Chapitre 10 - À couteaux tirés
Le lendemain, les élèves de Gryffondor – Ginny et ses amis compris – attendirent que Harry descende de son dortoir avec son balai pour l'escorter dans les couloirs comme s'il s'agissait d'un roi sur le point de les mener sur le champ de bataille. Lorsqu'il entra dans la Grande Salle avec sa suite, tous les regards se tournèrent vers lui. Des murmures s'élevèrent à la vue du balai. Les Serpentard semblaient avoir reçu un coup de massue. Olivier Dubois exposa le balai au milieu de la table des Gryffondor et les élèves de Poufsouffle et Serdaigle s'approchèrent pour le contempler. Cédric Diggory félicita Harry pour avoir si avantageusement remplacé son Nimbus 2000 et Pénélope Deauclaire demanda la permission de le prendre dans ses mains.
— Attention, Pénélope, pas de sabotage ! plaisanta Percy. Pénélope et moi, on a fait un pari. Dix Gallions d'or sur le résultat du match !
Pénélope reposa le balai, remercia Harry et retourna à la table des Serdaigle. Percy en profita alors pour chuchoter :
— Harry, débrouille-toi pour gagner. Je n'ai pas dix Gallions d'or. J'arrive, j'arrive, Penny !
Il courut la rejoindre à sa table.
— Tu es sûr que tu sauras piloter ce balai, Potter ? intervint alors une voix trainante.
Malefoy s'était approché, flanqué de Crabbe et Goyle.
— Je pense que oui, répondit Harry d'un ton tranquille.
— Il a beaucoup d'accessoires, n'est-ce pas ? Dommage qu'il n'ait pas de parachute... au cas où un Détraqueur passerait par-là...
Crabbe et Goyle ricanèrent.
— Dommage que tu ne puisses pas te greffer un troisième bras, répliqua Harry. Il pourrait peut-être attraper le Vif d'Or à ta place.
Ginny éclata de rire en même temps que le reste des Gryffondor. Malefoy plissa les yeux puis se détourna et alla rejoindre sa table. L'équipe de Serpentard se rassembla aussitôt autour de lui comme un essaim d'abeilles, sans doute pour s'assurer qu'il s'agissait bel et bien d'un véritable Éclair de Feu.
Un peu avant onze heures, Ginny prit la direction du stade en compagnie de Sally, Lucy et Neil. Le temps était au beau fixe, et Ginny sentait l'excitation la gagner. Une météo avantageuse, un nouveau balai ultra performant... Ce match était plein de promesses.
Les joueurs de Gryffondor et de Serdaigle entrèrent sur le terrain. Les capitaines se serrèrent la main, puis les deux équipes décollèrent.
— Wouah ! s'exclama Sally.
La rapidité de l'Éclair de Feu en avait soufflé plus d'un. Ginny elle-même était sciée.
— Ça y est, c'est parti ! commenta Lee Jordan. Le clou de ce match c'est bien sûr l'Éclair de Feu, monté par Harry Potter de l'équipe de Gryffondor. Si l'on en croit Balai-Magazine, l'Éclair de Feu a été choisi cette année par les équipes nationales qui participeront au championnat du monde...
— Jordan, vous voudriez bien commenter ce qu'il se passe sur le terrain ? l'interrompit McGonagall.
— Vous avez raison, professeur... Je donnais simplement les dernières nouvelles. Signalons au passage que l'Éclair de Feu est équipé d'un frein automatique intégré...
— Jordan !
— Très bien, très bien. L'équipe de Gryffondor est à l'attaque. Katie Bell se rapproche des buts adverses...
Ginny se désintéressa brièvement de Katie pour observer Harry. Cho Chang, l'Attrapeuse de Serdaigle, lui collait au train, lui coupant sans cesse sa trajectoire. Elle était plutôt maligne.
