Chapitre 18-1: Plan de fuite
Quand Nosfero ordonna à Brore de se cacher il se planqua tout en gardant un oeil. Il fut aux premières loges pour admirer la puissante déflagration flamboyante qui avait mis en déroute les miliciens, qui bloquaient le passage. Il assista en partie au combat opposant l'hybride aux assassins du Crépuscule. Et, voyant la disparition de l'intérêt que ces hommes avaient pour sa vie, il décida de faire ce que lui avait dit Nosfero. Il s'enfonça dans les ruelles, avec pour objectif de rejoindre la porte du loup endormi, afin de prévenir le groupe du rude combat qui faisait rage. Ne présageant aucunement de ces piètres capacités, il savait très bien qu'il serait un poids. Et que donc, la seule chose utile qu'il pouvait faire serait de guider le reste du groupe, pour lui venir en aide. Est-ce que Nosfero arriverait à tenir jusqu'à là ?
Il longea les ruelles adjacentes à la grande rue qui donnait sur le carrefour, devant l'entrée. Des soldats étaient mobilisés et se dirigeaient à grands pas vers le théâtre du combat. Pressés par les affrontement, les asholiens l'ignorèrent. Fuyant le lieu du conflit, ils devaient penser que Brore était un simple civil s'échappant. Ça l'arrangeait, car il pouvait se concentrer pleinement sur la mission qu'il s'était donnée et sans être inquiété. D'autant que, des relents de douleurs le submergeait. Il ne se voyait pas être en état de tenir tête à une troupe de soldats entraînés.
Très rapidement il arriva au carrefour, et la porte était close. Une garnison de quatre hommes veillait à la sécurité de la place forte. Dans sa trop grande vaillance, Brore s'était imaginé qu'il trouverait la place déserte et pourrait ouvrir les portes de la ville. Mais il se rendit compte que cette pensée était en faite bien vaine. Personne ne laisse les portes de la ville inoccupée, et encore moins quand des événements se déroulent. Son naïf parfait plan tombant à l'eau. Comment prévenir le groupe ? Comment détourner l'attention des gardes ? Il savait qu'il n'était pas un assez bon combattant pour déjà affronter un ennemi, alors quatre. Jusqu'à lors il n'avait eu que de la chance, un ennemi le sous-estimant, ou un protecteur. Seul il devait trouver une manière pour passer, et mieux, ouvrir la porte. Il était malin, et une once de confiance en sa force commençait à pointer. Il ne devait pas se décourager. À chaque problème sa solution.
Il resta en retrait et observa les quatre guerriers qui surveillaient le mur, afin de mettre en place une stratégie. De l'intérieur, la porte du loup endormi, ressemblait à un gigantesque mûr de métal, composé de barreau bien enfoncé dans le sol, tenu par des murs porteurs qui continuait en deux petites tourelles. Ces postes de gardes, étaient chacun occupé par deux archers. Les deux derniers combattants étaient au sol, assis autour d'une table à dilapider leurs temps avec des paries autour d'un jeu de dès. Brore, s'étonna de les voir aussi peut inquiéter par ce qui se déroulait un peu plus loin. Comme si leur jeu semblait avoir plus d'importance que leurs alliés tombant au combat. L'un d'eux, le chef, était habillé avec des épaulettes plus larges et imposantes que celle de son camarade.
Ce dernier lança, une première fois cinq dès. Les chiffres 2,4,4,5 et 6 sortirent. Il garda les deux 4 et le 6 et relança le deux et le cinq, une première fois. Brore n'eut pas le temps de voir ce qu'il était tombé la seconde fois. Le chef relança une troisième fois, un 3 et 4.
- Aahah un brelan de quatre. Tu mises ?
- La chance va tourner pour moi !
Le subalterne posa quatre pièces d'argent. Une grosse somme, compris Brore, que peu de personnes pouvaient se permettre de mettre dans un simple parie. Les observant encore, il remarqua que derrière eux deux se trouvait une salle fermé, protégé par un verrou et des grilles. Il comprit que c'était dans cette salle que se trouvait le mécanisme permettant d'ouvrir la porte. Mais il devait avoir en main la clef. Soudain, une idée lui vient. Au même moment le sous-fifre hurla à la mort, il venait de perdre sa mise.
