Chapitre 2 - Altercation au Chemin de Traverse
À son grand désarroi, Ginny continua d'être sujette à d'étranges réactions en présence de Harry. Elle semblait toujours aussi surprise de le voir entrer dans une pièce une semaine après son arrivée, au point d'en faire tomber toutes sortes d'objets ou de faire preuve d'une maladresse qui lui était parfaitement nouvelle. Elle se montrait également beaucoup plus mutique que d'ordinaire.
Le jour de son anniversaire, le onze août, Ginny descendit la première dans la cuisine, où elle retrouva ses parents.
— Joyeux anniversaire, ma chérie ! s'exclama sa mère en la serrant dans ses bras. Onze ans, ça y est ! Regarde ce qui vient justement d'arriver !
Sa mère lui tendit une lettre cachetée du sceau de Poudlard. Ginny s'en empara fébrilement et lut avec avidité l'adresse rédigée en encre verte sur le parchemin jauni :
Ms G. Weasley
Le Terrier
Loutry Ste Chaspoule
Devon
Elle ne put s'empêcher de ressentir un véritable soulagement. Elle savait qu'elle avait des pouvoirs magiques depuis longtemps, mais voir son nom sur l'enveloppe la rassurait. Elle allait à Poudlard. Pour de vrai. Enfin.
— Les lettres d'admission arrivent particulièrement tard, cette année, fit remarquer Arthur.
Ginny ouvrit l'enveloppe et lut la lettre qu'elle contenait.
COLLÈGE POUDLARD, ÉCOLE DE SORCELLERIE
Directeur : Albus Dumbledore
Commandeur du Grand-Ordre de Merlin
Docteur ès Sorcellerie, Enchanteur-en-chef, Manitou suprême de la Confédération internationale des Mages et Sorciers
Chère Ms Weasley,
Nous avons le plaisir de vous informer que vous bénéficiez d'ores et déjà d'une inscription au collège Poudlard. Vous trouverez ci-joint la liste des ouvrages et équipements nécessaires au bon déroulement de votre scolarité.
La rentrée étant fixée au 1er septembre, nous attendons votre hibou le 15 août au plus tard.
Veuillez croire, chère Ms Weasley, en l'expression de nos sentiments distingués.
Minerva McGonagall
Directrice-adjointe
Ginny consulta ensuite la liste des fournitures. La liste des livres attira particulièrement son attention :
Le Livre des sorts et enchantements (niveau 1), de Miranda Fauconnette
Histoire de la magie, de Bathilda Tourdesac
Magie théorique, de Adalbert Lasornette
Manuel de métamorphose à l'usage des débutants, de Emeric G. Changé
Mille herbes et champignons magiques, de Phyllida Augirolle
Potions magiques, de Arsenius Beaulitron
Vie et habitats des animaux fantastiques, de Norbert Dragonneau
Forces obscures : comment s'en protéger, de Quentin Jentremble
Flâneries avec le Spectre de la mort, par Gilderoy Lockhart
Vadrouilles avec les goules, par Gilderoy Lockhart
Vacances avec les harpies, par Gilderoy Lockhart
Randonnées avec les trolls, par Gilderoy Lockhart
Voyages avec les vampires, par Gilderoy Lockhart
Promenades avec les loups-garous, par Gilderoy Lockhart
Une année avec le Yéti, par Gilderoy Lockhart
— Ça fait... beaucoup de livres, commenta Ginny en se mordant la lèvre, mal à l'aise.
Ses parents n'avaient pas beaucoup d'argent. Sa mère lut la liste par-dessus son épaule, l'air préoccupée, puis déclara :
— Il te faudra aussi un cadeau d'anniversaire. Un animal, peut-être ? J'ai entendu dire qu'il y avait des soldes sur les crapauds...
— Non, maman, c'est bon, je ne veux rien...
Elle n'avait aucune envie d'avoir un crapaud, passé de mode depuis bien longtemps. Par ailleurs, entre la baguette magique, les livres, les robes et le reste des fournitures... Ses parents allaient déjà devoir dépenser une fortune. Et puis, elle ne pourrait même pas emporter à l'école le seul cadeau dont elle rêvait vraiment. Ginny lut la dernière phrase de la liste des fournitures avec un petit pincement au cœur.