Puis tout à coup, Harry libéra toute la puissance de son balai, et elle fut incapable de le suivre. Katie marqua le premier but. Harry amorça alors une descente en piqué.
— Il a déjà repéré le Vif d'Or ! s'écria Ginny.
Cho fonça sur Harry, mais ce fut un Cognard envoyé par un des batteurs de Serdaigle qui, cette fois, lui coupa sa trajectoire. Harry vira en catastrophe pour l'éviter. Un « Oooooooh » de déception balaya les gradins des Gryffondor tandis que les Serdaigle acclamaient leur batteur.
Pendant ce temps, Gryffondor avait marqué d'autres buts.
— Gryffondor mène par quatre-vingts points à zéro et regardez un peu les performances de l'Éclair de Feu ! Potter arrive à lui faire faire ce qu'il veut, maintenant. Vous avez vu comment il prend ses virages ? Le Comète de Chang ne fait pas le poids...
— JORDAN ! VOUS AVEZ REÇU DE L'ARGENT POUR FAIRE LA PUBLICITÉ DE L'ÉCLAIR DE FEU OU QUOI ? CONCENTREZ-VOUS SUR LE COMMENTAIRE DU MATCH !
L'équipe de Serdaigle marqua trois buts. Puis Harry repéra à nouveau le Vif d'Or, et Cho se mit derechef en travers de son chemin. Harry fit une embardée pour éviter la collision. Ginny ne comprenait pas pourquoi il ne s'était tout simplement pas contenté de lui foncer dessus, quitte à la faire tomber de son balai. Il n'aurait pas hésité une seule seconde s'il avait eu Malefoy en face...
Cho continua de calquer sa trajectoire sur la sienne, ayant visiblement décidé que c'était plus simple que chercher le Vif d'Or elle-même. Mais lorsque Harry plongea à nouveau en piqué et qu'elle tenta de le suivre, Ginny comprit son manège une seconde avant qu'il révèle sa feinte et remonte en chandelle à la dernière seconde. Cho redressa son balai pour ne pas s'écraser, mais ne put regagner rapidement la même altitude que lui. Soudain, elle montra quelque chose du doigt. Ginny tourna la tête en direction de ce qu'elle désignait. Son cœur rata un battement.
— Des Détraqueurs ! s'exclama Lucy avec effarement.
Ginny anticipa la sensation de froid et les mauvais souvenirs... Mais rien ne se passa.
Harry sortit alors sa baguette et la pointa vers les silhouettes. Il cria quelque chose qu'elle ne comprit pas, et une forme argentée similaire à celle qui était sortie de la baguette de Lupin dans le train en émergea. Les Détraqueurs tombèrent alors les uns sur les autres, révélant... des jambes humaines.
— Je ne crois pas que ce soit des Détraqueurs... dit Sally, sourcils froncés.
Harry, quant à lui, venait à nouveau de donner toute la puissante de son balai. Il tendit la main et la referma sur le Vif d'Or.
Ginny laissa éclater sa joie en même temps que les autres Gryffondor. Elle se joignit aux supporters qui descendirent les gradins pour aller féliciter Harry. Ron lui saisit le bras pour le brandir en l'air.
— Bravo ! Bravo !
— Magnifique, Harry ! lança Percy. Je vais gagner dix Gallions d'or ! Excuse-moi, il faut que j'aille voir Pénélope !
— Tu as été extraordinaire, Harry ! s'écria Seamus Finnigan.
— Ça, c'était quelque chose ! rugit Hagrid.
Ginny chercha Hermione des yeux, mais celle-ci ne se trouvait pas parmi eux. En regardant en arrière, vers les gradins, elle vit une touffe de cheveux bruns s'éclipser en direction du château.
Lorsqu'elle se tourna à nouveau vers Harry, Lupin se trouvait à ses côtés.
— Les Détraqueurs ne m'ont rien fait ! s'exclama-t-il. Je n'ai rien ressenti !
— C'est parce que... ce n'étaient pas des Détraqueurs. Venez voir...
