Acte III, Scène 2
Ame - Et après ?
Monna - Après quoi ?
Ame - Après ça ? Que se passe-t-il après ?
Monna - Rien.
Ame - Rien ?
Monna - Rien.
Silence.
Ame - Je dois avouer que je suis un peu déçu.
Monna - Pourquoi ?
Ame - Je m'attendais à quelque chose de plus ...
Monna - Plus quoi ?
Ame - Ben, quelque chose de plus long.
Monna - La longueur ne fait pas la qualité.
Ame - Je sais, mais ...
Monna - Mais quoi ?
Ame - Tu peux me laisser finir ma phrase ?
Monna - Oui, excuse-moi.
Ame - Donc, je disais : Je sais que la longueur ne fait pas la qualité, mais je trouve que ton histoire est ...
Sennar - Mauvaise.
Silence.
Ame et Monna se tourne d'un même geste vers Sennar.
Il est assit dans l'ombre de la scène.
Sennar - Ton histoire est mauvaise.
Ame - Ce n'est pas exactement ce que je voulais ...
Monna - Mon histoire est mauvaise ?
Ame - Non, ce n'est pas ...
Sennar - Mauvaise.
Silence.
Ame - (à part) Mais, me laisseront-ils enfin finir ma phrase, sans m'interrompre ? (puis, plus fort) Je disais donc que je ...
Monna - C'est faux ! Elle n'est pas mauvaise.
Sennar - Si, elle l'est.
Monna - Non, elle ne l'est pas !
Sennar - Elle est mauvaise, un point c'est tout.
Silence.
Tout deux s'observent.
Ame soupire bruyamment et sort de la scène, avec un geste irrité.
Sennar sort de l'ombre.
Sennar - N'essaye pas de me le cacher, Monna, je le sais. Ton histoire est mauvaise parce qu'elle est vraie. Tu ne sais que mentir. Voilà pourquoi cette histoire est mauvaise. Ce n'est pas un mensonge.
Monna - C'est faux. J'ai inventé cette histoire, comme les autres. Comme tout ce qui est ici.
Sennar - Pas celle-là, Monna. Pas celle-là.
Silence.
Il s'approche d'elle.
Monna reste immobile.
Sennar - Je le lis dans tes yeux. Lorsque tu ne mens pas, ton regard s'allume, s'embrase d'une lueur si froide, qu'elle me brise le cœur. Tu essaye de restée calme, neutre, comme lorsque tu te perds dans tes mensonges. Mais tu n'y arrives pas. Je te connais Monna, je sais à quoi tu penses, je sais pourquoi tu pleurs. Je connais tes erreurs, tes malheurs, tes peines de cœurs. Je sais tout de toi. Dès le premier jour. Ce jour là, où tu m'as appelé, brûlante d'une fièvre qu'on nomme la Vie. Tu m'as demandé de t'écouter. Je l'ai fait. Et tu m'as parlé de toi. Pour la dernière fois. Tu m'as demandé de t'aider à écrire, à te fondre dans tes rêves, à plonger dans tes mensonges. Je l'ai fait. Et tu as écris ces histoires qui te rongent le cœur, tu les as écrite, guidée par ma voix. Tu les écris encore. Tu m'as demandé de t'aimer. Je l'ai fait. Et je t'aime encore. Du plus profond de mon âme, je t'aime encore. Je serai toujours là pour t'aimer, Monna, tant que tu le voudras.
Monna - Tu m'aimes ?
Sennar - Oui. Je t'aime. Je t'aime bien plus que tu ne peux l'imaginer. Je sais ce que tu penses, ce que tu souhaites, ce que tu rêves, ce que tu es. Je te connais sur le bout de mes doigts, car tu es moi, et je suis toi. Un morceau de ce cœur un peu trop petit, un peu trop esseulé. Je suis ce morceau là, qui se détache du froid qui court dans un coin de ton être. Alors, dis-moi Monna, pourquoi fuis-tu la vérité ?
Silence.
Monna se tourne complètement vers lui, levant la tête pour plonger son regard dans le sien.
Monna - Je ne sais pas.
Sennar - Monna, pourquoi mens-tu encore ?
Monna - Parce que, je suis mensonge. Je suis le faux du vrai. Ce que l'on omet de dire, et ce que l'on ne fait pas. Je suis le "jamais" du "toujours". Je suis le "non" du "oui". Où l'inverse, ça arrive parfois. Je suis ce que les autres cachent, je suis ce qui fait tâche. Je suis les pleurs dans la nuit. Je suis les faux amis. Je suis les sourires forcés, les compliments malhonnêtes. Je suis les paroles creuses, les joies faussées, les politesses vides de sens et l'alibi de ceux qui se font surprendre. Je suis tous ces mensonges sans importances, qui rendent la vie plus élégante, qui rend les autres plus parfaits, qui rend les secrets moins amers. Je suis ce que l'on ne veux pas dire. Une vérité voilée par la fierté ou la peur. Le maquillage des petites laideurs. Ce qui cache mais ne change rien. Mais je ne suis pas une erreur. Je suis le Mensonge. Celui des imprévus, celui des déjà vus, celui des êtres perdus. Le Mensonge que la vie a déçu.
Silence.
Monna - Je ne connais de la vérité, que ce qui veut être caché. Je ne suis qu'un mensonge, celui qui apaise les âmes fébrile, qui errent dans leurs rêves. Je suis leur songe et la douceur qui pourra endormir leurs cœurs, pour qu'ils ne saignent plus sur leur vie. Je suis le mensonge qui les guéris.
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