IL EST RAPPELÉ AUX PARENTS QUE LES ÉLÈVES DE PREMIÈRE ANNÉE NE SONT PAS AUTORISÉS À POSSÉDER LEUR PROPRE BALAI.
Bah. Ce n'était pas comme si ses parents pouvaient se le permettre, de toute façon...
— Tu choisiras quelque chose quand on ira sur le Chemin de Traverse ! répondit sa mère avec un sourire.
Le message était limpide : elle n'avait pas l'intention de ne rien lui offrir pour son anniversaire. Ce débat clos, Ginny s'attabla pour le petit-déjeuner. Ron et Harry ne tardèrent pas à la rejoindre. Ginny renversa aussitôt son bol de céréales. Elle plongea sous la table pour le récupérer en se maudissant intérieurement et refit surface, les joues en feu.
— Vous avez une lettre de l'école, déclara Molly. Dumbledore sait déjà que tu es ici, Harry. Rien ne lui échappe. Vous aussi, vous avez du courrier...
Fred et George venaient d'entrer à leur tour, encore vêtus de leur pyjama. Depuis l'arrivée de Harry, Ginny prenait soin de s'habiller avant de sortir de sa chambre. Il était hors de question de rejouer la scène de la chemise de nuit.
— Toi aussi, tu dois acheter tous les livres de Lockhart ! commenta Fred en jetant un coup d'œil à la liste de fournitures de Harry après avoir fini de lire la sienne. Le nouveau prof de Défense contre les Forces du Mal doit être un de ses fans. C'est sûrement une sorcière.
Fred croisa le regard de leur mère et s'intéressa alors au pot de confiture. Comme beaucoup de femmes de son âge, Molly Weasley n'était pas insensible au charme de Gilderoy Lockhart.
— Tout ça ne va pas être très bon marché, intervint George. Les livres de Lockhart sont hors de prix.
— On s'arrangera, répondit leur mère, qui avait toujours l'air préoccupée cependant. Je pense que nous pourrons acheter la plupart des affaires de Ginny d'occasion.
À ce moment-là, Harry s'adressa directement à Ginny.
— Ah bon ? Tu vas à Poudlard cette année ?
Ginny se sentit rougir violemment. Avait-elle à ce point l'air trop jeune pour aller à l'école ? Certes, elle venait tout juste d'avoir onze ans, mais tout de même...
Incapable d'articuler quoi que ce soit d'intelligible, elle se contenta d'acquiescer et posa le coude dans le beurrier par inadvertance. L'arrivée opportune de Percy lui épargna les regards des autres. Il portait son insigne de préfet, comme s'il était déjà à l'école. Percy avait passé l'été à envoyer des lettres mystérieuses et à rester enfermé dans sa chambre, ce qui intriguait particulièrement Fred et George. D'autant plus qu'il était resté remarquablement modeste au sujet des douze BUSE qu'il avait obtenues en juin.
— Bonjour, tout le monde, salua-t-il à la cantonade d'un ton énergique. Belle journée.
Il manqua de s'assoir sur Errol, leur hibou défraichi, que Ginny n'avait même pas remarqué jusque là. Ron le ramassa et récupéra la lettre dissimulée sous son aile.
— Errol ! Enfin ! Il rapporte la réponse d'Hermione. Je lui ai écrit pour lui dire qu'on allait essayer de te délivrer de chez les Dursley.
Ron porta Errol jusqu'à son perchoir, mais le hibou s'affaissa aussitôt et Ron jugea préférable de l'étendre sur la paillasse de l'évier.
— Lamentable, marmonna-t-il.
Il ouvrit la lettre et la lut à voix haute. Hermione demandait des nouvelles de Harry et disait être absorbée par le travail scolaire (ce qui tira une remarque horrifiée de la part de Ron). Elle annonçait également se rendre sur le Chemin de Traverse le mercredi suivant et suggéraient à Ron et Harry de la retrouver là-bas.
— Tout ça me paraît très bien, nous n'aurons qu'à aller chercher vos affaires le même jour, décréta Molly en commençant à débarrasser la table. Qu'est-ce que vous comptez faire, aujourd'hui ?
