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26. Convalescence

Dès que Sam eut franchi le seuil de l'appartement, Laura reprit son téléphone. Malheureusement, la restauration automatique du système n'avait pas réinstallé l'application de traçage, ce qui l'empêcha de savoir si Ubis avait bougé. En revanche, elle avait des messages et des appels en absence de Sam, un appel d'Ubis qui datait de la matinée et un autre de la morgue, un peu plus tard. Elle décida de commencer par là. Paul répondit après quelques sonneries et elle devina d'emblée, à sa voix, qu'il était complètement dépassé.

— Docteur Woodward, souffla-t-il. Je suis heureux de vous entendre...

— Je suis désolée, j'ai seulement récupéré mon téléphone... Tu es toujours tout seul ?

— Oui, le docteur Ubis a appelé pour dire qu'il ne serait pas là pendant quelques jours. Ils ont envoyé un légiste de Saint James mais...

Il baissa le ton.

— Je veux pas être... méchant mais... il en touche pas une. Il les ouvre puis il les range, et il a l'air perdu.

— Je serai là demain. Jusque là, temporise. Rien ne sort. Ils peuvent rester au frigo un jour de plus. Qu'est-ce qu'a dit Ubis ?

— Qu'il était désolé. Qu'il avait un imprévu. Qu'il allait vous prévenir.

Il était vivant. Laura en ressentit un soulagement disproportionné, qu'elle métamorphosa en mauvaise humeur.

— Courage.

— Et vous... vous allez bien ? osa-t-il d'une voix incertaine.

Laura pinça les lèvres. Les nouvelles avaient circulé, en dépit du secret professionnel. Sorvet, sûrement. Elle ne s'était pas vraiment attendue à autre chose.

— Plus de peur que de mal. On se voit demain. Je vais contacter Ubis.

Il avait appelé presque huit heures plus tôt. Elle composa néanmoins son numéro, espérant qu'il décrocherait.

— Docteur Woodward. J'ai essayé de vous joindre...

— Moi aussi, rétorqua-t-elle, peu amène. Qu'est-ce qui se passe ?

— Je dois m'absenter quelques jours. J'en suis désolé mais... c'était à craindre, vous le saviez. J'ai eu... un contretemps dans la soirée...

— Votre état s'est dégradé ?

— Oui.

Laura grimaça.

— Où êtes-vous ?

— Laura, je n'ai pas besoin de votre pitié.

Elle faillit s'offusquer mais se contenta d'un soupir.

— Je n'avais pas l'intention de m'apitoyer.

Il avait certainement ramené le téléphone de garde à la morgue, elle ne parviendrait pas à le localiser de la sorte. Mais elle pouvait peut-être faire tracer son portable personnel. Elle comprenait son envie de finir seul – si elle avait été dans la même situation, elle n'aurait certainement pas eu envie d'avoir une bande d'éplorés à son chevet – mais recueillir sa confession sur son lit de mort était trop tentant.

— Mais c'est vous qui décidez, ajouta-t-elle.

— Merci.

Elle guetta son souffle difficile, mais n'entendit rien de particulier. La ligne n'était pas très bonne et il parlait à mi-voix. Certains hôpitaux interdisaient encore l'usage du portable, même si la pratique se raréfiait.

— Je vous rappellerai demain, annonça-t-elle finalement.

— Ce n'est pas nécessaire.

Elle lâcha un rire désabusé.

— Arrêtez de vous comporter comme si vous étiez le seul concerné. Vous ne pouvez pas croire que je me fiche complètement de ce qui vous arrive.

— Vous avez vu bien des morts.

— Oui. Des anonymes, des étrangers. Vous n'êtes plus un étranger.

Il resta silencieux, comme incapable de répondre à cette affirmation.

— Je vous appelle demain, trancha-t-elle.

— D'accord.

