XV - La faim
Nous nous regardâmes durant de longues secondes. Un mouvement de colère s'empara de moi et je me dirigeai vers elle pour la ramener dans mon bureau en claquant la porte derrière moi. Elle continuait de me fixer de son regard innocent.
- Pourquoi vous avez fait ça ?!
- Arrêtes !!! Ordonnai-je, arrêtes ça !
- Quoi ?
- Ça ! Ça là !!! Cesses de vouloir me faire culpabiliser !
- Je ne veux pas vous faire culp ...
- Si tu essayes ! Je le vois ! Je ... C'est normal pour moi d'accord ?! Je suis un Vampire ! Un V-A-M-P-I-R-E, je me nourris de sang ! C'est normal !
- ... Vous ne le vouliez pas ... vous ne vouliez pas vous nourrir n'est-ce pas ?
- Qu'est-ce qu'elle me raconte ?! M'écriai-je, Lélé arrêtes je te dis ! Tu réfléchis beaucoup trop ! Tu n'es pas là pour me conseiller quoi que ce soit ! Si je me suis nourris c'est que je le voulais ! Voilà tout !
- Mais ...
- Arrêtes !!! Hurlai-je en frappant contre le mur, arrêtes.
Je plongeai mon visage entre mes mains et tentai de me calmer. Ce qui m'énervait ... n'était pas vraiment Éléanore, bien qu'elle y contribuait, mais elle n'en n'était pas la raison principale. Non, ce qui m'énervait le plus, c'était cette sensation que j'avais ressentis face au résistant. Je le sentais. Si Erevan n'avait pas été derrière moi ... j'aurais ... j'aurais eu de la clémence. Et sur le moment, ça me mettait hors de moi. Je n'avais encore jamais ressentis une seule once de culpabilité ou de regrets après avoir tué quelqu'un. Ça n'était même pas parce qu'il était de la communauté non, je n'avais eu aucun regret pour le Wendigo. Je commençais à penser que ceci ... ce ... semblant de culpabilité ... ou peut importe ce que c'était ... était dû à Erevan. Son obsession pour ses âmes et ses ordres où ils m'obligeait à tuer ... ça faisait naître en moi une sorte de lassitude. Ne tuer que par ordre et non par plaisir ... ça ne m'étais plus aussi jouissif qu'avant.
- Edward ? S'inquiéta-t-elle, vous allez bien ?
- ...
- Edward ?
- Je n'aime plus ma situation, répondis-je, je suis ... coincé. Je suis coincé et ça m'énerve !!! Criai-je en frappant le mur.
Je restais appuyé contre ce dernier, gardant difficilement ma rage. Elle vint vers moi et posa ses mains sur une de mes épaules.
- Parlez-moi Edward, ça peut vous aider, confia-t-elle.
- Je n'ai pas besoin qu'on m'aide ! Grognai-je en la repoussant.
Choquée, elle resta tout de même devant moi et me tendit son avant-bras. Sans réfléchir et pour penser à autre chose, je fonçai sur cet avant bras et plantai mes crocs. Elle sursauta à mon assaut, mais elle résista pendant une longue minute. Il me fallait boire, il me fallait me nourrir. Je devais expulser cette rage en moi, cette colère, cette incompréhension et toutes ces autres émotions qui me mettaient hors de moi. Tant que je ne m'étais pas calmé, il me fallait du sang, beaucoup de sang. Je sentis à un moment qu'elle voulait retirer son bras, mais il ne fallait pas. Pas encore, je devais encore me nourrir. Je n'entendais plus, je ne voyais plus ... je ne pouvais que sentir ce sang, ce goût, cette texture et cette odeur ... j'en réclamais encore et encore. Mes canines s'enfonçaient petit à petit dans cette chair si exquise, si vivante. Elle s'agitait, mais je la maintenais. Je me penchais de plus en plus, appréciant encore et encore cette offrande humaine. De manière très indistincte, j'entendais sa voix, me suppliant quelque chose, mais je m'en foutais. Mon plaisir était ma priorité. Puis j'entendis une autre voix lointaine, une voix un peu trop familière.
- Tues-là, donnes moi son âme.
Je relâchais directement son avant bras, retirant brutalement mes crocs, laissant ainsi du sang couler sur son poignet. Je revins à la réalité. J'ouvris les yeux et vis Éléanore gémissant de douleur, toute pâle, se tenant fermement l'avant bras et reculant, s'éloignant de moi les yeux horrifiés. Nous nous regardâmes ainsi, muets. Je sentais encore sur mes lèvres, l'odeur et le goût de son sang. Il m'appelait, me réclamait. Sauf que j'avais assez bu pour me contrôler un minimum.
- Ed ...
Juste devant moi, Lélé tomba inconsciente au sol l'avant-bras en sang.
- Lélé ? Dis-je.
J'attendais, pensant qu'elle allait se relever. Puis je compris.
- Oh et merde !
Une demi-heure plus tard, nous étions dans l'un des deux hôpitaux de Baycoton, le plus petit. Je l'y avais emmené le plus rapidement possible, après avoir remarqué que j'avais peut-être été un peu abusif. Après l'avoir confié à des médecins auxquels j'avais fait boire mon sang, elle était finalement en sécurité et avait reprit de ses couleurs. Je restai à côté d'elle le temps de quelques minutes, après que son état se soit stabilisé. Pensif et muet, je n'étais plus très sûr de ce que je voulais. J'avais presque faillit la tuer et pour la première fois ... ça m'importait. Je changeais, je le sentais, je le savais, et je devais y faire quelque chose.
Je laissai alors Léanore seule sur le lit d'hôpital, faible et décidai de me rendre au repaire. Rien n'avait été rangé, des tables et des chaises étaient toujours au sol, de même pour quelques tas de cendres encore chaudes. Je vis un groupe de trois individus discuter dans leurs coin, zyeutant discrètement le bordel ainsi que ma personne. Il ne me suffit que de voir un seul d'entre eux sortir rapidement sa langue de vipère pour comprendre que je venais de trouver ceux que je cherchais. Je me marchai dans leur direction, le regard déterminé. Il me remarquèrent et sur le coup, prirent peur et reculèrent instinctivement.
- Lequel d'entre vous est résistant ? Grognai-je.
Il hésitèrent à me répondre, puis un de désista.
- Tu es Edward Owens ?
- Tu as besoin de ma carte de visite pour en être sûr ? Dis-je en montrant mes canines.
Leurs regards se portaient surtout sur mes lèvres où quelques minimes tâches de sangs résidaient encore.
- Alors ?! Insistai-je.
- Nous ... nous sommes tous les trois résistants, confia-t-il.
- Qui est votre leader ?
Il se lancèrent des regards, paniqués.
- Alors ?!!
- On veut bien te montrer le QG ...
- Vous n'avez pas de chef c'est ça ?
- Il vaut mieux te montrer le QG d'abord, réitéra le Reptile.
- Alors montrez-le moi en vitesse.
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