La face cachée de l'ange
Tu sais le soir quand la nuit tombe je ne peux m'empêcher de penser à toi. Je me rappelle de tes lèvres sur mon visage. De tes cheveux raides qui effleurent ma peau. De ton visage.
Ô ton visage...
Douceur. Cruauté. Allongé seul dans mes draps blancs, je me dis à moi-même dans le silence:
- Comment peux-tu me paraître comme un monstre et comme un ange ?
Ton visage, si beau pendant le jour.
Tes traits si harmonieux.
Ta peau sans défauts. Tes yeux marrons si clairs qu'on peut y voir ton âme. Tes cheveux, ta tenue, ta maison, tes affaires, tout ce qui amenait à toi, toujours impeccable. Toujours. Irréprochable. C'était ton obsession. C'était ton vice.
Parfaite.
Parfaite.
Parfaite.
C'est comme cela que je te voyais, c'est comme cela qu'ils te voient encore. Moi, j'ai vu la nuit.
Je me rappelle de ton odeur quand tu me prenais dans tes bras, elle me donnait souvent la nausée, mais le reste du temps elle me faisais planer. Tu me faisais valser. De plus en plus fort. Mais quand le jour se levait, tu soignais mes blessures et t'excusais d'une voix si tremblante que je me sentais... coupable.
Chérie, est-ce que tu penses encore à moi ? Est-ce que tu penses à moi ? Est-ce que je te hante comme tu me hantes le soir ? Tu me hantes.
Je me souviens des premiers jours. Ces jours où je bénissais le ciel de t'avoir. Ces jours où j'ignorais encore que lorsqu'on était côte à côte, ils ne voyaient que toi. J'ai mis du temps à comprendre les murmures et les regards méprisants. C'est arrivé un matin où mes propres amis m'ont regardés de même. Ils pensaient que je ne te méritais pas.
Je n'avais plus que toi à ce stade. Les autres étaient stupides, je pensais. Ils m'accusaient de profiter de toi, je n'en avais rien à faire. L'amour dans tes yeux clairs était tout ce qu'il me fallait. A notre mariage, ni ma famille ni mes anciens amis ne sont venus, mais ce n'était pas grave, tu connaissais assez de monde pour faire déborder l'église. Toi, dans ta robe blanche, tu avais l'air d'un ange.
Puis j'ai vu ton comportement changer. Toujours irréprochable lorsque nous étions en public, tu devenais de plus en plus blessante quand nous n'étions que deux. La première fois, je t'ai pardonnée, la seconde fois aussi. Mais, une nuit, tu m'as fait valser pour la première fois. A mon réveil, tes larmes ne pouvaient effacer les bleus. Mais je t'aimais, alors je ne pouvais te quitter.
Douceur. Cruauté. Allongé seul dans mes draps blancs, je me dis à moi-même dans le silence:
- Comment peux-tu me paraître comme un monstre et comme un ange ?
J'ai compris. J'ai compris que tu t'arrangeais pour que mes proches me haïssent. Pour qu'il ne me reste plus que toi. Pour que tu puisses exprimer ton imperfection à l'abri des regards. Pour éviter qu'ils voient la noirceur de ton âme. Tu devais rester irréprochable.
Alors je t'ai fui. Je t'ai fui comme on fuit un champ de bataille. Avec un mélange de terreur et de honte.
J'ai cru être libre. Naïvement. J'ai cru voir la mer quand ce n'était qu'un aquarium. Partout où je passe, ils me regardent avec étonnement, parfois avec mépris. Ils me reprochent d'avoir eu l'audace de quitter une reine.
Tu sais le soir quand la nuit tombe
Tu sais le soir quand la nuit tombe
Quand la nuit tombe
Des yeux marrons si clairs qu'on croit y voir une âme.
Moi, j'ai vu la nuit.
Texte de daisyluzion (daisyluzion )
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