
Chapitre 62
« Je ne pense pas que nous aurons besoin de nous rencontrer avant le matin, » dit Carlisle après le départ de Dumbledore, se dirigeant vers moi. « Je vais te ramener à ta chambre. » Il s'apprêta à me soulever.
« Tu n'as pas à faire ça, Carlisle. Je peux rester allongé ici jusqu'à ce que je sois capable de me lever. »
« Je crois que ce serait préférable de te ramener à ta chambre, » insista-t-il en regardant Bella. Je pense qu'elle veut un peu de temps en tête-à-tête...
Je ne pus faire qu'un léger mouvement d'approbation pour lui signifier que je comprenais. Il me transporta à la chambre que je partageais avec Bella dans les quartiers de Dumbledore et me déposa sur le lit. Je détestais me sentir inutile comme ça – comme un invalide, même si c'était seulement temporaire. Bella se changea et se pelotonna à mes côtés. Elle avait pris soin de tirer les draps avant que Carlisle ne m'installe sur le lit. Elle ramena la literie sur nous après s'être blottie contre moi.
J'aurais voulu pouvoir incliner la tête pour la regarder, ou embrasser le dessus de son crâne, ou n'importe quoi plutôt que de simplement rester couché là. Puis je sentis ses doigts chauds sur ma poitrine.
« Qu'est-ce que tu fais ? »
« Je déboutonne ta chemise, » dit-elle d'une voix neutre.
« Mais pourquoi... » Non pas que ça me dérangeait. En fait ça ne me dérangeait vraiment pas, mais je n'étais pas exactement dans une position pour tirer profit de la situation.
« Écoute, je sais que c'est contre les règles, mais j'ai besoin de me sentir proche de toi ce soir, Edward... J'ai pensé t'avoir perdu aujourd'hui. En outre, je ne crois pas que tu risques de perdre le contrôle cette nuit. » Elle releva la tête et me sourit de toutes ses dents.
« On ne sait jamais... » Je lui rendis son sourire.
« C'est vrai... et ça ne me dérangerait pas non plus. » Ma chemise était maintenant ouverte et elle tirait sur chaque bras.
« Alors, es-tu en train de profiter de moi ? » Demandai-je, peu habitué à être dans cette position.
« Absolument. »
Je souris, fixant le plafond... Elle était sans aucun doute pleine de surprises. Après s'être débattue pendant un moment avec ma chemise et le lit, elle réussit finalement à me l'enlever et la lança par terre. Puis elle se recroquevilla de nouveau à côté de moi et posa sa tête sur ma poitrine. Je sentis la chaleur de son corps réchauffer tout mon être. J'inspirai profondément, laissant la brûlure de son parfum se combiner à la brûlure dans mon corps...
Une fois installée à mes côtés, elle laissa échapper un profond soupir – un soupir de contentement. « Edward, tu ne peux plus jamais me faire ça. Je ne peux pas te perdre. »
« Je sais ce que tu veux dire. »
Elle leva la tête et revint dans mon champ de vision. Ses yeux bruns d'une profondeur abyssale plongèrent dans les miens. « Je suis sérieuse, Edward. Je ne peux pas te perdre. Jamais ! »
« Je sais, » répétai-je, la dévisageant avec autant d'intensité.
Sans avertissement, ses lèvres furent sur les miennes. « Edward... » Dit-elle entre deux baisers. « J'ai... besoin... de toi... » Je retournai ses baisers avec autant de ferveur que je le pouvais avant qu'elle ne passe au reste de mon visage. Chaque fois qu'une partie d'elle venait assez proche, je l'embrassais. Elle se déplaça vers mon menton et mon cou... puis elle fut sur ma poitrine, assise à califourchon. Je ris nerveusement en sentant la chaleur de son corps contre le mien. Si seulement je pouvais bouger... Peut-être était-il préférable que je ne le puisse pas. « Alors, allons-nous enfreindre toutes les règles cette nuit ? »
« Ce serait tout aussi bien, si nous allons en enfer. » Je pouvais entendre l'amusement dans sa voix alors qu'elle répétait mes paroles en continuant de mettre le feu à ma poitrine, la brûlure plus intense que celle qui me parcourait toujours. Incroyable que, malgré la douleur, j'aie quand même envie d'elle.
