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Mélusine 2.0

Depuis ce qui lui semblait une éternité, Ray trépignait et jurait autant qu'il le pouvait, derrière les barreaux de sa cellule. Soupçonné du meurtre de son oncle, il attendait désespérément l'arrivée de l'avocat chargé d'assumer sa défense. Le claquement d'une lourde porte attira soudain son attention. Il l'entendit avant de l'apercevoir. Le bruit de ses talons aiguilles martelant le carrelage, sa voix assurée qui s'adressait à l'agent dans un savant mélange d'autorité naturelle et de sincère déférence et son rire cristallin qu'elle offrit au représentant des forces de l'ordre en réponse à sa blague potache, piquèrent au vif sa curiosité. Intrigué, il se rapprocha des barreaux qui le privaient de sa liberté, pencha la tête pour essayer d'observer celle qui semblait débouler dans les lieux comme une tornade et briser le silence oppressant qui régnait jusqu'alors.

Ray fut captivé dès qu'il porta son attention sur la magnifique créature à la chevelure rousse se tenant face à sa cellule. Il s'était toujours imaginé que les avocats étaient de vieux grincheux dégarnis aux ventres aussi ronds que leurs dents étaient longues. Et voilà que se présentait devant lui une véritable sylphide au regard d'émeraude. Bouche bée, il mit un instant à prendre conscience que le policier ouvrait sa geôle et que la jeune juriste semblait attendre une réponse de sa part, une main tendue dans sa direction :

— Excusez-moi, vous pouvez répéter ? bredouilla Ray, en passant ses doigts dans ses cheveux bruns pour masquer son trouble.

— Monsieur Mondin, j'imagine. Je me présente, Maître Mélusine Saline, je suis votre conseil. Vous voilà libre, les éléments recueillis n'ont aucune force probante, il s'agit de simples supputations d'un procureur trop zélé qui jugeait de bon ton de faire un coup médiatique avec votre arrestation. Si vous voulez bien me suivre, je vais vous faire raccompagner à votre domicile.

L'aplomb et la détermination qui émanaient de la juriste impressionnèrent aussitôt Ray et achevèrent de le charmer au fur et à mesure des semaines pendant lesquelles ils se retrouvèrent en tête-à-tête afin d'évoquer son affaire. Maître Saline avait su immédiatement gagner sa confiance et sa sympathie. Elle avait même remporté plus que cela, elle avait conquis son cœur.

Après de longs mois d'audiences, de débats, de renvois et de tergiversations, lorsque l'innocence de Ray fut définitivement entérinée, ce dernier se décida enfin à prendre son courage à deux mains et invita la jolie Mélusine à fêter leur victoire.

Impatient et nerveux, Ray ne cessait de faire craquer ses phalanges, dans une vaine tentative d'évacuer la pression qui pesait sur ses épaules. Il avait choisi le nouveau bar branché de la région pour ce qu'il espérait comme son premier rendez-vous avec la ravissante avocate. Installé dans un coin un peu reculé de la pièce, il guettait l'arrivée de celle qui tourmentait ses nuits. Lorsqu'il vit la jolie rousse franchir le seuil, parée d'une robe fourreau qui magnifiait ses courbes, il engloutit d'un trait son verre de whisky japonais et décréta que ce soir il tenterait sa chance en lui avouant son attirance.

Au fil des mois qui s'écoulèrent, les choses devinrent sérieuses entre Ray et Mél', et le mariage se profila comme une évidence pour le couple.

En tête-à-tête devant le plateau de sushis et de makis qu'ils partageaient, Ray surprit la jeune femme en mettant un genou à terre, demandant sa main au terme d'une attendrissante déclaration d'amour.

— Mélusine, veux-tu bien me faire l'honneur d'être ma femme ?

Mél sentit son cœur accélérer la cadence, et l'émotion la submerger. Aucune hésitation, elle aimait Ray plus que tout au monde. Depuis son plus jeune âge, elle avait souhaité un mariage de conte de fées avec son prince charmant et sa multitude de bambins. Cependant, la voix de sa mère revenait la hanter, l'avertissement que celle-ci lui avait lancé résonnait comme une litanie dans son esprit.

— Oh, mon chéri, bien sûr que je rêve de t'épouser, oui, oui, oui, mille fois oui ! Toutefois...

— Toutefois ? répéta Ray dont le visage semblait se décomposer à vue d'œil.

— Toutefois, le mariage implique beaucoup de choses. Et je veux à tout prix demeurer celle que je suis tout au fond de moi. Aussi, je désire que tu me fasses la promesse que je pourrai passer chaque samedi de chaque semaine seule, sans que l'on se voie.

Remarquant le trouble qui gagnait son compagnon, Mélusine s'empressa de préciser :

— Ma mère m'a fait jurer de toujours conserver un instant rien qu'à moi afin d'avoir une vie heureuse et un mariage réussi. Tu m'en fais le serment ?

— Si une journée suffit à ton bonheur, alors qu'il en soit ainsi ! acheva Ray en écrasant ses lèvres sur celles de sa fiancée.