- Bordel par tous les dieux maudits du sud, cette saloperie de 5 me manquait pour faire ma suite.
- T'as trop était gourmand, peste du fou fieffé ! Et voilà je te bas 21 à 13. T'aurais gardé tes six tu m'aurais eu, mais la bleusaille et malingre en esprit.
- J'aurais eu une putain de suite à 30 points, je relance !
- Tu tiens tant que ça à me donner ton salaire?
- Excusez-moi, lança Brore.
Les deux gardes se retournèrent main sur leurs armes.
- Oh ptio, tu fais quoi dehors. C'est dangereux !
- Je sais, c'est pour ça que je veux partir d'ici
- Tu veux partir ? T'as les jetons ?
- Censément, noble gardien. Puis-je vous demander de m'ouvrir la porte principale afin de quitter la ville ?
- Jamais de la vie, je me ferais castrer si je faisais ça...
- J'ai de l'argent !
- Ah combien ?
Brore sortit sa dague. Elle lui avait été offerte par son grand frère, après qu'il en ait obtenu une de manufacture plus riche. Cette arme devait valoir douze pièces d'or chez le moins enclin des marchands.
- Tu me la donnerais en échange de ta liberté, ça me va !
- Nan
Brore savait que plus que partir, il devait laisser la porte ouverte pour que le groupe puisse arriver. Il devait gagner du temps et essayer au mieux de divertir les soldats et récupérer la clef.
- Comment ça nan
- Je veux jouer avec vous. Si je gagne, vous me laisserez partir sans rien vous donner.
- T'es pas gonflé, gamin. Je pourrais te faire disparaître et garder ta jolie lame pour moi.
- Vous pourriez, mais vous risquez de vous blesser en essayant. Alors que si vous me battez à la régulière vous ne perdrez rien et gagnerez tout.
- Tu sais pas à qui tu t'adresses... lança le subalterne.
- Skang ta langue ! On va pas tuer un gosse, d'autant qu'on peut s'en passer, déjà que les asholiens nous détestent. Il nous donne son arme si il perd. C'est plus honorable que de frapper à mort un gamin. On est pas des voleurs, mais les gardes de cette putain de ville.
Il finit sa messe basse et déclara à Brore.
- Bon allez approche, sale mioche que je récupère mon arme.
Brore s'installa à la table.
- Tu connais les règles ?
- Heu nan, mentit-t-il pour paraître moins dangereux.
- Bon, il sourit en jugeant que ce serait encore plus facile que de vaincre Skang et plus rentable, on va t'expliquer rapidement. Vu qu'on est trois, on va faire trois manches. Chaque fois que c'est notre tour, on lance cinq dès. On peut en garder autant qu'on veut et relancer les autres. L'objectif est de gagner le plus de points. Si tu n'as pas de figure, le totale de tes points est la somme des valeurs de tes dès. Si tu as un brelan, c'est-à-dire, deux fois le même dès et trois fois un autre, tu gagnes d'offices 25 points. Si tu as une suite de quatre dès, tu gagnes 30 points, et une suite de cinq dès, 40 points. Et si tu as cinq fois le même dès tu gagnes 50 points. S'il y a une égalité, celui qui a eu la figure la plus haute l'emporte. Celui qui a eu le moins de points à la manche précédente commence la suivante. à toi l'honneur gamin !
Brore lança les cinq dès. Sorti, 4,5,1,6,3. Il garda le 4,5,6 et relança le 1 et 3. Un 2 et 3 tombèrent. Il avait donc une grande suite formée de 2,3,4,5,6 qui lui octroyait 40 points. La surprise palpable dessinait les traits des deux miliciens. À ceci le jeune messager tempera par: " La chance du débutant".
En réalité, Brore maîtrisait le terrain. Il connaissait une version plus complexe du jeu. Depuis tout jeune les jeux d'argent étaient un de ses passe-temps favoris, qui sont ultimement basés sur des calculs de probabilité -notion étrangère pour ces pigeons-. Il imputa cette version simplifiée aux limites de comptage des deux gardes qui ne devait pas excéder les cent ou deux-cents (jeux à deux sous pour deux neurones) et au fait qu'ils voulaient très probablement se plumer rapidement. Parfait, sot oiseau se fera prendre deux fois dans le même piège, se dit-il.