Une fois la communication coupée, elle contempla l'écran de son portable, incertaine. Sa première impulsion avait été d'appeler sa cellule de la Société. L'épisode de la nuit méritait un rapport. Mais Lafferty, son patron, était certainement en vacances, et l'intérim retomberait sur Vima. Même si cette dernière avertissait Lafferty, elle prendrait d'abord les décisions urgentes, à savoir, plus que probablement, une mise en congé forcée, et un changement d'approche. Le dossier serait refilé à quelqu'un d'autre, peut-être un agent local, ou alors carrément suspendu pour une quinzaine de jours. Dans les dernières années, plusieurs accidents de travail étaient survenus en raison d'une tendance à pousser les agents à poursuivre leurs activités en dépit de leur état de santé. Depuis, les procédures s'étaient renforcées. Vima ne pourrait pas tergiverser.

Or Laura ne voulait pas que le situation lui échappe. C'était une question d'amour propre, elle en était consciente, une motivation stupide, indigne d'un agent de son expérience. Mais elle se sentait capable de continuer. Si Lafferty avait été présent, elle aurait pris le risque de l'avertir. Il la connaissait bien, ses capacités et ses limites, son besoin de mener les choses à terme, et il avait confiance en elle. Vima, en revanche, voudrait la préserver.

En somme, elle ne pouvait pas les prévenir. Elle sentait que quelque chose allait se débloquer et elle avait l'intention d'être aux premières loges quand cela se produirait.

Vanité, Laura.

Elle haussa les épaules au prix d'un nouvel élancement.

Un peu plus tard, armée de papier et d'un stylo, elle prit des notes à l'ancienne, d'une écriture beaucoup moins belle que celle d'Ubis.

L'individu était très grand. Sans doute plus de deux mètres. Beaucoup plus grand que tous les hommes qu'elle avait rencontrés à New Tren, de Sam à Ubis en passant par Sorvet, Aaron ou Theo Frakes. Plus grand que n'importe qui en fait.

Elle esquissa un croquis en bordure de la feuille. En tant que légiste, elle avait l'habitude des mensurations humaines, et elle se fia à son souvenir de la silhouette pour estimer la hauteur du masque. Il faisait sans doute trente centimètres de moins que ce qu'il en avait eu l'air. Ça restait très grand.

Est-ce qu'il était pieds nus ?

Elle ne pouvait pas se souvenir avec certitude.

Mais il lui avait semblé... Oui, elle avait été frappée par sa nudité dans les heures glacées de la nuit. S'il avait juste eu des chaussures, cela aurait détonné. Ça aurait même été franchement comique. Elle ne se rappelait pas d'avoir trouvé quoi que ce soit de drôle sur le moment.

En y réfléchissant, c'était étrange qu'elle se souvienne aussi clairement des derniers détails de l'agression. Elle avait perdu connaissance mais son cerveau n'avait rien oublié, comme s'il avait senti l'importance de tout fixer, tout garder, pour un usage ultérieur.

Si tout ça était vrai... Elle ne voulait pas envisager le contraire.

Elle avait senti le contact du sol froid avant de sombrer. Il l'avait lâchée, elle était tombée.

En fermant les yeux et en l'imaginant à nouveau, elle avait une certaine sensation d'harmonie... comme s'il avait été adepte d'un sport martial, ou bien danseur : le corps bien proportionné dans sa démesure, détendu, létal. Il avait quelque chose d'animal aussi. Pas seulement dans le masque, mais dans toute l'attitude. Une certaine grâce. C'était curieux car rien de cela ne l'avait frappée de prime abord. Concentrée sur l'événement, le comportement, la victime, le suspect, les mouvements, les sons, un seul objectif, elle n'avait pas eu le loisir de se forger une impression de son adversaire. Maintenant, elle pouvait le faire, tranquillement.

Bien sûr, elle ne pouvait pas négliger les mécanismes de reconstruction, le remplissage de zones d'ombre, de détails, qui avaient glissé hors de sa perception, hors de sa conscience, volonté, portée. L'imagination, traîtresse, menaçait de lui inventer un mirage. Il fallait rester vigilante.