Ron, Fred, George et Harry avaient l'intention d'aller jouer au Quidditch dans le pré. Ginny les regarda partir avec envie. Ses frères ignoraient qu'elle subtilisait régulièrement leurs balais pour aller voler avant que quiconque soit levé depuis qu'elle avait six ans et qu'elle savait donc se débrouiller sur un balai. Jamais ils ne lui avaient proposé de jouer avec eux, l'estimant trop petite pour les suivre. Ils firent même la proposition à Percy, qui n'éprouvait pourtant aucun intérêt pour le Quidditch, contrairement à elle. Ce dernier refusa, prétextant qu'il était trop occupé. Était-il absorbé par le travail scolaire en plein pendant les vacances d'été, comme Hermione ? C'était bien son genre de vouloir déjà se préparer aux ASPIC...
***
Le mercredi suivant, Molly réveilla toute la famille de bonne heure. Après un petit-déjeuner consistant, ils s'alignèrent devant la cheminée.
— Il ne nous en reste plus beaucoup, Arthur, soupira Molly en regardant au fond du pot de poudre de cheminette. Il faudra qu'on en rachète aujourd'hui... En tout cas, les invités d'abord ! Après toi, Harry, mon chéri !
— Que... Qu'est-ce que je dois faire ? balbutia l'intéressé.
— Il n'a jamais pris la poudre de cheminette ! s'exclama Ron. Désolé, Harry, j'avais oublié.
— Jamais ? s'étonna Arthur. Comment as-tu fait pour aller acheter tes affaires sur le Chemin de Traverse, l'année dernière ?
— J'ai pris le métro...
— Vraiment ? Est-ce qu'il y a des escapators ? Comment ça marche ?
— Je t'en prie, Arthur, pas maintenant, le coupa Molly. La poudre de cheminette, ça va beaucoup plus vite, mon chéri, mais si tu ne t'en es jamais servi...
— Ça se passera très bien, M'man, dit Fred. Ne t'inquiète pas, Harry, tu n'auras qu'à regarder comment on fait.
Il prit une poignée de poudre et la jeta dans les flammes, qui se teintèrent de vert. Fred s'avança dans la cheminée, cria « Chemin de Traverse ! » et disparut.
— Il faudra parler bien fort quand tu donneras l'adresse, mon chéri, indiqua Molly. Et fais attention de ne pas te tromper d'âtre...
— De quoi ? demanda Harry alors que George disparaissait à son tour dans la cheminée.
— Il y a beaucoup de cheminées chez les sorciers, mais si tu articules clairement...
— Il se débrouillera très bien, Molly, ne l'ennuie pas, dit Arthur en prenant une pincée de poudre.
— Mais, chéri, si jamais il se perd, qu'est-ce que nous dirons à son oncle et à sa tante ?
— Ils s'en ficheraient complètement, assura Harry. Dudley trouverait la plaisanterie excellente si jamais je me perdais dans le conduit d'une cheminée. Ne vous inquiétez pas pour ça.
Ginny réprima un sourire amusé. Harry pouvait être très drôle, comme elle l'avait découvert ces derniers jours.
— Très bien... dans ce cas... tu n'as qu'à partir après Arthur, dit Molly. Dès que tu pénétreras dans les flammes, annonce bien fort ta destination...
— Et garde les bras le long du corps, conseilla Ron.
— Et ferme les yeux, à cause de la suie, ajouta Molly.
— Et ne bouge pas, sinon, tu risques de tomber dans la mauvaise cheminée, renchérit Ron.
— Mais surtout ne panique pas et ne sors pas trop tôt. Attends le moment où tu verras Fred et George.
Eh ben, c'est sûr qu'avec tous ces avertissements, il ne va pas paniquer, songea Ginny.
C'était le genre de remarque qu'elle aurait fait à haute voix si Harry ne s'était pas trouvé dans la pièce.
Harry prit une pincée de poudre, la jeta dans l'âtre et s'avança dans les flammes vertes.
— Che...che...min de... Tra... verse, balbutia-t-il en toussant à cause d'un nuage de cendres.
Il disparut.
— Oh non ! s'affola aussitôt Molly. Où est-ce qu'il va atterrir ? Ron, dépêche-toi ! Va avertir ton père et essayez de le retrouver ! Percy, va après lui.