Lupin emmena Harry jusqu'au bord du terrain où Malefoy, Crabbe, Goyle et Marcus Flint étaient empêtrés les uns sur les autres. Une McGonagall hors d'elle se tenait devant eux.
— Un stratagème lamentable ! Une tentative lâche et abjecte pour déstabiliser l'Attrapeur de Gryffondor ! Vous aurez tous une retenue ! Et j'enlève cinquante points à Serpentard ! Soyez certains que je parlerai de cette histoire au professeur Dumbledore ! Ah, justement, le voilà !
— Viens, Harry ! héla George. Il y a une fête dans la salle commune de Gryffondor !
— J'arrive !
Ron eut du mal à se détacher du spectacle qu'offrait les quatre Serpentard qui tentaient toujours de se relever. Hilare, il se tint les côtes encore un bon moment alors que les Gryffondor prenaient la direction du château.
L'atmosphère était à la liesse. Ginny se joignit aux chants victorieux qui résonnèrent pendant tout le trajet jusqu'à la salle commune, où l'on mit de la musique et où l'on refit le match. Les jumeaux disparurent deux heures et revinrent les bras chargés de bouteilles de Bièraubeurre, de soda à la citrouille et de sacs de friandises.
La fête dura toute l'après-midi et se prolongea dans la soirée. Seule dans un coin, Hermione s'entêtait à étudier. Harry s'approcha d'elle. Ginny n'entendit pas leur conversation, mais elle semblait cordiale. Puis Ron lança d'une voix forte :
— Si Croûtard n'avait pas été dévoré, lui aussi aurait bien aimé manger quelques bonbons...
Hermione fondit alors en larmes, ferma son livre et monta dans le dortoir des filles.
Ginny hésita un instant, puis s'excusa auprès de ses amis pour monter discrètement à sa suite. Elle entendit des sanglots étouffés.
— Hermione ?
Les sanglots s'interrompirent. Ginny poussa la porte.
— Est-ce que ça va ?
Elle se maudit d'avoir posé cette question bête. Bien sûr, que ça n'allait pas ! Elle se sentait d'ailleurs un peu coupable : elle avait plus ou moins sciemment pris le parti de Ron dans cette histoire et n'avait guère parlé à Hermione ces derniers jours elle non plus. Roulée en boule sur son lit, cette dernière se redressa et s'essuya les yeux.
— Ce n'est rien. Je suis juste un peu fatiguée.
Ginny hésita, puis déclara :
— Je sais que ce n'est pas facile, mais je suis sûre que Ron te pardonnerait si...
— Je ne peux pas m'excuser, l'interrompit Hermione d'un ton brusque.
— Pourquoi ?
Ginny avait l'impression de marcher sur des œufs. Elle ne voulait pas qu'Hermione prenne mal ses réflexions. Mais celle-ci avait simplement l'air au bout du rouleau.
— Je ne peux pas, c'est tout. C'est trop tard. Ron a raison. Bien sûr qu'il a raison. Et Harry aussi... Pattenrond a mangé Croûtard, c'est la seule explication logique... Mais c'est un chat, ce n'est pas de sa faute ! Et puis je ne voulais pas admettre que j'avais tort, et maintenant, c'est trop tard.
— Il n'est jamais trop tard pour s'excuser...
— Je n'arrive même pas à le regarder en face. Et puis, il a été si... mesquin. Je n'ai pas le temps pour tout ça, de toute façon. Je vais aller me coucher. Je n'ai pas pu finir le livre que je dois lire pour demain, et je suis épuisée. Je vais me lever tôt pour le terminer demain matin avant les cours. Bonne nuit, Ginny. C'est gentil de ta part d'être venue me voir...
Comprenant qu'elle avait été congédiée, Ginny lui souhaita bonne nuit à son tour et redescendit dans la salle commune, où la fête battait toujours son plein.
