
60-
Le bar était plein à craquer, il faisait chaud à crever et je me décalais le plus possible pour ne pas être poussé par tous ces corps qui s'agglutinaient en attendant leur tour au comptoir pour commander à boire.
Jimin me tira par la manche et je finis par prendre une grande bouffée d'air en réussissant à me tirer de la foule. Mais en relevant la tête, mon regard croisa le sien.
Il y avait trop de monde, trop de tables entre Jungkook et moi pour que l'on puisse s'atteindre mais c'était la première fois, devant autant de personnes inconnues, qu'il se permettait de me fixer aussi longtemps.
De me fixer ainsi.
Je me mis à sourire et il me répondit simultanément. J'avais envie de me précipiter dans ses bras mais je ne le pouvais pas.
Jimin et moi ne pouvions pas avancer à cause du monde et il se plaignait que l'équipe avait choisi un endroit trop petit pour fêter sa victoire mais moi je m'en fichais.
Ne m'importait que le regard de Jungkook et ce qu'il me transmettait ainsi.
Toute sa joie, son soulagement, sa victoire.
Et tout son amour.
J'avais l'impression de devenir si faible, si fleur bleue, mais c'était tellement visible et ça me rendait tellement heureux, que je ne pouvais pas détacher mon regard de lui.
Il nous restait pourtant tellement de choses à nous dire et peut être que c'était l'ampleur de la discussion qui nous attendait qui fit vaciller ses iris.
Ou peut-être était-ce cette menace qui courait toujours qui allait s'enrager, se déchaîner maintenant que le match avait été gagné.
Mon regard ne vacilla pas, lui, et il cligna des yeux comme s'il ne parvenait pas à l'interpréter. Pourtant il était clair, je ne pouvais pas laisser Youngjae détruire l'avenir de Jungkook.
Je ne pouvais pas le laisser faire ça.
J'étais prêt à tout. Prêt à avoir une discussion difficile sur notre avenir, prêt à aller à l'étranger, prêt à accepter l'idée que la vie que nous vivions pouvait s'effacer.
Mais je n'étais pas prêt à ce qu'un fantôme de mon passé vienne détruire tout ce qui nous avait pris tant de temps à construire.
Ce regard que je lançais à l'homme que j'aimais était celui qui, pour une fois, était plein de hargne et d'ardeur.
Pour une fois, il était courageux.
Alors j'articulai silencieusement pour qu'il puisse lire sur mes lèvres :
— Je reviens.
Je le vis tiquer d'incompréhension puis s'inquiéter, ses pupilles effarouchées regardant dans tous les sens pour trouver un chemin vers lequel se frayer pour arriver le plus rapidement jusqu'à moi, mais il fut arrêté par la présence de sa mère et de son beau-père qui venaient à son encontre.
Je me tournai vers Jimin et prononçai de ma voix rauque et enrouée :
— Je sors cinq minutes prendre l'air, je vais rejoindre Sehun dehors, je n'arrive pas à respirer.
— D'accord. Tu veux que je te commande un verre dès que j'accède au bar ?
— Non, ça ira.
— Il faut qu'on retrouve Jin hyung, Bambam et Yeri, tu sais par où ils sont partis ?
— Non, je ne sais pas.
Jimin acquiesça mais je pris son poignet :
— Que Jungkook ne s'inquiète pas, il faut qu'il fête sa victoire avec les autres.
Mon meilleur ami fronça les sourcils mais je ne lui laissai pas le temps de me répondre, je l'entendis m'appeler mais je me glissai entre les individus avant de réussir à atteindre la sortie.
Une fois dehors, j'accostai Sehun qui fumait et lui demandai son téléphone, il me le donna sans explications.
— Il s'appelle reviens, m'informa-t-il seulement.
— Depuis quand j'ai une tête de voleur de téléphone, au juste ? m'exclamai-je en faisant semblant d'être outré.
Il se mit à pouffer et pour la première fois je m'aperçus que sa façon de se comporter avec moi avait enfin changé. Comme si tout était devenu plus naturel, sans étrangeté, sans ambiguïté. Juste de l'amitié. Et sur le coup de la surprise, je lui fis la remarque et il haussa les sourcils.
— Je ne vois pas de changement. Peut-être est-ce que c'est toi qui as changé ta façon de voir les choses, non ?
Il me laissa là-dessus et après avoir tiqué sous ses mots, je me concentrai sur son téléphone. Je cherchai l'application des cartes de la ville avant de quitter le bar, m'élançant dans la nuit noire et humide.
Dans la ruelle adjacente où les propriétaires entassaient les consignes des bouteilles, j'en pris une que je brisai avant de garder l'embout le plus coupant dans ma poche de manteau.
Il me fallut vingt minutes pour atteindre l'hôtel Hamilton.
Je ne pris pas le temps de m'arrêter à l'accueil et me dirigeai automatiquement vers les ascenseurs jusqu'au deuxième étage.
