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10 - Chemins parallèles

Lorsque Ren rentra, Léo servait le repas. L'albinos s'assit à table, imité par le brun.

« Alors ?
- Tu connais un certain Ylis ?
- Hm... oui, c'est le meilleur assassin du pays. J'ai déjà eu une mission à faire avec lui, mais c'est lui qui a quasiment tout fait...
- Il a demandé à Sorah de devenir son apprenti.
- Vraiment ? C'est vrai que c'était le dernier à ne pas avoir trouvé, des gamins assez talentueux pour lui, il doit pas en avoir beaucoup.
- Il est prétentieux ?
- Non, il a vraiment du talent. Sorah devait vraiment l'intéresser...
- Et il est gentil ?
- Non mais il est pas méchant non plus. Il est juste pas très sociable, c'est un solitaire. Tant que le boulot est fait, ça lui va. Mais j'espère que Sorah va essayer d'aller du côté relationnel avec lui parce qu'il va parler à un mur. C'est le mec le plus indifférent du royaume !
- Mais quand tu disais qu'il avait du talent, il a quoi comme talent ?
- Il sait tout faire.
- Ça c'est pas possible.
- Je te mets au défi de trouver un truc qu'il sait pas faire alors !
- Hm... d'accord. »

***

Quelques jours plus tard, ils furent convoqués au château. Le roi avait organisé une petite réunion entre les assassins et leurs apprentis. Sorah bondit presque sur Ren mais parla plus calmement qu'à l'habitude, sûrement qu'il ne voulait pas se faire remarqué ici.

« Ça va ?
- Oui et toi ? Je suis content que tu sois à nouveau de bonne humeur !
- Eh eh ! Au faite, t'as remarqué ? »

Ren le regarda intrigué. Le sorcier s'approcha et lui murmura à l'oreille.

« La fée de la dernière fois, elle nous regarde noir depuis le début. »

L'albinos ne regarda même pas pour vérifier, il n'en doutait pas une seule seconde et lança un regard amusé à son compagnon. Sorah pouffa à ses paroles et se tut lorsqu'il sentit une main se poser sur son épaule. Il se tourna vers le nouveau venu.

« Tu m'as surpris... »

Puis, il se tourna vivement vers Ren.

« Voici Ylis ! Et voici Ren ! »

Il désigna l'albinos à l'assassin qui lui servait de professeur. Ce dernier hocha simplement la tête, faisant tomber ses cheveux noirs devant ses yeux. Ren lui répondit de la même manière, alors c'était lui le meilleur assassin ici...

« C'est Léo qui s'occupe de toi ?
- Oui.
- C'est quelqu'un de très gentil, peut-être même un peu trop... »

L'albinos sourit à la remarque du jeune homme, il savait bien.

« Dis Zuri ?
- Oui ?
- Tu crois qu'on pourra s'entrainer ensemble ?
- Pourquoi ne pourrait-on pas ?
- Parce que quelque chose pourrait nous en empêcher.
- Moi, je veux bien, ça t'évitera de t'incruster ! »

L'albinos lança un regard malicieux au sorcier qui lui répondit par une mine amusée.

« Ah ! Et pour Arthur et compagnie, tu fais comment ?
- Je leur ai montré comment on fait de la bonne soupe... mais j'ai peur de retrouver la maison en cendre ce soir !
- Ils devraient y arriver quand même...
- J'espère, sinon ça va être embêtant. Et on a commencé à faire le toit de notre projet !
- Vous avez réussi à poser les bois qu'il restait ?
- Sans problèmes ! Et Gaby s'est fait embauché comme facteur le weekend, pour remplacer ces feignants !
- Il s'en est passé des trucs...
- Ouais en ce moment ça tourne pas mal ! Et tu reviens le deuxième weekend qui arrive c'est ça ?
- C'est ça.
- Essaie de pas croiser de sort errant en attendant !
- Promis ! »

Léo finit par s'approcher, et salua les deux d'un signe de tête. Sorah ne perdit pas une seconde pour relancer le sujet des entrainements groupés, décidé à le faire. C'était le moment, tout le monde était réuni.

« On se disait qu'on ferait bien des entrainements ensemble, vous seriez partant quand et vous ?
- Sorah ?
- Quoi ?
- Calme-toi, tu t'agites beaucoup je trouve...
- Ben faut bien quelqu'un pour animer cette discussion, je te signale que je suis en face d'un mur, d'un peu très bavard et d'un pas beaucoup bavard !
- Je suis en face d'une puce moi.
- Demain ?
- Demain quoi ?
- Vous êtes libres ?
- Normalement oui.
- Nous aussi ? »

Il regarda son professeur avec insistance. Celui-ci hocha la tête silencieusement, n'ayant pas l'air très enthousiasmé. À vrai dire, Léo non plus ne semblait pas plus partant que ça.

