La planque
— Wahoo ! Non mais tu te rends compte de ce que l'on vient de faire ?
— C'est incroyable ! J'avoue que je ne pensais pas que ça réussirait. Mais quand j'ai vu que j'étais moi aussi dans ton souvenir, je me suis dit que tout pouvait être possible.
— Merci Wanda. Sans toi, ça n'aurait pas été possible.
— Maintenant, il faut que ça serve à quelque chose.
— Oui. Je pense qu'on peut trouver des renseignements avec cette plaque.
— Demande à Natasha. C'est la meilleure pour ce genre de chose.
— Bonne idée ! Rolala, ça devient de plus en plus concret. C'est exaltant et stressant à la fois.
Les deux femmes se tiennent les mains. La jeune sorcière affiche un sourire franc et confiant. Cela rassure Gabrielle. Elle sait qu'elle n'est pas seule dans cette quête. Et que sa principale alliée la complète parfaitement. En tout cas, leurs pouvoirs s'accordent et chacune gagne en puissance lorsqu'elles sont ensemble.
L'espionne russe est sollicitée rapidement. La plaque leur donne déjà une indication sur la provenance de l'état. VERMONT - CSF 603. Juste quelques heures la séparent potentiellement de ses parents. Enfin, s'ils se trouvent bien à cet endroit. L'attente angoisse la médecin. Craignant que la finalité des recherches de l'espionne ne la satisfasse pas. Et même, au-delà de ça, elle en vient à se demander si les retrouvailles avec sa famille seront aussi joyeuses qu'elle l'espère. C'est vrai, après tout, elle ne sait pas si ses parents ont envie qu'elle les retrouve. Ce n'est pas pour rien qu'ils ont disparus toutes ces années. Pour la protéger, c'est ce que son frère lui a dit. Mais si la raison était tout autre. Qu'ils avaient préféré l'abandonner ? S'éloigner d'elle car elle leur faisait peur ? Qu'ils craignaient pour leur sécurité ? La médecin se rassure comme elle peut, essayant de se convaincre qu'ils n'auraient pas abandonné leurs autres enfants si cela avait été le cas. Ils ne sont pas comme elle. Ils n'avaient dans ce cas aucune raison de couper tout contact avec ses frères et sa sœur.
Cette situation déstabilise la confiance que l'ancienne rousse a en elle. Elle veut y croire et préfère réfréner ses sentiments. Restant malgré tout à fleur de peau. Dans l'éventualité que les renseignements lui arrivent rapidement, elle s'occupe pour penser à autre chose. Un sac avec quelques affaires, son ordinateur et même la tenue offerte par Tony est préparé. Elle s'organise à partir, seule, rejoindre sa famille dès qu'elle le pourra. Empruntant quelques vivres et demandant au milliardaire la possibilité d'y être emmené en Jet. Enfin Natasha lui apporte l'objet de son interminable attente.
— La voiture est une location. Elle a été retirée dans une agence à Rutland.
— Eh bien voilà, j'ai enfin un point de départ ! souffle de soulagement la jeune femme.
L'espionne accepte de la conduire jusqu'à la ville reculée. Son sac sur l'épaule, la médecin a la surprise de trouver un Bucky, déterminé, qui l'attend devant l'avion.
— Tu comptes faire quoi ?
— Et bien, je vais les retrouver. Quelle question.
— Je viens avec toi !
— Pas besoin ! Je peux me débrouiller toute seule.
— Je ne te laisse pas le choix
— Tu me donnes des ordres maintenant ?
— J'ai dit que je t'aiderai à retrouver tes parents, alors je serais avec toi jusqu'à ce que tu sois avec eux !
— C'est gentil Bucky, mais je peux y arriver seule. Il ne peut rien m'arriver.
— Je te rappelle que la dernière fois que tu es sorti du complexe pour une simple visite à ton frère, tu as fini enlevée et torturée.
— Ne fais pas d'une généralité un événement ponctuel.
— Je pense seulement que ce serait plus prudent pour toi.
— Tu t'inquiètes pour moi ?
— C'est ce que font les amis, non ?
— Je suis touchée par ta volonté de me venir en aide, vraiment. Mais je ne t'ai jamais demandé de le faire. C'est toi qui t'es mis en tête de me protéger. Comme je te l'ai dit, je pense que je suis en capacité de me défendre toute seule.