Je sentis mon cœur battre à tout rompre quand les portes s'ouvrirent sur le long couloir à la moquette de velours noire et aux portes grises.
Cette vision me donnait des vertiges mais je serrai le goulot de la bouteille brisée dans ma poche et avançai jusqu'à arriver à la bonne porte.
Je devais le faire, il le fallait.
Je ne pouvais plus reculer, me cacher, me terrer derrière les autres.
Je devais être courageux.
Mes mains tremblèrent légèrement avant que je ne cogne contre le battant. Ce dernier s'ouvrit très rapidement et le visage de Youngjae se barra d'un sourire victorieux.
Néanmoins, il ne prononça rien en se reculant et me fit le signe avec son bras de rentrer. Mes pas foulèrent le seuil mais je lâchai :
— Ne ferme pas la porte.
— Pourquoi ? Pour que tes amis viennent à nouveau ? ironisa-t-il en refermant tout de même le battant.
— Personne n'est venu avec moi, répondis-je en avisant mon téléphone posé sur le meuble.
— Je le sais.
Il n'arrivait pas à cacher son sourire victorieux et moi je tentais, du mieux que je pouvais, de ne pas lui montrer que j'étais terrorisé.
Je pris un semblant de courage qui semblait vouloir filer et prononçai d'une voix que je voulais ferme :
— Je suis venu pour que ça s'arrête, Youngjae.
Il acquiesça avant de prendre un énorme sac qu'il posa sur son lit ainsi que sa veste accrochée au dossier d'une chaise :
— On est censés rentrer demain sur Busan, mais on va prendre le train maintenant, j'ai regardé, le prochain départ est dans trente-cinq minutes.
Puis il me fixa avant de froncer les sourcils :
— Tu n'as pas emmené beaucoup d'affaires pour rentrer à la maison...
— Je ne viens pas.
Il lâcha les lanières de son sac avec fracas, sa mine se fermant, et il soupira bruyamment :
— Ne commence pas Tae, je ne suis pas du tout d'humeur...
— Je te l'ai dit, repris-je avec force, je suis venu ici pour que ça s'arrête. Je suis venu pour t'empêcher de détruire la carrière de Jungkook.
Il refit tomber sa veste qu'il tenait sur son sac et répondit sarcastiquement :
— Ça, j'avais pigé.
Mais ses yeux me fixèrent, me noyant presque dans leur noirceur :
— Mais tu sais que le seul moyen pour que tout ça s'arrête, Tae, c'est que tu me reviennes et que tu rentres avec moi. Qu'est-ce que tu n'as pas compris, au juste ?
Je fronçai les sourcils, resserrant ma prise sur mon arme de fortune dans ma poche pour me donner du courage :
— Je pense que c'est toi qui fais fausse route.
Il pivota entièrement vers moi et son expression me terrifia mais je relevai le menton sans bouger pour lui prouver ma détermination.
Détermination que je sentais vaciller telle une petite flamme tremblante et terrorisée dans le noir.
Minuscule étincelle, mais néanmoins chaude et rassurante.
— Tu commences à m'énerver, Tae, argua-t-il, son corps commençant à se crisper de manière désordonnée. Je ne suis pas là pour entendre tes jérémiades de dégénéré, je...
— Je t'interdis, tonnai-je, de dire quoi que ce soit sur Jungkook à qui que ce soit !
— Tu m'interdis ? répéta-t-il de manière menaçante.
— Je t'interdis, insistai-je, sinon je vais voir la police !
Soudain, il éclata de rire, l'air clairement amusé mais je ne bougeai pas, poings et mâchoire serrés.
Puis, tel un prédateur, il s'avança et je reculai sur la défensive. Je savais qu'il allait me frapper, je le sentais, je le voyais mais je ne pouvais pas le laisser faire ça.
Je ne pouvais plus le laisser faire ça.
Je devais me concentrer sur la flamme de ma détermination.
J'en avais la force, je le sentais mais je ne savais pas si j'arriverais encore à l'utiliser.
Tout paraissait bloqué en moi, comme si cela refusait de sortir.
— Je suis prêt à aller voir la police dès maintenant pour t'empêcher à tout jamais de détruire sa carrière, insistai-je.
— Tu vas porter plainte contre moi ? se moqua-t-il.
Il recommença à rire, presque hilare.
— Comme si ça allait changer quelque chose.
Puis il me fixa et j'eus du mal à respirer, la noirceur de ses yeux me terrassait :
— Comme si ça allait changer quelque chose, susurra-t-il sombrement, comme si ça allait m'empêcher de dire quoi que ce soit sur ce Golden Gamin. Tu penses qu'aller voir la police m'empêchera de parler ? Que tu es naïf...
J'avais l'impression qu'il sifflait ces mots à mon oreille, comme les murmures perfides d'un serpent prêt à m'attaquer à la gorge.
— Je... vais aller voir la police, repris-je.
Mais je me sentais perdre en assurance et ma bonne résolution vacilla.
Il me faisait tellement peur ainsi.
