Chapitre 20 - L'heure des choix
Remus ouvrit de grands yeux horrifiés.
Il avait quitté James dans les couloirs pour descendre au pied de la tour d'astronomie, au cas où Grace chuterait. Mais il ne connaissait aucun sort assez efficace susceptible de ralentir ou arrêter une telle chute. Impuissant, il observa la silhouette de Grace tomber comme une pierre, telle une poupée de chiffon lestée.
— ARRESTO MOMENTUM !
Soudain, la silhouette de Grace sembla tomber plus lentement, comme une plume portée par le vent. Remus tourna la tête vers Dumbledore, qui avait jeté le sort d'une voix de stentor ayant retenti dans tout le parc. Des élèves commençaient à accourir depuis le château. Ils avaient dû voir Dumbledore le traverser en trombe en compagnie de James.
Dumbledore fit apparaître un matelas géant où se déposa la silhouette de Grace. Celle-ci semblait en état de choc. Dumbledore s'agenouilla auprès d'elle. Mme Pomfresh se fraya un chemin à travers la foule des élèves qui commençait à se former au pied de la tour pour s'occuper de sa nouvelle patiente. Celle-ci fut allongée sur un brancard qui surgit du néant d'un coup de baguette de l'infirmière. Dumbledore et Mme Pomfresh remontèrent la foule à contre-courant vers le château.
— Regagnez vos dortoirs ! clama Dumbledore d'une voix forte.
Les élèves ne semblaient pas pressés d'obéir, jetant des regards avides et curieux sur Grace, mais ils finirent par obtempérer lorsque Dumbledore se mit à gravir l'escalier de marbre, James et Remus sur les talons. Lorsqu'ils parvinrent au sommet, ils virent Lily, Marlene, Sirius, Peter et Mary accourir vers eux.
— Elle n'est pas... commença Marlene, en pleurs. Elle n'est pas...
— Elle va bien, mademoiselle McKinnon, la rassura Dumbledore en la regardant par-dessus ses lunettes en demi-lune. Suivez-nous jusqu'à l'infirmerie, vous tous. Je crois que vous avez beaucoup de choses à m'expliquer...
Marlene lâcha échapper un sanglot. Elle tremblait de tous ses membres. Sirius la prit dans ses bras, puis lui tint fermement la main alors qu'ils gravissaient les étages. Lily prit également la main de James, les yeux rougis par les larmes. Remus jeta un coup d'œil à Mary, qui avait l'air complètement choquée, mais n'osa pas s'approcher d'elle.
Mme Pomfresh installa Grace dans un lit et lui donna une potion pour la faire sombrer aussitôt dans le sommeil.
— Elle n'est pas blessée, commenta-t-elle d'un ton expert. Juste en état de choc.
— Elle a été soumise à l'Imperium, révéla Lily. Par Mulciber. Elle y est soumise depuis des mois... C'est elle qui a attaqué les élèves. Sur ordre de Mulciber.
— Un élève a utilisé l'Imperium ? fit Mme Pomfresh, choquée.
— Il l'a aussi forcée à faire d'autres choses... Il l'a... Il l'a violée.
Cette fois-ci, Mme Pomfresh resta sans voix. Puis enfin, elle déclara :
— Cela dépasse mes compétences, professeur Dumbledore. Il faudrait la transférer au plus vite dans l'aile psychiatrique de Ste Mangouste. Si tout cela est vrai, elle aura besoin d'une prise en charge spécifique par des Guérisseurs spécialisés en santé mentale...
— Je me charge de faire prévenir ses parents et d'arranger le transfert, Pompom. Veuillez me suivre dans mon bureau, ajouta Dumbledore à l'adresse des sept élèves rassemblés au chevet de Grace.
Le professeur McGonagall patientait déjà dans le bureau du directeur, droite comme un I, ainsi que le professeur Chourave. Le professeur Dumbledore fit apparaître neuf fauteuils moelleux recouverts de chintz, et tous s'y installèrent, hormis leur professeur de métamorphose qui semblait incapable de se plier en deux.
— Monsieur Potter ici présent a accouru vers mon bureau il y a un quart d'heure. Par chance, je sortais tout juste du dîner dans la Grande Salle lorsque mon chemin a croisé le sien dans les couloirs. Il m'a averti qu'une élève s'apprêtait à sauter de la tour d'astronomie.
Mme Chourave écarquilla les yeux.
— J'ai donc envoyé d'autres élèves chercher le professeur McGonagall, Mme Pomfresh, ainsi que vous-même, Pomona, puisque l'élève en question fait partie de votre maison.
— De quelle élève s'agit-il, professeur ? s'enquit Mme Chourave, choquée.
— Grace Fawley. J'ai pu intervenir à temps pour amortir sa chute. Elle se trouve actuellement à l'infirmerie, indemne. Il semblerait en revanche que Miss Fawley ait subi de nombreux sévices par le passé. Miss Evans... Êtes-vous certaine que Mr Mulciber se cache derrière tout ça ?
— Oui, professeur. J'ai deviné que c'était lui et Grace me l'a confirmé.
— Professeur McGonagall, pourriez-vous je vous prie aller chercher Mr Mulciber, ainsi que le professeur Slughorn ? Nous allons devoir interroger Mr Mulciber en présence de ses parents. Je souhaiterais que le professeur Slughorn leur envoie un hibou express en leur demandant de venir en urgence ce soir. Cette affaire pourrait être portée jusqu'au Magenmagot. Professeur Chourave, pourriez-vous également prévenir les parents de Miss Fawley et arranger son transfert à Ste Mangouste ?
— Bien entendu, professeur Dumbledore, répondirent en chœur les professeurs McGonagall et Chourave avant de quitter toutes deux le bureau.
— Miss Evans... comment avez-vous deviné que le coupable était Mr Mulciber ?
— Je me suis souvenue de leur altercation en début d'année, professeur. Grace l'avait humilié publiquement et Mulciber n'est pas du genre à laisser couler. J'aurais dû me douter qu'il se vengerait d'une manière ou d'une autre, comme il l'a fait deux fois à Mary.
Celle-ci baissa les yeux, gênée.
— Vous auriez dû le virer dès la première fois, intervint soudain Sirius d'un ton arrogant.
— Malheureusement, expulser un élève de manière définitive n'est pas aussi simple que cela, Mr Black.
— Parce que son père fait partie du conseil d'administration ? ironisa Sirius.
— Mr Black, reprit Dumbledore d'un ton plus sévère. Soyez certains que la position d'un parent d'élève au conseil d'administration n'est pas un passe-droit pour commettre la moindre exaction dans l'école que je dirige.
Dumbledore était resté parfaitement calme, mais si ferme que Sirius n'émit plus aucune remarque.
— Miss Evans, que vous a raconté Miss Fawley ?
— Elle m'a dit que Mulciber l'avait obligée à agresser un élève né-Moldu, puis Samantha Parker après qu'elle a critiqué les Mangemorts, et enfin deux élèves au hasard. Il l'a forcée à prélever des cheveux sur la dernière victime pour les utiliser avec le Polynectar qu'il avait volé au professeur Slughorn. Il s'est servi de ce déguisement pour passer inaperçu et l'obliger à... l'obliger à...
Elle ne parvint pas à continuer.
— L'obliger à lui octroyer des faveurs sexuelles, compléta James, venant à sa rescousse.
Dumbledore poussa un profond soupir. On frappa à la porte à ce moment-là. Le professeur Slughorn pénétra dans la pièce, accompagné de Mulciber. Ce dernier arborait son habituel petit sourire arrogant, ce qui sembla électriser aussitôt toute la pièce. James, Sirius et Remus se levèrent à moitié, les poings serrés.
— Rasseyez-vous, jeunes gens, leur ordonna Dumbledore avant d'inviter d'un geste les deux nouveaux venus à prendre place dans les fauteuils laissés vides par le professeur McGonagall et le professeur Chourave.
