VI - Une nuit de folie
[Musique à n'activer (au choix) qu'arriver au moment où il y a marqué " (**) "]
J'entrai dans la pièce à la faible luminosité, dont le seul éclairage était une lampe LED rose bonbon au plafond , créant ainsi une ambiance plutôt coquine. Une musique de fond provenant de là où nous venions parvient jusqu'à nous, ainsi que des bruits de foules. L'homme à mes côtés, petit et gras, entra à son tour et marcha jusqu'à son bureau, m'invitant ensuite à prendre place en face de lui sur une chaise.
- Votre nom ?
Il prit un stylo, une feuille blanche, et se pencha sur son bureau pour commencer à écrire.
- Éléanore Dubois, répondis-je.
Il leva calmement la tête et me regarda les yeux plissés.
- Pas du coin hein ?
- Non en effet.
- Europe ?
- J'y suis originaire.
- D'accord. Âge ?
- Vingt-deux ans.
- Célibataire ?
- Oui.
- Vierge ?
Je me demandai pourquoi ce pervers avait besoin de ce genre d'informations. Au lieu de répondre, je le fixai droit dans les yeux, sans un mot. Au bout de quelques secondes il comprit et grommela quelque chose d'inaudible tout en gribouillant deux trois mots sur sa feuille à l'aide de ses doigts boudinés.
- Pourquoi vous voulez être ici ?
- J'ai besoin de boulot pour continuer à vivre un minimum, je n'ai pas d'aides et mes fins de mois sont compliquées.
- De la famille ?
- Pas ici.
- En ville ?
- Ils sont restés en Europe.
Il gribouilla à nouveau sa feuille.
- Un passé dans le domaine ? Vous déjà fait de la danse auparavant ?
- Pas en école, mais j'ai déjà dansée oui.
Distraite par le tableau coquin accroché juste derrière mon interlocuteur, je pu tout de même voir ses yeux qui, à quelques moments, se braquaient sur ma poitrine. Aucun doute, il ne devait pas être si fidèle que ça. La bague de fiançailles qu'il portait à son majeur me fit penser qu'une autre femme dans ce bas monde était trompée. À quoi fallait-t-il s'attendre avec un cinquantenaire propriétaire d'un bar de strip-tease ?
- Vous pouvez commencer quand ?
- Je suis prise ?!
- On manque de personnel ici alors je prend ce qui passe sous la main. Me répondit-il en posant son stylo.
- Euh ... et bien tout de suite. Tout de suite je suis disponible !
Il se lève. J'entendais toujours le bruit ambiant extérieur à la pièce.
- Bien, je vais vous guider aux vestiaires, et vous y enfilerez votre ... costume.
Je me levai et commençai à le suivre. Il se retourna et pointa son doigt sur sa poitrine, droit sur un petit badge où était inscrit son nom.
- Je m'appelle Sébastien.
Il se rapprocha légèrement.
- Mais toi tu peux m'appeler Seb, me chuchota-t-il.
Je ne répondis pas. Nous sortîmes du bureau, partîmes à gauche de l'étroit couloir éclairé à l'ultraviolet et nous nous arrêtâmes à la toute dernière porte au fond, sur le côté droit. Un simple cœur rose était dessiné dessus.
- Je te laisse là, reviens me voir quand tu as terminé, me sourit-il.
J'ouvris la porte tout en imaginant très bien ce gros pervers me caresser du regard de haut en bas, et fermai aussitôt celle-ci derrière moi, dégoûtée face à mon imagination. La pièce n'était pas éclairée, je me retrouvai dans le noir comme une idiote. Au hasard, je tâtai le mur à ma droite et fini par trouver un interrupteur dont la forme me paraît étranger au toucher. J'appuyai. La lumière vint à moi, toujours d'une luminosité rose coquine dégueulasse et je tournai la tête pour observer l'interrupteur dont la forme rappelait celle d'une verge. Charmant. Je vis en face de moi un grand placard de couleur noir, ainsi qu'une toute petite fenêtre où passaient les rayons de la lune.
Je m'approchai du placard et l'ouvris. Je découvris quatre tenues de danse de couleur rose qui étaient, à première vue, plutôt provocantes.
- Allez ... c'est juste temporaire ... soupirai-je.
Je me déshabillai pour ne pas manquer de temps. Le bruit de foule continuait de parvenir jusqu'à moi, à croire que les murs n'étaient pas du tout insonorisés. Ils devaient certainement tous s'amuser. J'allais devoir danser sensuellement avec une barre de pole dance tout le reste de la soirée, quoi de plus démotivant.
À présent en sous-vêtements, j'empruntai un des quatre costumes disponibles et l'enfilai. Quelques minutes plus tard, l'habit sur moi, je me dirigeai vers le seul miroir peu propre de la salle, accroché à un des quatre murs de la pièce, et me choquai moi même à la vue de mon accoutrement.
- Putain de merde ... chuchotai-je.