Elle se souvint qu'il avait les mains humides de sang... ou d'huile... d'un liquide visqueux et chaud, en tout cas. Il n'en restait nulle part, pas même sur ses vêtements. L'hôpital ne les avait pourtant pas nettoyés. Comment était-ce possible ?

Elle quitta le divan et gagna la salle de bain. Même sans taches écarlates sur ses vêtements, ceux-ci avaient souffert de la crasse qui maculait les quais. Elle aurait dû en changer d'emblée, avant de salir le divan de Sam. Pris par l'émotion, ils n'y avaient pas songé. Une fois sous le jet tiède de la douche italienne, elle s'abandonna à nouveau à ses réminiscences.

La couleur de sa peau... Pouvait-elle s'y fier ? Comme pour le reste, la pénombre dissimulait l'évidence. L'individu ne lui avait semblé ni très pâle, ni très foncé, mais son attention s'était focalisée sur son masque improbable, pas tellement sur le reste.

Elle se frotta machinalement la gorge. Des empreintes digitales auraient été une bénédiction.

Bien sûr, il manquait le corps. Le tueur avait dû le traîner vers le fleuve et il ferait sûrement surface dans les jours prochains. Laura n'avait aucune idée de l'identité de la victime. Les ténèbres l'avaient réduit à une tache noire sur noir, et le danger imminent ne lui avait pas permis de l'examiner davantage. Aucun indice.

Si. Il avait les tripes à l'air et, pourtant, il était toujours vivant. Elle l'avait vu bouger, elle l'avait entendu gémir. Or les rapports d'Ubis mentionnaient une ablation du foie post-mortem.

Ce cas n'a peut-être rien à voir avec le Dévoreur de Foies, lui glissa une petite voix, insidieuse.

La coïncidence paraissait énorme, mais elle ne pouvait pas complètement écarter ce détail.

Elle devait retourner sur les lieux au plus vite. Les secours étaient venus en aide à une victime d'agression et n'avaient eu aucune raison de chercher la trace d'un cadavre dont ils ignoraient l'existence. Il pouvait rester des signes discrets, exploitables. Surtout si le tueur avait dû plier bagage à la va-vite.

Malheureusement, lorsqu'elle regagna le salon, la pluie battait les vitres avec virulence, comme pour lui signaler que, bientôt, il ne resterait plus rien à trouver. Elle songea à s'y rendre dans l'instant, mais le seul fait de s'habiller provoqua des douleurs insupportables. Elle consulta la notice des antidouleurs mais Sam lui avait déjà administré la dose maximum, et elle ne pourrait pas en reprendre avant plusieurs heures. Un vertige termina de la renseigner sur le sérieux de son programme.

Nerveuse comme une panthère en cage, frustrée, elle se résigna à regagner le divan et à prendre son mal en patience. Une soirée de pause, une nuit de sommeil, et la machine pourrait se relancer.

Elle songea à nouveau à son équipe à Murmay, aux divers contacts qu'elle avait dans l'organisation. Envoyer des informations à l'équipe de profilage demanderait des autorisations qu'elle n'avait pas le temps d'obtenir. Duncan paniquerait et viendrait la rejoindre par le premier train, Lloyd lui ferait la morale et préviendrait Vima. Elle appela donc l'archiviste, Edward, l'homme le plus fiable et le plus discret du monde.

— Lau ! Mais quelle bonne surprise ! s'exclama-t-il.

— Bonsoir Ed, j'espère que je ne dérange pas.

Elle se le représenta sans mal, assis parmi ses livres et ses revues, encerclé par ses trois écrans d'ordinateur, dans son terrier tout au bout du couloir.

— Jamais de la vie. Je suis toujours à ton entière disposition. Tu as une petite voix.

— C'est la saison.

— Pas faux.