Non pas par sa violence ou par les coups qu'il pouvait me donner mais simplement parce qu'il était d'une force d'esprit quasi incassable, un cruel manque d'empathie, de remords.
C'était un fléau, Sehun avait raison. Youngjae était si sinistre, le monde autour de lui et tout ce qu'il touchait se détruisait, sombrait.
Ce ne serait jamais assez pour lui, il n'aurait jamais de limite. Il n'en avait plus depuis longtemps. Que je lui revienne ne serait jamais suffisant car je ne pourrais pas combler tout ce qu'il souhaitait, tout ce qu'il voulait. Parce que c'était impossible de combler tout ça.
Il était trop sombre, trop brisé, trop noyé dans la noirceur pour ça.
Il avança encore et ça me réveilla à demi, je resserrai mes poings avant de lâcher, puissamment :
— Non.
Je pris une grande inspiration par le nez. Je devais me concentrer.
J'étais venu pour une chose et je ne pouvais pas tout laisser tomber et prendre la fuite.
Je devais protéger Jungkook.
Et c'était ça, et uniquement ça, ma priorité.
Je le toisai en ressentant de nouveau brûler en moi la maigre flamme de détermination et de courage :
— Je vais leur dire la vérité.
Il pouffa, amusé :
— Combien de temps tu vas mettre à comprendre ? Ça ne changera rien.
— Ça peut tout changer, assurai-je de ma voix la plus grave en le fixant froidement dans les yeux.
Ses sourcils se froncèrent et les traces de son amusement disparurent de son visage.
Je redressai mon corps, sentant monter en moi une appréhension mélangée à de l'adrénaline. Comme si enfin tout ce qui était bloqué en moi pouvait sortir et s'exprimer librement. Alors je soufflai :
— Je vais leur dire que c'est toi qui as tué ton père.
Youngjae n'avait pas de faille.
À part moi.
L'ancien moi.
Et j'étais le seul à connaître ce secret, ancré et enterré pendant si longtemps au fond de mon esprit.
Et c'était la seule arme qu'il me restait contre lui.
La seule faille qu'il possédait.
Il y eut un temps de latence où, durant la fraction de seconde qui suivit, son visage se figea puis se décomposa. Secoué, les yeux écarquillés, il recula, d'abord d'un pas puis de l'autre.
— Quoi ? croassa-t-il.
— Je vais leur dire ce que je sais, je vais leur dire où tu as caché le corps...
Il sembla comme frappé, comme si la foudre s'abattait sur lui.
— Tu ne peux pas faire ça !
— Je vais le faire ! clamai-je en criant.
Dépossédé, il chancela avant de bafouiller en répétant.
— Tu... ne peux pas faire ça...
— J'ai gardé ce secret, le toisai-je avec une nouvelle force qui m'était inconnue, pendant longtemps. Je l'ai fait par amitié pour toi, je l'ai fait parce que j'estimais que ton père le méritait, je l'ai fait parce que tu as dit que tu t'étais défendu et que tu avais défendu ta mère sous les coups, que c'était un accident...
Ses yeux écarquillés d'horreur fixèrent les miens comme si je venais de l'abattre. Comme si mes mots lui avaient tiré dessus.
Il secoua la tête :
— Ne... fais pas le con, Tae. Tu ne peux pas faire ça ! Je n'ai rien fait de mal...
— Je vais leur dire, répétai-je en avançant, en prenant le pas sur lui. Je vais leur dire où tu as enterré le corps. Je vais leur dire tout ce que je sais, tout ce que tu m'as dit cette nuit-là.
— Tu... tu as promis, tu... ne dois pas le dire ! Ne fais pas ça !
— Je ne le ferai pas tant que tu ne diras rien concernant Jungkook !
Ses yeux auraient pu me tuer mais je savais qu'il ne le ferait pas. Il pouvait me faire du mal mais il ne pouvait pas me perdre.
Il semblait lutter entre l'agressivité et la panique, comme si deux entités en lui s'affrontaient. Comme si l'ancien Youngjae, l'enfant maltraité et l'adulte violent ne parvenaient pas à se mettre d'accord.
Et il avait l'air fou comme ça.
Il l'était.
Je ne pouvais plus l'ignorer à présent.
Mes lèvres tremblèrent mais je m'accrochais à ma hargne pour le faire plier :
— J'irai les voir, j'irai tout leur dire, je le ferai si tu prononces quelque chose envers Jungkook.
— Viens avec moi ! hurla-t-il. Viens avec moi et je te jure que je ne m'occupe plus de ce gamin !
— Ça ne marche pas comme ça.
Cette fois, j'avais chuchoté.
Il semblait chercher un plan, chercher quelque chose et la façon dont son corps était avachi sur lui-même prouvait à quel point il était désespéré.
— C'est donnant-donnant, affirmai-je. Repars à Busan et jamais, au grand jamais tu ne prononces un mot sur Jungkook, ni tu ne touches à Jimin, et en échange de quoi, jamais je ne révélerai ce que je sais.