Mulciber s'installa dans son fauteuil d'un air parfaitement décontracté. On pouvait presque entendre les dents grincer autour de lui.
— Mr Mulciber, commença Dumbledore. Il semblerait qu'une de vos camarades ait été soumise à l'Imperium.
— Vraiment ? répliqua Mulciber d'une voix trainante, comme si tout ceci ne l'intéressait guère et ne le concernait en rien.
— Il s'agit là d'une faute très grave, qui va au-delà d'une simple expulsion de l'école. L'utilisation d'un Sortilège Impardonnable tel que celui-ci vaut à son lanceur une peine d'emprisonnement à Azkaban.
— Je ne suis au courant de rien, répondit Mulciber en affrontant le regard de Dumbledore sans ciller.
— Vos parents ont été prévenus. Je suggère que nous attendions tous leur venue avant de procéder à un interrogatoire. Une délégation du Département de la Justice Magique sera également présente.
À ces mots, Dumbledore tourna la tête vers le majestueux phénix qui sommeillait sur son perchoir. Ce dernier disparut alors dans un tourbillon de flammes sous les yeux médusés des élèves. Même le professeur Slughorn sembla impressionné par ce spectacle.
Commença alors une attente interminable pendant laquelle tous restèrent silencieux. Dumbledore s'était attelé à la rédaction d'un parchemin. Slughorn ne cessait de se tourner nerveusement les pouces. James, Sirius et Remus ne desserraient ni les poings ni les mâchoires. Lily elle-même était dévorée par une colère attisée par le fait que Mulciber jouait négligemment avec sa baguette magique. Tout ceci ne semblait pas l'inquiéter le moins du monde. Lily avait un très, très mauvais pressentiment.
Le phénix fit sa réapparition au moment où quelqu'un frappa à la porte. Quatre nouvelles personnes entrèrent. D'abord un couple : une femme à l'air hautain avec les mêmes yeux perçants que son fils et un homme à l'air arrogant possédant les mêmes traits que Mulciber. Ensuite, un homme pourvu d'une moustache noire en brosse à l'expression sévère. Sirius lâcha une exclamation dédaigneuse en reconnaissant Bartemius Croupton, le nouveau directeur du Département de la Justice Magique en personne. Enfin, le quatrième homme, beaucoup plus âgé, pénétra dans le bureau. Cette fois, ce fut Marlene qui haussa les sourcils d'un air méprisant en reconnaissant son grand-père, Elias McKinnon. Ce dernier moufta à peine en découvrant sa petite-fille.
Les parents de Mulciber encadrèrent aussitôt leur fils dans un geste protecteur.
— Professeur Dumbledore, salua Mr Croupton. J'ai bien reçu votre message.
Il jeta un regard au phénix.
— J'ai croisé Mrs et Mr Mulciber dans le hall en arrivant. Le professeur McGonagall nous a gentiment proposé de nous accompagner jusqu'ici, mais je lui ai assuré que je connaissais le chemin. Étant donné les circonstances, j'ai préféré me déplacer moi-même. Cette affaire doit être prise au sérieux.
— Il n'y a rien de sérieux dans toute cette mascarade, commenta Mrs Mulciber. Mon fils n'a rien à voir avec tout cela. Cette fille est de toute évidence une mythomane dotée d'un esprit malade. Se jeter du haut d'une tour, quelle idée saugrenue !
Marlene lui jeta un regard noir.
— Calmez-vous, Ursula, intervint Croupton.
Lily était désormais certaine que par « étant donné les circonstances », Croupton signifiait « étant donné l'identité des parents de l'élève mis en cause, que je connais personnellement ». Son pressentiment s'intensifia.
— Monsieur McKinnon est ici présent en tant qu'avocat de la famille Mulciber, précisa Croupton.
— Quelle surprise, ironisa Marlene dans sa barbe.