— Écoute, j'ai besoin de tes lumières. J'ai vu un loup-garou.

— Tiens donc. Raconte-moi ça.

Sa sérénité tranquille la fit sourire et elle lui décrivit l'apparition, sans rentrer dans les détails sordides de leur interaction, mais le plus précisément possible. Si quelqu'un pouvait trouver un écho, quelque part, n'importe où, dans un roman, un film, une bande dessinée, un fait-divers, une tradition, un conte, un document d'archives en latin, un bas-relief poussiéreux, le site internet d'une secte obscure, ce serait fatalement Ed. Il en savait davantage que Wikipédia.


Elle émergea à la faveur d'un mouvement, une ombre qui se déplaçait dans les ténèbres, sur sa gauche, et se redressa. Un gémissement ensommeillé, surpris, se faufila entre ses lèvres.

— Désolé, je ne voulais pas te réveiller.

Il faisait nuit noire. La pluie tombait toujours. Sam s'assit près d'elle.

— Je me suis endormie, remarqua-t-elle.

— Ça ne me semble pas complètement anormal, vu les circonstances, répondit le jeune homme.

Il lui toucha le front, puis l'épaule.

— Comment te sens-tu ?

— Un peu barbouillée. Il est quelle heure ?

— Vingt-et-une heures.

— Merde, j'ai dormi... beaucoup. Tu es rentré depuis longtemps ?

— Un certain temps. Tu veux manger quelque chose ? Boire ? Ta voix a l'air d'avoir récupéré, mais ce serait sans doute bien d'appliquer à nouveau le traitement.

Elle se servit de son bras pour se remettre d'aplomb, il lui enserra les épaules.

— Oui, sûrement.

— La police m'a appelé, aussi. Je pense qu'ils ne savent pas que tu es à nouveau joignable. Ils veulent une déposition. Le type n'avait pas l'air très pressé, mais sans doute qu'au plus vite, le mieux.

— J'irai demain.

— Tu as aussi un scan, demain.

— Je n'ai pas de lésions cérébrales.

— Ce n'est pas discutable, Docteur Woodward.

Il l'abandonna pour rallumer une des nombreuses lampes qui parsemaient son intérieur, joua avec le modulateur pour ne pas l'aveugler.

Elle le laissa prendre soin d'elle sans se défendre. Tandis qu'il s'affairait, elle l'observa à la dérobée, la courbe délicate de son nez, ses lèvres un peu froncées, ses yeux clairs, toujours en mouvement, la chute de sa poitrine, son dos droit, ses gestes précis. Il était magnifique, comme le personnage d'un film romantique, distant, auquel elle n'appartenait pas mais dont elle n'arrivait pas à se défaire. Ce serait pour demain. Ou le jour suivant.

Il finit par l'accompagner jusqu'à la chambre. Elle n'était pas en état de participer à des activités très audacieuses, mais il était, comme toujours, soucieux de son plaisir. Là aussi, elle lui laissa assouvir son besoin de la combler. Elle y succomba car comment y résister ?

Mais quelques secondes plus tard, pas davantage, son esprit dérivait déjà vers d'autres contrées. Sam se rendait-il compte de la distance qui se creusait entre eux ? Accepterait-il qu'elle s'éloigne, qu'elle retourne dans le brasier du travail, qu'elle affronte le monstre ?

Il avait eu l'air inquiet, protecteur, mais pourtant il savait quel boulot elle faisait, il l'avait prise comme ça.

Non.

Il ne savait pas qu'elle n'était davantage que légiste, qu'elle avait le droit et le devoir de s'impliquer plus, qu'elle allait risquer tout ce qui était à risquer. Elle ne pourrait pas rester avec lui. Il ne comprendrait pas et elle ne pourrait rien dire. Une fois de plus les aléas de la profession allaient lui interdire le repos de la guerrière.

Dans le noir, Laura se mordit la lèvre, tandis que Sam couvrait son ventre de baisers.

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