Avais-je été embauchée pour être danseuse ou prostituée ? Ma poitrine était dévoilée grâce à un superbe décolleté avec lequel, malgré ma grande taille, même un nain aurait pu se nettoyer les yeux !!! En ce qui concerne les formes, j'avais beau être plutôt correcte de ce côté-ci, là elles étaient un peu exagérées. Je me tournai à moitié, et à ma grande surprise j'observai mon fessier presque à nu.
- C'est ... pour le travail ... soupirai-je.
Dans ma grande auto-critique, je remarquai subitement l'absence totale de bruit ambiant à l'extérieur du vestiaire. Non pas que ça me dérangeai, mais ça m'intriguai car je m'étais depuis une trentaine de minutes habituée à tout ce bordel ambiant. Je me dirigeai vers la porte et l'ouvris calmement, entrant ainsi dans l'étroit couloir et sa fidèle lumière sensuelle. Au fond du couloir, je pu voir des lumières de la grande salle qui éclairaient de mille feux, mais aucun bruit n'en émanait. Étrange étant donné que trente minutes auparavant, c'était pratiquement la fête avec des bruits de sifflements masculins, des claquements de fesses et des rires aux éclats.
Toujours munie de mon costume provocant, je me dirigeai presque sur la pointe des pieds le long du couloir jusqu'au bureau de Sébastien. Jetant un œil au fond du couloir, là où les lumières scintillent toujours et où le bruit manquait encore, je posai ma main sur la poignée de la porte et l'ouvris, entrai en regardant par terre et la première chose que je vis était une large traînée de sang qui menait jusqu'au bureau. À cet instant là, mon sang se glaça, un électrique frisson fit vibrer mes bras et mes mains ; ma bouche, par panique, s'ouvrit rapidement pour laisser s'échapper un cris bien aigu qui ne fut pas loin d'exploser mes cordes vocales.
Je levai instinctivement la tête, et la vision qui s'offrit devant moi me tua intérieurement. À la première seconde, je n'étais pas sûr de ce que je voyais, la seconde qui suivait fut comme un poing de métal qui m'arriva en pleine figure. J'étais tétanisée. En face de moi, derrière le bureau, Sébastien, les yeux fermés, dans les bras d'un homme habillé tout en noir ; une veste en cuir certainement très coûteuse, des cheveux sombres décoiffés, les yeux clairs, mais la couleur était difficile à distinguée avec la luminosité ; les joues creuses et une barbe de trois jours occupait son visage. Mais ce qui m'horrifiais était le cou de Sébastien. Tâché de sang. Sang qui coulait tout le long de son costume jusqu'à couler sur le sol. Ensuite, le visage de l'homme en noir, sévère, sa bouche était collée au cou de Seb, qui paraissait clairement mort à cet instant.
Sûrement l'homme avait-il dû remarquer ma présence car il détacha son visage de mon ancien patron, et je pu voir une bouche maculée de sang, un large sourire presque démoniaque siégeait sur ses lèvres et ses yeux semblaient hurler de bonheur. Mais le détail qui me frappa fut la présence de dents extrêmement longues, surtout les quatre canines devant, beaucoup plus grandes que la moyenne. Je regardai le corps de Sébastien et pouvais de là où j'étais, apercevoir quatre énormes trous dans la nuque et dans le cou de ce dernier, où le sang coulait encore à flot. La lumière rose projetée par la LED au plafond rendait l'individu complètement malsain de là où je me tenais. Son sourire, ses yeux, sa bouche, ses dents, la position dans laquelle il tenait le corps et la façon dont il me regarda juste après me terrifia.
- Oups. Je crois que j'ai fais mal au gros Seb, lâcha-t-il sarcastiquement d'une voix moqueuse.
Il jeta sans attendre le cadavre au sol comme un déchet et essuya sa bouche d'un revers de la manche avant de me regarder pleinement dans les yeux de son regard ténébreux.
- Vu ta tenue, je serais bien tenté de profiter de tes services mais je pense que la façon dont je pourrais abuser de toi ne te conviendrais pas.
Je ne répondis pas, muette. Il enjamba le corps et s'arrêta.
- Ou alors c'est ce que tu cherches ? Hein ? Tu cherches à me nourrir ?
J'étais face à un fou.
- C'est gentil, gros Seb ne m'a pas suffit.
Il sorti soudainement ses grandes canines et tenta de se jeter sur moi mais je le repoussai de justesse. Je pris immédiatement la fuite, sortis du bureau et courrai dans le couloir en direction des lumières de la grande salle.
- Cours forest ! Cria-t-il toujours dans le bureau.