« Bella... » J'essayai de la ramener vers mon visage, où je pourrais la voir, et l'embrasser encore, espérais-je.
« Mmm, » marmonna-t-elle. Elle continua d'embrasser ma poitrine et remonta jusqu'à mon cou, tandis que ses mains envoyaient des ondes électriques à travers mon corps. Je commençais à me sentir mal à l'aise.
« Bella, j'aimerais beaucoup t'embrasser. »
Elle se redressa, la chaleur de son corps appuyant de façon plus prononcée sur mon centre incandescent. « Vraiment ? »
« S'il te plaît, Bella... Tu m'as manqué toi aussi. »
Elle se pencha vers moi très lentement, prenant délibérément son temps, plantant son regard dans mes yeux tout en posant doucement ses lèvres sur les miennes. L'incendie de ce baiser était mille fois plus intense que la douleur galopant dans mes membres. C'était la confirmation de son existence dans ma vie, et moi dans la sienne – de l'avenir que nous savions avoir tous les deux. C'était un soulagement après que nous ayons tous les deux réalisé la possibilité de la perte et recouvré l'autre. Mes bras n'étaient peut-être pas en mesure de répondre au désir qui leur dictait de la toucher, mais je pouvais utiliser mes lèvres, et je m'en servis pour goûter aux siennes, aussi longtemps qu'elle les laissa à proximité de ma bouche. Ce fut douloureux quand elle se détacha de moi, à bout de souffle.
« Je t'aime, » dit-elle, revenant à sa position antérieure, recroquevillée à côté de moi, sa tête sur ma poitrine.
« Tout comme je t'aime. » Je voulais la tenir contre moi, mais je dus plutôt me résoudre à lui fredonner une berceuse, et elle finit par s'endormir.
Un peu après deux heures du matin, je retrouvai l'usage de mes bras et je pus balayer les cheveux de son visage et lui caresser le dos comme j'avais voulu le faire quand elle pleurait. Je pouvais lever ma tête et je la penchai pour embrasser le dessus de la sienne.
Le lendemain matin, Carlisle revint pour m'aider à m'habiller après que Bella soit partie s'occuper de ses 'besoins humains.' Je pouvais au moins rester en position assise une fois installé, même si je ne pouvais pas me lever. La douleur avait diminué dans mes membres depuis la nuit dernière, et elle était désormais concentrée dans mon centre et dans ma tête.
Il me transporta à nouveau dans le salon et m'installa sur l'un des canapés. Dumbledore était déjà là, en train de déguster une tasse de thé. Bella nous rejoignit peu après, se blottissant à mes côtés. Elle ne voulait pas être loin de moi pendant longtemps, ce que j'appréciais grandement. S'il n'en tenait qu'à moi, je ne m'éloignerais plus jamais d'elle. Le reste de la famille vint nous rejoindre petit à petit.
« Tu as deux visiteurs, » déclara Dumbledore, ses yeux redevenus scintillants.
J'étais confus. Qui pouvait bien me rendre visite ? Tout le monde croyait que j'étais mort, non ? La porte s'ouvrit, et Hermione se précipita directement aux côtés de Bella, m'étreignant furtivement au passage. « Je suis tellement heureuse de voir que tu es en train de guérir, Edward. Je me sentais tellement mal pour Bella hier. » Bien sûr, Hermione savait.
Mon autre invité entra dans la pièce avec beaucoup moins d'exubérance. Cedric se tenait sur le seuil, me regardant avec incrédulité. Alors c'est vrai...
« Salut, Cedric, » dis-je avec circonspection.
