Voyage d'un marmouset
Quand Achlys aura d'un pouce dénoué l'empan
De ses menottes d'airain, d'un pérenne rampant
Et de mon ciboulot ne se trouvant repue
Dès ce jour, je m'en irai par les grandes étendues.
Entre les mares limoneuses de mon enfance hallucinée, je laisserai tomber l'engeance de mon front comme un petit poucet, et j'irai dans l'heure bleue retrouver l'espérance au fond de cette lande. Dans cette bande à regret trop longtemps expectant, il a fallu attendre quelque dix ans d'errance, quelque parchemins oubliés renfermés sur eux-mêmes, où tout le mal produit était tapi dans l'ombre informe de mes méninges ; et seul Phobos ne ménageait pas ma conscience de petiot solitaire. Le réveil vicieux de mon Moi endormi, m'ont plongé dans la nuit de l'interminable jour de l'existence, minable penseur intermittent déconnecté du monde, et toutes les contraintes et les craintes et les traitements bidons dévoilent leurs souches racornies et les voiles du visible. Dès lors l'incertitude s'est élue en Vizir, et la fange des Autres me pendait au nez, mézigue qui n'était alors qu'un bigleux qui appréhendait de ne guère rester sur son arbre. C'est de bonne guerre que j'ai gratté mes croûtes pour trouver une horreur bonne à ressortir et servir aux podiums des râles courts de la désolation. C'était l'époque de la reviviscence, où l'inconscience bienheureuse de quelques idées claires ponctuait les délires de mon tectum immobile de gavroche cabossé et replet de tristesse. Les nuages noctiluques du temps à venir donnaient le biberon à mon Phobos personnel, et le dos courbé de toute cette haine désormais non dissimulée, je bâillonnais Alala et replâtrais ma gueule de miston maniaque comme une gentille poupée muette bonne pour la casse. Une communion morbide et ennemie, toute cette réluctance de mon âme qui n'avait qu'à bercer les médisances de tous ces gamins cruels avant l'alarme. Les figures étaient tombées, et tous mes affreux environs peuplés de synapsides déshumanisés ne se battaient plus à couvert, devant mon vieil effroi qui grandissait dans l'autre camp.
Dorénavant, je jouerai dans la cour des grands.
Et les vertes prairies de l'Ailleurs respireront,
Toutes vierges encore d'humains, le calme de la vue
Et s'éclipsera la puanteur en sa valeur absolue
D'une fraction la lueur d'un lointain fanion.
Derrière les maisons-brumes et les phalanges brunes
Des allées et venues des grandes avenues
J'emprunterai ce chemin en taisant ma rancune
Enfin assuré, je marcherai sur l'oppression abattue.
Et c'est en ce temps-là que je priais des statues, et refondais mon armure de pièces de fer et de fait, je multipliais les inconnues sans jamais trouver de vecteur directeur. C'était mon malheur et ma vertu, de n'essayer jamais de serrer la vis à Thanatos. J'ai fait ma chirurgie dès que m'a asséné ce soufflet qui m'a fait émerger, et j'ai fini par mener ma barque en voyant l'offensive, sans protection aucune qu'une précaution infinie. Je voyais mon diable en face et sa joue était laide. Je la baisais avec dégoût, et ses bras hypocrites tremblant de fureur contenue, ne cherchaient plus à paraître enveloppés du soyeux coton de la douceur. Acrimonie d'Echidna, ma despote, je t'ai caché les fuites de mes tuyauteries escarboucles et les pleurs sur mes dents débouclées pour mordre ton image omnipotente. Je ne sais même plus où j'avais caché une innocence-fossile en mon esprit-labyrinthe. Comme tous les anciens bambins couronnés de supplices, je débarquais à Argos, où je coupais les restes de ce cordon ombilical plastifié et rabougri, et espérais trouver le courage de la révolte, comme un bilatérien à la demi-tête d'Electre servante sans repentir branchée sur le secteur, et à moitié prêt à en finir avec la Clytemnestre embuant ses pensées de sa senestre main déchiquetée dans son système nerveux centralisé. L'enfer est plus goutu plein de férocité en combustible. Ma mécréante gérante mégère ne me couvait plus, et j'étais averti en secret, séparé enfin de l'ignorance et de l'aliénation qu'on m'avait imposées. Il ne restait qu'à continuer d'avancer plus loin dans la boue.
Le souffle d'Aura transpercera mes tympans
Et tout le long de ce long serpent de cinq miles au moins
Des Primes aux Complies, j'écouterai le vent
Furieux ou détendu, jouer son mystique clavecin.
La nuit fixera à mes pieds son érubescent apprêt
Et j'humerai de la liberté le sensible attrait
Et aucun autre burle n'envahira ma latitude.
Seuls mes derniers cris voleront jusqu'à cette altitude.
J'ai cultivé mes émois maladifs comme on plante des Daturas. J'ai acheté contre ma saine sainteté de préhension des choses le croquis d'un manuel tout croqué pour apprendre la stratégie de l'inespoir. De L'autre côté du miroir, en partance pour mouroir, c'est un franc-tireur aux abois qui squattait ma cervelle, attendant que je tombe pour que sa botte enfonce mon crâne en une seconde dans ma tombe de fortune momentanée. C'est toujours trébucher et s'étaler dans son manque de lueur et ses carences revitalisées, être fatigué de se relever en titubant de cet lit de fange dont j'étais entubé, alors que les vivants psychopompes et trompes des mouches-arbitres abruties ont érigé leur religion à coups de burin dans le télencéphale, et comme téléguidé par l'habitude d'être sur ses pieds, rester efficace et fonctionnel, vivant telle la flamme hésitante qui vacille en silence. Évanoui du repos et actionnaire de la coupure de cette gangrène infâme, il reste le choix de se cramponner aux radeaux ou tirer les rideaux sur cette longue journée qui décline. Il faut encore naviguer dans cette entre-deux vicieux, pour que la scission soit parfaite et seulement un reliquat qui coupera parfois mes nerfs jusqu'à mes terminaisons. Prendre le large, pour que cette petite histoire à lire dans la cruauté sans fin du sang des journées sans faim, meure sans moi.
Quand derrière moi s'étendra le noir des précipices,
Enroué et glacé comme une mécanique échue
A l'heure où l'avant-nuit cache du passé les vices
Dès ce jour, j'irai par les grandes étendues.
○○○
Réponse au Défi N°4 des mini-concours "Les murmures littéraires"
Écrire sur le thème du crépuscule et de la séparation
Sans utiliser les mots potron-minet, intrication et onirisme
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro