Chapitre 33 - Un espion parmi nous
— Vous devez admettre que tout ceci est très étrange, Severus.
Dumbledore le contemplait d'un air sévère par-dessus ses lunettes en demi-lune. Comme d'habitude, ils s'étaient donné rendez-vous sur la colline désolée où Severus lui avait juré allégeance pour la première fois. La pluie tombait drue sur leur bulle de silence.
— Comme je vous l'ai dit, le Lord m'a tenu à l'écart de cette opération. J'ignorais où était retenue Marlene McKinnon. J'ignore aussi pourquoi elle a été enlevée exactement et quelle est cette information qu'elle pense leur avoir donné sans s'en souvenir.
— Peut-être a-t-il des doutes sur vous...
— Je ne pense pas. Le Lord m'a accordé une grande part de sa confiance pour cette histoire de prophétie, et maintenant, il se repose sur d'autres de ses partisans pour ses différents projets. C'est ainsi qu'il fonctionne.
— Et votre vieux camarade d'école, Mulciber Junior ? Ne vous a-t-il rien dit ?
— Mulciber aime se vanter, mais pas au point de trahir les secrets que lui confie son Maître. Il ne m'a rien dit au sujet de leur plan. S'il sait quelque chose au sujet de ce fameux espion que vous pensez se trouver parmi vous, il ne m'a rien dit non plus. Vous ne pensez tout de même pas que je ne vous aurais pas averti si j'avais su qu'ils viseraient Lily ? C'était idiot de la laisser participer à cette opération... Elle aurait pu y passer.
— Lily Potter a le droit de prendre ses propres décisions.
Severus grimaça comme s'il avait avalé du pus de Bubobulb non dilué en entendant Dumbledore l'appeler ainsi.
— Elle voulait sauver sa meilleure amie, ajouta Dumbledore. Mais si cela peut vous rassurer, Severus, il a été convenu que Lily et James ne participeront plus aux misions de terrain, même de façon exceptionnelle. Est-on certain que Voldemort n'a pas apposé sa Marque sur notre espion ?
— Oui. Il ne prendrait pas ce risque, pas maintenant.
— Bien, soupira Dumbledore. Il faudra donc déterminer son identité d'une autre façon. Merci, Severus.
***
De nouveau présentable, Marlene se rendit chez ses parents pour les rassurer sur son sort. Dumbledore autorisa également Marlene à rendre visite à sa sœur à l'école. Stella avait gardé le porte clé en forme de hibou qui avait servi de Portoloin illégal comme pendentif, qu'elle portait constamment autour du cou. Les deux sœurs se tombèrent dans les bras et pleurèrent.
Une fois les retrouvailles passées, Marlene décida de rester chez Sirius. Un soir, elle demanda si elle pouvait lui emprunter sa baguette pour accomplir une tâche toute simple.
Elle fut incapable de la réaliser malgré de multiples essais. Gagnée par une panique grandissante, elle s'essaya à d'autres sorts, mais même les plus simples ne donnèrent aucun résultat. Ce n'était pas normal. Même avec une baguette d'emprunt, elle aurait dû être capable de faire de la magie. Mais elle ne pas en mesure de produire la moindre étincelle.
Sirius tenta de la rassurer – elle venait de traverser quelque chose de terrible, après tout – mais Marlene commença à se demander si le poison qu'on lui avait injecté n'avait pas eu des conséquences irréparables.
Peut-être lui avait-on enlevé plus que des souvenirs.
Peut-être lui avait-on enlevé sa magie.
Ce fut le début d'une autre descente aux enfers. Qui était-elle, si elle n'était plus une sorcière ?
Elle passa ses journées à regarder le plafond, à se sentir vide. Elle s'en était sortie. Elle aurait dû savourer chaque seconde de liberté, mais un gouffre béant s'était ouvert en elle. Elle avait l'impression qu'une partie d'elle était restée là-bas, dans ce cachot. Elle se sentait morte.
Plus rien n'avait d'attrait à ses yeux.
***
Sirius suivait la silhouette capuchonnée qui marchait d'un pas vif dans l'Allée des Embrumes. La silhouette s'engouffra chez un apothicaire. À travers la vitrine, il la vit parlementer avec le vendeur. Une bourse passa d'une main à l'autre, puis la silhouette glissa une fiole dans la poche de sa cape. Sirius se rencogna dans la ruelle pour la laisser sortir. Puis il l'attrapa par la main et l'attira dans la venelle.
La silhouette laissa échapper un glapissement de surprise et de panique mais cessa de se débattre en reconnaissant son visage.
— Qu'est-ce que tu fais ? demanda Sirius d'un ton sévère.
Il glissa une main dans la poche de la cape et en retira la fiole.
— C'est vraiment ça, ta solution ?
La silhouette baissa alors son capuchon, libérant ses cheveux bruns.
— Ça va pas ? chuchota furieusement Marlene. Tu m'as fait une peur bleue... J'ai cru...
Les traits de Sirius s'adoucirent aussitôt.
— Désolé... Je n'avais pas pensé à ça...
Elle avait cru qu'on l'enlevait à nouveau.
— Mais ça ? ajouta-t-il en montrant la fiole. Ce n'est pas la solution...
— J'ai besoin... J'ai besoin de ressentir quelque chose.
— Et le venin de vampire va t'aider ? Tu vas te sentir bien deux minutes, et après ? Tu vas passer deux jours malade ? Mulciber a dit que tu avais mis des jours à te sevrer dans ce cachot...
Marlene détourna le regard, honteuse et désespérée, les larmes aux yeux.
— Ça ira mieux, d'accord ? ajouta Sirius avec douceur. Je te le promets. Mais toi, tu dois me promettre de ne jamais toucher à ce truc.
— Ok, capitula-t-elle. Je te le promets.
— Bien.
Sirius se tourna contre le mur au fond de la venelle et projeta la fiole dessus. Elle éclata en mille morceaux.
— Viens...
Il la prit par la main et ils transplanèrent.
À la grande surprise de Marlene, ils réapparurent non loin de là, sur le Chemin de Traverse, juste devant chez Ollivander.
— Qu'est-ce qu'on fait ici ?
— On vient t'acheter une nouvelle baguette. Il est temps, tu ne crois pas ?
— Quel intérêt ? demanda-t-elle sombrement.
Sirius la prit par les épaules.
— Je suis certain que ça va revenir. Et que ça reviendra beaucoup plus facilement avec une baguette qui t'appartient vraiment. En plus, je te l'offre. Cadeau de Noël en retard, ou cadeau d'anniversaire en avance, peu importe. Alors tu ne peux pas refuser.
Il esquissa un sourire en coin. Marlene finit par céder.
— Ok... Allons-y.
Ils entrèrent dans la boutique.
Ollivander lui fit essayer plusieurs baguettes sans que rien ne se produise. Marlene allait renoncer lorsqu'enfin, l'une d'entre elles émit une maigre lueur lorsqu'elle s'en saisit. Sirius lâcha une exclamation victorieuse, mais Marlene préféra garder l'espoir à une distance raisonnable. Elle n'était pas sûre de retrouver sa magie et sa puissance d'antan.
Cette impression se confirma les jours suivants. Elle avait le sentiment de tenir une baguette étrangère entre les mains, une baguette qui ne lui appartenait pas vraiment. Elle avait le même niveau qu'un élève de première année. Comment était-elle censée reprendre sa formation d'Auror avec ça ? Elle avait été trop absente pour valider sa dernière année et ne se sentait déjà pas le courage de la repiquer, mais en serait-elle seulement capable avec un niveau aussi médiocre ?
Bien qu'elle ait renoncé à ses missions pour l'Ordre, elle se laissa convaincre par Sirius de l'accompagner au QG mais, au lieu d'assister à la réunion, elle reste dehors à humer l'air frais au sommet de la falaise et à profiter des derniers rayons de soleil de la journée. Le parfum iodé, le bruit des vagues et les cris des mouettes auxquels elle s'était raccrochée comme à une ancre pendant sa captivité l'apaisèrent.
Et soudain, une prise de conscience la frappa avec la force d'un ouragan.
Elle était en vie.
Elle était libre.
Elle se souvint des paroles que Sirius lui avaient un jour dites à Poudlard.