— ON DOIT ÊTRE ENSEMBLE ! tonna-t-il. TU DOIS RENTRER AVEC MOI !
— Je ne vais nulle part avec toi. Je n'irai plus jamais quelque part avec toi.
Mais il se releva, une ombre passant sur son visage, et il se mit à rire comme un fou :
— Et qu'est-ce qui pourrait m'empêcher de t'assommer là et de t'emmener de force, hein ?
— Rien, avouai-je à demi-mot.
Il eut un sourire, un horrible sourire victorieux en se relevant.
— Si tu tiens à moi, si tu tiens à notre ancienne amitié, tu ne le feras pas, m'interposai-je en sentant qu'il reprenait sa domination sur moi.
— Je ferai n'importe quoi, cracha-t-il avec hargne en se relevant. Je m'en fous de lui, de Jimin, de tout ça, je ferai tout pour que tu me reviennes.
— Alors je préférerais mourir.
Son sourire mourût en me voyant sortir de la poche de mon imperméable une bouteille de Soju brisée aux pointes dangereuses.
— Qu'est-ce que tu fous ? cracha-t-il. Qu'est-ce que tu fous avec ça ? Lâche ça !
Je plaquai les lames coupantes sous mon cou :
— Approche-toi de moi et je m'enfonce ça dans la carotide. Je suis stagiaire en médecine, Youngjae, je connais le corps humain, je sais aussi combien de temps je mettrais pour me vider de mon sang et mourir avant que les secours n'arrivent.
Il se figea, me fixant comme si de nous deux j'étais celui qui était le plus fou.
Peut-être que je le devenais à mon tour. Peut-être que je l'avais toujours été. La folie appelait la folie. Mais à part ce langage, aucun autre ne pouvait être entendu par Youngjae.
Je me sentais sombrer, accroché à ma flamme de détermination devenue plus grande et plus brûlante.
— Je suis prêt, affirmai-je. Prêt à mourir s'il le faut.
Il secoua la tête, étourdi :
— Ce type... n'en vaut pas la peine.
— Aucun type n'en a jamais valu la peine selon toi.
— Évidemment, on avait seulement besoin l'un de l'autre ! hurla-t-il.
— Ce n'est plus le cas, tu as rompu ta promesse, tu t'en es pris à Jimin !
Ses pupilles tremblèrent :
— Tais-toi...
— Tu as trahi tes promesses Youngjae, alors je n'ai plus aucune raison de garder ce secret...
— Il est hors de question que tu me laisses, que tu m'abandonnes encore ! cria-t-il comme un possédé.
— Jamais, jamais je ne partirai avec toi, jamais je ne te laisserai détruire ce que j'ai construit, jamais je ne te laisserai atteindre Jungkook ! m'écriai-je presque hors de moi.
Puis soudain il se figea, redevenant calme, presque effrayant.
— Alors il faut qu'il crève...
Ma main trembla, me coupant le cou avec le goulot et je m'emportai, paniqué :
— Si tu le touches, si tu t'approches de lui... je leur dis tout ! Je leur dis où tu as enterré ton père et je me tue ensuite !
Il en trembla mais ses yeux semblaient déjà complètement absents et je poursuivis, hors de moi :
— Je leur dirai tout ce que je sais ! Jamais plus tu ne joueras au baseball ! Et puis...
Mes pensées m'emportaient comme si j'avais ouvert la porte des ténèbres pour leur faire face.
— Pense à ta mère, Youngjae ! Elle t'a protégé, elle t'a toujours protégé et tu l'as laissée moisir en prison par ta faute !
— TAIS-TOI ! hurla-t-il comme revenu à lui-même.
— Que crois-tu qu'elle ressentira quand elle saura ?
Il se mit à rugir, un hurlement strident en s'élançant vers moi mais j'inclinai furieusement la lame sous ma gorge abîmée, je sentis que je m'étais à nouveau coupé, et il s'arrêta brusquement.
— C'est fini Youngjae, c'est un adieu.
Peut-être que je délirais, que j'allais beaucoup trop loin.
Je n'avais pas envie de mourir mais si c'était la seule chose qui pouvait protéger Jungkook alors je me sentais prêt.
J'étais déjà mort une fois, est-ce que cette fois j'y survivais à nouveau ?
Il me fixa, l'air paniqué. Comme l'enfant qu'il avait été, terrorisé, avant de laisser les ténèbres l'envahir.
— Ne m'abandonne pas, balbutia-t-il d'une voix qui fit trembler mon cœur malgré tout.
Il tomba à genoux, cherchant à accrocher mes jambes :
— Tu n'as pas le droit de me laisser, tu ne peux pas... Tae... je t'en prie... de tout mon cœur... ne me fais pas ça... ne dis rien, reste avec moi... ne leur dis pas.... NE LEUR DIS PAS !
Il recula, j'avais l'impression que ses pupilles s'éteignaient.
— Tu n'as pas le droit, on avait promis de toujours être ensemble... toi, moi, pour toujours...