« On se retrouve ?
- Comme tu veux.
- Euh... et si on se retrouve devant la cabane ?
- T'as pas plus discret ?
- On se met derrière la haie.
- S'il n'y a que ça pour te faire plaisir.
- Génial ! »

Ren regarda Sorah puis Léo. Pourquoi il avait accepté ? Ça faisait louche de faire ça derrière la haie. Au pire, ils se déplaceraient mais bon. Ça trahissait vraiment le manque d'entrain de Léo, pourtant il n'avait eu l'impression que le brun avait quelque chose contre Ylis lorsqu'ils en avaient parlé.

« À demain alors !
- À demain Sorah ! »

Les deux s'éloignèrent et Ren regarda Léo. Celui-ci était déjà reparti à discuter avec Haley. L'albinos soupira, il lui poserait ses questions après.

Il entendit alors ricaner derrière lui et se retourna. Elvis ! Qu'est-ce qu'il avait celui-là encore ? Il avait deux autres garçons avec lui, une grande perche au cheveux bleus glace et l'autre, pas beaucoup plus petit, avec une tignasse bicolore, rouge avec des mèches violettes. L'albinos lâcha un profond soupir, quelle bande d'imbécile ! Ils s'approchèrent lentement... ils avaient attendu que Sorah s'éloigne remarqua le garou. Les voyants venir avec leurs airs arrogants, il retourna près de Léo.

***

Le lendemain après-midi, les deux duos se retrouvèrent à l'endroit dit. Les quatre autres, curieux, se cachèrent derrière la haie et furent griller immédiatement, cependant, on ne leur dit rien.

Les apprentis et les mentors se placèrent en cercle pour débuter et faire une mise au point.

« On commence par quoi ? s'exclama Sorah.
- Ren ?
- Hm ?
- Est-ce que tu as déjà tué ?
- Il parait que j'ai tué un sorcier, mais je n'en ai aucun souvenir.
- Celui de la dernière mission générale, précisa Léo.
- Dommage que tu ne t'en souviennes pas. Et depuis ?
- Il surveille la rue. C'est moi qui tue.
- Tu ne le laisses pas faire ?
- Pas encore. »

Le brun était clairement sur la défensive. L'albinos n'avait pas trouvé le bon moment pour poser des questions. Il regarda Sorah, qui semblait ennuyé par la discussion. Le jeune sorcier jouait avec un brin d'herbe.

« Et vous avez fait toute la partie combat ?
- En diagonale.
- Hm... j'ai du mal à te suivre. On fait la partie combat au cas les apprentis ratent leur mission, un peu comme une sécurité. Si tu ne l'as pas vu sérieusement, ça veut dire que tu as largement confiance en les talents de tueur de Ren. Pourtant tu ne le laisses pas tuer ?
- C'est comme ça.
- Tu n'as pas changé. Toujours trop protecteur.
- Si tu es pour me donner des leçons de morale, tu peux t'en aller. »

Les deux s'affrontèrent du regard jusqu'à ce que Sorah prenne la parole.

« Vous êtes ennuyants. On peut pas passer aux choses sérieuses ? »

Léo soupira, se leva et regarda Ylis.

« Tu proposes quelque chose ?
- Je propose que pour l'instant, on travaille chacun de notre côté. Mais qu'on inverse.
- Comme tu voudras. »

Le brun vit signe à Sorah de le suivre et les deux s'éloignèrent. Ren regarda Ylis. Ils ne pouvaient donc vraiment pas se supporter au point de faire un entrainement séparé ? L'assassin se leva et invita l'albinos à en faire de même d'un mouvement de main.

« J'imagine que si Léo a sauté la partie combat, il doit t'avoir fait faire plutôt la partie approche en toute discrétion, non ?
- Oui.
- Dans ce cas, tue moi ! Je ne ferais que de me défendre dans un premier temps. »

L'albinos regarda l'autre. Le tuer ? Il tenterait juste de lui mettre un couteau sous la gorge, ça sera suffisant. Le garou prit sa forme féline, et s'approcha en trottinant, légèrement sur la droite du l'autre. D'ailleurs, il ne savait même pas s'il avait affaire à un garou, un fae ou autre. Enfin, peu importe. On lui appris qu'il ne fallait pas éveiller les soupçons de sa cible, alors il fallait paraitre normal. Il était un simple chat qui marchait dans la rue, à la recherche d'une souris à se mettre sur la dent. Un simple matou blanc sans histoire qui voit un passant. Alors comme un bon ami, il vint se frotter à la jambe de celui-ci quémandant des câlins. Le passant le regarde, se penche et là, le démon bondit à la gorge de sa proie.