— Inutile de rendre les choses plus difficiles qu'elles ne le sont, Marlene, répliqua son grand-père.
Marlene ne répondit pas et croisa les bras d'un air buté. Sirius ne put s'empêcher de sourire, particulièrement fier d'elle.
— De quoi est accusé mon client ? s'enquit Mr McKinnon.
— Mr Mulciber est accusé d'avoir utilisé le sortilège de l'Imperium sur la personne de Grace Fawley, répondit Dumbledore. Il l'a obligée à attaquer quatre élèves et l'a forcée à le laisser commettre des crimes d'ordre sexuel sur sa personne.
— Sottises, éructa Mrs Mulciber.
— Professeur Dumbledore, intervint pour la première fois son mari d'une voix doucereuse. Je suggère que nous ne perdions pas de temps en interrogatoires futiles et que nous passions directement à la recherche de preuves concrètes. J'entends par là, bien sûr, un examen de la baguette de mon fils.
Lily écarquilla les yeux. Bien sûr... La baguette ! Il suffisait d'examiner sa baguette, et la vérité éclaterait au grand jour ! Elle étouffa toutefois très vite cet élan d'espoir devant le visage serein de Mulciber et de son père.
— Très bien, acquiesça Dumbledore. Mr Croupton, puis-je... ?
— Bien sûr, Dumbledore, bien sûr...
Dumbledore tendit la main. Mulciber lui confia sa baguette avec un sourire en coin. Dumbledore s'en empara avec délicatesse et pointa sa propre baguette sur celle de Mulciber.
— Priori incantatem...
Des images fantomatiques surgirent alors de la baguette de Mulciber, défilant les unes après les autres. Lily n'aurait su comment toutes les interpréter, mais Dumbledore, Croupton, Elias McKinnon et le couple Mulciber semblaient parfaitement savoir de quoi il retournait. Les images cessèrent de défiler au terme d'une bonne minute.
— Bien, je suppose que cela conclut cette entrevue, décida Mulciber Senior. Il est clair que mon fils n'a jamais lancé d'Imperium de sa vie, encore moins récemment...
— Je suppose... répondit Dumbledore d'un air pensif.
— Quoi ? explosa James en se levant d'un bond. Il est coupable ! Cette baguette n'est sûrement pas la sienne ! Il a dû piquer celle d'Avery ou de je ne sais qui...
— Je peux vous assurer, mon garçon, que cette baguette appartient bel et bien à mon fils, rétorqua Mulciber d'un ton froid. Devons-nous également faire venir Mr Ollivander pour le confirmer ?
— Cela ne sera pas nécessaire, Ebenezer, tempéra Croupton.
— Parfait. Nous en avons donc terminé. Au revoir, professeur Dumbledore.
Mulciber se leva et suivit ses parents hors du bureau, non sans jeter un sourire malveillant à James et aux autres. Croupton et Elias McKinnon quittèrent également la pièce après avoir salué Dumbledore.
Lily était dévastée.
— Ce n'est pas possible, dit-elle. J'étais tellement sûre que...
Soudain, son visage s'illumina et elle se leva comme un ressort.
— Attendez ! Professeur Dumbledore, je sais comment il a fait ! Il n'a pas emprunté une autre baguette aujourd'hui... Il en a volé une au début de l'année. C'était lui, juste après son altercation avec Grace ! Il savait qu'il risquait de se faire prendre, alors il a tout planifié ! Il a volé la baguette de ce petit Serpentard et s'en est servi contre Grace ! Il avait deux baguettes sur lui tout au long de l'année ! Il faut les rappeler, professeur !
— Miss Evans, la tempéra Dumbledore. Vous avez sans doute parfaitement raison. Cependant, si mes estimations sont exactes, je pense que retrouver cette baguette va s'avérer extrêmement difficile. À mon humble avis, elle se trouve déjà au fond du lac, brisée en deux. Mr Mulciber aura eu tout le temps de s'en débarrasser après avoir eu vent de ce qu'il s'était produit ce soir.