Je reculai encore et ma voix enrouée cracha :
— Tu es le premier à avoir trahi tes promesses ! Tout a commencé à cause de ça ! Tu t'en es pris à Jimin, tu m'as menti délibérément...
— Non... non... Je l'ai fait pour toi...
— Tu as toujours tout fait pour toi et uniquement toi !
— Non !
— Ce jour-là...
Ma voix vacilla, ses yeux s'écarquillèrent, et il plaqua ses mains sur ses oreilles.
— Je ne veux pas qu'on parle de ça !
Mon corps partit en avant sans que je ne le contrôle, je traversai les centimètres qui nous séparaient et l'attrapai par le col de son pull puis me mis à le menacer directement avec mon arme de fortune.
Je ne me contrôlais plus.
Je me sentais soudainement envahi par la colère, la haine et la vengeance.
— Tu n'aurais jamais dû faire ça ! Ce qui arrive à présent est ta punition, tu as perdu tout droit d'amitié sur moi ! Tu ne t'approches ni de Jimin, ni de Jungkook, ni de moi. C'est terminé. TOUT CA, C'EST DE TA FAUTE !
Ses mains retombèrent le long de son corps, sa bouche s'ouvrit légèrement. Il était comme sonné.
Je susurrai à mon tour dans le silence :
— Promets-le-moi.
— N... non... balbutia-t-il.
— Promets-le-moi ! crachai-je. Tu ne diras rien sur Jungkook, tu ne t'approcheras jamais de lui, ni de Jimin. Tu sors de ma vie pour toujours. C'est ta dernière promesse, si tu la romps je dirai tout à la police, je dirai tout à ta mère et tu te seras l'unique responsable de ce qu'il m'arrivera !
Le silence fut foudroyant et je tremblais légèrement, mes jointures blanches serraient le goulot de la bouteille brisée.
Je me sentais rempli, terrible. Puissant.
— Promets-le-moi.
Il bougea, hochant doucement la tête comme un enfant martyrisé. Comme si les rôles s'étaient échangés. Comme si j'étais devenu le méchant et lui la victime.
— PROMETS-LE-MOI ! beuglai-je.
— Je te le promets, répondit-il précipitamment, je te le promets... Je... ne leur ferai rien...
— Jamais, le menaçai-je, si tu trahis cette promesse Youngjae...
— Je ne ferai rien, répéta-t-il en pleurant, promis. Promis. Je suis désolé... Tae... ne meurs pas, ne pars pas.
Son regard était rempli de larmes, son visage, lui, avait perdu toutes ses expressions. Il avait l'air d'une créature fragile et infantile.
J'eus une impression de déjà-vu mais je ne me laissai pas prendre par la pitié et fis volteface, prenant mon téléphone posé sur le meuble et je rejoignis la porte rapidement, brutalement.
Je claquai la porte derrière moi, l'écho résonna dans le silence. La main serrée sur le goulot de la bouteille, je sortis de la chambre, remontant le couloir aux multiples portes jusqu'à l'ascenseur.
Une fois que les battants automatiques se fermèrent, j'eus l'impression de respirer à nouveau, que la porte des ténèbres ouverte était de nouveau close. Je laissai tomber nerveusement mon arme de fortune de mes mains trop crispées, le verre se cassa au sol. Je chancelai, me retenant au mur de la cage d'acier avant de chercher mon souffle.
Mes membres tremblaient littéralement et j'expirais bruyamment par la bouche.
Que venait-il de se passer ?
J'eus l'impression de sortir d'un cauchemar, d'une bulle dans laquelle je me noyais. Pourtant en remontant mon visage face au miroir, je tiquai. Je me voyais clairement à travers mon reflet. J'arrivais à voir à quel point mes yeux étaient perçants. À quel point mon regard pouvait être déstabilisant si je me concentrais longtemps.
Je me redressai, m'observant en totalité, ma peau mate marquée par les coups, mon cou abîmé qui saignait encore un peu, la forme de ma mâchoire, mes cernes, la pâleur non-naturelle de ma peau.
C'était étrange mais j'avais l'impression d'être moi et de voir aussi l'ancien moi.
Les portes s'ouvrirent et je quittai brutalement l'ascenseur comme pour échapper à cet endroit. Je laissai derrière moi le goulot de bouteille détruit et m'enfonçai dans la nuit noire et pluvieuse en suivant le GPS sur le téléphone de Sehun jusqu'au bar.
Je courais, je m'éloignais, je mettais à distance tout ce qui venait d'arriver.
Je ne me concentrais que sur le visage de Jungkook dans mon esprit et ma course se mit à ralentir.
Je respirais à nouveau correctement par grandes bouffées.
J'avais gagné.
Je me sentais étrange.
Je me sentais libéré.
Un peu vide.
Un peu plein.
Un peu tout.
C'était fini.
Une fois sur place, je remarquai que la foule ne s'était pas dispersée à mon plus grand malheur. Je fourrai les téléphones dans mes poches et m'essuyai le cou avec ma manche. Ça ne saignait plus. Je me frayai, avec plus de volonté, un chemin jusqu'à la table des victorieux.