Tu es Marlene McKinnon. Tu veux tout être, tout vivre, tout faire.
Il l'avait percée à jour, cette nuit-là. Pour la première fois, elle s'interrogea sur cette facette d'elle-même. Elle avait voulu toucher à tout, être douée dans tous les domaines, en partie parce qu'elle avait quelque chose à prouver. Elle voulait être digne de cette magie qui avait sauté une génération dans sa famille. Elle voulait rendre fiers ses parents, s'assurer une belle carrière.
Mais pour la première fois de sa vie, elle n'était plus douée. Et cela avait un côté libérateur.
Peut-être qu'elle pouvait tout recommencer. Redécouvrir qui elle était vraiment, sans la magie. Elle n'était pas juste une sorcière. Et, désormais, elle pouvait être qui elle voulait.
— Mar ?
La voix de Sirius la fit se retourner. Son air inquiet s'envola aussitôt lorsqu'il la vit sourire.
— Tout va bien ? demanda-t-il tout de même.
— Oui. Oui, tout va bien...
Être capable de croire à ses propres paroles la remplit d'une joie intense. Elle leva les bras au dessus de sa tête, savourant le vent qui soulevait ses cheveux et son cardigan, et se mit à rire.
Sirius ne put s'empêcher de sourire en entendant ce son qui résonnait pour la première fois depuis longtemps. Il lui avait manqué. Elle lui avait manqué.
Au cours des jours qui suivirent, Marlene renoua avec des passions auxquelles elle n'avait guère eu le temps de s'adonner ces dernières années. Elle reprit la peinture et le piano. Lorsqu'elle s'en sentit le courage, elle se rapprocha même d'un club amateur de Quidditch qui avait besoin d'une nouvelle batteuse. Elle fut soulagée de constater que malgré sa magie médiocre, elle volait toujours aussi bien.
La présence de Marlene égayait la maison. On l'entendait souvent chantonner lorsqu'elle faisait quelques tâches ménagères sans l'aide de la magie, qu'elle avait presque complètement abandonnée. Sirius s'en inquiétait un peu, mais peut-être avait-elle simplement besoin de temps pour s'y remettre. Elle avait passé toute sa scolarité et le début de sa vie d'adulte à travailler pour devenir la meilleure. Elle méritait bien une pause. Elle allait enfin mieux, ce n'était pas le moment de la pousser à reprendre la magie.
Le jour, ils allaient souvent se promener à la plage ou à la campagne pour prendre l'air. La nuit, même si les cauchemars de Marlene s'espaçaient, ils continuaient à dormir dans le même lit. Vint un soir où, incapables de dormir l'un et l'autre, ils se retrouvèrent à se regarder dans les yeux en silence dans la pénombre. Spontanément, Sirius la prit dans ses bras. D'ordinaire, il ne le faisait que lorsqu'elle avait besoin de réconfort après un cauchemar. Marlene l'embrassa alors et bascula à califourchon sur lui. Elle avait repris un peu de poids, mais elle paraissait encore si maigre, si fragile...
— Tu es sûre ? souffla-t-il.
Marlene acquiesça. Soudain, elle avait besoin de lui de cette façon.
Elle avait besoin de le retrouver, lui.
***
Après la réunion, Remus s'attarda dans l'entrepôt. Il débarrassa les tables, remit les chaises en place. Il n'avait aucune envie de rentrer chez lui. Le cottage était plaisant, et il avait eu une chance inouïe de le trouver. Son père lui avait rendu un grand service. Et pourtant, il ne se sentait pas à l'aise là-bas.
Plus exactement, il s'y sentait seul.
Quitter Sirius avait été la décision la plus difficile de sa vie. Mais il ne pouvait pas rester chez lui alors que Marlene s'y trouvait. Elle avait besoin de lui, et elle souffrait déjà assez comme cela. Inutile de lui infliger leur idylle.
Il savait qu'ils étaient de nouveau ensemble. Il avait prévu que cela arriverait, mais cela ne rendait pas les choses plus aisées.
— Tu vas bien ? demanda une voix familière.
Remus n'avait pas remarqué que Nina était restée, elle aussi. C'était la première fois qu'elle lui adressait la parole depuis une éternité.