Lily se laissa tomber sur son fauteuil, encore plus abattue qu'auparavant.
— Il y a forcément un moyen de prouver qu'il est coupable ! s'insurgea James. La Legilimancie, le Véritaserum ! On peut fouiller dans ses souvenirs, les coller dans une Pensine et faire un tour dedans !
— Mr Potter, soupira Dumbledore d'un air las. Ces moyens dont vous parlez, quand ils ne sont pas faillibles, sont strictement encadrés par nos lois. Si la famille de Grace Fawley porte plainte, certains d'entre eux pourront être envisagés, mais le dernier mot revient au Magenmagot.
— Vous en faites partie ! lui rappela James. Vous le présidez !
— Je m'en souviens, Mr Potter. Croyez-le ou non, je ne suis pas encore assez sénile pour l'avoir oublié. Mais ma voix n'est pas la seule qui compte. Et il est inutile de cacher le fait que la famille Mulciber possède d'excellentes relations, y compris au sein du Magenmagot, comme vous avez pu le constater par vous-mêmes...
James se calma, un peu honteux à l'idée d'avoir pris Dumbledore pour un idiot.
— Alors on ne peut rien faire ? résuma Marlene.
— En ce qui concerne cette affaire... je ne pense pas, non.
Un silence morose accueillit cette réponse.
— Toutefois... cette affaire n'est qu'un exemple parmi des centaines d'autres de ce qui arrive quand quelqu'un fait usage de la magie noire contre une personne innocente, reprit Dumbledore.
Tous relevèrent la tête, intrigués.
— Vous avez tous ici présents prouvé tout au long de l'année à quel point vous êtes brillants et dévoués au service de causes justes. C'est pourquoi, si cela vous intéresse, je m'apprête à vous faire une proposition.
Plus personne ne bougeait, à présent.
— Vous quitterez très bientôt Poudlard. Il existe une infinité de causes justes à défendre dans ce vaste monde, en particulier en ces temps troublés. J'ai mis sur pied, il y a quelque temps, une organisation nommée l'Ordre du Phénix. Ses membres se destinent à combattre Voldemort et tous ceux qui aspirent aux mêmes idéaux que lui.
Un frisson parcourut son audience lorsqu'il mentionna Voldemort.
— Nous avons besoin de jeunes sorciers tels que vous. Courageux. Loyaux. Justes. Vous êtes, j'en suis persuadé, la génération qui changera le monde. Si rejoindre une telle organisation vous intéresse, n'hésitez pas à me le faire savoir. Prenez le temps de réfléchir. Je vous souhaite une bonne fin de soirée.
Ainsi congédiée, la bande se leva et quitta le bureau du directeur.
***
Le train émit un dernier sifflement. Lily soupira, le front contre la vitre. Elle quittait Poudlard pour la dernière fois. Elle n'y reviendrait jamais.
Dans le couloir, des rires d'élèves résonnaient, mais dans le compartiment où Lily, James, Sirius, Remus, Peter, Marlene et Mary avaient pris place, les mines étaient basses.
Grace avait été transférée à Ste Mangouste le lendemain de sa chute. Mulciber s'était pavané dans les couloirs avec des airs de roitelet jusqu'au dernier jour. Il leur avait fallu rassembler toute leur volonté pour qu'aucun d'entre eux ne lui saute dessus pour le réduire en charpie.
— Je ne vais pas faire partie des Catapultes, annonça soudain James.
— Quoi ? s'exclamèrent en chœur tous ses amis.
— Je suis riche. Je pense qu'il est temps de mettre cette richesse au service d'une noble cause. Je vais entrer dans l'Ordre du Phénix et m'y rendre utile à plein temps.
— Moi aussi, abonda Sirius. Je suis également riche – merci, oncle Alphard, d'être décédé l'année dernière en me laissant toute ta fortune parce que toi aussi, tu détestais notre famille. Et comme justement, je n'avais pas la moindre idée de ce que je voulais faire en quittant Poudlard, je crois que j'ai enfin trouvé ma vocation.