Il avança dans le salon et vint s'asseoir sur le siège à côté de moi, me dévisageant toujours. « Ça m'est venu la nuit dernière... quand je t'ai vu... Je n'arrivais pas à croire que tu étais mort, Edward... Je ne voulais pas... » Il prit une grande respiration et fixa le sol. « Je me suis rappelé que tu ne mangeais jamais avec nous... à cause de ta diète spéciale. » Il s'étrangla de rire. « Et puis quand nous luttions, vous étiez tous si froids, même si c'était une journée froide au départ – ça me donnait l'impression que vous étiez faits de glace – et vous ne paraissiez pas faire d'effort pour avoir le dessus... Et ensuite le fait que tu sois capable d'effectuer les sortilèges sans magie... » Il leva les yeux vers moi à cet instant. « J'ai juste pensé, ou peut-être espéré, que tu sois plus qu'humain... Je ne voulais pas que tu meures. »
La sincérité de ses propos m'émut énormément. Il avait été mon seul et unique meilleur ami. Ça allait être très dur de le quitter. Je tendis mon bras et saisis son épaule dans un geste amical. « Merci, Cedric... L'année prochaine va être un peu plus normale, pas vrai ? »
« Pas vraiment. » Il me regarda à nouveau. « Je ne reviendrai pas en septième année. »
« Quoi ? Mais pourquoi, Cedric ? »
« Je peux voir ce qui se passe, même si Fudge ferme les yeux sur ce qui est évident. J'ai parlé avec Dumbledore ce matin. Il a besoin d'émissaires pour communiquer avec les autres créatures mythiques, et je vais l'aider... Nous allons avoir besoin de toute l'aide que nous pourrons obtenir pour affronter Voldemort... »
Je me mis soudainement à être préoccupé pour sa sécurité. « Mais où vas-tu aller ? Qui va t'accompagner...? »
« Eh bien, j'ai pensé que je pourrais retourner à Forks avec vous – commencer à créer des liens avec les vampires. »
« Vraiment ? » J'étais surpris – agréablement surpris...
Je jetai un regard à Carlisle qui s'efforçait de réciter l'Histoire des vampires qu'il avait lue cette année... Il savait ! « Nous en avons discuté plus tôt ce matin... Nous pouvons contacter d'autres vampires végétariens, expliquer la situation... »
« Mais, c'est quand même dangereux, Cedric. Tu es certain ? »
« Allez, Edward – après toi, je pense que je peux m'occuper de moi... » Il sourit. « D'ailleurs, je ne crois pas pouvoir rester ici et prétendre que tu es mort alors que tu ne l'es pas. Les gars ont beaucoup de difficulté à se faire à l'idée. »
J'étais désolé de cet état de fait. J'aurais voulu pouvoir leur dire que j'allais bien.
« C'est nécessaire, » dit Dumbledore. « Tu sais, les décisions les plus difficiles ne sont pas entre le bien et le mal – bien que celles-ci puissent être difficiles... Les décisions les plus difficiles sont entre ce qui est bien et ce qui est mieux... Il vaut mieux que tu restes mort pour les élèves de Poudlard... »
J'acquiesçai. Il avait raison, bien sûr.
ooo
« Mais ce que vous avez dit au sujet de Fudge – de quoi était-il question ? » Demandai-je.
« Ah, eh bien, Edward, Fudge ne croit pas au retour de Voldemort. Il préfère rester dans les ténèbres plutôt que de provoquer une panique... »
« Quoi ? Comment peut-il penser ça ? Croit-il que je suis tout simplement mort de causes naturelles ? » Bella me serra un peu plus fort à la mention de ma mort.
« Il craint de perdre son poste, » supposa Carlisle...
« Oui, » répondit Dumbledore, « et il pense que Harry cherche seulement à attirer l'attention. »
« C'est de la folie. Harry déteste être le centre d'attention. Tout ce qu'il veut, c'est être normal... c'est-à-dire comme tout le monde. Au fait, comment va-t-il ? »
« Il va aussi bien qu'on puisse s'y attendre, » répondit Hermione. « Nous lui avons rendu visite ce matin... mais il ne veut voir personne d'autre en ce moment... Et il ne veut pas parler de ce qui s'est passé dans le cimetière. »
« Il a dit ça ? »
« Non, c'est dans ce qu'il ne dit pas... » Elle poussa un profond soupir. « En fait il ne parle presque pas. Il reste assis en silence avec Ron et moi. C'est assez attristant, vraiment. »
« Ça lui passera, » commenta Dumbledore. « Il connaît la vérité, ou du moins ce qu'il a besoin de savoir... Son esprit est simplement en train de traiter ce qui s'est passé. C'est regrettable qu'il soit obligé de souffrir autant. »
« Nous devrions aller en bas et lui rendre visite, Carlisle, » dit Esme. « Même s'il ne veut pas de visiteurs... Ça pourrait lui faire du bien. »
« Alors il va retourner chez les Dursley ? » Demandai-je.