— Oui, répondit-il.
— Ce n'est pas vraiment ton genre de t'attarder ici...
Remus remit une dernière chaise en place. L'endroit était propre et rangé. Il n'avait plus aucune raison de rester, mais il est resta immobile, incapable de partir.
— Allez, dis-moi ce qui ne va pas, insista Nina.
Remus envisagea de lui demander d'un ton cinglant « On se parle, maintenant ? » mais se ravisa. Il savait que c'était la colère qui aurait parlé à sa place. Peut-être que cela lui ferait du bien de vider son sac, de toute façon. Même s'il n'avait aucune intention de donner les détails.
— J'étais avec quelqu'un, et c'était... bien. Mais c'est fini.
— Oh... je suis désolée.
— Oui, moi aussi.
Il s'apprêtait à partir quand il songea qu'il pouvait au moins lui rendre la pareille et lui demander comment elle allait.
— Et toi ? Pourquoi tu restes là ? Ce n'est pas tellement ton genre non plus...
— Parce qu'il m'attend.
Nina détourna les yeux. Et, soudain, elle se mit à pleurer. Remus ne sut comment réagir.
— Tu avais raison. Je suis devenue la putain de Greyback. Mais il ne me laisse pas le choix...
Elle essaya rageusement ses larmes.
— Si tu savais comme je le hais... Je le tuerais, si je le pouvais. J'ai essayé, tu sais. J'ai essayé de l'empoisonner, mais il a vu le coup venir et depuis, il est encore pire...
— Tu devrais peut-être t'enfuir.
— Il me retrouverait. Il me l'a bien fait comprendre. Il pense que je lui appartiens, désormais. Mais je préférerais mourir plutôt que continuer à le laisser faire.
— Ne dis pas une chose pareille !
Remus s'approcha d'elle, alarmé. Il ignorait que la situation était si catastrophique. Soudain, tous ces derniers mois sans parler n'avaient plus d'importance. Il lui prit les mains.
— On va trouver une solution.
Peut-être qu'il pourrait demander à l'Ordre de la cacher... Peut-être que...
Le prenant totalement de court, Nina l'embrassa. Lorsqu'elle se recula, elle le regarda avec une lueur de supplication dans ses yeux embués.
— Tu ne m'aimes pas, fit remarquer Remus.
— Toi non plus. Qui a parlé d'amour ?
***
Lorsque Remus ouvrit les yeux, Nina était toujours endormie nue à côté de lui. Elle l'avait attiré dans le local privé de Greyback, sur un lit de camp trop étroit pour deux personnes. Remus n'y était jamais entré car il était protégé par magie, mais Nina savait comment désactiver les protections. Seuls les proches de Greyback y avaient accès.
Se rendant compte de l'occasion sans pareille qui se présentait à lui, Remus se dégagea doucement des bras de Nina pour inspecter les lieux. Il commença par jeter un œil à l'immense tableau épinglé de photos. Certaines étaient barrées d'une croix rouge, signe que les cibles avaient été éliminées. L'une des photos attira son regard comme un phare dans la nuit.
C'était une photo de Sirius.
Elle ne comportait pas de croix rouge, mais dessous, des notes manuscrites indiquaient un ordre de mission et une date.
Greyback comptait s'attaquer à Sirius sur ordre de Voldemort.
Ce soir même.
Sans prendre le temps d'avertir Nina, il courut vers la sortie.
***
Il débarqua dans le salon du QG, hors d'haleine. Peter rédigeait de la paperasse tout en s'occupant de la veille communicationnelle près du feu de cheminée.
— Où est Sirius en ce moment ? demanda-t-il.
— Il... Il est en mission.
— Où ?
— Je ne suis pas censé le dire...
— IL EST DANGER ! s'écria Remus. Greyback a l'intention de l'attaquer, alors laisse tomber les ordres de Dumbledore, Peter, et dis-moi où il est !
— Tu ne peux pas y aller tout seul, de toute façon... Il va te falloir des renforts. On peut demander aux membres qui ne sont pas en mission, comme Dorcas, ou Lily et James...