— Qu'est ce que tu me fais là ? Pourquoi tu ne veux plus de mon aide soudainement ?
— Je pense seulement que cette histoire ne concerne que moi. J'étais venue chercher de l'aide pour savoir qui m'en voulait. On les a trouvés et je les ai éliminés. Maintenant je dois continuer seule. C'est mon passé. Ma famille. Mes parents.
— J'avoue que j'ai un peu de mal à te suivre. Ce n'est pas toi qui disait que tu serais toujours là ? Que je ne pourrais pas me débarrasser de toi ? Pourtant c'est ce que tu es en train de faire.
— Je ne voulais pas paraître désobligeante.
— Je sais ce que tu cherches à faire. Je t'ai demandé de ne pas te mêler de mes problèmes alors tu fais la même chose.
— Je...
— Gabrielle, ce que j'étais, ce que j'ai fait, dépasse les limites de ton imagination. Cela dépasse aussi les frontières de ce pays. Je ne veux pas que tu m'aides car il y a un réel danger derrière tout ça. Je suis recherché, je te rappelle.
— Une raison de plus de ne pas venir avec moi.
— Pourtant je vais le faire. Parce que je veux que tu puisses retrouver ta vie d'avant. Tes amis, ton métier. Ce qui fait que tu es de ton époque et de ton temps. Que tu vives la vie que tu mérites. Que tu ne vive pas, comme moi, dans une quête interminable de rédemption et de culpabilité. Je veux que tu sois heureuse bordel !
— Je crois que je n'ai pas le choix, tacle, vexée, la jeune femme en maintenant son regard droit dans celui de l'homme.
— Non en effet !
— Ne va pas croire que je te laisse venir pour que tu sois mon garde du corps. Je fais uniquement ça pour que tu aies la conscience tranquille.
— Dis donc, il va falloir se détendre un peu, râle l'homme alors que la médecin lui passe devant pour entrer dans l'avion.
— Borné ! murmure Gabrielle en levant les yeux au ciel.
— Je t'ai entendu !
À l'issue du court vol, qui au final était une réelle promenade de santé pour Natasha, l'espionne les dépose le plus discrètement possible à l'extérieur de la ville. Aux vues de la taille de la ville, il leur faut un peu de temps pour trouver l'agence de location de voiture. Elle est malheureusement fermée pour le moment. Obligeant les compères à patienter aux alentours en flânant autour d'un commerce. Le soldat contient comme il peut l'agacement que la conversation qu'il a eu avec la médecin lui a fait ressentir. Tout est prétexte à ce qu'il râle.
La mutante essaye de ne pas en tenir rigueur, même si, pour elle aussi, cela devient pesant. Pour penser à autre chose, elle se concentre sur un présentoir à cartes postales installé devant une boutique. Ce sont des représentations de la région. Les paysages y sont magnifiques. Cependant, une des photos attire son regard. Plus elle la regarde, plus elle a comme une sensation de déjà-vu. Même si elle ne se souvient pas du lien. Et ce n'est pas la seule, car en fouillant le support, d'autres reprographies lui procurent la même sensation. Elle connaît cet endroit ! Faisant fi de ce qui l'entoure, Gabrielle sort son téléphone et appelle Wanda.
— Wanda ? C'est Gabrielle. Dis, j'aurai un service à te demander. Est-ce... commence-t-elle à dicter au répondeur de la jeune Sokovienne.
Mais Bucky ne la laisse pas terminer. Soudainement, il se plaque contre elle, lui cachant le visage au passage. Il est aux aguets. La casquette enfoncée, le visage baissé, il observe discrètement ce qui se passe autour d'eux. Au bout de longues secondes, il la lâche enfin.
— Mais ça ne va pas la tête ! houspille la jeune femme;
— On est suivi ! répond doucement le soldat.
— Comment ça, on est suivi ?
— J'ai remarqué des hommes sur le chemin tout à l'heure, toujours à bonne distance de nous. Et là ils viennent de passer en voiture.
— Quoi ? Mais comment c'est possible ? Et qui ça peut bien être ?
— Je ne sais pas, mais il faut qu'on se méfie. Alors tu vas arrêter ton shopping. Ce n'est pas l'heure de faire du tourisme.
— Je ne fais pas de tourisme. Regarde ces photos ! Je connais cet endroit.
— Oh, c'est formidable !
— Mais non, Bucky ! Je suis déjà venue ici !
— C'est cool, mais tu me feras visiter un autre jour.
— Non, mais tu ne comprends rien !
S'emparant des cartes, Gabrielle s'engouffre dans le magasin afin d'aller les payer. Lorsqu'elle ressort du magasin, l'homme l'attrape par le bras et l'entraîne dans une ruelle, à l'abri des regards.
— Là, c'est toi qui ne comprends pas ! De nouveau, des types louches sont après nous. Il faut qu'on fasse attention ! Pourquoi j'ai l'impression qu'il faut toujours que tu te foutes dans des trucs pourris et que ça te fait ni chaud, ni froid.
— On dirait mon père quand tu dis ça.
— Ouvre les yeux Gabrielle !
— On ne sait même pas si c'est après nous qu'ils en ont.
— La probabilité que le même genre de mecs, que ceux qui t'ont enlevé, trainent dans le même patelin du fin fond du trou du cul du monde que nous, est tout de même assez faible.
— Mais c'est possible qu'ils cherchent quelqu'un d'autre.
— J'y crois pas ! Je te dis qu'il faut qu'on soit discret. Je le sens. Fais-moi confiance !
— D'accord ! T'énerves pas !
— Il faut qu'on trouve une planque, un endroit où on sera à l'abri.
— Euh... Je crois que j'ai vu une pension de famille sur le chemin tout à l'heure, explique-t-elle en pointant une direction.
— Ça peut faire l'affaire, conclut le sergent, exaspéré par la frivolité de son amie.
Bucky enfonce un peu plus son chapeau sur sa tête et incite la femme aux cheveux blancs à faire de même. Il lui attrape la main pour longer les murs jusqu'au Bed and Breakfast dont elle parlait..
— Et pour l'agence de location ?
— Nous verrons ça demain. On va se cacher pour le reste de la journée, affirme-t-il en tenant la porte de l'établissement pour la laisser passer.
— Bienvenus dans notre tranquille pension, les accueille une femme d'un certain âge. Vous désirez une chambre ?
— Bonjour madame ! salut à son tour la médecin. Oui, effectivement. Nous souhaiterions une chambre s'il vous plaît.
— Vous avez de la chance, car il nous en reste justement une. Tout confort avec salle de bain privée.
— Ce sera parfait !
— Très bien ! Vous êtes dans notre belle ville pour une occasion particulière ?
— Euh... hésite dans un premier temps la mutante avant d'attraper la main de son compère et d'y faire discrètement apparaître une bague. Nous sommes jeunes mariés et nous avons décidé de vagabonder un peu pendant notre lune de miel.
— Que c'est romantique ! À quel nom dois-je mettre la chambre s'il vous plaît ?
— Amanda et Stan Petterson ? propose-t-elle en regardant Bucky.
— Voilà ! Votre chambre est la numéro 5. En haut des escaliers, et au fond du couloir.
— Merci beaucoup. Bonne journée à vous.
Sans lâcher la poigne du soldat, Gabrielle le traîne vers l'étage. Les contacts avec le soldat sont rares, surtout ceux qui sont peau à peau. Elle se surprend à apprécier la douceur de sa peau contre la sienne. Mais, dès lors qu'il sont entrés dans la pièce, l'homme rejette rapidement le lien qui les unis quelques instants. Il referme à clé la porte et tire tous les rideaux de la chambre.
— Je peux savoir d'où tu as sorti ces noms ?
— Je ne sais pas, ça m'est venu comme ça.
— Et pourquoi tu as dit qu'on était marié ? interroge-t-il en regardant l'anneau à son doigt.
— Tu as dit de la jouer discret ! Un couple de jeunes mariés en lune de miel est toujours moins suspect que des inconnus qui se cachent. Mais ne t'inquiète pas, je ne te mets pas la corde au cou ! nargue-t-elle en remuant ses doigts pour faire disparaître les fausses alliances.
La trentenaire est plus qu'agacée par le comportement de l'homme et son sale caractère. S'asseyant sur le bord du lit, elle souffle un bon coup, avant d'être surprise par les vibrations de son téléphone.
— Wanda ?
— Gabrielle ? Tout se passe bien ? Ton message a été coupé en plein milieu.
— Oui, ça va bien. C'est juste Bucky qui m'a fait raccrocher en me sautant dessus.