Le regard de Jungkook se tourna directement vers moi en me voyant arriver et je soupirai de soulagement.
Il était là.
Il se fraya un chemin, lui aussi, bien plus précipitamment jusqu'à s'arrêter devant moi.
— Où tu étais ? s'inquiéta-t-il.
— Parti régler un problème, éludai-je, on en parlera plus...
Mais il agrippa mon poignet avec angoisse et je tournai légèrement la tête dans tous les sens pour vérifier si on nous regardait, avant de chuchoter pour le rassurer :
— Jungkook, tout va bien.
Il retira sa main et regarda autour de nous en se reculant avec difficulté.
— Laisse-moi te féliciter, m'enjouai-je.
— Tu es allé le voir, me coupa-t-il sombrement.
Je soupirai bruyamment.
— Oui... Mais on en parlera quand on sera seuls.
Je le sentis trembler mais je secouai la tête :
— Tout va bien. Il ne dira rien, ne t'inquiète pas.
— Et tu lui as promis quoi en échange ? persifla-t-il.
Je le fixai dans les yeux, longtemps, au point de le rendre un peu mal à l'aise, et il se calma en détournant le regard tout en poussant sa joue avec sa langue.
— Tu as confiance en moi ? soufflai-je.
— Oui.
— Alors ne t'inquiète pas autant, assurai-je en souriant.
— Hyung, insista-t-il nerveusement. Qu'est-ce que tu as fait, qu'est-ce qu'il t'a fait... ?
Ses yeux balayèrent mon cou et je le sentis se crisper. Il avait vu les égratignures.
Mais moi je n'étais plus inquiet, plus du tout, et je voulais lui communiquer ça, le calmer, effacer le désespoir sur son visage.
Tourner la page.
— J'ai rappelé à Youngjae ce qu'il me devait et s'il voulait que jamais ses secrets ne s'ébruitent alors il devait s'éloigner, disparaître, de toi, de moi, de Jimin. Mais je te raconterai tout demain. Tu n'as rien à craindre. Profitons de cette soirée pour fêter dignement cette victoire.
— Tu... tu es sûr de ce que tu dis ? balbutia-t-il dans un murmure à peine audible.
Je lui fis un grand sourire, que je supposais carré :
— Je n'ai jamais été aussi sûr de quelque chose.
Il me fixa un moment sans réussir à se calmer alors j'ajoutai.
— Tout ira bien maintenant. On en parlera demain. Tu es là pour fêter ta victoire.
Il eut beaucoup de difficulté mais il finit par acquiescer, presque timidement.
— Un verre hyung ?
Je me tournai d'un coup vers Chanyeol qui se tenait près de nous sans que nous l'ayons vu arriver, il tenait un pichet de bière alors que Jungkook, que j'avais enfin réussir à détendre, se crispait à nouveau. Je me mis à sourire à son camarade :
— Oui, avec plaisir mais sans alcool.
— Il doit y avoir du coca ou du jus par-là, m'indiqua-t-il en montrant une table proche. Il t'est arrivé quoi au visage ?
— Je me suis battu avec un tyrannosaure rex, j'ai gagné évidemment.
Il me fixa bêtement et je me mis à sourire avec ironie avant de me tourner vers Jungkook.
— Hein que c'est vrai ?
Il mit un temps avant de répondre, l'espace de quelques secondes, dû à l'effet de surprise avant de dire :
— Carrément, un truc monstrueux mais hyung est un terrasseur de dinosaure, le meilleur de sa catégorie.
Chanyeol nous fixa, l'air blasé :
— Ah ah, très drôle, ironisa-t-il. Et plus sérieusement il s'est passé quoi ?
— Plus sérieusement je crois que c'était plus petit, fis-je mine de réfléchir. En même temps, on ne voit pas des masses de tyrannosaures dans les parages.
Puis en me servant un smoothie à la fraise à une table non loin, je lançai très sérieusement en revenant vers eux :
— À tout les coups c'était un Pokémon.
Chanyeol me fixait comme si j'étais soudain devenu ridicule mais je continuais de lui faire mon plus beau sourire, aux lèvres craquelées. Il reposa d'autres questions mais je répondis dans le même délire. Il finit par être contrarié et partit sans demander son reste.
Jungkook se tourna vers moi, avec un regard que je ne lui connaissais pas, comme s'il était d'un coup émerveillé parce ce que je venais de faire. Il se mit à rire avant de lever sa main en l'air pour quémander un high five auquel je répondis.
— Hyung, tu es incroyable, tu lui as carrément coupé le sifflet !
— C'est toi qui es incroyable. Je suis tellement fier de toi, lâchai-je dans un murmure pour que seul lui puisse l'entendre.
