Elle - Chapitre 11
Alors que nous débouchions sur la place devant le centre commercial fermé, je m'arrêtais devant la statue d'un cerf, la tête levée vers le ciel. D'une matière non-identifiée, ses contours semblaient grossièrement exécutés, comme s'il avait été taillé à grand coup de ciseaux de gravure. Hakyeon se posa à côté de moi avec un sourire.
— Il y a d'autres animaux à l'intérieur du centre commercial, on pourra y revenir si tu veux.
— Oh oui ! C'est tellement impressionnant, il doit faire au moins trois mètres !
Hakyeon rit de mon enthousiasme et une douce chaleur se répandit dans mon ventre. Alors que je me tournais à nouveau vers la sculpture, une silhouette connue attira mon attention.
— Maura est accompagnée !, dis-je avec un grand sourire.
Je réalisais soudain qu'elle venait vers nous. Instinctivement, j'attrapais le poignet de Hakyeon et le tirais avec moi derrière la structure.
— Une amie ?, chuchota Hakyeon, un sourire dans la voix tandis que j'épiais Isabelle et le mystérieux inconnu.
— Oui. Elle ne m'avait pas parlé de lui, ajoutais-je en me tournant vers lui.
— Tu lui as parlé de moi ?
Un nouveau frisson remonta le long de ma colonne vertébrale tandis que certains de mes rêves me revenaient en tête.
— Non, j'ai préféré te garder pour moi seule..., murmurais-je en baissant les yeux vers ses lèvres.
Hakyeon rit doucement en posant son front contre le mien. Je rougis et mon visage se réchauffa mais je restais totalement immobile, effrayée à l'idée de briser le moment. Finalement, Hakyeon releva la tête et la tourna vers Isabelle.
— C'est la femme blonde avec le pantalon kaki ?
— Oui. Baisse-toi, dis-je en le tirant de nouveau vers moi, elle va nous voir !
— Aucun risque, elle vient de tourner vers le restaurant de tacos.
— Suivons-les !, m'exclamais-je en lui prenant les mains pour le faire se relever. J'ai tellement hâte de lui en parler lundi ! Je me demande si c'est quelqu'un de mon école...
— Amie ? Ou commère du village ? Je ne vois plus la différence...
— Oh je t'en prie... Tu connais mes penchants pour l'espionnage !, dis-je avec un sourire entendu.
Haussant un sourcil amusé, Hakyeon raffermit sa prise sur ma main et entrelaça ses doigts avec les miens.
— Viens, c'est par là. Et moi qui pensais que nous étions en rendez-vous...
— Nous nous dirigeons actuellement vers le restaurant de tacos, répliquais-je tandis que les différentes intonations qu'il utilisait pour dire « rendez-vous » commençaient à former une mélodie dans mon esprit. Techniquement, nous ne faisons rien d'autre.
— Bien sûr, dit-il en levant les yeux au ciel.
— Oh allez, ne me dis pas que tu n'es pas un petit peu curieux !
— Pas spécialement. Mais si ça peut prolonger le temps que l'on passe ensemble, pourquoi pas.
— Alors c'est décidé ! J'aime passer du temps avec toi, dis-en lui serrant doucement la main.
J'étais amoureuse de lui. Au lieu de fuir comme je le faisais (trop) souvent, je rassemblais tous les fragments de confiance en moi que je possédais, et décidais d'assumer.
— Avons-nous réellement besoin d'une raison pour nous voir, dans ce cas ?, ajouta-t-il en ralentissant alors que les deux tourtereaux entraient à nouveau dans notre champ de vision, au milieu d'une ruelle remplie de restaurants.
— Juste son visage, le suppliais-je. Laisse-moi voir son visage, et je te suis jusqu'au bout de la nuit !
Il plissa les yeux en évaluant mon état d'esprit, et je lui offris mon expression la plus suppliante. Probablement satisfait, il hocha la tête et se remit en marche.
— Je compte sur toi pour tenir ta parole, murmura-t-il en m'observant du coin de l'œil.
Je hochais moi aussi la tête, déterminée. Isabelle suivit son compagnon dans un des bâtiments.
— Je veux absolument savoir si c'est quelqu'un que je connais. On s'amuse tellement à taquiner une amie sur ses conquêtes, je ne peux pas la laisser s'en tirer comme ça ! Le traitement doit être égalitaire !
— Quelle conviction ! N'as-tu pas l'impression de garder la main, tout de même, en leur cachant mon existence ?
— Es-tu l'une de mes conquêtes, Hakyeon ?, lui demandais-je avec un sourire aguicheur.
