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Sans titre 2


Gwenaëlle n'aimait pas dormir. Enfin, elle n'aimait pas rêver. Depuis qu'elle était toute petite, ses rêves étaient trop violents. Trop réalistes. Trop réels, peut-être. Comme si elle vivait des scènes de vie d'autres personnes, mortes et enterrées bien avant qu'elle ne naisse sur ce sol breton si chargé de mystères. A neuf ans, elle vit un sorcier vendre son âme pour un mandragot. Le chat noir lui offrit gloire et fortune avant de le conduire en enfer. En une nuit, l'enfant perdit sa candeur. Elle avait observé la vie entière d'un homme dévoué au mal. Pendant des mois elle trembla à la boulangerie en entendant sa mère vider les pièces de son petit porte-monnaie sur le comptoir. Cela lui rappelait le regard mesquin du félin qui, chaque matin rapportait des louis d'or à son maître. Grâce à ses terreurs nocturnes, elle savait au moins que l'argent, s'il peut faire le bonheur un temps, prive sans concession d'un repos éternel.

Non, Gwenaëlle n'aimait pas dormir. Mais Pépé poussière veillait, et elle ne pourrait pas lui échapper.

Un grincement de charrette. Un carillon. Koridwen ne pouvait pas ignorer ce mauvais présage. L'Ankou rôdait près de sa maison. Il ne venait pas pour elle, les signes n'apparaissent jamais à la victime. Elle savait qui allait mourir mais ne pouvais pas l'accepter. Son mari, mort il y a des années, lui aurait dit que la mort du petit Nathaël serait finalement une bonne chose. Après tout, ce n'étais pas vraiment leur fils. Ses cheveux roux indiquaient clairement son état de changeling. Leur véritable bébé avait été enlevé une semaine après sa naissance, cinq ans auparavant. La jeune femme a toujours pris soin de cet enfant qui n'était pas le sien. Elle savait que la fée qui avait échangé les nourrissons traiterait le petit humain de la même façon qu'elle-même s'occupait du descendant de l'Autre Monde. Cependant, si l'un mourait, l'autre devrait succomber aussi. Mais son rejeton n'avait jamais été baptisé. Qu'allait-il devenir ? Elle redoubla de soins et de prières. En vain.

Non, Gwenaëlle n'aimait pas dormir, mais elle n'avait pas su résister.

La vie quitta Nathaël neuf jours après, à l'instant même où le soleil disparaissait derrière l'horizon, laissant derrière lui une mère éplorée, plus endeuillée que jamais. Elle avait perdu deux fils. Celui qu'elle avait élevé, mais aussi celui qu'elle avait enfanté. Elle le sentait au plus profond d'elle-même. Elle n'avait plus personne. Elle maudit intérieurement l'âme de son mari. S'il avait eu le bon sens d'aider cette lavandière de nuit, ar c'hannerezed-noz, il ne serait pas mort. S'il lui avait porté secours de bonne grâce, elle ne lui aurait pas brisé les bras avant de le noyer dans le lavoir. Les autres lavandières, celles qui ne sont ni mortes, ni maudites, n'ont retrouvé son cadavre que trois jours plus tard. A vingt-cinq ans, Koridwen était mère, et veuve. Pour ses trente ans elle était seule. Et surtout, elle n'avait plus rien à perdre. L'Ankou lui avait rendu de trop nombreuses visites, prenant toux ceux qu'elle aimait sur son passage. Mais, dans son désespoir, elle se dit qu'ils n'avaient peut-être pas tous disparu. Son fils, celui à qui elle avait donné la vie, n'était pas baptisé. Son âme devait donc errer dans les marécages, parmi les autres feux follets. La jeune femme ne croyait pas aux rumeurs qui disaient que ces créatures sont viles et dangereuses. Que pouvait-il lui arriver ? Elle ne craignait pas sa propre mort.

Non, Gwenaëlle n'aimait pas dormir, mais elle ne pouvait pas se réveiller.

Alors elle partit. Elle plaça dans un grand panier un pot de lait et une miche de pain, posa le vieux châle hérité de sa mère sur ses épaules, et abandonna sa maison et son village. Elle marcha pendant des jours et des nuits, se perdit dans les collines de Yeun Ellez. Elle savait que la porte des Enfers était dissimulée non loin. Mais les marécages l'attiraient, l'obsédaient. Elle pensait ne jamais trouver le repos lorsqu'à la nuit tombée, alors qu'elle peinait à avancer, les pieds embourbés dans ce sol nauséabond, une lumière bleutée, une flamme qui dansait devant elle apparut. Hypnotisée, elle s'approcha doucement, la main tendue vers cette illusion, comme pour toucher l'âme de son fils qu'elle croyait reconnaitre. Elle fit un pas, puis deux, puis quinze. Jamais elle ne put effleurer cette vision fantasmagorique. Les feux follets se multiplièrent et elle fut cernée. Le charme était brisé. Son cœur se brisa aussi, pour la troisième fois. Elle avait enfin compris que jamais elle ne reverrait son enfant. Jamais ce vide en elle ne serait comblé.

Non, Gwenaëlle n'aimait pas dormir, pourtant jamais Pépé poussière ne la laisserait partir.

Elle pensait tomber là, foudroyée de chagrin, mais une musique entêtante vint réveiller son cerveau endolori. Hypnotisée, elle se leva et son corps avança mécaniquement, comme doué d'une volonté propre vers la clairière où semblait se tenir une fête. Des tréo-falls déchainés dansaient en cercle avec un pauvre homme qui pleurait de fatigue, suppliant ces cousins de korrigans de le laisser s'assoir. Mais il devrait danser jusqu'à la mort, et la jeune femme était prête à le rejoindre. Cela aurait été une belle façon de mourir. Mais elle était trop malheureuse. Trop ennuyeuse. Les joyeux habitants de l'Autre Monde ne voulurent pas d'elle. Ils la repoussèrent loin de leur dolmen, ne lui laissant pas la possibilité de s'approcher. La pluie commençait à tomber. Froide. Cinglante. Alors Koridwen se mit à courir. Elle courut comme elle ne l'avait jamais fait. Sans s'arrêter, sans se retourner, jetant son panier d'abord, vide depuis bien longtemps. Puis ses souliers qui la ralentissaient. Elle lâcha son châle qui s'envola vers la falaise, bientôt rejoint par le tablier qu'elle portait toujours pour protéger sa robe. Elle détacha ses cheveux, laissa couler ses larmes. Ses muscles tremblaient, ses poumons brûlaient. Pourtant elle courait toujours. Sa course aurait pu s'arrêter au bord de l'eau, mais elle avait l'intime conviction que l'océan la délivrerait. Alors elle continua.

Non, Gwenaëlle n'aimait pas dormir, mais elle était hypnotisée.

L'eau recouvrit ses pieds, puis ses genoux, atteignit son ventre et sa poitrine. Elle nageait presque. A son grand malheur elle flottait. Mais lorsque le rivage ne fut plus qu'une lointaine illusion, elle s'immobilisa. Les vagues en furie semblaient se nourrir de son désespoir. Elle coulait, ne prenait plus la peine de respirer. Elle attendait que l'océan l'emporte pour qu'ils se fracassent ensemble sur les rochers. Lorsque la sirène la prit dans ses bras, elle se débattit comme un animal sauvage. Elle ne voulait pas être sauvée. Mais cette fée des eaux qui l'avait prise en pitié se moquait de ses désirs. Elle la tira derrière elle jusqu'à la plage, près du port. Là, un marin plus si jeune se lamentait de ne pas avoir d'autre amour que cette mer majestueuse qui lui prenait tout. Il pensait à son père, dévoré par la grawc'h qui l'avait transformé en poisson, avant de le donner à manger à son nouvel hôte. Il faut dire que le vieux Loïc n'avait jamais été doué avec les femmes, et surtout pas avec les sorcières. Les deux malheureux se regardèrent. La magicienne, replongea sans s'attarder sur le bonheur qu'elle venait de créer. Ce jour-là, Morgan et Koridwen prirent le large à bord d'un petit voilier au doux nom de Callon Lann. Ils disparurent, avalés par l'horizon. Et ne revinrent jamais.

Non, Gwenaëlle n'aimait pas dormir. Pourtant elle regrettait presque de s'être réveillée. 

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