Je le sentis presque ému, sa main effleura timidement la mienne et il s'apprêtait à répondre quand le reste de l'équipe se précipita sur lui avec de nouveaux verres remplis à ras bords, entamant un champ de victoire cacophonique tandis que Sehun, en compagnie de Yeri, me criait à quelques mètres de là :
— Taehyung, mon téléphone s'appelle « reviens maintenant » !
Quelque chose avait changé, en moi.
Je le sentais, comme si cette victoire, ce renversement contre Youngjae, avait clôt une boucle infernale. Dans le miroir de l'ascenseur j'avais eu l'impression de me revoir en partie comme avant. Avant, ou dans le passé, j'avais une autorité sur lui et j'étais le seul à savoir comment lui mettre des limites. À une époque où Youngjae me suivait partout et où il n'aurait jamais rompu de promesse de peur de perdre notre amitié. À une époque où nous étions sur le même pied d'égalité.
À une époque où j'étais fort, peut-être même légèrement arrogant.
Je ne serai plus jamais ce Taehyung là, mais je le sentais en moi comme si à présent mon passé n'était plus quelque chose d'obscur et d'effacé mais qu'il avait retrouvé sa place. Comme si le cours de ma vie avait retrouvé sa temporalité, comme si les espaces vides qu'il manquait à mon développement personnel étaient à présent comblés.
Je me sentais empreint d'une nouvelle force et d'un nouveau courage et je sentais au fond de moi que si c'était pour Jungkook, je serais capable d'affronter le monde entier.
Moi aussi je voulais pouvoir le protéger.
Alors, à présent, je ne voulais plus avoir peur, ni de Chaenyol, ni de qui que ce soit.
Ni même de l'avenir.
Je voulais que maintenant tout se compose uniquement de rires et de beaux moments, pour moi, pour Jungkook, pour Jimin, pour Sehun, Yeri, Jin hyung, Bambam et tous les gens à qui je tenais.
Pour la première fois, je pus pleinement me lâcher dans une soirée, profiter agréablement de l'atmosphère sans craindre le lendemain, sans craindre les autres, sans craindre personne.
Je me sentais vraiment bien, confiant pour une fois.
Peut-être que Sehun avait raison, c'était peut-être mon point de vue sur les choses qui m'entouraient qui avait changé.
Mon point de vue sur moi, aussi.
Nous avions gagné deux choses ce soir, Jungkook et moi, et c'était fiers et heureux qu'on fêta ces deux victoires dans l'euphorie générale avec les gens à qui nous tenions.
*******
Le Dr Choi soupira bruyamment, la mine sévère, et recula sur son siège.
— Je suis désolé Kim, mais il est hors de question que vous vous occupiez des patients avec cet aspect-là.
Je soupirai silencieusement et acquiesçai.
J'aurais dû m'y attendre.
Il était six heures du matin et je n'avais pas dormi. La soirée s'était éternisée jusqu'à quatre heures du matin où Sehun m'avait aidé à ramener un Jungkook bourré et où il avait dû lui-même s'occuper d'une Yeri défoncée.
Nous étions rentrés à pied et elle avait voulu s'arrêter sur la route pour cueillir tous les coquelicots qu'elle voyait même si je lui répétais qu'il n'y avait pas de coquelicots.
Je n'avais pas fermé l'œil au final parce qu'une fois que Sehun nous avait déposés devant chez Jungkook, ce dernier avait été malade. Il avait pris la phrase « fêter dignement cette victoire » un peu trop à cœur et il fallait dire que ses coéquipiers étaient de sacrés forceurs dans leur genre...
En tout cas, je retournais en stage aujourd'hui. Jin hyung m'avait remplacé il y a deux jours de cela pour que je passe la veille du match avec Jungkook.
Veille qui avait au final résulté en une catastrophe monumentale suivit d'un match autant éprouvant psychologiquement que physiquement.
À présent, tout était fini pour de bon.
Bref, j'étais là, bariolé de milles et une couleurs sur le visage. Le pire restait mon cou qui, rappelons-le, avait l'air d'avoir été enduit de peinture sombre. Lorsque que l'infirmière en chef m'avait vu quelques minutes plus tôt, elle avait pris une figure vraiment choquée et m'avait demandé de rester à l'infirmerie avant de prendre mon service.
Au final, je me retrouvais devant mon maître de stage référent qui n'avait pas l'air du tout de bonne humeur ce jour-là.
— Je vous file une semaine de repos, me lança-t-il d'une voix apathique, vous rattraperez vos heures une prochaine fois. Tâchez de faire en sorte que ça guérisse et que ça disparaisse vite.
— Une semaine ? repris-je, mais... enfin ça fait beaucoup d'heures et...
— Pas le choix, reprit-il avec autorité, vous allez faire peur aux patients. Qui voudrait qu'un médecin le prenne en charge s'il ressemble à ça ?
Je me mordis la lèvre avant d'acquiescer strictement.
Il se leva avant de dire froidement :
— Utilisez ce temps pour écrire votre lettre de motivation afin de préparer votre dossier, il ne vous reste plus très longtemps...
