S'il y avait une chose à savoir à propos de Timéo, c'était qu'il détestait son prénom. Il sonnait trop enfantin, trop mignon alors quand il avait six ans, cela allait mais maintenant qu'il en avait seize, c'était limite ridicule. Cette haine contrôlée contre son prénom, il la partageait avec sa petite amie qui se prénommait Félicie. Elle aussi n'appréciait pas vraiment son patronyme malgré sa signification heureuse.

Timéo aimait Félicie pour sa maladresse, après tout, ils étaient littéralement tombés avant d'être amoureux. C'était une après-midi d'hiver où Timéo avait décidé d'aller patiner avec ses amis. Une paire de gants et de patins, un bonnet et un pull puis il était parti sur la glace.

À vouloir faire le malin face à un pari lancé par son meilleur ami, Timéo avait tenté de patiner en arrière. C'était là qu'il avait percuté Félicie qui peinait à tenir debout sur ses lames. Cette chute avait fini en rendez-vous dans un café un peu plus tard. Ils s'étaient revus plusieurs fois autour de chocolats chauds. À l'époque ils étaient en seconde et ils avaient tous les deux finis en S pour cette année. Félicie n'était pas ravie mais essayait de relativiser en imaginant être en cours avec son petit ami. Et puis elle allait reformer le club de théâtre grâce à son professeur de français de seconde, qui était aussi celui des L. À la mi-août, sur les conseils de ce même prof, elle avait contacté Thomas, grand passionné de français et théâtre pour l'avoir avec elle dans ce club qui allait renaître de ses cendres.

Félicie était capable d'être pétillante de joie et de contaminer tout le monde avec sa bonne humeur et le lendemain, elle se refermait un peu sans raison et ne laissait personne lui parler sauf Timéo. Et aujourd'hui était l'un de ces jours sans. Félicie ne parlait pas, ne souriait pas. Timéo restait à ses côtés, sa tête posée sur la sienne reposant sur son épaule. Il se laissait guider par les respirations de sa petite amie pour savoir si elle allait finir par parler.

Elle fermait les yeux, son strabisme léger caché en même temps que ses iris verts. Timéo laissait glisser les siens sur le visage de Félicie en allant de son nez tordu qui lui donnait son charme à cette tâche rubis à la naissance de sa poitrine qu'elle trouvait trop développée mais dont Timéo se fichait. Ses cheveux châtains accrochés dans un chignon mal fait juste pour dégager son cou s'échappaient lentement du chouchou les emprisonnant et venaient tomber sur son épaule dénudée. Timéo savait que ça allait l'agacer alors il les replaça pour éviter qu'elle n'ait à le faire. Félicie esquissa un sourire après le geste de son petit ami. Elle ouvrit les yeux et passa sa main dans les tresses blondes perlées de Timéo.

"Tu veux parler ? demanda-t-il sans la presser.

-Je suis fatiguée de me battre contre mes parents, mes frères et ma sœur. J'arrive pas toujours à faire semblant d'aller bien. Et quand je craque, mon père décrète que j'ai mes règles. Ça n'a aucun rapport du coup je m'énerve d'autant plus. Tu penses que j'ai besoin de voir un psychologue pour parler ?

-Si tu n'en ressens pas le besoin, je ne vois pas pourquoi tu paierais quelqu'un pour t'écouter alors que tu as des amis et moi pour le faire. Tu sais très bien que tu peux tout me dire et que je suis là pour t'écouter.

-Merci d'être là, tu ne peux pas savoir à quel point ça compte pour moi."

Félicie releva la tête et l'embrassa avec sa délicatesse et sa maladresse naturelles.

"Timéo ! cria sa petite sœur depuis le salon. L'écran de la télé il est tout noir !"

Timéo se tourna vers Félicie en soupirant ce qui la fit rire.

"Je reviens, lui assura-t-il. Garde ton sourire."

Le jeune homme trouva sa petite sœur, la télécommande à la main regardant l'écran éteint ou plutôt simplement en veille comme en témoignait la lumière rouge.

"Timéo ! Dépêche-toi, je vais rater la fin de l'épisode des Winx.

-Alice, combien de fois je t'ai dit de ne pas jouer avec la télécommande si tu veux regarder la télé sans risquer de l'éteindre ?

-Beaucoup je crois. Allez remets la télé !

-Comment on dit ?

-S'il te plaît Timéo !"

La fillette aux cheveux blonds s'assit sur le tapis, le nez presque collé à l'écran à tel point que Timéo dû la forcer à reculer. Alice portait sa fameuse robe bleue qu'elle ne quittait presque jamais.

Timéo laissa sa sœur à son épisode et rejoignit Félicie. Elle avait retrouvé son sourire et envoyait un sms.

"À qui écris-tu dans mon dos ? l'interrogea Timéo en riant.

-Thomas. Il voulait quelques informations pour le théâtre.

-Je t'ai dit que je l'avais vu jouer cet été ? se souvint-il soudain en repensant à sa sœur et sa robe bleue.

-Non, je ne crois pas.

-Tu sais, il nous a parlé d'un club de théâtre auquel il a participé tout l'été. En fait, c'était dans le centre de vacances où je suis allé pendant les vacances et où Alice a joué avec d'autres enfants et des ados une version de Peter Pan.

-Pour une coïncidence, c'en est une sacrée. Qui eût cru que ça pourrait être possible ?

-Le monde est petit comme on dit.

-En effet."

Le lendemain, Félicie avait prévu de voir Juliette et Thomas pour parler du club théâtre et avait supplié Timéo de l'accompagner. Heureusement pour elle, la mère de son petit ami ne travaillait pas et il n'avait pas à garder Alice.
Main dans la main, se promenant dans les rues de Strasbourg, Timéo remarqua que Félicie était dans un bon jour. Elle souriait à tout va et sa voix traduisait sa bonne humeur. Timéo la préférait dans cette passe car il n'aimait pas la voir triste et qu'il ne puisse pas faire grand chose pour l'aider si ce n'était patienter. Le soleil caressait ses joues en leur donnant une teinte rouge et elle racontait tout ce qu'elle savait sur le projet du club théâtre, à quel point elle avait hâte de revoir son professeur de français de seconde et de savoir qu'elle serait son emploi du temps. Aujourd'hui Félicie trouvait du plaisir dans les petites choses et cela ravissait Timéo.

Le chapitre du jour est arrivé !

J'espère qu'il vous a plu.

Je suis contente de l'avancée de ce roman. L'écriture du chapitre 11 est en cours.

Pour le numéro 4, je vous réserve un chapitre sans dialogue, une première dans cette saga. Et on retrouvera Noémie. Je n'en dis pas plus.

Je vous souhaite de bonnes vacances