— Non, pas Lily et James. Ils ne doivent pas sortir de chez eux. Il ne faut surtout rien leur dire de tout ça, sinon James voudra venir, c'est certain... Je vais me débrouiller. Dis-moi juste où il est, et j'irai chercher Dorcas et les autres membres de l'Ordre libres ce soir...
Peter lui confia la position de Sirius et lui donna les noms des membres qui n'étaient pas en mission. Remus transplana aussitôt et tira Dorcas de son lit, puis alla prévenir Edgar tandis que Dorcas allait chercher Caradoc. Remus songea à une autre personne : Marlene. Elle n'avait pas repris les missions depuis son enlèvement, mais elle voudrait sans doute être mise au courant...
Il la trouva chez Sirius. Alarmée, elle s'empara de sa baguette et le suivit.
***
Sirius étouffa un bâillement. La conversation des deux Mangemorts qu'il espionnait était barbante au plus haut point. Lorsqu'ils quittèrent le pub, Sirius se jeta discrètement un sort de Désillusion avant de les suivre à l'extérieur. Au lieu de transplaner, les deux Mangemorts se dirigèrent vers les bois en lisière du village.
Voilà qui est plus intéressant, songea-t-il.
Qu'avaient-ils à faire dans ces bois ?
Ils continuèrent à parler de leurs paris idiots sur des courses illégales d'hippogriffes tandis qu'ils s'enfonçaient sous le couvert des arbres.
Puis, soudain, en plein milieu de leur discussion, ils transplanèrent.
Pris de court, Sirius ne songea que trop tard à la possibilité qu'on venait de lui tendre un piège. Il tenta de transplaner à son tour, en vain.
Il entendit des branches craquer. Autour de lui, émergeant de leur cachette, une dizaine d'hommes resserraient leur cercle autour de lui. Leur faciès n'était pas tout à fait humain : ils avaient les yeux jaunes et les dents pointues. Des grognements animaux sourdaient de leur poitrine. Sirius reconnut Greyback. Ces hommes étaient des lycanthropes. Ce n'était pas la pleine lune, mais ils semblaient capables de se métamorphoser partiellement en dehors de celle-ci. Certains tombèrent à quatre pattes comme si cela leur était plus naturel que d'avancer sur leurs deux jambes. Un filet de sueur froide coula entre les omoplates de Sirius. Il ne pourrait jamais se défendre seul contre dix loups-garous...
Mais il mourait en essayant.
***
Lorsque Remus et les autres transplanèrent devant le pub où Sirius était censé espionner deux Mangemorts, ils se rendirent compte rapidement qu'il ne s'y trouvait plus.
— Comment est-ce qu'on va le retrouver ? demanda Marlene d'un ton angoissé. Il pourrait être n'importe où...
Remus ferma les yeux et se concentra. Pour une fois, il pria pour que sa condition lui soit utile et fit appel à son flair surnaturel. Comme d'habitude, il avait pris soin de modifier son apparence pour protéger sa couverture.
— Il est toujours là, indiqua-t-il en rouvrant les yeux. Par ici...
Son flair le guida vers les bois. Alors qu'ils s'en approchaient, ils entendirent des bruits de lutte. Ils trouvèrent alors un Sirius en très mauvaise posture qui tentait de garder à distance les dix loups-garous qui le menaçaient. Remus se jeta aussitôt dans la bataille avec Dorcas, Edgar et Caradoc. Marlene voulut jeter un sort de Stupéfixion, mais sa baguette ne fit que projeter quelques étincelles rouges. Elle attira l'attention de Greyback qui, d'un air moqueur, s'approcha d'elle. Horrifiée, Marlene se retrouva aculée contre un tronc d'arbre. Dorcas avisa sa position précaire et prit le temps de jeter un sort à Greyback pour le repousser, ce qui lui valut d'être attaquée par son assaillant, qu'elle évita de justesse. Marlene maudit sa propre stupidité. Elle s'était jetée dans ce combat sans réfléchir aux conséquences. Non seulement, son incompétence la mettait en danger, mais en plus, elle mettait les autres en péril.
Greyback revint à la charge, visant cette fois Sirius qu'il approcha dans le dos.