Ron se hâta d'emprunter la cheminée, suivi de Percy.
— Maintenant, à ton tour, Ginny. Fais attention, d'accord ? Et ne bouge pas en attendant que j'arrive...
Ginny prit une pincée de poudre, la jeta dans les flammes et s'y avança.
— Chemin de Traverse ! s'exclama-t-elle d'une voix assurée.
Ce n'était pas la première fois qu'elle voyageait par cheminée, mais la sensation était toujours étourdissante. Elle eut l'impression d'être aspirée dans une tornade. Elle tourna sur elle-même, gardant les yeux clos et les bras le long du corps, jusqu'à avoir l'impression qu'un froid glacial lui giflait les joues. À ce moment-là seulement, elle ouvrit les yeux et vit défiler plusieurs décors. Lorsqu'elle aperçut celui du Chaudron Baveur, elle fit un pas en avant.
Son père et ses frères étaient dans le pub. Pas Harry.
— Il ne peut pas être bien loin, disait Arthur, l'air inquiet cependant.
Molly apparut derrière Ginny.
— Il est avec vous ? demanda-t-elle aussitôt.
— Non, mais ne t'inquiète pas, on va le retrouver, la rassura Arthur.
Ginny se glissa près des jumeaux et singea Fred.
— « Ça se passera très bien, M'man ». Tu parles !
— Regardez qui a retrouvé sa langue ! répliqua son frère d'un air moqueur. Ça fait plus d'une semaine qu'on ne l'entend presque plus !
— Haha, très drôle...
— Maman, pourrais-tu me passer la brosse à habits, s'il te plait ? demanda Percy. Je ne peux pas me balader couvert de suie. Je suis...
— ... préfet, achevèrent les jumeaux à sa place.
Percy leur lança un regard noir. Molly sortit la brosse de son sac à main d'un geste impatient.
— Dépêchez-vous, on doit retrouver Harry !
Elle confia la brosse à Percy, qui tenta se débarrasser de la suie avec tant d'application que George finit par la lui arracher des mains. Il épousseta la suie sur ses propres vêtements puis la passa à Fred. Lorsque tout le monde fut à peu près présentable, Molly rangea la brosse et ils se dirigèrent vers la cour à l'arrière du pub pour rejoindre le Chemin de Traverse. Molly scruta aussitôt les alentours.
— J'espère qu'il n'a pas atterri trop loin... Peut-être dans une des boutiques...
Ils se hâtèrent le long de la rue, cherchant Harry du regard. Molly tenait Ginny fermement par le bras, comme si elle craignait qu'elle se perde, elle aussi.
— Là ! s'exclama soudain Ron. Près de Gringotts, il est avec Hagrid et Hermione !
— Merci Merlin, murmura Molly.
Ron, Fred, George, Percy et Arthur coururent vers eux. Ginny aurait voulu leur emboîter le pas, mais sa mère la tenait toujours et peinait à suivre le rythme.
— Oh, Harry, mon petit chéri ! s'exclama Molly lorsqu'elles les eurent enfin rejoints. Tu aurais pu atterrir Dieu sait où !
Le souffle court, elle extirpa à nouveau la brosse à habits de son sac et épousseta la suie des vêtements de Harry. Ce dernier avait les lunettes cassées. Il avait dû atterrir un peu trop brutalement... Arthur les lui répara. Pendant ce temps, Molly interrogeait Hagrid.
— Où était-il ?
— Dans l'Allée des Embrumes.
Molly plaqua une main sur son cœur comme si elle allait avoir une attaque puis saisit celle de Hagrid. Ginny n'osait pas observer ce dernier trop longtemps, craignant de se montrer malpolie, mais la stature du fameux gardien de l'école était pour le moins impressionnante.
— L'Allée des Embrumes ! Ah, Hagrid, heureusement que vous l'avez retrouvé ! Je n'ose imaginer...
— Il faut que j'y aille, déclara Hagrid. À bientôt à Poudlard !
Lorsqu'il eut prit congé, les Weasley, Harry et Hermione grimpèrent les marches de Gringotts. Il leur fallait d'abord récupérer de l'argent avant d'aller faire leurs achats.
— Devinez qui j'ai vu chez Barjow et Beurk, lança Harry. Malefoy et son père.
