Chapitre 6 - Ce fut un plaisir
Il est 17h13. Colin avait dit 17 heures. À force de jeter des coups d'œil à l'horloge de la grande salle, je commence à regretter de ne pas avoir poursuivi mon histoire hier. Puis je ravale cette pensée aussi vite qu'elle est arrivée. Je ne veux pas me prendre à son jeu.
Mes yeux parcourent la salle. Quelques élèves gribouillent sur des parchemins ou jouent aux cartes. Des serpentards se toisent avec méchanceté et des premières année enroulent un pauvre chat dans une écharpe jaune et noire.
La porte claque. Violemment. Colin entre en courant. Il tient sa robe d'une main et de l'autre, la Plume à Papote qui semble se débattre.
Il fouille la salle du regard avant de me repérer et de venir s'asseoir lourdement sur le banc en face de moi.
— Encore désolé, Sir ! La Plume à Papote refusait de coopérer, dit-il en maintenant sa Plume sur la table.
Il semble appuyer de toute sa force sur le pauvre objet qui se tortille sous sa palme. Un regard navré m'est jeté, puis sa joue s'aplatit sur le bois et je l'entends vaguement chuchoter :
— Bon Pluplu, t'as du boulot maintenant alors arrête un peu de gigoter et soit professionnelle. T'es insortable, c'est pas vrai !
Il se relève, le visage légèrement marqué par les planches et m'adresse un sourire entendu.
— C'est bon ! Au travail.
Sous ses doigts, la Plume se calme.
— Vous pouvez recommencer depuis la fin des cours ?
Je hoche la tête sans enthousiasme.
— Nous quittâmes définitivement Poudlard un samedi. Le soir même, nous utilisâmes un Portoloin. C'était une vieille roue de charrette, me souvené-je en souriant.
« Nous arrivâmes à quelques pas du château qu'habitait le marquis de Dorset. C'était un château moderne. Il avait beaucoup de fenêtres et des tourelles. Un véritable chef-d'œuvre.
Colin hoche la tête, affichant un air faussement impressionné.
— Et je suppose qu'il avait des portes et l'eau courante.
C'est ça, moque-toi Colin.
— Il avait même une très belle et grande porte en bois sculpté. L'eau courante n'existait pas en revanche. On allait aux toilettes dans des latrines assez grandes pour que tu tombes dedans.
Il hausse les épaules et me regarde à travers ses cils. La patience n'est vraiment pas son fort.
— Nous logeâmes dans l'aile Est du château. Elle était ravissante. C'est ainsi que le dimanche soir, Edward me rendit visite dans la chambre que ses parents m'avaient gracieusement. Je me souviens parfaitement des détails : j'étais à la fenêtre, j'observais le jardin. Il toqua doucement à la porte puis entra sans attendre ma réponse. Il me regarda d'un air grave et alla s'asseoir sur mon lit. Je le regardai faire sans parler. "Je venais m'assurer que tu n'as pas changé d'avis" me dit-il. Je secouai la tête, et allai m'asseoir à sa gauche. "Pour être tout à fait honnête avec toi, cette journée ici n'a fait que renforcer ma volonté" lui dis-je. Il hocha la tête, déglutit et dit "bien".
« Je me souviens l'avoir détaillé. Il portait des bas blancs et une tunique rouge. Ses cheveux étaient légèrement ébouriffés. Il essaya de sourire. "Ce que nous nous apprêtons à faire est dangereux. Nous pourrions nous retrouver condamnés à la pendaison ou la décapitation. Je ne change pas d'avis. Je t'ai donné ma parole il y a de cela trois ans, et je compte la tenir. Je t'aiderai à devenir noble. Et que ma vie soit en danger n'y changera rien." Il posa sa main sur la mienne à la fin de sa tirade. Je ne dis rien. Je n'y parvins pas. J'essayai de lui sourire. Il finit par quitter la chambre sans que l'un de nous n'ait prononcé un mot de plus.
« Le lendemain, je préparai à nouveau mes affaires. Edward me donna quelques-uns de ses vêtements de noble, afin que je me fonde dans le décor de la cour. Nous mangeâmes au château en quelques minutes, puis nous décidèrent de transplaner. C'était la solution la moins dangereuse, si quelqu'un nous voyait arriver avec des créatures magiques ou même un Portoloin, c'en était fini. Nous arrivâmes sous un vieux pont qui menaçait de s'écrouler. Personne ne nous vit. Nous sortîmes dans la rue, prêts à voir la garde royale venir nous arrêter pour sorcellerie, mais personne ne vint. À chaque pas, chaque changement de direction, chaque noble croisé, je retenais mon souffle. Nous avions rendez-vous à Hampton Court, où le Roi avait ses appartements. Je ne te cache pas que mon souffle fut coupé quand je l'aperçus pour la première fois. C'était un somptueux bâtiment de briques, entouré de jardins où de nombreux nobles se promenaient. Bien entendu, ce n'était rien de comparable avec Poudlard ou Beaubâtons, mais c'était tout de même majestueux, surtout pour un bâtiment moldu.
« Nous fûmes accueillis par le Roi sur-le-champ quand nous nous présentèrent. Il faut dire que le père d'Edward, marquis de Dorset fréquentait régulièrement la cour. Aucun garde ne nous suivit dans son bureau. Je n'eus pas vraiment le temps de réagir, que déjà, Edward avait pointé sa baguette sur le Roi et récité l'incantation.
« Imperium ! chuchoté-je à l'oreille de Colin.
Le garçon sursaute et vérifie autour de lui que personne ne m'a entendu. Mes yeux roulent vers le ciel et je grommelle :
— Oh, c'est bon ! C'était pas encore impardonnable, je te dis.
Je secoue la tête, m'efforçant d'ignorer le regard apeuré du gamin.
— Ce fut Edward qui fit tout. Lui qui ordonna au Roi de me faire noble, de me donner le petit bout de Terre que j'avais choisi pour y construire ma maison, de répandre la nouvelle de mon adoubement à la cour. Il lui dit de bien insister sur le fait que j'avais sauvé le futur marquis de Dorset de la noyade – ce qui, bien entendu, était entièrement faux. Enfin, il déclara que le Roi lui-même aurait pleinement confiance en ces informations pour le restant de sa vie.
« Puis, il se vint se placer à ma droite, prit une inspiration, et défit le sort. J'arrêtai de respirer pendant un instant, priant le Ciel pour que le sort ait fonctionné. Je recommençai à respirer quand le Roi s'approcha de moi, le sourire aux lèvres. Il posa l'une de ses mains sur mon épaule, et de l'autre, serra la mienne. Il se recula, alla ouvrir la lourde porte, et, alors que nous passions devant lui, déclara "Sir Beaufort, Sir de Mimsy-Porpington, ce fut un plaisir."
« Nous ne fêtâmes pas notre victoire immédiatement. Nous nous contentâmes seulement de marcher côte à côte alors que nous sortions de Hampton Court.
Les yeux de Colin brillent quand il relève la tête.
— Sir, c'est sûrement déplacé, mais je suis fier de vous ! déclare-t-il en enroulant son parchemin.
En quelques secondes, il a sautillé gaiement vers la grande porte et y a disparu.
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