- À mon tour, lança Skang.
Il garda ses trois 6 et relança 2 et 1. Après deux jets infructueux il garda qu'un 5 et un 2. Pour un total de 25 points. C'était au tour du chef. Il ne garda rien de son premier jet et relança. Cette fois-ci, il garda ses deux 1 et un 5. Au dernier coup il récupéra un 5 et 1. Il avait obtenu un full, trois 1 et deux 5, ce qui lui faisait avoir également 25 points. Le chef sortait second de cette manche, gagnant la place avec sa figure haute. Les comptes étaient donc à 40 pour Brore, 25 avec un full pour le chef et 25 pour Skang. C'était donc à Skang de relancer pour la deuxième manche.
Skang sortit de cette manche avec 2,1 et trois 5 ce qui augmenta son score à 43. Le chef lança. Il garda deux 5 et relança le reste. Il obtint un nouveau 5 et relança une dernière fois. Un 5 et 6 sortirent. Culminant à 51 points. Brore lança à son tour. Il sortit avec 6, 4, 2 et deux 5 . Il avait déjà un total de 22 points, ce qui le laissait toujours en tête pour cette manche. Il préféra relancer pour creuser l'écart et jeta son 2. Pas de bol ! Il retrouva 2. Au dernier coup, il doubla son dès en sortant un 4. Il avait sur cette manche gagné un total de 24 points, ce qui ramenait son compte à 64. En jouant la sécurité, il devrait pouvoir allègrement gagner.
Les deux gardent commencèrent à virer au rouge. Regrettant amèrement d'avoir accepté de jouer. Même si la partie se déroulé à trois, le chef comprit que son subalterne ne servait à rien. Au mieux, il participait au coup de pression virile, à impressionner ce jeune pourceau à peine arraché à la mamelle. La partie se jouait à un contre un. Perdre face à ce puceau en-fieffé dont la chance coulait dans les doigts était intolérable. S'il ne gagnait pas à la loyale, cette histoire se finirait dans un faussé, à coup de nuque tranché. Il fallait bien ça pour laver la honte de perdre contre le premier venu, après douze ans d'expérience.
- Bon allez c'est à mon tour, lança Skang. Putain de 5 et 6, à un dès je faisais une petite suite !
Il garda son 1,2,3 et relança les autres dès. A nouveau 5 et 6, il relança. Un 4 et un 6 sortirent. Il avait une petite suite 1,2,3,4 avec un 6, ce qui lui faisait 36 points, pour un total de 79.
- J'ai eu de la veine, enfin !
Le chef bloqua, dominé par un perdreau et une musaraigne au cerveau malade. C'était impossible, il devait être maudit par les anciens dieux, ou quelque chose qui n'était pas de ce monde. Tout avait été joué à la chance, et il décida d'y placer ces derniers lancés.
Il lança. Deux 6, deux 4 et un 1. Il était bien parti pour un full, ce qui lui assurerait un total de 81 points. Insuffisant. Il devait lui mettre 20 points d'avance. Dans son désir de gagner haut la main, il relança ses cinq dès. Quatre 5 et un 2 sortirent. À cet instant, deux sentiments se mêlés en une douce-amère frustration. Il aurait du garder 81 et ne s'imaginait pas pouvoir récupérer mieux. Certes, il lui manquait qu'un seul 5, pour rafler 50 points d'un coup, mais les dès son capricieux en cette fin de partie. Il lança son ultime dès. 1.
- Nan des Dieux, je me fais battre par un gosse et ce débile de Skang.
- Je t'avais dit que la roue allait tourner pour moi, mes pertes envolées !
Le subalterne ne cacha pas sa joie.
Le chef quitta la table et sorti un trousseau de clefs pour en détacher une, il posa les autres sur la table et se dirigea vers un baril cadenassé. Il alla cuver son échec dans la bière, malgré l'appréhension des archers qui en postes ne pouvaient boire.