— Est-ce que Lucius Malefoy a acheté quelque chose ? s'enquit aussitôt Arthur.
— Non, il était venu vendre.
— Donc, il est inquiet. Ah, j'aimerais tellement coincer Lucius Malefoy un de ces jours...
— Fais attention, avertit Molly alors qu'ils entraient dans la banque. Cette famille ne peut t'attirer que des ennuis. Tu risques de t'attaquer à un trop gros morceau.
— Tu crois que je ne suis pas de taille à lutter contre Lucius Malefoy ? s'indigna Arthur.
Son attention fut détournée par un couple de Moldus qui patientait devant le comptoir. Hermione les rejoignit.
— Mais vous êtes des Moldus ! s'exclama Arthur avec ravissement. Il faut absolument que nous allions boire un verre ! Qu'est-ce que vous avez là ? Ah, vous changez de l'argent moldu ? Molly, regarde ça !
Après avoir observé les billets moldus, les parents de Ginny demandèrent à être emmenés à leur coffre et à celui de Harry. Ils quittèrent Hermione et ses parents et empruntèrent les wagonnets dans les souterrains. Molly vida le coffre familial de son maigre contenu, puis ils se rendirent à celui de Harry. Ginny tomba des nues en apercevant les montagnes d'or qu'il contenait.
Ils retrouvèrent Hermione et ses parents devant la banque. Percy partit de son côté, Fred et George du leur. Molly décida d'emmener Ginny dans une boutique qui vendait des robes d'occasion pendant qu'Arthur allait boire un verre avec les parents d'Hermione, qui eut pour sa part tout le loisir d'aller se promener avec Ron et Harry.
— On se retrouve Chez Fleury et Botts dans une heure pour acheter vos livres, déclara Molly. Et vous, ne vous avisez pas de mettre les pieds dans l'Allée des Embrumes ! ajouta-elle à l'adresse des jumeaux qui s'éloignaient déjà.
Ginny aurait aimé flâner, elle aussi, mais sa mère l'entraîna dans une véritable course contre la montre. Elles passèrent d'abord à la boutique de robes d'occasion pour acheter toutes ses pièces d'uniforme, puis chez l'apothicaire pour faire le plein d'ingrédients pour les cours de potion et pour faire l'acquisition des instruments dont elle aurait besoin. Elles passèrent également acheter un chaudron, firent un tour à la papeterie pour s'approvisionner en plumes, encre et parchemins. Enfin, elles se rendirent chez Ollivander. Ginny en sortit avec une baguette en bois d'if de vingt-sept virgule trois centimètres de long contenant un nerf de ventricule de dragon, qu'Ollivander qualifia de mélange « intéressant ». Elles passèrent devant la boutique de Quidditch sans s'y arrêter, au grand dam de Ginny. Le nouveau Nimbus 2001 flamboyait dans la vitrine. Enfin, elles se rendirent Chez Fleury et Botts, où se pressait une foule impressionnante principalement composée de sorcières de l'âge de Molly. Une banderole accrochée sur la façade annonçait la présence de Gilderoy Lockhart, qui dédicaçait son autobiographie.
— Bon, on va commencer par voir ce qu'il y a en occasion, puis on ira acheter les livres de Lockhart, d'accord ? On pourra même les faire dédicacer !
— Je n'ai pas besoin d'une dédicace, Maman, grimaça Ginny.
Hormis les livres de Lockhart, elles trouvèrent presque tous les livres demandés en première année en occasion. Ginny dénicha également un exemplaire abîmé du Quidditch à Travers les Âges qui ne coutait que quelques noises. Puisque sa mère tenait à ce qu'elle prenne un cadeau, autant qu'il soit abordable et qu'il lui plaise...
— M'man, je peux prendre celui-là pour mon anniversaire ? demanda-t-elle.
Molly regarda le prix et acquiesça.
— Bon, très bien, il ne reste plus que les livres de Lockhart. Je vais faire la queue, d'accord ? Ne quitte pas la boutique.