« Cela aussi est nécessaire. »
Je me rappelai le cimetière, quand Voldemort avait mentionné que la magie protégeait Harry chez son oncle et sa tante, et je compris.
« Mais je pense que je vais devoir envoyer les Weasley chez lui dès que ça semblera moins risqué. Je suis sûr que ça lui plairait... »
Il y eut un moment de silence alors que nous cherchions comment aborder toutes les choses dont nous devions encore discuter.
Du coin de l'œil, je vis Hermione sortir un bocal et le donner à Bella. Celle-ci commença par frissonner en regardant le contenu, puis haleta sous le choc.
« S'agit-il de ... ? » S'enquit-elle.
Hermione hocha la tête. « Je l'ai trouvée tapie sur le rebord d'une fenêtre dans l'infirmerie, juste à côté de Harry. »
Je tournai vivement la tête pour regarder sa capture plus attentivement... C'était un gros scarabée avec des taches qui ressemblaient aux lunettes de Rita Skeeter autour des antennes. « Est-ce vraiment Rita Skeeter ? Mais elle a été ici pendant tout ce temps... Elle va tout savoir. »
« Non, j'ai ensorcelé le bocal. Il est incassable et à l'épreuve du son, et tout ce qu'elle peut voir de l'intérieur est une vue imprenable sur le Lac Noir. » Hermione sourit. « Elle n'écrira plus d'articles intéressants – à moins qu'elle veuille que je partage son secret. »
Dumbledore avait soudainement semblé fasciné par l'une des tentures murales, et en conséquence il paraissait avoir manqué la totalité de la conversation.
« Edward, » débuta-t-il, changeant le sujet, « je ne voulais pas te le demander la nuit dernière, étant donné ton état, mais peux-tu me dire ce qui s'est passé ? »
Je savais ce qu'il voulait vraiment. Même si cela allait me causer de l'inconfort, ce n'était rien en comparaison de la douleur qui s'amenuisait enfin... « Laissez-moi vous montrer. »
Il regarda intensément dans mes yeux, les siens sondant mon âme, ramenant à la surface des souvenirs que j'aurais voulu oublier – ces moments terribles dans le cimetière, quand j'avais pensé que j'étais mort, et ensuite quand j'avais cru que je n'allais pas en revenir. L'intrusion dans mon esprit provoqua un malaise jusque dans mon estomac... Ce n'était pas un souvenir sur lequel je désirais m'attarder.
« Je vois, » dit-il lorsqu'il eut terminé...
« Avez-vous vu la vision d'Alice – ce qui s'est passé après ? »
Alice se leva et vint se mettre à genoux à côté de Dumbledore. Utilisant le même procédé, il fouilla dans sa mémoire. Son visage devint très inquiet.
« Lucius, » fut tout ce qu'il dit. Je hochai la tête.
Carlisle nous regarda, alarmé. « Qu'est-ce que Lucius a fait ? »
« Il a partagé quelque chose avec Aro avant de transplaner, » répondit Dumbledore, les yeux remplis d'angoisse tandis qu'il caressait sa barbe.
« Pendant la Coupe du Monde de Quidditch, il a dérapé quand il nous a vus... J'ai pu entendre ses pensées durant quelques secondes – il songeait que notre nom lui était familier. »
« Cela est très préoccupant, » continua Dumbledore. « Si Voldemort est connecté aux Volturi... »
« S'il a une connexion avec les Roumains, il ne peut pas en avoir une avec les Volturi, » déclara fermement Jasper.
« Hmmm, » réfléchit Dumbledore. « Mais Lucius, d'autre part, pourrait se ménager une porte de sortie... »
« Et qu'en est-il de Rogue ? » Demandai-je posément.
« Rogue est dans son bureau. Il prépare de nouvelles leçons de potions pour sa classe, » répondit Dumbledore d'une façon qui voulait dire beaucoup avec peu de mots. « Mais je crains qu'il ait eu une nuit longue et pénible, » ajouta-t-il après un moment.
Je ne pus m'empêcher de me demander combien d'heures de torture il avait endurées avant que Voldemort ne décide de le laisser vivre... Et ce qu'il avait dû promettre afin de garder la vie sauve. Je n'enviais pas son rôle dans tout ça.