— Et bien, y'en a qui se font plaisir !
— Tu n'en loupe pas une ! C'est juste qu'il a vu qu'on est suivi et il a voulu me cacher.
— Vous êtes suivi ?
— Apparemment. On s'est planqué pour le reste de la journée... Par contre, je ne t'ai pas appelé pour ça tout à l'heure. Pourrais-tu me rendre un service s'il te plaît ?
— Évidemment !
— Pourrais-tu aller dans ma chambre ? Dans un des cartons, il y a des photos de vacances. Il faudrait que tu me scannes et que tu m'envoies les photos qui ont été prises autour d'un chalet.
— Toutes ?
— Oui, si c'est possible. Il doit y en avoir une bonne trentaine. Je t'envoie par SMS mon adresse mail.
— Très bien, je te fais ça.
— Merci Wanda !
— Soyez prudents surtout !
Déposant son téléphone sur les draps, le traumatologue sort de son sac les cartes qu'elle a acheté plus tôt et les étale sur le lit. Bucky observe discrètement la rue, caché derrière le rideau d'une des fenêtres.
— Tu ne penses pas qu'il y a autre chose à faire ? C'est pas vraiment le moment de faire ça. Franchement ? Regarder tes photos de vacances. Pffff ! Pathétique !
— Non, mais tu vas arrêter ! Va falloir te calmer là !
— Je vais très bien.
— Tu rigoles ? Tu es imbuvable depuis qu'on est partis. Je m'en prends plein la tête dès que je dis ou fais quelque chose.
— Je ne suis pas le seul ! Et puis, j'ai bien raison. Tu ne prends pas les choses au sérieux.
— Beaucoup plus que tu le crois !
— J'aurai mieux fait de rester au complexe si c'était pour faire un travail d'amateur.
— Je ne t'ai jamais demandé de venir. C'est toi qui as insisté. Je ne te retiens absolument pas. La porte est là ! Je saurais très bien me débrouiller toute seule !
La mine fermée, Gabrielle se saisit de ses affaires et va s'enfermer dans la salle de bain. En colère. Rageuse. Désappointée. Dégoutée. D'accord, elle est totalement consciente que le fait de demander au soldat de ne pas se mêler de sa vie est la base même de leur engueulade.
Non, en fait, c'est que lui lui ait dit qu'elle ne devait interférer avec ses problèmes qui a tout déclenché. Elle s'est sentie blessée qu'il la rejette. Et refuser qu'il vienne avec elle était tout bonnement un moyen de l'éviter. De s'éloigner de lui. De se protéger. Car au fond d'elle, la médecin sent bien que son cœur a tendance à s'ouvrir un peu trop pour l'homme. Que les sentiments qu'elle ressent s'apparentent à de l'affection, voire même à de l'amour. C'est tout elle, s'attacher à un homme qui la rejette. Et surtout, qui la surprotège. Non, l'infantilise. Ne pas la croire capable de réussir, remettre en question son comportement ou même rabaisser ses idées est la preuve que le soldat n'a pas vraiment de considération pour elle. Elle s'est fait de fausses idées. J'suis trop conne ! se blâme-t-elle alors que, assise sur le sol de la pièce d'eau, elle sort son ordinateur pour réceptionner les premières photos envoyées par Wanda. Pour le moment, la médecin voit bien des ressemblances entre les photos et les cartes postales. Mais c'est trop vague. Après tout, un sapin peut ressembler à n'importe quel autre.
— Gabrielle ? prononce la voix douce du sergent de l'autre côté de la porte en frappant de petits coups.
— Qu'est-ce que tu veux ?
— Tu as faim ?
— Non ! répond-t-elle fermement.
— D'accord.
Alertée par le claquement de la porte de la chambre, la trentenaire sort la tête de la salle de bain pour se rendre compte que la pièce a été désertée. Le sac du soldat est toujours là, indiquant à la jeune femme que son compagnon a prévu de revenir. Elle saisit l'occasion de cette absence pour retourner sur le lit, nettement plus confortable que le tapis assortis à la faïence rose de la salle de bain. Une fois l'ordinateur branché, elle lance le téléchargement des pièces. Le faible débit de l'endroit ralentit la réception des fichiers. L'attente, et la fatigue, ont raison de la mutante qui finit par somnoler, puis s'endormir totalement.