Il pencha la tête sur le côté, une expression pensive sur le visage.
— Oui, je pense, dit-il finalement, une légère rougeur teintant ses oreilles. Votre jeu n'est vraiment pas égalitaire...
— Cela va de soi. J'en suis l'instigatrice et la maîtresse, dis-je avec fierté tandis que mon cœur battait la chamade. Wouah, je suis tellement excitée à l'idée de savoir qui c'est ! Je ne suis pas sûre de tenir jusqu'à lundi !
— Moins fort, elle va t'entendre, me rabroua Hakyeon. Vraiment, je m'étonne que personne n'ait remarqué que tu nous analysais dans notre immeuble, avec une discrétion de ce niveau.
— Rabat-joie !, ris-je doucement en m'approchant plus calmement de la façade. Le voilà ! Il me dit quelque chose... Je le connais !, m'exclamais-je.
— Chut !, chuchota Hakyeon en retenant un sourire, le doigt sur ma bouche.
— C'est un de ses amis à l'école, je ne me souviens plus de son nom ! Elle m'avait juré qu'il ne se passait rien !
— Alessia, moins fort, vraiment !
— Maura sort avec quelqu'un, ris-je carrément.
Hakyeon jeta un coup d'œil nerveux dans le bâtiment.
— Tu n'as pas entendu quelqu'un m'appeler ?, entendis-je Isabelle demander, sa voix approchant de la sortie.
— Si, je crois, répondit Celui-dont-je-ne-me-souvenais-pas-du-nom.
Je me mordis les lèvres pour arrêter de rire. J'allais forcément me faire prendre, mais tant pis ! C'était trop gros !
Hakyeon posa sa main gauche derrière ma tête et me poussa rapidement vers le mur de la droite. Ses doigts empêchèrent ma tête d'entrer en contact avec la surface dure.
— Que fais-tu ?, chuchotais-je, étonnée.
— Je t'aide à garder la main, murmura-t-il en se penchant vers moi, sa tête soustrayant complètement mon visage à la vue de Maura.
Mon cœur s'arrêta un instant pour repartir beaucoup plus fort quand ses lèvres m'effleurèrent l'oreille. Son visage était si proche du mien !
Mes mains s'accrochèrent instinctivement à sa veste, rapprochant de moi le reste de son corps et j'embrassais sa joue. Sa main droite se posa sur ma hanche et je jurais ressentir une certaine possessivité qui me fit fondre. J'enfouis mon visage dans son cou, et Hakyeon me caressa affectueusement la nuque. Mon sang battait tellement fort à mes oreilles que je n'entendais rien d'autre.
— Que dirais-tu d'aller manger ?, me demanda soudain Hakyeon.
Je hochais la tête en m'écartant.
— Je pense que tu peux me considérer comme l'une de tes conquêtes aussi, dis-je avec un sourire timide.
— Ouf ! J'ai douté un instant de mon charme naturel, sourit-il en récupérant ma main. Je n'ai plus besoin de trouver des excuses pour venir te voir ?
Je secouais la tête.
— Moi non plus ?, ajoutais-je.
— Je casserai quelques verres si tu ne viens pas, de toute façon...
Je lui donnais un coup de coude joueur tandis qu'il m'entraînait vers un restaurant quelques mètres plus loin. Nous commandâmes et je m'installais face à Hakyeon avec un sourire.
Je ne savais pas quoi dire pendant que nous attendions notre commande, et me contentais de le regarder, de regarder nos mains jointes, et de rire sans raison apparente.
— Que se passe-t-il ?, finit par me demander Hakyeon avec un sourire incrédule.
— Pardon... Je crois que je suis juste tellement contente...
Le coude sur la table, Hakyeon posa le menton sur sa paume et m'observa avec un petit sourire. Embarrassée, je me cachais derrière ma main.
— Je vais chercher notre commande, l'entendis-je murmurer en me lâchant la main, qui me parut instantanément vide.
En revenant, il s'installa dos contre le mur.
— Ce n'est pas nécessaire, il faudra bien que tu me vois manger un jour... Et puis je dois m'y habituer...
— Parfait, je déteste te quitter des yeux !
Je ris tandis qu'il frissonnait.
— C'était un peu trop, non ?
— Un peu, lui souris-je, mais merci, ça m'a fait du bien.
Je me levais et me penchais par-dessus l'étroite table pour lui embrasser la joue.
Je me sentais bien, à ma place et confiante. Et cela faisait définitivement du bien.
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