James et Sirius échangèrent un sourire complice.
— Eh bien, moi, je suis pauvre, mais je pense que je peux essayer de trouver un travail et de faire partie de l'Ordre aussi, ajouta Remus.
— T'en dis quoi, Peter ? fit James. Les Maraudeurs, édition Ordre du Phénix, ça te tente ?
— Bien sûr, balbutia Peter.
Mary lui jeta un regard suspicieux, mais resta silencieuse.
— Moi aussi, j'aimerais en être, admit Lily. Mais je vais quand même essayer de suivre la formation de Guérisseuse... j'espère simplement que je pourrai jongler avec les deux.
— On s'échangera nos astuces de gestion du temps, intervint Marlene. Parce que peu importe le temps que me prendra cette formation d'Auror, moi aussi, je compte bien participer.
Sirius la contempla avec un immense sourire. Mais Marlene ne le lui rendit pas. Il fronça les sourcils, mais James s'exclama alors :
— Toute la bande dans l'Ordre du Phénix ! Parfait !
Lily jeta un coup d'œil à Mary, qui restait anormalement silencieuse.
— Je vais faire un tour aux toilettes. Mary, tu m'accompagnes ?
Lorsque les deux filles se retrouvèrent seules à l'abri des regards, Lily demanda :
— Est-ce que ça va ?
— Je ne vous suivrai pas, déclara alors Mary sans ambages. Je ne ferai pas partie de l'Ordre.
— Oh...
— Je suis désolée, Lily... Dumbledore avait peut-être raison à votre sujet, mais pas au mien. Je ne suis pas courageuse. Je veux une vie normale, loin du danger. Loin des types comme Mulciber. Pitoyable, hein ? Je laisse tomber Remus, et maintenant je vous laisse tous tomber... Même Peter est plus courageux que moi... Tu parles d'une Gryffondor...
Elle s'interrompit. Lors d'une fraction de seconde, elle fut tentée de prévenir Lily au sujet de Peter. De lui dire qu'il n'était pas celui qu'il prétendait être. Qu'il n'était pas digne de confiance. Qu'il était opportuniste, mauvais, lâche... Mais comment pouvait-elle prétendre une chose pareille alors que c'était elle la lâche, à présent ?
— Tu as le droit de vouloir une vie normale, la rassura Lily.
— Ouais... peut-être...
— Allez, viens. On n'est pas obligés d'en parler tout de suite aux autres, si tu veux. Et peu importe que tu sois dans l'Ordre ou non, on restera toujours amies.
Mary serra Lily dans ses bras, les larmes aux yeux.
— Tu es la meilleure d'entre nous, Lily Evans. Tu le sais, ça ?
— N'exagère pas.
— Crois-moi. Je n'exagère pas le moins du monde.
Lorsqu'elles retournèrent dans leur compartiment, Lily s'installa sur les genoux de James et lui passa un bras autour du cou.
— Alors comme ça, tu es prêt à renoncer à ta carrière de joueur de Quidditch ?
— C'est-à-dire que... Je ne sais pas, ça me semble un peu futile, maintenant. Avec tout ce qu'il se passe dehors, je préfère faire quelque chose de vraiment utile contre les salauds comme Mulciber.
— Et c'est aussi pour ça que je t'aime, déclara Lily.
James sourit et l'embrassa.
Le trajet touchait presque à sa fin lorsque la porte du compartiment s'ouvrit sur Mulciber.
— Oups, mauvaise porte ! s'exclama-t-il de son air goguenard.
Il était évident qu'il l'avait fait exprès.
— Pas de rancune, hein, les gars ? Dommage que la petite Grace ne soit plus parmi nous, j'aurais bien voulu lui dire au revoir...
Ce qu'il se passa ensuite fut fulgurant.