Quelques heures sont passées, lorsqu'elle ouvre à nouveau les yeux. Toujours installée sur la couche, elle se rend compte qu'elle n'a plus ni chaussures, ni pantalon. Son ordinateur a été déplacé sur la table de nuit. Seules les lumières de la rue filtrent dans la pénombre de la chambre. En se redressant, elle remarque le soldat qui dort par terre, juste à ses côtés. Il a pris le temps de la border. Ce qui étonne grandement la médecin. Comment peut-il être imbuvable et l'instant d'après, s'inquiéter de sa faim ou de son confort pour dormir ? Il peut être tellement attentionné. Et Gabrielle sait très bien que c'est ce genre d'attention qui la font craquer pour le brun aux yeux bleus.
Doucement, elle se saisit de l'appareil numérique pour voir ce qu'ont donné les téléchargements. Ceux qu'elle a lancés avant de sombrer ont bien abouti, elle peut donc commencer à étudier les clichés. Bien qu'elle soit la plus discrète possible, Bucky se réveille doucement. Il l'observe quelques instants avant de briser le silence de la pièce.
— Je suis désolé. J'ai été un connard. Je n'aurais pas dû te gueuler dessus.
— C'est bien que tu en sois conscient.
— Normalement, c'est le moment où toi aussi tu reconnais avoir poussé le bouchon trop loin.
— Je ne suis pas allé aussi loin que toi.
— Je... En fait, j'ai pas bien compris, interroge l'homme en se redressant. Pourquoi tout à coup tu ne voulais plus que je t'aide ? Je pensais que tu étais d'accord.
— C'est vrai.
— J'ai vraiment eu l'impression que tu ne voulais plus de moi.
— C'est marrant, parce que j'ai ressenti exactement la même chose !
— Comment ça ? s'étonne le soldat en se levant pour s'asseoir aux côtés de la mutante.
— C'est toi qui m'a repoussé en premier. Je t'ai dis que tu étais devenu quelqu'un d'important pour moi. Que je serais toujours là pour toi. Enfin, ma déclaration d'amitié était on ne peut plus claire. Tu es mon ami Bucky. Pas une connaissance ou un collègue. J'ai la sensation qu'on était fait pour se rencontrer. Il y a chez toi quelque chose qui...
— Qui quoi ?
— Je n'ai pas envie de te perdre !
— Oui, je sais bien. Moi non plus.
— Alors pourquoi tu ne veux pas que je t'aide ? Pourquoi tu m'éloigne de toi ?
— C'est pas ça.
— Pourtant si ! Ou alors tu me considères vraiment comme une gamine et tu préfères me laisser sur le côté pour faire des choses de grandes personnes.
— Mais non.
— C'est quoi alors ? Je ne suis pas assez bien ? Je sais que tu as demandé à Steve de t'aider. C'est parce que tu le connais mieux que moi ?
— Non, tu mélange tout.
— C'est de ma faute, évidemment.
— Je n'ai pas dit ça.
— Alors expliques-moi !
— Je vais partir, Gabrielle !
— Comment ça ?
— J'ai demandé à Steve qu'il contacte son ami du Wakanda. Ils vont me cryogéniser à nouveau.
— C'est pas possible ?
— Comprends-moi. J'en ai besoin ! Je suis un danger pour les autres. Pour moi-même. Il faut qu'on m'aide à m'enlever tout ce qui est là, dit-il en frappant son front avec son majeur. Je ne serais jamais en paix si je reste comme ça.
— Tu as décidé ça quand ?
— Après avoir failli te tuer.
— Mais... bégaye la jeune femme, incrédule. Tu m'as reproché de vouloir partir. Et finalement, tu fais pareil ?
— Je sais. Je m'en suis voulu d'avoir réagi de la sorte.
— C'est pour ça que tu étais désagréable avec moi ?
— Je ne sais pas trop. Je crois que j'essaye de me convaincre que j'ai fait le bon choix. Et puis je me dis que si je te dégoûte de moi... Tu me regretteras moins.
— Et tu crois que ça fonctionne ?
— Au fond de moi ?... Non. Je suis tellement heureux de t'avoir rencontré. Tu es une belle personne. C'est grâce à toi que j'ai voulu faire ça.
— Grâce à moi ? rit la médecin.