« Et Sirius ? » Questionna Esme. « Que va-t-il devenir ? »
« En ce moment il passe du temps avec son filleul... sous sa forme canine, bien sûr. Mais j'ai pensé à quelque chose... Carlisle, tu as mentionné qu'il y avait des loups à Forks – des métamorphes... Je pensais envoyer Sirius pour prendre contact avec eux... »
« Vraiment ? » S'exclama Esme. « Il reviendrait à Forks avec nous ? »
« Il faut que j'en discute avec lui, mais je pense que ce serait prudent. Avec ce qui s'en vient, nous avons besoin de tous les partisans que nous pouvons trouver. »
« Je ne suis pas très optimiste au sujet des loups, » l'avertit Carlisle. « Ils sont confinés à la tâche de protéger les leurs. Ils ne s'aventurent pas loin de chez eux... Eh bien, à l'exception de... » Il ne termina pas sa phrase, sachant qu'il causerait de l'inquiétude à Bella en lui rappelant l'état des choses avec Jacob quand nous étions partis. Ça n'avait pas d'importance. Elle se raidit en comprenant ce qu'il avait failli dire. Je frottai son bras pour la réconforter tandis qu'elle retrouvait sa contenance. « Et nous n'entretenons pas les liens les plus étroits avec eux... bien que la situation soit en train de s'améliorer, » crut-il bon d'ajouter.
« Ça vaut quand même la peine d'essayer, » soupira Dumbledore. « Bon, je vais me joindre à vous si vous allez rendre visite à Harry, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. » Il se leva, signalant que la conversation était terminée. Carlisle et Esme le suivirent. Cedric et Hermione quittèrent peu après, promettant de revenir bientôt.
Quand Carlisle et Esme revinrent, l'inquiétude se lisait sur le visage de celle-ci. « Pauvre garçon, il a l'air d'être en état de choc, » dit-elle. « Il a essayé de nous donner les gains de sa victoire pour toi, Edward... » Si Esme pouvait pleurer, j'étais sûr qu'elle fondrait en larmes.
« Cet argent ne lui apportera pas beaucoup de joie, j'en ai bien peur, » déclara tristement Carlisle.
Les yeux d'Alice devinrent soudainement vitreux. Je vis la vision en même temps qu'elle, et souris. « Oh, je pense qu'il va trouver comment en faire bon usage. »
« Oui, il semblerait que Harry va investir dans le magasin de farce et attrapes des jumeaux Weasley... » Alice partagea mon sourire.
« Ça pourrait être une chose très nécessaire par les temps à venir, » convint Carlisle.
« Oh, et je sais ce que Ludo trafiquait, » dit Alice avec enthousiasme. Jasper sortit de sa chambre et accourut à ses côtés. « Apparemment, il avait des dettes de jeu envers les gobelins. Il a parié que Harry allait remporter le Tournoi des Trois Sorciers. »
Jasper sourcilla. « Ce fumier, mais ensuite il a gagné... »
« Pas exactement, » dis-je en regardant la vision d'Alice. « Les gobelins ont dit que Harry n'avait pas gagné, qu'il était arrivé ex æquo... »
« Parfait ! » Sourit Jasper.
Avant que nous ne quittions le Royaume-Uni pour de bon, Esme devait aller vérifier les rénovations à Venlaw. Elle était extrêmement déçue de ne pas avoir été en mesure d'apporter la touche finale elle-même, et elle voulait s'assurer que le château soit impeccable malgré tout. Alice, bien entendu, était tout aussi préoccupée, bien que davantage pour des raisons esthétiques que parce qu'elle se souciait des propriétaires qui nous avaient si gracieusement cédé leur résidence pour y vivre pendant presqu'un an. Carlisle et Jasper les accompagnèrent, mais j'étais coincé dans les quartiers de Dumbledore jusqu'à notre départ. Heureusement, Bella était coincée avec moi. Elle ne pouvait tout simplement pas jouer le rôle de la petite amie en deuil alors qu'elle était tellement soulagée que j'aie survécu. Apparemment, Cho se chargeait très bien de le faire à sa place.
« Elle n'arrête pas de pleurer, » rapporta Hermione. « On pourrait croire que c'est son petit ami à elle qui est mort. » Le léger agacement dans sa voix était teinté d'inquiétude.