Elle lui confia les sacs débordants de paquets. Ginny laissa tomber tous ses livres dans son chaudron et s'isola dans un coin tranquille de la librairie avec ses achats. Son père et les parents d'Hermione ne tardèrent pas à faire leur apparition, ainsi que Fred, George et Percy. Ils rejoignirent Molly dans la file. Ron, Harry et Hermione entrèrent également dans la boutique et s'arrêtèrent à leur hauteur.
— Dégagez ! aboya un photographe à l'adresse de Ron. C'est pour La Gazette du sorcier !
— Ce n'est pas une raison pour marcher sur les gens, répliqua Ron.
Gilderoy Lockhart se leva alors, apparaissant pour la première fois dans le champ de vision de Ginny.
— Ma parole, ce n'est quand même pas Harry Potter ? s'exclama-t-il.
La foule s'écarta en chuchotant sur le passage de Lockhart alors qu'il se frayait un chemin jusque Harry, qu'il attrapa par le bras pour l'entraîner vers la table de dédicace sous les applaudissements. Sans lui laisser le choix, Lockhart serra la main de Harry sous l'objectif du photographe qui mitraillait la scène, nappant les Weasley d'un épais nuage violet produit par son appareil dès qu'il prenait un cliché. Harry donnait l'impression de ne plus savoir où se mettre. Dès que Lockhart le lâcha, celui-ci tenta de revenir vers les Weasley, mais Lockhart l'empêcha de partir en passant un bras autour de ses épaules.
— Mesdames et Messieurs, voici un moment extraordinaire ! Un moment idéal pour vous annoncer quelque chose que j'avais gardé secret jusqu'à présent ! Lorsque le jeune Harry Potter est entré chez Fleury et Bott aujourd'hui, il voulait simplement acheter mon autobiographie – que je vais me faire un plaisir de lui offrir gratuitement...
La foule reprit ses applaudissements.
— ... mais il ne se doutait pas le moins du monde que bientôt il aurait beaucoup plus que mon livre Moi le magicien. En effet, lui et ses camarades de classe vont avoir le vrai magicien en chair et en os. Eh oui, Mesdames et Messieurs, j'ai le plaisir et la fierté de vous annoncer qu'à partir de la rentrée de septembre, c'est moi qui assurerai les cours de Défense contre les Forces du Mal, à l'école de sorcellerie de Poudlard !
Sous les exclamations réjouies et les applaudissements nourris, Harry se vit offrir la collection complète des livres de Lockhart. Il s'extirpa de la foule, titubant sous le poids des volumes, et parvint à se glisser jusqu'au coin où Ginny avait trouvé refuge.
— Tiens, je te les donne, marmonna-t-il en laissant tomber la collection dans son chaudron. J'achèterai moi-même mes propres exemplaires.
Ginny le regarda d'un air songeur. De toute évidence, il n'aimait pas l'attention que sa célébrité lui valait, ni les traitements de faveur qui en découlaient. Elle avait remarqué sa façon de se dépêcher de prendre son argent dans son coffre en essayant de dérober son contenu à la vue des Weasley. Comme s'il trouvait indécent de posséder tout cet argent. Lui donner ses livres était sa façon de faire un geste pour aider sa famille, qu'il savait pauvre. Et il le faisait de façon assez gracieuse, de surcroît, comme s'il ne s'agissait pas du tout d'un geste de bonté, mais plutôt comme si Ginny lui rendrait un fier service en acceptant de le débarrasser de ces livres.
Harry Potter était un garçon modeste et généreux.
Ce qui ne risquait pas d'atténuer ces petits bonds que produisait son cœur quand elle le voyait... Jusque là, elle l'avait admiré seulement de loin à cause de sa réputation, des exploits qui lui étaient attachés. Mais elle commençait à découvrir le garçon qui se cachait derrière la légende.
— Ça a dû te faire plaisir, Potter ? lança une voix traînante.
Un garçon blond toisait Harry d'un air méprisant.
— Le célèbre Harry Potter, poursuivit-il. Il ne peut même pas entrer dans une librairie sans faire la une des journaux.
Ginny réagit sans réfléchir. Elle ignorait qui était ce garçon, mais il se trompait lourdement sur le compte de Harry.
— Laisse-le tranquille, ce n'était pas sa faute, intervint-elle en adressant un regard assassin au blondinet.
Elle fut presque choquée de s'entendre parler en présence de Harry pour la première fois, comme si elle retrouvait enfin sa vraie personnalité. Le moment ne dura pas.