Ylis l'attrapa par la peau du cou d'un mouvement vif et l'envoya un peu plus loin, sans violence. Le chat retomba sur ses quatre pattes, il y était presque !

« Maintenant, je sais que tu m'en veux et je vais contrattaquer. »

Le chat bondit en avant, si l'autre savait, il n'avait plus aucune chance de le surprendre, il n'avait qu'à être plus rapide. Il feinta une attaque par la droite et finit par bondir à gauche. L'autre l'écarta d'un mouvement de bras et l'envoya valser un peu plus loin. Ren fit une roulade dans le gazon et se remit sur ses pattes.

« Et , j'appelle les renforts et c'est fini pour toi. À moins qu'on n'ait pas vu ton visage et que prenne la fuite. Comme tu es un chat, j'imagine que tu sais marcher sur les toits. »

Ren reprit sa forme intermédiaire et hocha la tête. Il avait souvent essayé de chopper des oiseaux sans réel succès. Ceux-ci s'étaient toujours envolés avant même qu'il puisse sauter.

« On va donc passer à la situation réelle si tu as compris ce que je viens de te dire. »

L'albinos le regarda, voir s'il parlait sérieusement.

« Un problème ? »

Ren secoua la tête et suivit l'assassin dans les rues. Ils n'eurent pas à marcher longtemps pour arriver devant une petite maisonnette.

« Il y a un homme d'une bonne quarantaine d'année dans ce bâtiment. Il est pour toi. Je n'interviens pas. Je t'appelerai uniquement si quelqu'un arrive. »

Un crime comme ça ? En plein jour ? C'était risqué quand même... mais quand il faut y aller, il faut y aller. Le garou prit à nouveau sa forme de chat et se glissa par une fenêtre entrouverte. Il se retrouva dans la cuisine. À patte de velours, il sortit et déboucha dans un couloir silencieux. Il s'arrêta un instant pour écouter les bruits, et entendit un ronflement dans la pièce en face de lui. Il devait faire la sieste... ça lui faciliterait le travail. Il entrouvrit la porte qui grinça, il se figea. L'autre dormait encore profondément. Il s'autorisa à pousser un soupir de soulagement et s'engagea dans la pièce. À chaque pas, son cœur accélérait. Il allait tuer et s'il se faisait chopper, c'était fini. Il lança un regard circulaire à la pièce, de nombreux dessins enfantins y étaient accrochés... c'était sans aucun doute un père de famille. Est-ce qu'il pouvait briser une famille ? Des enfants ? Les renardeaux qui jouaient lui revenait en mémoire. Pouvait-il blesser des êtres si innocents ? Ils n'avaient rien demandé et cet homme... pourquoi devait-il le tuer ? Pour un stupide ordre du roi ? Il n'avait sûrement rien fait. Rien qui méritait la mort. Rien qui méritait la séparation d'une famille en tout cas.

Soudain, il entendit son prénom dans la rue et fit demi-tour sans demander son reste. C'était Léo, il avait reconnu sa voix. Qu'est-ce qu'il faisait ici ? Il ressortit comme il était rentré. Sorah n'était pas là... il était resté là-bas ? Ylis regarda le chat.

« Tu l'as fait ? »

Le chat baissa les yeux et secoua la tête. Il avait failli.

« Pourquoi ?
- Peu importe. On file. »

Ren leva la tête vers Léo, surpris par le ton sec du brun. Il lui en voulait d'avoir échouer ?

Les trois se retrouvèrent à nouveau près de la cabane. Ren s'assit près de Sorah qui tournait en rond tout seul. Le sorcier s'apprêta à prendre la parole mais il fut couper.

« Non mais qu'est-ce qu'il t'a pris !? Si je ne laisse pas faire avec moi, c'est pas pour que tu l'y envoies dès que j'ai le dos tourné !! »

L'albinos comprit, ce n'était pas à lui qu'on en voulait, mais à Ylis. Ce dernier regarda froidement le brun.