« Nous étions de bons amis, » dis-je doucement avant de la taquiner. « Ne verserais-tu pas quelques larmes pour moi si j'étais vraiment mort ? »
Elle souffla et se tourna vers Bella pour changer de sujet. « Alors, tu ne t'ennuies pas trop, ici, toute la journée ? »
Bella rougit. « Um, pas vraiment. » Elle me sourit. « C'est agréable, après une année tellement stressante, de juste avoir quelques jours de tranquillité. »
J'étais d'accord. Qui plus est, dès que mon corps avait retrouvé toutes ses fonctions, j'avais été en mesure de repayer Bella pour avoir profité de moi durant la nuit de mon retour d'entre les morts. Il fallait bien avouer que quelques-unes des règles avaient été brisées...
« Que vas-tu faire au sujet du Festin de fin d'année ? » S'enquit Hermione.
« Je pense que je vais simplement rester ici, » répondit Bella. « Je ne veux pas avoir à faire face à qui que ce soit en ce moment. »
Esme, Carlisle, Alice et Jasper revinrent sur ces entrefaites.
« Eh bien, il y a certaines choses que j'aurais aimé faire moi-même, mais dans l'ensemble c'est très beau. » Esme sourit de soulagement. Elle ne serait pas partie si tout n'avait pas été parfait.
« Je continue à penser que nous aurions pu ajouter un placard ou deux... » Commenta Alice.
« C'est un Bed and Breakfast, Alice, » fis-je remarquer. « Combien d'espace de rangement crois-tu qu'ils auraient besoin ? »
« Et ce ne serait pas conforme à l'architecture de l'époque. Je t'ai déjà expliqué tout ça, » souligna Esme.
Architecture d'époque ou pas... les garde-robes sont toujours en vogue.
Le lendemain était le jour du Festin de fin d'année. Tel que discuté, Bella et moi allions rester dans les appartements de Dumbledore pendant que les autres assisteraient à la fête. Bella avait justifié son absence du festin en disant qu'elle était incapable de faire face aux autres et de prétendre être bouleversée par ma mort... Une partie de moi espérait cependant que ce soit aussi pour passer du temps seule avec moi.
Alice, bien sûr, avait mis le paquet en aidant Hermione avec sa coiffure et son maquillage et en lui trouvant une tenue à porter sous ses robes. Conséquemment, Hermione était très jolie quand Alice en eut terminé avec elle. J'avais hâte de voir la réaction de Ron quand il l'apercevrait... Pour une fois, j'avais choisi de regarder les festivités par l'intermédiaire de son esprit.
Nom d'un chien... Qu'est-ce qu'il se passe avec elle cette année – toujours là à se faire belle... probablement juste pour lui... Son regard tomba momentanément sur Krum, qui regardait lui aussi Hermione avec l'expression d'un aveugle à qui on aurait fait don de la vue alors qu'elle entrait dans la Grande Salle. Je ne sais pas pourquoi elle ne peut pas simplement porter ses vêtements normaux... Mais derrières ses pensées forcées, il y avait une attraction indéniable et un sentiment de jalousie... C'était une émotion que je ne comprenais que trop bien à présent. Elle regarda vers l'extrémité opposée de la salle, et Ron l'imita.
La Grande Salle n'était pas remplie de gaité comme d'habitude. Les décorations avaient été enlevées, et des rideaux noirs avaient été accrochés au mur derrière la table du corps enseignant. Je réalisai immédiatement que c'était en mon honneur. Je fus frappé d'horreur et impressionné en même temps. Professeur Maugrey – le vrai, supposai-je – était assis à la table, l'air extrêmement crispé et nerveux. C'était logique, après avoir été emprisonné pendant dix mois, songeai-je. La chaise du Professeur Karkaroff était vide. Je repensai tristement à cette fameuse nuit, me demandant s'il avait déjà été retrouvé par Voldemort et, si tel était le cas, comment il se portait. Je n'aimais pas Karkaroff et je ne lui faisais pas confiance, mais je ne lui souhaitais pas le genre de mort qu'il allait rencontrer à coup sûr.