Elle avait un peu mal au cœur de voir Hermione s'isoler ainsi. Elle avait fait exactement la même chose l'année précédente, et elle ne savait que trop bien à quel point la solitude devait lui peser. Mais elle n'osait pas insister, et elle avait peur d'empirer la situation en intervenant auprès de Ron.
La fête prit fin à une heure du matin, lorsqu'une McGonagall en robe de chambre intervint pour exiger qu'ils aillent tous au lit.
***
Un cri perçant réveilla Ginny en sursaut.
— Keskispasse ? marmonna Sally en se redressant.
Lucy et Aileen s'étaient réveillées, elle aussi.
— Quelqu'un a crié ? demanda Lucy.
— On ferait mieux d'aller voir...
La première, Sally sauta hors du lit et enfila sa robe de chambre par-dessus son pyjama. Ginny et Lucy l'imitèrent. Elles descendirent dans la salle commune, où se trouvaient Ron, Harry, Dean, Seamus et Neville.
— Tu es vraiment sûr que tu n'as pas rêvé, Ron ? demanda Dean.
— Je te dis que je l'ai vu !
D'autres élèves affluèrent.
— Qu'est-ce que c'est que ce vacarme ? demanda un garçon plus âgé.
— McGonagall nous a dit d'aller nous coucher ! ajouta une fille.
— Formidable ! lança Fred. On continue la fête ?
— Tout le monde dans les dortoirs ! s'écria Percy.
— Percy ! Sirius Black ! Dans le dortoir ! Avec un couteau ! Il m'a réveillé !
Tout le monde contempla Ron comme s'il déraillait. Percy rompit le silence.
— Absurde ! Tu as trop mangé, Ron... C'était un cauchemar, tout simplement...
— Je te dis que non !
— Bon, allez, maintenant, ça suffit !
McGonagall venait de faire son retour.
— Je suis enchantée que Gryffondor ait gagné le match, mais tout cela devient ridicule ! Percy, j'attendais mieux de votre part !
— Je n'ai absolument pas autorisé ce qui vient de se passer, professeur ! J'étais en train de leur dire de remonter se coucher ! Mon frère Ron a fait un cauchemar...
— CE N'ÉTAIT PAS UN CAUCHEMAR ! PROFESSEUR, JE ME SUIS RÉVEILLÉ, ET SIRIUS BLACK SE TENAIT DEVANT MOI, UN COUTEAU À LA MAIN !
McGonagall le regarda sans ciller.
— Ne soyez pas ridicule, Weasley, comment aurait-il pu franchir le portrait ?
— C'est à lui qu'il faut le demander ! répliqua Ron en pointant du doigt le portrait du chevalier du Catogan. Demandez-lui s'il a vu...
McGonagall lança un dernier regard soupçonneux à Ron avant de sortir dans le couloir pour s'adresser au chevalier. Tout le monde retint son souffle.
— Chevalier du Catogan, avez-vous laissé entrer un homme dans la tour de Gryffondor il y a quelques instants ?
— Sans aucun doute, gente dame.
Il y eut un silence stupéfait ponctué de hoquets de surprise.
— Vous... vous avez fait ça ? Mais... le mot de passe !
— Il les avait tous ! Tous ceux de la semaine ! Écrits sur un morceau de papier. Il me les a lus les uns après les autres !
Le professeur McGonagall rentra dans la salle commune, frémissante de colère.
— Qui, qui a été assez stupide pour noter tous les mots de passe de la semaine et les laisser traîner n'importe où ?
Un couinement apeuré creva le silence. Puis Neville leva une main tremblante.
J'espère que ce chapitre vous a plu ! Personnellement, j'aime beaucoup la petite scène entre Ginny et Hermione...
On se retrouve la semaine prochaine pour l'avant-dernier chapitre de ce tome, qui sera aussi le plus long ! Il y aura (encore) du Quidditch, et du rififi entre Gryffondor et Serpentard !
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