eux.
- En temps normal, je vous aurais dit de parler moins fort ; aujourd'hui vous êtes seuls, vous avez de la chance. Mais comme ça, Miss Potter, vous avez eu mal à la tête en même temps que votre sœur ? Intéressant... Cela pourrait m'aider pour son cas.
- Son cas ? s'exclama Anna. Elle ne va pas se réveiller ?
- Oh si, ne t'en fais pas. Elle se réveillera avant ce soir, ce n'est rien de grave, juste une mauvaise chute. S'il n'y avait pas eu ce caillou... Mais ça se soigne très bien ! La magie fait des miracles, n'est-ce pas ? Ce n'est pas une égratignure comme celle-ci qui m'effraie.
Anna se relâcha puis fixa sa sœur ; même si son étrange pâleur pouvait faire penser à un cadavre, sa poitrine se soulevait à un rythme régulier. Alors qu'elle regardait paisiblement le sommeil de sa jumelle, la brune fut prise d'un nouveau mal de tête, moins aigüe mais très vif. Elle grimaça, attirant l'attention des Richards et de l'infirmière. Soudain, la petite voix se manifesta au fond de son esprit. La voix était encore plus faible, ténue, et chuchotait presque, comme si elle fournissait un effort incroyable pour articuler ses lèvres : je vais me réveiller. Les lèvres d'Amalia avaient bougé quand la voix s'était manifestée.
- Qu'a-t-elle dit ? s'enquit Timothy.
- Je vais me réveiller, répéta Anna, confuse.
- Comment avez-vous entendu ça, Miss Potter ? demanda Mme Pomfresh, en posant sa main sur l'épaule de la jeune fille. Elle a juste remué les lèvres, aucun son n'est sorti.
- Je vous assure que je l'ai enten... Attendez ?! Vous n'avez donc rien entendu ?
- Non, répliquèrent en chœur Louis et Tim.
- Elle m'aurait juste parlé à moi dans ma... tête ? tenta Anna.
Bien que les frères Richards en soient très étonnés, Mme Pomfresh montra de l'intérêt à ce que venait de dire Anna. Elle se frotta le menton pour réfléchir, avant de prendre la parole.
- Eh bien, Miss Potter, ce que vous dites n'est pas bête du tout. Maintenant que vous le dites, je me rappelle avoir étudié un cas similaire à Ste-Mangouste et...
- Vous voulez dire que je suis folle, c'est ça ?
- Non pas du tout ! Ste-Mangouste n'est pas qu'un hôpital pour les fous, vous savez...
Le silence envahit la pièce, grande, vide et blanche. Les yeux de Mme Pomfresh se posèrent sur Anna puis sur Amalia avec un faible sourire. Un sourire résonnant d'espoir. Elle congédia les frères Richards et permit à Anna de rester au chevet de sa sœur jusqu'à son réveil, quitte à rater la journée de cours.
***
Anna ne savait pas quelle heure il était. Mais son ventre commençait à gronder ; cependant, elle n'avait aucune envie de descendre dans la Grande Salle, subir des questionnements et laisser seule Amalia qui pourrait se réveiller d'une minute à l'autre, d'après Mme Pomfresh. Donc la brune chercha un moyen de s'occuper pour oublier sa faim et faire passer le temps. La poitrine d'Amalia se soulevait toujours à un rythme régulier, rien d'anormal. La salle était vide ; Mme Pomfresh était partie et il n'y avait pas d'autres élèves que les deux sœurs Potter. La Serpentard décida alors de se lever de sa chaise pour explorer la vaste pièce lumineuse, dont elle ne connaissait encore rien. Elle sillonnait entre les lits blancs et vides, laissant sa main dans son sillage, qui effleurait chaque armature métallique, chaque recoin de la pièce. Cependant, elle découvrit, à côté d'un lit près de la fenêtre, une marque inhabituelle. Piquée par la curiosité, elle s'avança, en ayant vérifié que personne ne la regardait.
Elle posa sa main sur le mur de pierre où étaient réunies de nombreuses gravures. Non pas des gravures artistiques, mais plutôt des petits mots, des traces de passage. Pour des amis malades, pensa Anna avec un sourire. Les marques étaient nombreuses. Presque trop. Elles occupaient une brique entière, mais se cantonnaient à ce périmètre. La brune se baissa pour se mettre à la hauteur des écritures et être capable de les déchiffrer. La première chose qu'elle vit fut le prénom « Avery » écrit dans un cœur, dessiné maladroitement. C'est mon deuxième prénom, songea-t-elle. Anna Avery Potter. Elle continua de regarder les petites écritures finement gravées dans la pierre dont personne n'avait osé effacer la trace. Juste à côté du cœur, elle lit : « on t'aime Potter ». Ceci lui fit l'effet d'un coup dans la poitrine. Potter ? A ce moment-là, le mal de tête revint, et, par réflexe, elle se retourna vers sa sœur jumelle.
Amalia se levait doucement, en se tenant le crâne. Ses yeux étaient encore ensommeillés mais un grand sourire s'étira sur son visage lorsqu'elle aperçut Anna non loin. La brune dut abandonner sa découverte pour rejoindre sa sœur, sans pour autant chasser cette révélation de son esprit.
***
La blessée reprenait peu à peu ses esprits sous l'œil inquisiteur d'Anna et de Mme Pomfresh, revenue alertée par la brune. Amalia avait tout de même du mal à recoller les morceaux, à comprendre ce qui s'était réellement passé pendant la matinée. La journée était désormais bien avancée et aucune des deux n'était prête à rejoindre les salles de classe. Mme Pomfresh pansa la blessure au front d'Amalia et s'assura qu'elle allait bien avant de la laisser partir dans le château, en compagnie de sa sœur. Bien évidemment, Amalia n'avait rien et était simplement tombée dans les pommes à cause de ce mystérieux mal de crâne.
- Nom d'un hippogriffe ! s'exclama Amalia, une fois sortie de l'infirmerie. C'était quoi ce mal de crâne ? J'avais jamais ressenti ça, t'imagines même pas !
- Figure toi que je peux imaginer, si, répliqua Anna.
- Comment ça ?
- Disons que j'avais aussi mal et...
J'ai aussi failli tomber dans les pommes, pensa Anna, sans vouloir le prononcer à voix haute, pour ne pas alerter Amalia sur la « gravité » de la situation.
- Vraiment ? demanda la Serdaigle.
- Ouais j'avais mal et...
- Non ça j'ai compris ! Mais on aurait pu se retrouver toutes les deux à l'infirmerie endormies ? Dément !
- Mais... Je n'ai rien dit, s'interrogea Anna.
- Bien sûr que si tu l'as dit !
- Je t'assure que je l'ai juste pen... Attends... Tu m'as dit que tu avais entendu que j'ai failli tomber dans les pommes, c'est bien ça ?
- Oui ! assura Amalia.
- Sauf que je l'ai pensé... Ce qui voudrait dire que... tu lis dans mes pensées ?
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