Madame Maxime avait déjà pris place à la table elle aussi, paraissant beaucoup plus gaie qu'elle ne l'avait été depuis le Bal de Noël. Elle était assise à côté d'Hagrid et, si je ne me trompais pas, semblait particulièrement heureuse d'être engagée dans une conversation tranquille avec lui. McGonagall et Rogue étaient là aussi. J'aurais voulu que Ron s'attarde plus longtemps sur Rogue, mais il était beaucoup plus intéressé à reporter son regard sur Hermione. Je m'empressai de passer à l'esprit de Harry. Il observa Rogue beaucoup plus longtemps. Je me questionnai sur les cernes foncés sous ses yeux et son visage beaucoup plus pâle que d'habitude. Il ressemblait à un vampire assoiffé de sang. Il était plus que physiquement épuisé... Il était vidé mentalement. Harry était sceptique, se demandant pourquoi Dumbledore avait une confiance sans équivoque en Rogue...
Son regard tomba alors sur Dumbledore qui était debout, forçant les élèves à lui accorder leur attention. « La fin d'une autre année, » déclara-t-il en adressant un regard pénétrant à la salle entière. Ses yeux s'arrêtèrent sur mon ancienne table. J'aurais voulu voir à travers ses yeux, ne serait-ce qu'un moment. Pour voir mes anciens camarades de Maison une dernière fois. Harry remarqua le regard de Dumbledore et tourna les yeux dans la même direction, réalisant mon souhait. Je ressentis une douleur physique en regardant les visages abattus d'Ernie, Patrick et James... et finalement le visage moins sombre de Cedric. Il jouait son rôle – mais n'était peut-être pas un meilleur acteur que Bella.
« Je voudrais vous dire tant de choses ce soir, » poursuivit Dumbledore, « mais je dois d'abord mentionner la perte d'une personne dévouée, qui devrait être assise ici... » Il fit un geste vers mes camarades. « ... Pour profiter de cette fête avec nous. Je vous prierais tous de vous mettre debout, et de lever vos verres, à Edward Cullen. »
Je fus atterré en entendant le crissement des bancs et tout le monde se lever, tenant chacun leurs verres et faisant écho en une seule voix grave et bourdonnante. « À Edward Cullen. » Un frisson longea ma colonne vertébrale devant le caractère étrange du moment, en conflit avec l'étonnement causé par l'honneur collectif qu'ils me rendaient – moi, le monstre parmi eux... Eh bien, peut-être pas le monstre que j'avais longtemps cru être...
Le regard de Harry se posa ensuite sur Cho, et je vis la même agonie que celle de mes camarades de Maison se refléter dans ses larmes alors qu'elle sanglotait doucement. Je me sentais mal pour elle. Elle avait toujours été gentille, c'était une bonne amie comme Cedric et Hermione, qui m'avait aidé à me préparer pour la tâche finale, à me calmer quand j'étais angoissé, ce jour-là, avant d'aller dans le labyrinthe... Elle m'avait aidé en dépit du fait que je ne lui rendais pas la vigueur de ses sentiments. Elle méritait mieux. Si seulement j'avais pu réussir à la brancher avec Harry – à leur apporter de la joie à tous les deux... Peut-être que c'était la tâche de quelqu'un d'autre.
Dumbledore interrompit le cours de mes réflexions. « Edward était une personne qui illustrait de nombreuses qualités distinguant la Maison des Poufsouffle. C'était un ami bon et loyal, un travailleur acharné qui avait un sens aigu du fair-play. Sa mort vous a tous affectés, que vous l'ayez bien connu ou non. Par conséquent, je pense que vous avez le droit de savoir exactement comment les choses se sont passées. » Je me sentis honteux à l'écoute de ces éloges que je ne méritais pas.
Un soupir se fit entendre dans la salle. Je réalisai que c'était Harry.
« Edward Cullen a été assassiné par Lord Voldemort. »
Le soupir se changea en plusieurs, et ensuite en chuchotements paniqués qui balayèrent la grande pièce. Harry jeta un coup d'œil à la ronde, apercevant des visages choqués, et d'autres remplis d'incrédulité.