— Oui, Dr Choi, acquiesçai-je simplement.
Il me fixa avant de secouer la tête, affligé :
— Et, à l'avenir, évitez de vous retrouver dans cet état-là.
Oui, bah oui, comme si j'avais demandé à ressembler à ça, tiens...
J'acquiesçai encore en m'inclinant légèrement avant de prendre mes affaires, fourrer les mains dans les poches de ma blouse et de refaire le chemin dans l'autre sens jusqu'au vestiaire.
Je ne savais pas si j'étais un peu vexé de m'être fait jeter ainsi, alors que j'avais fait l'effort de venir à l'hôpital sans même avoir dormi, ou si c'était le fait qu'il avait parlé de la lettre de motivation et que ça m'avait donné un coup de stress important.
J'attendis le bus sous la pluie, en réussissant à protéger un peu mes cheveux avec la petite capuche du hoodie de Jungkook que j'avais emprunté ce matin en n'ayant rien d'autre sous la main, chez lui.
Je me frottai les yeux une fois assis sur mon siège et réchauffé par le chauffage du véhicule. Mais je ne parvenais pas à m'empêcher de bâiller.
Il fallait que je dorme.
Vraiment.
Je sursautai vivement en sentant ma tête chanceler dangereusement sur la gauche. Il ne fallait surtout pas que je m'endorme dans le bus !
Je me secouai, pour sortir de mon assoupissement.
Avant, ce qui me tenait éveillé en faisant les trajets était de pianoter sur mon téléphone et de jouer aux jeux qu'il m'avait installés, ou d'écouter les musiques qu'il avait téléchargées.
Sauf que là, mon téléphone était déchargé.
Je me sentais tout de même chanceux d'avoir réussi à le récupérer la veille. Mon esprit s'égara en repensant à la scène de hier soir et j'effleurai les contusions dans mon cou.
Oui, tout était fini.
Je n'avais même plus de doute même si je savais qu'une fois que Jungkook, Jimin, Yeri et Sehun sauraient, ils ne seraient pas en confiance.
Mais moi, j'avais l'infime conviction d'avoir réussi.
J'eus une légère culpabilité, comme un pincement au cœur, en me demandant ce qu'allait devenir Youngjae à l'avenir, mais j'effaçai rapidement cela de mon esprit.
Mes yeux se fermèrent et je sursautai en tentant de me réveiller.
Me donner des petites claques et me pincer les cuisses ne marchait pas bien, et si je loupais mon arrêt, j'étais bon pour attendre de repasser devant après le tour complet du bus, soit dans deux heures.
Quand je pense qu'avant, quand j'étais arrivé sur Séoul la première fois, je m'étais doucement moqué des gens qui dormaient n'importe où n'importe comment dans les transports en commun. Je ne comprenais pas comment on pouvait s'endormir ainsi, dans des positions inconfortables qui plus est.
Sauf que maintenant, ça m'arrivait tout le temps.
J'avais été contaminé par la ville, je me comportais comme un vrai Séoulite.
Il fallait que je pense à des trucs, à n'importe quoi pour me tenir éveillé le plus possible.
La première image que mon esprit fabriqua fut des brochettes d'agneau grillées.
Évidemment. J'avais faim maintenant.
Mon calvaire dura un moment, je ne réussis pas à gagner contre le sommeil, et c'est totalement paniqué que je me réveillai en appuyant comme un forcené sur le bouton d'arrêt.
J'avais deux stations de retard.
Sous la pluie, mains et nez dans le hoodie, capuche sur la tête, je remontai la rue pour rentrer chez nous. Trempé, je m'engouffrai dans l'immeuble de Jungkook, laissant l'ascenseur grimper les étages tout en suppliant mentalement que la personne avec qui je partageais ma vie n'ait pas revomi pendant mon absence.
Je fis un pas dans l'appartement et je humai l'air. Pas d'odeur bizarre, parfait.
Doucement et dans la pénombre, je me glissai dans la chambre et me déshabillai avant de me remettre sous les draps dans un soupir de bonheur. La couette était chaude et Jungkook prenait toute la place dans le lit, allongé sur le ventre, en travers, le nez dans les oreillers. Je le poussai d'abord doucement, et voyant qu'il ne bougeait pas d'un iota, je recommençai sans ménagement. Il grogna, se décala, se réveilla en marmonnant une phrase incompréhensible et se rendormit contre moi.
Je me mis à sourire légèrement en caressant ses cheveux.
Oui, à présent le calvaire était terminé. Mon passé était clos et jamais plus il ne me ferait du tort ou le ferait souffrir lui. J'en faisais une promesse personnelle. J'avais à présent l'infime conviction que moi aussi je pouvais être fort et qu'il pouvait se reposer sur moi. Et c'est ce nouvel équilibre entre nous qui me rendait heureux et confiant.
Je me tournai contre lui en entremêlant nos jambes, passant mes bras sur sa taille, et mes yeux se fermèrent.
Je m'endormis d'un coup.
Heureux.
Confiant.
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