Une décennie, un chien, deux poissons rouges et une tripotée d'enfants plus tard, la famille Mondin accueillit, Greg, le frère de Ray, le temps que celui-ci se remette d'une énième rupture douloureuse.

Autour de l'immense îlot central, dans sa cuisine high-tech, Ray s'activait à remplir de lait les multiples bols, d'ajouter une cuillère de chocolat dans certains, faire réchauffer les autres, dans l'assourdissant brouhaha de chamailleries et de piailleries des marmots.

Échevelé et le regard vaseux, Greg poussa délicatement la porte et rejoignit son aîné, lui demandant d'une voix rauque :

— C'est toujours aussi matinal et bruyant le réveil chez vous ?

— Malheureusement, les enfants n'étaient pas livrés avec l'option « grasse mat' », répondit Ray en lui tendant une tasse de café fumante.

— Mél réussit à dormir avec un tel barouf ?

— On est samedi, elle est déjà partie.

— Où ça ?

— Aucune idée, elle me donne pas son programme. Peut-être une journée avec ses copines, shopping, massage ou ciné, un truc de fille quoi ! répliqua Ray en assénant un coup de coude à son frère.

— Et elle revient quand ?

— Demain matin.

— Elle fait ça souvent ?

— Chaque samedi, pourquoi toutes ces questions ?

— C'est étrange, ta femme se fait la malle tous les samedis, tu as aucune info sur ce qu'elle fait et ça te pose aucun problème ? Wahou je t'admire mec, moi je serai fou à ta place, pas savoir ce que fait ma meuf, ça me rendrait dingue. Sérieux, tu trouves pas ça bizarre ?

— Non, j'ai confiance en Mél'.

— La confiance est un luxe qu'on ne doit pas se permettre, acheva Greg en avalant une grande gorgée de café.

Au cours de la semaine qui suivit, les propos de son frère ne cessèrent de s'insinuer dans l'esprit de Ray et les vagues explications de son épouse n'apaisèrent nullement ses inquiétudes. Tant et si bien que lorsque vint le samedi, il s'était transformé en véritable boule de nerfs. À fleur de peau et en proie au doute, il passa la majeure partie de la journée à tenter de joindre Mél' sur son portable, sans succès. Une fois les enfants couchés, Greg, ne supportant plus de voir son frangin se ronger les sangs, lui avoua alors avoir installé une application de géolocalisation sur le téléphone de sa mystérieuse belle-sœur.

Tout d'abord choqué par cette atteinte à la vie privée de sa femme, Ray reconnut rapidement qu'il avait le besoin viscéral de découvrir ce qu'elle s'évertuait à lui cacher. Pantelant, il retint son souffle lorsque l'application afficha la position de Mel'. En l'espace d'une seconde, son visage perdit toutes ses couleurs et ses épaules s'affaissèrent.

— Putain de merde, je le crois pas !

— Je suis désolé, vraiment. Je sais pas quoi dire...

Ray se leva, et se dirigea sans un mot vers le bar trônant dans le salon afin de se servir une double dose de whisky qu'il s'enfila d'une traite. À pas feutrés, Greg s'avança jusqu'à lui et s'aventura à l'interroger :

— Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant ?

— J'en sais fichtrement rien ! Je suppose que je vais aller dans ce putain d'hôtel et découvrir ma femme dans les bras d'un autre. Je suis vraiment le dernier des cons, j'arrive pas à croire qu'elle me ment depuis toutes ces années, et que moi j'ai fermé les yeux ! Tu peux rester ici surveiller les gosses pendant mon absence ?

— Bien sûr, tu peux compter sur moi vieux.

Ray adressa un remerciement silencieux à son frère, saisit sa veste et son trousseau de clés avant de se retourner et d'ajouter :

— Putain, qu'est-ce que je fous ? Je suis réellement sur le point de choper ma femme en train de s'envoyer en l'air avec un connard ?

Arrivé devant l'hôtel plein de charme où son épouse le trompait allègrement, un cocktail détonnant d'émotions envahit Ray. Abattu, déçu, trahi, écoeuré, il ne comprenait pas comment Mél' avait-elle pu oser lui faire ça à lui ? Lui qui s'était toujours évertué à être un mari aimant, l'épaulant dans chacun de ses pas, veillant à être attentif et présent pour leurs enfants, qu'avait-il donc fait pour mériter cet outrage ? Impossible de nier l'évidence, son frère avait raison, il s'était trompé sur son compte. Endiguant tant bien que mal sa colère le temps d'embobiner la réceptionniste ; il prétexta que sa femme avait réservé pour deux, mais que faute de batterie sur son portable, il n'avait pas pu prendre connaissance du numéro de chambre qu'elle lui avait envoyé. En dépit de la nervosité mal contenue que sa voix trahissait, l'employée d'accueil lui révéla sans complexe le numéro en question.

La hargne étouffa vite tout autre sentiment quand il sortit de l'ascenseur jusqu'à le consumer entièrement lorsqu'il se posta devant la chambre 86. Ray prit une profonde inspiration, il ne supportait plus de se sentir dupé, et de rester dans l'incertitude, il fallait qu'il le voie de ses yeux pour finir de se convaincre de son erreur de jugement.