Il fallait 16 points à Brore pour gagner. Rien d'impossible. Trois 6, trois 5, ou trois 4 le mettrait déjà suffisamment à l'abri. Il récupéra les dès et lança, pour son ultime manche. 2,3 et trois 1. Ce premier jet ne le convainquit pas. Il préféra tout relancer. À ce stade de la partie, il serait hasardeux de tenter le full. Les cinq dès repartirent. Deux 5, deux 1 et un 3 sortirent, ce qui faisait à peine 15, pile une égalité. S'il gardait tous ses dès, cela se jouerait à un ultime lancé de dès entre les deux concurrents, le hasard, le pile ou face, la chance sur deux étant Roi. Ne pas relancer serait s'en remettre aux Dieux maudits. Par sécurité il garda ses deux 5 et son 3, ce qui lui assurait déjà 13 points. Un 3 suffirait. Il était confiant et il était quasiment certain qu'il allait gagner. Le chef avec sa chope observa les jeux, il tempêta quand il vit les résultats
- Par le dieu des enfers, Skang !
- Vous voulez pas qu'on le trucide, j'ai pas envie de perdre ?
- L'envie me prend bien là. Si on apprend qu'on à ouvert la porte avec la pagaille en ville et à cette heure, on va se faire fouetter dix fois chacun, vingt fois pour toi peut-être.
- Mais je vous pensais loyale et sincère, essaya Brore
- On est des mercenaires, mioche. On est loyale quand les bourses s'alourdissent, pas quand on nous les vide.
- Je peux m'occuper de lui chef. Mais on est d'accord que je vous ai battu et que sa lame est à moi ?
Le chef tiqua et grogna. Brore commença à paniquer.
- Tu me donneras une pièce d'or, et tu fermeras ta gueule sur cette affaire. Tu ne m'as jamais battu !
- Bien-chef !
- Alerte qui va là !
Hurla un des archers postés sur une tourelle. Le chef s'approcha de lui.
- Oh Karan, ferme là un peu ! Tu veux pas nous foutre dans la merde.
Skang, dégaina son arme et alla pour frapper Brore. En voyant l'agitation à la porte, il se douta que les élémentalistes étaient arrivés, il lui fallait gagner du temps, un tout petit peu de temps. La brute portant bien son nom, devait pouvoir défoncer cette porte en jouissant des forces de la terre.
- Allez, mon gamin, donne-moi ton arme et je te laisse partir.
- Attendez s'il vous plaît, dit-il en se reculant de la table pris de peur. La partie n'est pas finie, il me reste un coup à jouer, même si j'ai de grandes chances de gagner, il vous reste une petite chance. Vous n'aimeriez pas gagner avec honneur ?
- ça change quoi ? Si je perds, j'aurais qu'à te buter et récupérer ta dague.
Il se leva avec son épée dégainée et s'approcha, menaçant, sur Brore.
- Oui, mais n'oubliez pas notre pari. Si je perds, je vous laisse mon arme et je pars. Et personne n'aura rien à en dire. Et même si votre chef veut étouffer l'affaire, vous aurez une victoire. Il devra vous respecter pour ça. Et vu que là vous voulez me tuer, j'espère de tout cœur que je vais perdre.
- T'es pas con gamin ! Okay je te laisse lancer. Si je gagnes tu vis !
- Promesse ?
- T'veux pas que je me taillade un bras, non plus ? Lance !
- C'est très généreux Monseigneur le grand mercenaire. Vous méritez cette victoire.....
Il voulut allongé encore la phrase, mais les yeux cruels et le regard limité, sans once de raison, lui intima à s'activer. Ne se contentant que d'un faux sourire de gratitude. Dans une dernière pensée, peut-être sa toute dernière, il s'étonna de l'habilité dans la tromperie dont il avait fait preuve. Espérant que le groupe ne soit pas trop long à réagir, il attrapa les cinq dès -pour augmenter ses chances d'échecs- et les serra en priant pour perdre. Son adversaire s'assit, attendant avec son épée sur l'épaule et l'autre main qui nerveusement taper la table. Brore élança son bras, desserra sa main, ouvrit ses doigts...
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