Elle - Chapitre 5
Je rentrais vers 19 h 30 le jeudi soir : une interrogation de mathématiques avait été ajoutée le lendemain et je l'avais révisé avec mes amis. Je commençais à monter les marches du 4ème étage pour annuler, mais m'aperçus que je n'en avais aucune envie.
Je me précipitais sous la douche et vidais mon placard pour trouver comment m'habiller. Tâche impossible sans musique... Le son était tout juste assez bas pour ne pas déranger mes voisins, et j'aurais tué pour pouvoir le mettre plus fort.
J'optais pour le classique haut blanc, slim noir. J'y ajoutais ma paire de talons préférée, que je ne mettais presque que à Noël et enfin ma veste en cuir beige, la seule que je possédais. Je m'étais fait un chignon aussi présentable que possible en un temps très réduit, et quelques mèches s'en étaient déjà échappé quand j'avais couru dans l'appartement pour retrouver mon sac à main. Les yeux légèrement maquillés, je m'observais dans le miroir une dernière fois avant de quitter précipitamment l'appartement.
Mon voisin était assis au même endroit que d'habitude et j'eus du mal à retenir un sourire idiot. J'avais presque l'impression d'aller à un rendez-vous... J'aspirais mes lèvres pour m'empêcher de rire bêtement et me tournais vers la porte en faisant semblant de vérifier qu'elle était bien fermée.
— Bonsoir, Mademoiselle Martin.
— Bonsoir, voisin. Je suis désolée pour le retard..., dis-je en baissant la tête.
— Il y a déjà eu bien pire, dit-il en balayant mon commentaire d'un geste. Vous avez mangé ?
Mes yeux s'arrondirent et je me mordis la lèvre.
— On va s'arrêter sur le chemin alors, dit-il avec un sourire en coin. Je connais une très bonne adresse, mais ce n'est pas un restaurant étoilé.
— Je suis vraiment désolée..., murmurais-je, abattue.
— Ce n'est rien, suivez-moi, dit-il avec un clin d'œil.
Ma faiblesse se confirmait...
Hakyeon m'emmena dans un petit Fast-Food, décoré de nombreuses affiches de films.
— De l'extérieur, ça ne paye pas de mine, mais ils font les meilleures frites du coin.
— Je me range à votre jugement. Pour l'instant...
Ses épaules tressautèrent et j'eus un sourire satisfait.
— Bonsoir. Un sandwich et une portion de frites. Je pourrais vous en prendre ?
Je hochais la tête en examinant les différents sandwichs et optais pour un américain de taille moyenne. Mon voisin s'appuya contre le comptoir.
— Quelle sauce avec les frites ?
— Ketchup.
— Pas très original, mais approuvé, dit-il avec un air appréciateur.
— J'en suis étonnement plutôt émue, dis-je en soulevant un sourcil d'un air ironique.
Il rit et grimaça en pressant deux doigts contre ses lèvres.
— Ça me tue, grogna-t-il. A chaque fois que je pense que c'est fini, ça recommence...
Je sortis mon portefeuille et mon stick à lèvres de mon sac que je lui tendis.
— Quelle boisson ?
— Un coca zero, s'il vous plaît.
Le caissier enregistra ma commande, et je m'apprêtais à lui donner ma carte quand il en tendit une à Hakyeon.
— Je choisis, je paye, dit-il en rangeant sa carte. Je n'ai aucune idée de l'état de vos finances...
— Je vous offre le baume dans ce cas. Échanges de bon procédé...
Il sourit, et ouvrit le stick.
— Allez trouver une place qui vous plaît, j'arrive avec notre commande.
Je hochais la tête et me tournais vers un coin du magasin, d'où personne ne pourrait me voir manger. Je détestais que des inconnus puissent m'observer en train de manger. Logiquement, cela aurait dû être l'inverse, mais au contraire, j'étais relativement à l'aise avec mes connaissances. Après tout, elles savaient à quoi s'attendre, alors pourquoi s'inquiéter de leur avis ?
Je posais ma veste pour « verrouiller » la place et allais me laver les mains aux toilettes avant de revenir m'assoir. Quand je revins, un gobelet de coca m'attendait et j'en aspirais quelques gorgées avec plaisir en observant mon voisin de trois-quarts. Il discutait avec le caissier. Il avait l'air bien réveillé aujourd'hui, et ses cernes étaient beaucoup moins flagrants.
Je le trouvais vraiment très très mignon. Une dizaine de centimètres de plus que moi, pour que mes yeux soient juste à la hauteur des siens avec de hauts talons, et ces cheveux qui me faisaient rêver... Et puis plus que tout, la forme de ces yeux, et leur couleur si sombre...
Je me frappais les joues en secouant la tête et détournais le regard juste avant qu'il ne reçoive notre commande. Pas plus mal, je ne devais pas franchement avoir l'air d'une potentielle amie, mais plus d'une petite imbécile.
— Et voilà, Mademoiselle...
— Merci, souris-je.
— Avec ceci, ce sera parfait, dit-il en me tendant mon baume.
— Je suis sérieuse, gardez-le.
— Un peu trop sage pour moi...
Je levais les yeux au ciel en récupérant mon sandwich.
— Vous en avez mis au moins ?
— Bien sûr, dit-il en jouant avec la paille de son gobelet.
Je jetais un coup d'œil à ses lèvres, et leur aspect légèrement brillant ne laissa pas place au doute. Je haussais les épaules en récupérant mon stick à lèvres et le glissais dans ma poche.