— Oui. Tu me montres que je peux être considéré comme quelqu'un de normal. Que je peux aussi avoir une vie. Que j'ai le droit au bonheur.
— Évidemment que tu as droit au bonheur ! Je sais que tu es une bonne personne, Buck. Ton passé n'est pas de ton fait. Tu n'avais pas le choix. Mais ce n'est pas le vrai James Barnes. Celui que je vois devant moi à cette heure-ci.
— J'ai tellement envie de croire en ce que tu me dis que je pense que me faire cryogéniser est la meilleure solution qui s'offre à moi. Même si pour ça, je dois perdre mes amis. Te perdre toi.
— Laisse-moi être une petite porte ouverte dans ta vie. Et quand tu te sentiras mieux, je serai là.
— Ce serait égoïste de te demander d'attendre.
— Ça, c'est moi qui décide.
— Merci ! Merci d'être là pour moi, souffle le soldat en prenant son amie dans ses bras.
— Ne t'inquiètes pas. Tu me le revaudra au centuple.
— Tu ne perds jamais le nord, rit l'homme en se détachant d'elle. Bon alors, raconte-moi le truc avec tes photos là.
— Ah ? Mes lubies de photos de vacances t'intéressent maintenant ?
— Allez !
— Oh ça va. Je rigole ! Bon ! Voilà ! Certaines cartes postales montrent des endroits qui me sont familiers. Je crois savoir où sont planqués mes parents, explique-t-elle en montrant sur l'écran de l'ordinateur un cliché représentant un chalet en bois. Tu vois, je cherche des photos ressemblantes aux cartes postales pour trouver où c'est.
— Mais c'est quoi ce chalet ?
— L'endroit où j'ai passé de très nombreuses vacances. Mais je suis incapable de retrouver le nom. Je ne sais même pas si j'ai su un jour le nom de la ville où ça se trouvait. On disait toujours "Le chalet".
— Tu sais ? J'ai revu les gars en ville tout à l'heure quand je suis sorti chercher à manger. Je crois que ce sont encore des hommes d'Hydra.
— Oh merde ! Et tu crois qu'ils me cherchent ?
— Je ne sais pas. Je pense que tu n'es pas la seule à chercher tes parents. Ils ne pouvaient pas savoir que tu allais venir ici. En revanche, si tu as vu la plaque d'immatriculation, c'est possible que eux aussi.
— Alors il faut vraiment qu'on les trouve avant eux ! s'agace-t-elle en replongeant dans ses fichiers tandis que Bucky se lève pour lui apporter un sachet de nourriture.
— Tiens, je t'avais quand même pris ça tout à l'heure.
— Oh ! Tu essaye de gagner à nouveau des points ?
— Gabrielle !! fronce des sourcils le soldat.
— Pardon !
— S'il te plaît, je m'en veux assez de comment je me suis comporté avec toi. Faisons table rase de nos prises de becs.
— Tu as raison. Je suis désolée. Mais ça me rend triste.
— Moi aussi, tu sais ? J'arrive à sortir de mon enfer, je rencontre une personne géniale et mon passé vient tout gâcher, encore.
— Tu sais. J'ai envie de penser qu'on ne peut pas savoir de quoi sera fait l'avenir. Pour le moment, ce qui est certain c'est que l'on sait que notre amitié aura une possible fin. Et on sait aussi quand elle aura lieu. Alors si on peut décider que ça ne change rien et que l'on veut vivre les choses à fond.
— Tu veux prendre ce risque ?
— Et toi ? demande-t-elle innocemment, faisant sourire son partenaire. Juste... On ne se cache rien. De l'honnêteté jusqu'au bout. Pas de lecture dans les pensées, juste la vérité. On reste soi-même !
— Pour toi, je suis partant ! Amis ? propose l'homme en lui tendant la main.
— Amis ! répond la médecin après avoir légèrement hésité.
Mais au lieu de répondre à sa poignée de main, elle le serre de nouveau contre elle. Profitant de la situation pour déposer une bise sur la joue du soldat.
— On devrait dormir encore un peu, soumet Bucky en reculant. La journée de demain va être chargée je pense.
Gabrielle reprend sa place sous les draps, tandis que le soldat décide de s'installer à ses côtés, dans le lit cette fois. Lui tournant le dos, il attrape la main de son amie et la serre contre son torse pour qu'elle se rapproche de lui. Savourant ce contact incongru.
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