« Et qu'est-ce que tu crois gagné en l'éloignant ainsi de la réalité ? Quel intérêt d'enseigner la théorie à un gamin qui ne peut pas la mettre en pratique ?
- Ren peut le faire, mais pas maintenant.
- Pourtant mettre un couteau sous la gorge de quelqu'un ne semble pas lui poser problème. Je pense qu'au contraire, tu devrais l'y habituer dès maintenant. Moins longtemps il appréhendera, mieux ce sera.
- Je suis son tuteur, je décide. Tu feras ce que tu veux avec Sorah mais Ren, c'est mon élève.
- Il ne faudra pas s'étonner si le jour tu le laisseras faire, il se fige devant sa cible, même si celle-ci est son pire ennemi.
- Si c'est le cas, j'attendrais encore. Le talent n'est pas inné chez tout le monde, parfois il faut du temps.
- J'avais oublié que tu avais pris le premier gamin qui t'est tombé sous la patte. Tu n'as pas réfléchir si au final il en était réellement capable. Ça vaudrait peut-être mieux pour son avenir quand même que tu réfléchisses trois fois à la question.
- ...
- Pour le moment, j'ai l'impression que tu tournes en rond avec lui. Tu as trop peur qu'il se braque alors tu repousses la date de sa première victime, je te le répète, tu es trop protecteur. S'il peut le faire maintenant, tu seras fixé.
- Tu ne connais pas Ren, tu n'as pas à juger.
- Plus que tu ne le penses. Je pense qu'il a toutes les qualités pour le faire, mais si les laisses pourrir, ça n'a pas d'intérêt. »

L'albinos serra le poing, il n'appréciait leur dispute à son sujet. Il leur dirait bien d'arrêter mais il n'était en bonne position pour le faire. Sorah lui tapota l'épaule et lui proposa de faire un pierre papier ciseaux pour passer le temps. Le garou accepta l'offre, ça lui évitera de penser aux deux autres. Pourtant, il ne pouvait pas se détacher du désaccord entre les deux assassins. Sorah le regarda et lui sourit.

« Nos professeurs sont deux chemins parallèles. Ils ont le même but, ils vont dans la même direction mais leurs avis ne se croisent jamais. »

Ren le regarda surpris puis finit par sourire.

« Et nous Sorah ? Ils sont comment nos chemins ?
- Notre chemin tu veux dire ? Je crois qu'il va au même endroit qu'eux mais le trajet est très différent. »

Le sorcier tendit une main vers le garou, un grand sourire au visage. Celui-ci la serra, et fit son plus beau sourire à son ami. Puis Sorah se leva.

« Je te propose qu'on aille cueillir quelques orties pour la soupe de ce soir ! Le temps qu'ils terminent le truc, on peut largement y aller !
- Avec plaisir ! »

L'albinos se releva et les deux garçons s'éloignèrent joyeusement, loin des soucis des assassins.

***

Le soir, lorsque Ren rentra de sa fin d'après-midi avec Sorah, Léo était assis, la tête posé sur ses bras croisé, avachi sur la table et se semblait pensif.

L'albinos n'eut pas le temps de lui poser de question, Üko lui avait sauté dessus. Le renardeau avait grandi depuis qu'il l'avait eu. Plusieurs fois, Ren avait pensé le dresser comme un chien, mais c'était un animal sauvage. Il finirait sûrement par retourner dans la nature un jour...

Finalement, le garou finit par obtenir un moment de répit de la part du canidé et regarda Léo.

« À quoi tu penses ? »

Voyant qu'il ne l'écoutait pas, il prit Üko dans ses bras et le posa juste devant le brun. Ce dernier réagit presque immédiatement.

« Pas sur la... »

Il n'eût pas le temps de terminer, la bête rousse lui avait sauté dessus et lui léchait affectueusement le visage. Ren sourit devant la scène qui ne dura que quelques secondes, le temps que Léo attrape l'animal et le pose au sol. Celui-ci couina, déçu et alla se réfugier entre les jambes du garou blanc.

« Tu pensais à quoi ?
- Rien.
- Tu penses que Ylis à raison ?
- Non.
- Tu lui en veux ?
- Oui. »

La queue du garou s'agita, il avait compris qu'il n'obtiendrait rien ce soir.

« Désolé, je suis énervé.
- Je vois. »

Ren prit Üko à bras et se dirigea vers sa chambre en chantonnant un petit air joyeux. Sorah l'avait chantonner pendant leur cueillette et il l'avait dans la tête.

Il s'assit sur son lit et posa le renard. Celui-ci s'assit en face de lui, le fixant avec des grands yeux. Ren le regarda.

« Couché ! »

Le renard couina mais ne se coucha pas.

« Qu'est-ce que tu veux ? »

Le renard s'agita et gratta à la porte. Ren lui ouvrit, et la bête fila. Peut-être qu'elle ne voulait pas de compagnie ? Il referma la porte et se tourna vers la pièce. Soudain, une main se posa sur sa bouche. Surpris, il se débattit mais une autre main le tenait fermement.

« Surprise... »

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