J'arrivai dans la fameuse pièce où le bruit avait cessé. Mais mon cœur cessa lui aussi de battre une seconde durant. Devant moi, un véritable carnage, une boucherie. Un massacre. Des dizaines de gens assis à des tables, morts, décapités, leurs têtes paraissaient regroupées soigneusement au milieu des tables imbibées de sang. Sur les scènes réservées aux strip-teaseuses, des cadavres de ceux qui devaient devenir mes collègues de travail, tuées, couchées à même le sol. Au bar, le barman, lui aussi décapité et couché sur le comptoir, avait cinq ou six bouteilles plantées dans sa poitrine. La musique avait cessé d'être, le silence régnait, mais les projecteurs eux, continuaient de faire valser les lumières bleues, roses, rouges et violettes dans tous les sens.
Me souvenant de ce qui me poussait à m'enfuir, je pressai le pas, me dirigeai vers les tables sanglantes et regardai la porte de sortie qui à ma grande déception, était barricadée à l'aide d'une vingtaine de cadavres empilés les uns sur les autres. Soudainement (**), une musique retentit dans les enceintes du club, une musique à l'allure de rock, très peu rassurante.
- Voilà qui est beaucoup mieux ! S'exclama une voix masculine dans l'étroit couloir derrière moi.
La peur s'empara à nouveau de moi. Prise de panique, je me cachai sans réfléchir sous une des tables noyées par le sang. Je me retrouvai sous l'une d'elle, entourée de cadavres assis proprement sur leurs chaises, les pieds dans une mare de sang, mon costume léger à présent tâché à cause de la nappe de la table. J'entendis quelques secondes plus tard, toujours avec la musique malsaine en fond, des bruits de pas.
- Eh beh !!! N'entends-tu pas ça ? Ne sens-tu pas cette musique te rentrer dans les veines ? Prendre le contrôle de tes mouvements ?
Je l'entendis s'arrêter.
- Ah bah non. C'est la peur qui doit sûrement te contrôler actuellement. Ah ! Si tu était moins phobique du sang, tu pourrais venir t'amuser avec moi ! Je t'assure que de là où je suis, c'est l'éclate totale ! Lança l'individu à haute voix.
Il recommença à marcher lentement.
- Tu veux savoir pourquoi je suis de si bonne humeur ?
Je faillis sangloter.
- Parce que j'ai compté ! Et je suis largement. LARGEMENT, au dessus du quota demandé. Il m'aura fallu ouvrir et fermer ma petite bouche un bon nombre de fois, mais j'ai mon quota ! Ria-t-il.
Je l'entendis s'approcher de ma table. Il s'arrêta devant elle et sembla se pencher pour prendre une des têtes.
- Non ! Non ! Par pitié ! Ne me faites pas de mal ! S'exclama-t-il d'une voix aigu et blasée, celui-là avait la phrase la moins originale du monde ! Il devait mourir. Je ne peux pas laisser passer aussi peu d'originalité tu comprends ? Demanda-t-il à vive voix.
Mon pied glissa de quelques centimètres à cause du sang. Mes cuisses commençaient à me faire mal, ma position était loin d'être confortable.
- En plus il a la tête de l'intello de la classe, continua-t-il.
Il laissa tomber la tête au sol, et cette dernière tomba de sorte à ce que le visage soit face à moi, les paupières ouvertes, tout comme la bouche. Face à cette vision, je ne pu m'empêcher de crier comme jamais.
- J'ai trouvé la vilaine prostitué ! Rigola-t-il.
Je vis la table s'envoler au dessus de moi, ainsi apparu l'individu devant moi, les yeux toujours aussi euphoriques et la bouche en sang, les canines trop grandes dépassants des lèvres.
- Et si j'ai bien compté, tu es ma trois cent deuxième, déclara-t-il d'un sourire narquois qui me glaça le sang.
Je me levai sans attendre, courrai vers la porte de sortie, mais j'avais oublié à cause de la panique la barricade peu commune. J'entendis derrière moi un rire qui n'eut d'autre effet que de me clouer sur place.
- Peut-être que tu ne cherches pas à me nourrir en fin de compte. Mais moi ma belle, j'ai envie, de me nourrir.
Qu'avais-je en face de moi ? J'étais face à un véritable psychopathe. Comment avait-il fait tout ça ? Qu'avait-il fait ? Pourquoi ? Pourquoi ici ? Pourquoi eux ? Pourquoi ce club ? Pourquoi aujourd'hui ? Pourquoi moi ? Pourquoi buvait-il le sang de ces gens ? Qu'allait-il faire ensuite ? Mon cerveau explosa, écrasé sous les milliers de questions qui fusèrent dans ma tête.
Il s'approcha de moi d'une démarche tranquille et posa sa main sur mon épaule tremblante. Il me regarda droit dans les yeux.
- Ce fut un plaisir, sourit-il.
Il planta ses énormes canines dans mon cou, me provocant une douleur atroce. Je criai, j'hurlai, je me débâtai le plus possible, mais il me tenait fermement de ses deux mains. Des bruits de succions se firent entendre et peu à peu, ma vision devint trouble, un voile noir m'aveugla et quand je m'écroulai au sol, j'entendis un à nouveau un rire de satisfaction.
- J'adore cette musique bordel, marmonna-t-il.
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