6.2
Toivoiose n'avait pas encore ses nouveaux salariés, mais, au moins, toutes les communications étaient prêtes. Miranda avait travaillé sur l'annonce de recrutement et sur la fiche de poste en sollicitant l'avis de Léna, qui avait proposé quelques ajustements à la marge. Miranda l'avait aussi sollicitée pour décider des valeurs du cabinet, qui devaient pouvoir être intégrée à cette annonce et évoquées lors des entretiens de recrutement. Il y avait eu un atelier, auquel Noah avait lui aussi participé. Léna trouvait ça plutôt sympa, même si elle avait le sentiment qu'il y avait une forme d'arnaque dans le procédé des valeurs. Est-ce que, sur le papier au moins, tous les cabinets n'avaient pas un peu les mêmes ? Puis, même si ce n'était pas le cas, est ce que cette liste de valeur permettait vraiment de savoir avec quelle organisation on serait le plus aligné ? Quelques soient les listes de valeurs que Léna pouvait lire sur les sites d'entreprises, qu'elles qu'elles soient, elle avait le sentiment d'être en accord avec toutes. Après, il y avait bien sûr des histoires de hiérarchies mais, ça, ce n'était jamais vraiment abordé ; et probablement rarement un vrai critère de choix d'entreprise.
En tout cas, le plus important, pour Léna, c'était vraiment d'être considéré comme une véritable contributrice de la construction du cabinet, et non pas comme un simple exécutant. C'était ce que différenciait Miranda d'une patronne telle que celle de Lucien, et c'était ce que Léna avait voulu mettre en avant lors de l'atelier. C'était ce qu'elle avait dit en premier, et elle était heureuse et fière que Miranda ait retenu son idée. Ils avaient choisi d'appeler ça "Construire ensemble", et il y avait un sous-titre qui expliquait ce que ça voulait dire : être plus qu'un simple salarié, plus qu'un exécutant, mais un véritable acteur et un créateur du développement de Toivoiose. Pour Léna, c'était le plus important. C'était valorisant, responsabilisant, et ça intégrait aussi, à son sens, des idées de démocratie, de créativité et de valorisation des individualités.
Ensuite, il y avait la valeur "Se réinventer pour s'adapter aux besoins", avec une petite phrase qui expliquait la vérité continue de cette affirmation, dans un monde où le changement serait toujours présent et où les enjeux et réalités des personnes accompagnées ne pourraient que changer. Ça, c'était Miranda qui l'avait proposé elle-même, et Léna était peut-être un peu moins fan. Déjà, il y avait la formulation qui était un peu longuette mais, bon, ils n'avaient pas trouvé mieux. Ensuite, même si Léna était d'accord avec l'idée, elle était fatiguée d'avance en l'entendant énoncée. Au fond d'elle-même, elle espérait qu'à un moment donnée les choses soient stabilisées, et que le cabinet ne doive pas se réinventer dès qu'il arriverait à un point d'équilibre.
Certes, les métiers et les réalités des besoins des personnes accompagnées allaient en permanence évoluer, ce qui impliquerait de devoir adapter la prestation et continuer à apprendre. Mais bon, ce n'était pas parce qu'on s'adaptait et qu'on apprenait qu'il fallait pour autant complètement tout réinventer. Et puis, il y avait déjà une valeur sur l'apprentissage, qui s'appelait "Grandir et se développer en permanence". Là dessus, Léna était parfaitement d'accord. Oui, il fallait en permanence grandir et s'enrichir par de nouveaux apprentissages, et c'était justement ce qui faisait l'intérêt de la vie. Mais bon, ça pouvait être incrémentiel aussi, sans forcément venir remettre en question tous les acquis précédents. Ils avaient eu un débat là dessus pendant l'atelier, parce que Léna aurait voulu mettre juste "S'adapter aux besoins" sans cette idée de réinvention permanente. Mais bon, Noah avait pris la parole en disant que ça semblait trop bateau, la simple mention de l'adaptation, et que c'était quelque chose qu'on pouvait retrouver partout. Miranda avait réaffirmé que la réinvention lui semblait un terme fort et différenciant qui leur donnerait une vraie identité, et Léna n'avait pas osé la contredire une nouvelle fois.
Peut-être que Miranda avait raison. Enfin, bon, Léna espérait juste que cette valeur ne se matérialiserait pas trop concrètement, ou bien que Miranda lui donne un sens plus atténué que celui que le terme revêtait dans son esprit à elle. Parce que bon, s'impliquer dans la création du cabinet, c'était valorisant et énergisant, mais ce n'était pas non plus quelque chose que Léna serait capable de faire tous les deux ans. Ou alors, elle ne verrait vraiment plus Lucien et, ça, elle ne pouvait pas l'accepter à long terme. C'était avec lui qu'elle voulait faire sa vie et, une vie, dans l'esprit de Léna, ça impliquait plus que seulement des week-end partagés. Sauf que tout ça, c'était peut-être trop personnel pour pouvoir être discuté avec Miranda. Même si elle semblait assez ouverte, ce n'était pas non plus une conseillère conjugale. Et puis, pour l'instant, Léna n'avait pas le sentiment que son couple était en danger. Elle savait juste que ça devait rester un point de vigilance parce qu'inévitablement, si la situation durait et qu'ils continuaient à ne jamais se croiser, ça ne pourrait que le devenir.
La dernière valeur, c'était "S'impliquer pleinement pour rester toujours excellents" et ça, pour le coup, Léna se reconnaissait bien dedans. C'était Noah qui l'avait proposé. Il avait plutôt parlé du fait de toujours faire de son mieux, et Miranda avait soulevé que ça pouvait sous-entendre de ne pas forcément atteindre l'excellence, et donc que ça risquait de ne pas renvoyer une très bonne image aux clients. Léna avait dit qu'on pouvait mettre, à la place, une valeur qui serait "Ne pas transiger sur la qualité". Ça n'avait pas eu beaucoup de succès : Miranda trouvait que ça faisait trop sévère, et Noah trouvait que ça ne mettait pas assez en valeur la notion de motivation. Ils en avaient discuté pendant une bonne dizaine de minutes, et ils étaient arrivé à ce consensus sur "S'impliquer pleinement pour rester toujours excellents", qui leur semblait mettre en valeur à la fois l'effort et le résultat.
Au final, Léna était plutôt en accord avec tout ça. Elle trouvait pour le moins que c'était des valeurs qui reflétaient bien leurs avis à tous les trois et les compromis qu'ils pouvaient mettre en place ensemble. Ça lui semblait aussi être des valeurs susceptibles d'attirer les futurs talents. Surtout, ça donnait une assez bonne vision de la réalité du job : challengeant mais valorisant, qui donne l'occasion de faire un travail de qualité et de vraiment contribuer à un beau projet, si on s'en donne les moyens. Oui, ça reflétait bien ce qu'était Toivoiose en tant qu'entreprise, et Léna était impatiente de découvrir les nouvelles personnes qui rejoindraient cette équipe et ce beau projet.
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