Remus se leva et décrocha une droite spectaculaire à Mulciber, qui tomba à la renverse dans le couloir, le nez en sang. Mulciber s'épongea le visage d'un revers de manche avant de se remettre sur pieds avec un rire mauvais.
— Ne t'approche plus de mes amis, gronda Remus.
Quelque chose dans sa voix ou dans son regard dut faire son effet, car Mulciber opta finalement pour la retraite en leur jetant un dernier regard mauvais.
Remus claqua la porte du compartiment si fort derrière lui que la fenêtre trembla. Son regard croisa celui de Mary. Et à ce moment-là, elle sut. Elle sut qu'il n'avait pas fait ça que pour Grace.
Elle aurait voulu le remercier, se jeter dans ses bras, l'embrasser...
Mais elle n'en fit rien.
Remus se rassit, son calme presque retrouvé.
— Ça fait du bien, commenta-t-il.
James éclata de rire.
— Eh bah, mon pote ! Je pense qu'on peut dire que t'as réussi ton pari. Quelle droite légendaire ! Je n'aurais jamais soupçonné ça de ta part.
— Je confirme, fit Sirius.
Remus esquissa un faible sourire.
Le train entra finalement en gare. James et Lily s'adressèrent un long au revoir qui se passait de mots, et ce bien qu'ils avaient déjà convenu de se revoir quelques jours plus tard pour dîner chez les parents de Lily.
Marlene restait à l'écart du groupe, l'air morose. Sirius s'approcha d'elle.
— Est-ce que ça va ? demanda-t-il.
— Non, répondit-elle franchement. Je ne peux pas m'empêcher de penser à Grace... J'aurais dû m'apercevoir de ce qui lui arrivait. Mais à la place, je me suis complètement laissée distraire... Surtout par toi. Pour une relation qui n'avait aucun avenir.
— Je pensais que tu ne regretterais jamais ce qu'il s'était passé entre nous, fit remarquer Sirius en fronçant les sourcils.
— Je n'ai pas dit que je regrettais ça... c'est juste que... je regrette de ne pas avoir été là pour elle. Mais bon, peu importe. De toute façon, c'est fini, non ? Poudlard. Toi et moi...
— Pas forcément. Tu pensais qu'on ne se verrait jamais en dehors de Poudlard, mais si on fait tous les deux partie de l'Ordre...
— Qu'est-ce que ça change ? On ne pourra pas passer notre vie à se voir en catimini pour voler deux minutes de bonheur. Il vaut mieux en rester là, non ?
Un silence accueillit sa réplique.
— À bientôt, Sirius, déclara Marlene en se détournant.
Sirius resta immobile pendant deux secondes.
S'il ne disait rien, s'il ne faisait rien, s'il ne partageait pas enfin les pensées qui hantaient son esprit depuis leur nuit ensemble à Pré-au-Lard, il la perdrait.
Définitivement.
Sirius la rattrapa.
— Tu sais quoi ? Je crois que tu as peur.
— Hein ? fit Marlene en se retournant.
— Tu es complètement terrifiée, même. Terrifiée à l'idée d'avoir des sentiments pour moi, à l'idée que je puisse te laisser tomber. Et tu sais quoi ? Moi aussi, je suis terrifié. C'est la première fois que j'ai envie d'être avec quelqu'un. De vraiment être avec quelqu'un. Pas seulement pendant deux minutes au détour d'un couloir. Mais c'est fini, ça. Je suis prêt à assumer une vraie relation. À m'engager. Complètement. Avec toi.
Marlene le regarda avec, dans les yeux, cette peur dont il parlait.
— Tu es sûr ? murmura-t-elle.
Pour toute réponse, Sirius l'embrassa au beau milieu du quai. Leur baiser sembla durer une éternité. De nombreux élèves s'étaient mis à les fixer et à murmurer, mais ils n'en avaient cure. Lorsqu'ils se séparèrent, Marlene mit quelques secondes à se remettre de ses émotions. À comprendre qu'enfin, il était prêt.