Il frappa trois coups sourds contre la porte.

— Mél', c'est moi, ouvre !

Un mouvement furtif lui parvint derrière le battant, signe qu'on se précipitait.

— Ray ? Mais qu'est-ce que tu fais là ?

— Je sais tout ! Laisse-moi immédiatement rentrer !

— Quoi ? Non, c'est impossible, je t'en supplie va-t'en ! Si tu m'aimes, fais-moi confiance !

— Tu te fous de ma gueule ? Tu imagines que je vais repartir bien gentiment chez nous ? C'est une blague ? Ouvre cette putain de porte ou je la défonce !

— Ray, non je t'en conjure, crois-moi, tu dois partir !

— Mél je vais perdre patience ! Ouvre-moi tout de suite !

Mélusine jura avant de s'éloigner. C'était plus qu'il ne put supporter, ses nerfs le lâchèrent, il explosa. Ray ne reconnut pas l'homme qui mit un grand coup de pied dans la porte, l'arrachant du chambranle. La haine prit possession de lui quand il aperçut le lit défait et les vêtements de sa femme qui traînaient dans un coin. En hurlant, il se précipita devant la porte de la salle de bains et tambourina dessus comme un forcené.

La voix engouée de sanglots, Mélusine n'arrêtait de lui demander de partir, mais Ray restait désespérément sourd à ses suppliques.

Complètement paniquée, Mél' détailla la pièce dans laquelle elle se trouvait. Une seule issue possible, elle devait s'enfuir par la fenêtre avant qu'une nouvelle porte ne cède sous les assauts répétés de son mari. Elle se précipita, posa la main sur les battants lorsque le menu rempart qui la séparait de son époux s'ouvrit à la volée, laissant apparaître un Ray furieux. Elle peina à reconnaître celui dont elle partageait la vie depuis tant d'années, celui qu'elle avait chéri plus que tout au monde tant la colère déformait ses traits. Pourtant, en quelques secondes, cette colère laissa place à l'incompréhension, puis à l'incrédulité et enfin, à un profond dégoût. Inutilement, Mélusine tenta de masquer sa peau recouverte d'écailles en dessous de son nombril et sa queue de serpent qui ondulait sur le carrelage de la salle de bains.

— Qu'est-ce que c'est que ce délire ?

— Oh, Ray, je suis sincèrement désolée.

— Mais... mais... où sont tes jambes ? Oh, mon dieu, j'ai épousé un monstre !

— J'aurais aimé pouvoir te le dire plus tôt, je te le jure. Malheureusement, cela faisait partie du sortilège, je ne pouvais décemment pas te révéler la raison de mes absences. Tu ne devais pas être au courant. Et tu ne devais pas me voir, mais tu n'as pas su respecter notre accord.

— Je crois que je suis en train de faire un cauchemar, oui c'est ça, un cauchemar ! déclara Ray en secouant la tête de droite à gauche, sous le choc. Mais comment est-ce possible ?

— Ma mère m'a jeté cette malédiction, chaque samedi cette queue de serpent devient mienne, rien ne peut l'empêcher.

Mélusine expliqua alors que, plus jeune, avec l'aide de ses sœurs, elles s'étaient vengées de la trahison et l'abandon paternel. Prétextant une balade en montagne, Mélusine et ses frangines avaient sciemment laissé leur père seul et sans ressource au beau milieu des pentes escarpées. Elles imaginaient que leur mère les remercierait d'avoir lavé cette atteinte à son honneur, pourtant à la surprise générale, celle-ci réprima violemment leur comportement. En guise de représailles, elle envoûta chacune d'entre elles. Malgré les apparences, Mél se trouvait moins mal lotie que ses sœurs qui demeuraient recluses chacune à l'autre bout du pays. Ray passa frénétiquement sa main dans ses cheveux, incapable d'esquisser un pas en direction de Mélusine, avant de l'interroger :

— Et maintenant ? Tu peux me dire ce que je suis censé dire ou faire ?

— Je n'en ai aucune idée. Par ta défiance, tu as scellé ce sortilège, me voilà condamnée à rester ainsi chaque jour que je vivrai, répliqua Mélusine en lui adressant un regard désolé.

La grimace que Ray esquissa involontairement ne laissa nulle place à l'interprétation. Résignée, Mél' se rapprocha de la fenêtre et en repoussa les battants. Le cœur lourd, elle pivota et déclara d'une voix enserrée par les larmes :

— Sache que je comprends et que je ne t'en veux pas. N'oublie pas que je n'ai jamais aimé que toi. Et je t'en prie, ne dis rien à nos enfants, je ne souhaite pas que leurs yeux se teintent de la même expression que celle que tu arbores en ce moment. Adieu Ray.

Ne supportant plus la révulsion qu'elle lisait sur les traits de son époux, Mélusine émit un cri strident et désespéré avant de s'enfuir pour toujours, emportant avec elle la preuve de son secret.

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