— Alors, Potter, tu t'es trouvé une petite amie ? ironisa le garçon.
Ginny sentit ses joues chauffer. La répartie lui fit défaut, mais heureusement, Ron et Hermione les rejoignirent à ce moment précis, les bras chargés de livres de Lockhart.
— Ah, c'est toi, constata Ron. Tu dois être surpris de voir Harry ici, non ?
— Ce qui me surprend le plus, c'est de te voir dans une boutique, Weasley, répliqua le garçon. J'imagine que tes parents n'auront plus rien à manger pendant un mois après t'avoir acheté tous ces bouquins.
Le teint de Ron vira à l'écarlate. Il laissa tomber ses livres dans le chaudron et s'avança vers le blondinet, mais Harry et Hermione le retinrent.
— Ron ! intervint leur père en s'approchant avec Fred et George. Qu'est-ce que tu fabriques ? Viens, on sort, c'est de la folie, ici.
— Tiens, tiens, tiens, Arthur Weasley.
Un homme grand et blond qui devait être le père du garçon tant il lui ressemblait posa une main sur l'épaule de ce dernier en toisant le père de Ginny avec le même mépris que son fils en témoignait envers Harry. Ginny frissonna. Sans qu'elle puisse s'expliquer pourquoi, cet homme l'effrayait.
— Lucius, salua froidement Arthur.
Ainsi, cet homme était Lucius Malefoy ? Et le garçon devait être Drago...
— Beaucoup de travail au ministère, à ce qu'on dit, lança Lucius. Toutes ces perquisitions... J'espère qu'ils vous paient des heures supplémentaires, au moins ?
Il plongea la main dans le chaudron de Ginny et en sortit son livre de métamorphose usé.
— Apparemment pas, reprit Lucius Malefoy. À quoi bon déshonorer la fonction de sorcier si on ne vous paie même pas bien pour ça ?
Ce fut au tour d'Arthur d'arborer un teint rouge écrevisse. Décidément, c'était un truc de famille...
— Nous n'avons pas la même conception de ce que doit être l'honneur d'un sorcier, Malefoy.
— Ça ne fait aucun doute, confirma Lucius en jetant un regard aux parents d'Hermione. Vous fréquentez de drôles de gens, Weasley... Je ne pensais pas que votre famille puisse tomber encore plus bas...
Prenant tout le monde de court, Arthur se jeta alors sur Malefoy, renversant le chaudron de Ginny au passage. Des grimoires tombèrent de l'étagère contre laquelle son père avait plaqué Malefoy.
— Vas-y, Papa ! l'encouragèrent les jumeaux.
— Non, Arthur, non ! s'écria Molly.
Le vendeur protesta lui aussi, mais une voix plus puissante couvrit la sienne.
— Allons, allons, Messieurs, ça suffit !
Hagrid sépara les deux hommes. Les yeux flamboyant de hargne, Malefoy jeta le livre de métamorphose de Ginny qu'il tenait toujours à la main aux pieds de celle-ci.
— Tiens, jeune fille, prends ton livre. Ton père ne pourra jamais rien t'offrir de mieux.
Lucius Malefoy repoussa Hagrid qui le maintenait à distance, fit un signe impérieux à son fils pour lui ordonner de le suivre, puis s'empressa de quitter la boutique.
— Vous n'auriez pas dû faire attention à lui Arthur, déclara Hagrid. Toute cette famille est pourrie jusqu'à la moelle, chacun sait ça. Sale engeance ! Allez, venez, sortons d'ici...
Ginny se pencha pour récupérer son livre, encore secouée par cette altercation. Elle n'avait jamais vu son père agir ainsi.
Alors qu'elle saisissait le manuel usé, quelque chose s'en échappa. Un autre livre, beaucoup plus petit et moins épais, à la couverture noire. Quelqu'un avait dû le glisser là par inadvertance...
Elle le ramassa et découvrit une date patinée par le temps mais encore visible sur la couverture : 1943. Elle le feuilleta rapidement : un nom était écrit sur la première page, « T.E. Jedusor », mais le reste était vierge.
Ginny comprit alors qu'il ne s'agissait pas un livre.
C'était un journal intime.
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