— Si jamais vous en avez de nouveau besoin, vous savez où il est...
Hakyeon hocha la tête d'un air très sérieux, et aspira quelques gorgées de sa boisson en m'observant. Je révisais aussitôt mon opinion... finalement je ne le connaissais pas si bien que ça, et je me retrouvais toute gênée.
— Ne me regardez pas...
Il hocha la tête et s'appuya contre la vitre.
— Merci, grimaçais-je.
— Il n'y a pas de quoi, je peux comprendre. Alors, à quoi vous vous attendez pour ce soir ?, dit-il en croquant une frite.
J'avalais ma bouchée en réfléchissant. Tout ce qui me venait en tête provenait de films où les boîtes de nuit étaient toujours pleines à craquer, et les bars si enfumés qu'on ne voyait pas à plus d'un pas devant soi.
— Je préfère ne rien dire... Je vais me ridiculiser, dis-je avec un rire dérisoire.
— Mais non, dit-il avec un sourire en coin.
Je secouais négativement la tête.
— Peut-être après, quand je pourrais moi aussi rire de moi-même, mais pour l'instant...
Je fis mine de fermer ma bouche avec deux doigts.
— Quel dommage... Je voulais me moquer, moi...
— Un bien vilain passe-temps.
— Je plaide coupable, avoua-t-il en levant les mains en signe de reddition, les yeux m'observant une seconde du coin de l'œil.
Le silence s'installa, tandis que je mangeais mon sandwich. Ma barquette de frites se vidaient doucement.
— Vous avez déjà mangé ?
— Non.
— Pourquoi vous n'avez rien commandé alors ? Ne me dîtes pas que...
— Non, mes finances se portent comme un charme, rit-il.
— Vous en voulez ?
— Je grignote déjà vos frites.
— Pourquoi ne pas appliquer vos conseils ?
— Je suis intimement persuadé que je supporte bien mieux l'alcool que vous.
Je repensais à son état les quelques fois où je l'avais croisé et eu une moue très dubitative.
— Je vous assure ! Et puis, on va éviter la gueule de bois pour le premier soir, vous n'aurez plus envie de sortir avec moi après...
— C'est vous qui n'aurez plus envie de sortir avec moi après ce soir, dis-je en haussant les sourcils, et en avalant une gorgée de ma boisson.
— Pour quelle raison ?
— Il y en a des tas ! Mais je n'ai pas assez confiance en moi pour les assumer. Ce qui représente finalement une première raison.
— Allons donc..., dit-il en se tournant vers moi.
— Non, ne me regardez pas !
Il rit franchement en s'appuyant à nouveau contre la fenêtre, avant d'appuyer sur le coin de sa bouche et de soupirer de soulagement.
— Il n'y a bien qu'avec vous que je manque de me vider de mon sang comme ça, fit-il dans un dernier éclat de rire.
— Moquerie ?
— Je ne crois pas, non.
— Vous m'en saurez soulagée, puisque vous en pouvez pas me voir. Enfin je crois que c'est mieux..., dis-je avant de prendre une nouvelle bouchée de mon sandwich.
Un petit silence s'installa, ce qui me permit de terminer mon sandwich. Je m'essuyais la bouche et pris une frite.
— Je ne m'attendais pas à me retrouver ici avec vous, Mademoiselle Martin.
Je haussais un sourcil interrogateur.
— Je me trompe peut-être mais vous semblez avoir une étrange impression de ma personne.
— Vous êtes la voisine du dessous qui est venue me demander si j'allais bien parce que vous avez entendu du verre brisé. Je ne vais pas vous le cacher, ce n'est pas la meilleure première impression qu'un voisin m'est faite.
Je grimaçai.
— Je n'espionne pas mes voisins, si c'est ce que vous entendez.
— Mais vous savez à quelle heure ils passent dans les couloirs...
— Ce n'est pas ce que vous pensez. Je sais que ça peut paraître étrange, mais j'aime juste savoir où ils sont pour les éviter dans le couloir sans arrêter de lire ou d'écrire.
— Vous lisiez la dernière fois...
— Vous n'êtes pas dans le hall à cette heure-ci d'habitude, et j'ai manqué de vigilance.
— Ça reste un comportement très louche, si vous voulez mon avis, ricana-t-il en se tournant vers moi.
— Là, c'est de la moquerie !
— Un peu. Au cas où ça vous prendrait à nouveau, évitez de frapper chez un inconnu pour lui demander s'il va bien après avoir fait tomber un verre... Je me demandais si vous aviez un problème ou si vous étiez une voisine un peu trop invasive.
— C'était un prétexte comme un autre. Il faut bien dire bonjour pour commencer à connaître les gens, dis-je en haussant les épaules. En plus, si ça avait été un cambrioleur, je l'aurais sûrement fait fuir. Vous ne vous sentez pas plus en sécurité avec moi, maintenant ?, dis-je en lui prenant la main, un sourire rassurant sur les lèvres.
Il me renvoya un regard dubitatif, et j'éclatais de rire en levant les mains en signe de reddition.
— Très bien, c'était étrange, et je n'ai aucune excuse. Satisfait ?
— Vous le pensez ?
— Non, mais je me dois de vous rassurer en vous disant que je comprends votre réaction.
— Merci, rit-il.
— Mais de rien, dis-je avec un grand sourire. Autre chose ?
— Finissez, on va y aller, dit-il en secouant la tête d'un air désespéré, un sourire dans la voix.
— Oui, chef.
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