« Le Ministère de la Magie ne veut pas que je vous dise ceci. Il est possible que certains de vos parents soient horrifiés que je l'aie fait malgré tout – soit parce qu'ils ne croiront pas que Lord Voldemort est de retour, ou bien parce qu'ils jugeront que je ne devrais pas vous révéler ces faits, compte tenu de votre jeune âge. J'ai la conviction, cependant, que la vérité est généralement préférable au mensonge. » Je grimaçai en songeant au mensonge que lui-même devait propager maintenant, pour notre protection. « ... Et que toute tentative de prétendre qu'Edward est décédé des suites d'un accident, ou d'une quelconque maladresse de sa part, est une insulte à sa mémoire. »
Harry vit les visages désormais effrayés de ses camarades de classe se tourner vers Drago Malefoy – qui n'était ni choqué, ni effrayé. Il était en train de marmonner à Crabb et Goyle. Dommage que Potter ne soit pas celui tué... Edward était juste une victime... Entendis-je en pensées les paroles qu'il chuchota à ses complices. Le venin bouillonna dans ma bouche en me remémorant leurs pères, debout dans le cercle autour de Harry... Et puis quand Lucius avait pris la main d'Aro. Qu'avait-il dit à Aro ? Quelles informations avaient-ils partagées ? Quelles promesses avaient-ils faites ? Quel était le lien ?
« Quelqu'un d'autre doit être mentionné en relation avec la mort d'Edward, » continua Dumbledore. « Je parle, bien sûr, de Harry Potter. » Un brouhaha résonna dans la salle, mais je ne vis aucune des expressions car Harry baissa la tête et fixa son assiette.
« Harry Potter a réussi à échapper à Lord Voldemort. Il a risqué sa propre vie pour retourner le corps d'Edward à Poudlard. Il a montré, à tous les égards, le genre de courage que peu de sorciers ont déjà montré face à Lord Voldemort, et pour cela, je lui rends honneur. »
Harry leva les yeux vers Dumbledore, sous le choc. J'entendis à nouveau le crissement des bancs alors que les gens se levaient pour porter un toast à Harry, mais je ne vis rien de ça à travers ses yeux, puisqu'il les ancra dans ceux de Dumbledore. Puis, à la dernière minute, tandis que Harry baissait les yeux, je vis du coin de son œil que Drago et ses sbires n'avaient pas joint les autres dans l'hommage qu'on lui rendait.
« L'objectif du Tournoi des Trois Sorciers était de promouvoir et de favoriser la compréhension de la magie. À la lumière de ce qui s'est passé – le retour de Voldemort – ces liens sont plus importants que jamais... »
Je réalisai, alors, que ce n'était pas une erreur que le tournoi ait été remis au goût du jour à ce moment précis. Dumbledore avait vu les signes, il savait ce qui allait se produire. Je présumai qu'il avait contribué à rapprocher les trois écoles de sorcellerie de sorte que, lorsque les temps difficiles surgiraient – ce qui allait se produire à coup sûr dans un avenir proche – elles auraient établi des liens qui allaient, c'était à espérer, être fatals à la tentative de Voldemort de reprendre le pouvoir. C'est pourquoi il n'avait pas mis un terme à cela quand il savait que Harry était en danger, pourquoi il nous avait fait venir ici, pourquoi il envoyait maintenant Cedric et Sirius à Forks avec nous... Parce qu'au cœur des temps dangereux, nous sommes seulement aussi forts que les liens que nous avons créés avec les autres... que l'amour que nous partageons avec nos amis.
Mon esprit retourna subitement au salon et au canapé que je partageais avec Bella alors que je la tenais sur mes genoux. Je me rendis compte que j'avais commenté le déroulement du festin pour son bénéfice quand elle se rapprocha de ma poitrine et que je sentis ses larmes sur ma chemise.
« Je sais que tu penses que tu ne le mérites pas, mais ce que Dumbledore a dit est vrai, » dit-elle en se serrant contre moi, son parfum m'imprégnant comme il le faisait toujours lors des moments que nous passions ensemble depuis le début de ma vie... la vie qu'était devenue mon existence quand elle y était entrée.
Je l'attirai plus près encore et embrassai le sommet de son crâne. Je me remémorai les mots auxquels j'avais pensé avant l'épisode du labyrinthe, et que j'avais partagés avec elle à mon retour... Ils faisaient écho au message de Dumbledore. Elle était ma force. Son amour me protégeait d'une manière que je n'aurais jamais pu imaginer... « Je t'aime, » murmurai-je.
« Tout comme je t'aime. »
La fin d'une aventure.
Le début d'une autre...
FIN
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