— Tu as vraiment attendu notre tout dernier jour d'école pour t'afficher devant tout le monde avec moi ? Tu parles d'un engagement, plaisanta-t-elle.
Sirius éclata de rire et colla son front contre celui de Marlene. Puis il murmura :
— Plus de peur, d'accord ?
— Plus de peur, confirma Marlene.
***
Regulus jeta un coup d'œil par la fenêtre. Le quai était bondé d'élèves se disant au revoir et de parents heureux à l'idée de retrouver leur progéniture. Le garçon qui lui faisait face, quant à lui, n'était guère pressé de descendre du train.
— Ça va passer vite, le rassura Regulus. C'est l'affaire de deux petits mois.
Le garçon ne répondit pas, la mine sombre.
Regulus l'avait rencontré à la fin de l'année précédente. Il avait été surpris de découvrir ce garçon frêle aux cheveux couleur paille arborant le blason des Serdaigle dans la section de la Réserve consacrée aux sorts de magie noire. Clairement, le garçon avait eu l'air surpris de se faire surprendre, lui aussi. Il n'était de toute évidence pas assez âgé pour avoir le droit de se trouver là. Regulus lui-même, n'étant qu'en cinquième année à l'époque, n'avait pu arpenter ces rayons que grâce à la permission écrite de Slughorn. Ce vieux gâteux l'adorait à cause, en autres, de ses prouesses au Quidditch dans l'équipe de Serpentard et l'avait même admis dans son club idiot. Il ne lui refusait jamais rien. Au contraire, il encourageait sa « curiosité intellectuelle » et n'hésitait jamais à lui signer ces permissions pour l'accès à la Réserve. Quelle naïveté de sa part. Mais Regulus n'allait pas s'en plaindre.
— Dès la rentrée de septembre, on s'y remet, poursuivit-il. On a encore beaucoup de choses à apprendre pour se préparer.
— Toi, au moins, tu pourras continuer à apprendre avec les bouquins que tu as chez toi. Moi, si mon père me trouve avec un livre de magie noire, tu peux être sûr qu'il m'enverra lui-même à Azkaban.
— La bibliothèque familiale est plus limitée qu'on peut le croire, répondit Regulus. Mais tu as raison, je reste mieux loti que toi.
Regulus et le garçon aux cheveux couleur paille avaient fait connaissance dans la Réserve ce jour-là. Ils s'étaient trouvé beaucoup plus de points communs qu'ils ne l'auraient imaginé. Lorsque Bellatrix avait emmené son jeune cousin Regulus rencontrer le Seigneur des Ténèbres, l'été suivant, le Lord avait vu quelque chose en lui. Du moins, Regulus l'espérait. Sinon, pourquoi lui aurait-il donné la Marque et avec elle, la mission de faire du recrutement en amont à Poudlard ? Regulus avait été ravi de lui apprendre qu'il avait déjà quelqu'un en tête. Et lorsque le Seigneur des Ténèbres avait appris le nom de son futur apprenti, il avait éclaté de rire. Un rire froid et terrifiant. Mais il avait félicité Regulus. Cette recrue, avait-il dit, pourrait leur être très utile à l'avenir... Regulus aurait pour mission de le former, de le préparer en secret.
Regulus observa son compagnon. Celui-ci avait encore deux ans à tirer à Poudlard, bien sûr. Et Regulus, qui avait un an de plus que lui, quitterait l'école l'année prochaine. Mais cela suffirait largement pour lui apprendre tout ce dont il avait besoin en matière de magie noire.
Le garçon aux cheveux de paille avait du potentiel. Un potentiel sublimé par la haine pure qu'il éprouvait contre son père.
Oui.
Bartemius Croupton Junior ferait décidément une excellente recrue.
https://youtu.be/C-WSkiJgqmY
Et voilà, nous sommes à la fin de cette fanfic ! La suite, intitulée Les Chroniques des Maraudeurs : La voie du phénix, est disponible !
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