— NON ! hurla Marlene.
Sans y penser, elle leva sa baguette.
Son sort fut si puissant que le tronc heurté par Greyback lorsqu'il fut projeté en arrière se brisa sous l'impact. La partie supérieure de l'arbre s'abattit sur un autre loup-garou. Ni l'un ni l'autre ne se releva.
La scène suspendit le combat une poignée de secondes. Puis les combattants se remirent de leur incrédulité et la bataille reprit. Marlene se joignit à ses camarades, savourant sa pleine puissance retrouvée.
Le combat ne tarda pas à pencher en faveur des membres de l'Ordre. Les derniers rescapés jugèrent préférable de prendre la fuite en abandonnant leurs comparses. Greyback avait dû reprendre conscience et s'enfuir, car il avait disparu.
Soulagé de constater que Sirius était toujours en un seul morceau, Remus voulut se jeter dans ses bras, mais Marlene le devança.
— Tu vas bien, souffla-t-elle.
— Oui... et toi aussi, on dirait. Ta magie... Elle est de retour.
— J'imagine qu'elle avait simplement besoin d'un petit coup de pouce, répondit-elle en riant et pleurant à la fois.
Sirius la prit dans ses bras et Marlene l'embrassa. Remus détourna les yeux. Puis il aida Dorcas, Edgar et Caradoc à ligoter les corps étendus par terre.
***
Le lendemain, Greyback annonça une réunion d'urgence. Un bandage épais lui enserrait le crâne et il était furieux.
— Hier soir, nous avons attaqué une cible sur ordre du Seigneur des Ténèbres, déclama-t-il en faisant les cents pas devant ses troupes. Une poignée de personnes seulement étaient au courant de cette opération. Pourtant, l'Ordre du Phénix en a été averti. Ils ont déjoué notre intervention et on fait des prisonniers parmi nos compagnons. Ce qui signifie qu'un espion se trouve parmi nous.
Un long frisson remonta le long de la colonne vertébrale de Remus. Il croisa le regard de Nina. Elle savait que c'était lui. Elle l'avait fait entrer dans le bureau privé de Greyback, et il avait volé des informations cruciales avant de l'abandonner après avoir couché avec elle. Elle devait être furieuse, elle aussi.
C'était fini pour lui. Greyback l'avait percé à jour. Il évalua ses chances de s'enfuir : elles étaient minces, quasi inexistantes. Il songea à Sirius. Il n'aurait jamais l'occasion de lui dire tout ce qu'il avait encore à lui dire.
Greyback promena son regard sur chacun de ses soldats. Il glissa sur celui de Remus, qui retint sa respiration, conscient que ses voisins devaient sentir les effluves de peur qui émanaient de lui.
Mais Greyback ne s'arrêta pas sur lui.
Ses yeux fixèrent Nina.
— Toi, l'accusa-t-il. Tu as averti l'Ordre.
Remus allait intervenir pour la défendre lorsque Nina répondit, le menton fièrement relevé :
— Oui. C'était moi.
Aussitôt, les autres loups-garous s'écartèrent d'elle, comme s'ils craignaient d'être contaminés par sa traîtrise. Pris de court, Remus fut incapable de réagir. Il essaya de capter son regard, mais Nina poursuivit :
— Tu pensais peut-être que j'allais continuer à te laisser faire de moi ce que tu voulais ? Je voulais me venger. Alors j'ai choisi mon moment. Je savais à quel point cette opération était importante. À quel point le Seigneur des Ténèbres voulait cet homme mort. Et maintenant, tu l'as déçu. Il sera furieux contre toi. Il ne te confiera plus aucune mission importante. J'ai gagné.
— Gagné ? répéta Greyback d'un ton doucereux. Tu penses avoir gagné ?
Il descendit de son estrade et s'approcha d'elle. Remus sut ce qui allait se passer. Et Nina le savait, elle aussi.
Je préférerais mourir plutôt que continuer à le laisser faire.
Remus voulut crier.
Ce n'est pas ta porte de sortie ! On peut trouver une solution !
Mais il était déjà trop tard.
D'un coup de griffe, Greyback égorgea Nina Volkov, qui s'écroula, sans vie.
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