Il est erroné de séparer en deux espèces distinctes les imbrasils dits "vivaces" et ceux dits "sauvages". Tout au plus peut-on considérer qu'il s'agit de deux populations, chacune attachée à un habitat propre, mais au développement et aux méthodes de reproduction sensiblement identiques. Les imbrasils, sauvages comme vivaces, présentent ainsi une morphologie semblable et un dimorphisme sexuel également marqué. Les femelles, plus grosses, possèdent une carapace rouge vif, tandis que celle des mâles revêt un orangé terne. Ces teintes ne sont visibles qu'à la lumière des flammes autour desquelles les insectes s'accouplent.

Le rôle du foyer dans la reproduction des imbrasils, et indirectement l'état actuel du Continent, expliquent par ailleurs la distinction apparue au cours du temps entre insectes vivaces et sauvages. Le feu, inhérent à la présence des peuples sur un territoire, est essentiel à l'accouplement puisqu'il permet seul aux femelles, en révélant la couleur de leurs carapaces, d'attirer les mâles à elles. Aussi les imbrasils étaient-ils libres de se reproduire sur tous chemins ou routes fréquentés lorsque l'Ombre n'avait pas encore étendu ses doigts sur le Continent. A ce jour, les attaques aveugles des Pervertis ont entraîné une baisse rigoureuse des voyages, et donc de l'occurrence de feux en dehors des villes.

De là vient la migration d'une partie des imbrasils au sein des cités. La présence de flammes, ne serait-ce que celles des Tours aux Effluves, y est bien plus importante et de surcroît constante tout au long de l'année. Ainsi, alors que les imbrasils sauvages, restés dans les campagnes, se reproduisent lors de la Fraîche Saison, période pendant laquelle les voyageurs sont plus enclins à allumer des feux nombreux, les imbrasils vivaces s'accouplent sans contrainte temporelle. Mais ici résident les seules différences entre ces deux populations d'insectes qui demeurent interfécondes, bien que la disparition progressive des individus sauvages réduise la probabilité des rencontres.

Imbrasils sauvages et vivaces, Espèces animales et végétales du Continent

Anhtor Marneon de Cipsa

Manuscrit envoyé à Quiledon pour impression, accepté sous réserve de modifications concernant la mention des Pervertis