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ACTE III - Scène 18

Jeudi 05 Novembre, 14 : 37

<7 Years ~ Lukas Graham>

Je regarde la maison qui se dresse devant moi. Elle est magnifiquement construite, avec une façade blanc crème légèrement jaunie par les années, des fenêtres hautes et un toit pentu comme les maisons anciennes. Étonnant qu'elle soit si récente. Ca doit sûrement être des gens très riches, attachés à l'authenticité et la noblesse des vieilles choses, qui l'ont fait construire à l'orée de Lyon. Les volets sont ouverts, ce qui est logique : nous sommes en plein milieu de la journée. Par les fenêtres, je repère des rideaux couleur émeraude élégamment tirés découvrant sur un salon riche et spacieux, par le peu que je peux en dire, placée à dix mètres de la maison, scrutant cette dernière à travers les barreaux du haut portail se dressant devant elle. Je me détourne de la contemplation de ces intérieurs pour regarder le jardin qui l'entoure. Il est immense, contenant des buissons parfaitement taillés et des fleurs multicolores resplendissant dans les pavés, bien que ce ne soit pas du tout la saison. Ce devait être là, sous les branches recourbées d'un arbre qui doit offrir un rafraîchissement merveilleux durant l'été, que se trouvait la fourmilière que m'avait montrée Zoé. Les tulipes rouges poussant gracieusement dans un coin doivent être à la place du bac à sable où je m'amusais, et la maison même s'élevait là où il y a dû avoir le toboggan. J'observe encore un instant l'édifice avant de m'en détourner pour rentrer chez moi.

Mes parents et ma sœur étant absents, au collège pour Pogno et au boulot pour Patrick et Anne, j'ai aujourd'hui pris la décision de passer revoir ce terrain vague dont la construction de la maison par-dessus m'avait tant attristée. Ca doit faire des années que je n'y étais pas allée. En fait, je ne crois pas y être retournée depuis que j'ai appris les travaux qu'ils allaient y faire, il y a bien cinq ans. Le ciel était d'un gris de béton et le vent claquait contre la fenêtre de ma chambre, alors j'ai enfilé une grosse doudoune par-dessus mon pyjama (flemme de me changer) et je suis sortie. Je suis restée bien une heure là, à contempler chaque partie de la nouvelle installation. Après réflexion, il est probable que les locataires étaient partis pour la journée, car personne n'a appelé la police pour les prévenir qu'une fille bizarre, encore en pyjama et aux boucles emmêlées agitées par le vent, les fixaient depuis leur portail.

Une fois rentrée chez moi, d'humeur nostalgique, je décide de regarder à nouveau mes photos d'enfance. Je farfouille dans ma chambre pendant bien une demi-heure, leur emplacement m'étant complètement sorti de la tête. Il faut dire que je ne fais pas ça souvent. Finalement, je mets la main sur un paquet grossièrement emballé de papier kraft dans les fins fonds de mon bureau, et arrache le papier brun pour découvrir les photos. Une cinquantaine de clichés glisse du paquet et s'étendent autour de moi, en auréole. J'en choisis une au hasard et la regarde. Elle montre Zoé et moi, à mon goûter d'anniversaire organisé pour mes six ans. J'étais boudinée dans un costume de princesse rose à paillettes avec de petites ailes de fées dans le dos, et mes cheveux sombres étaient coupés dans une affreuse coupe au bol. Nous sourions de toutes nos dents, c'est-à-dire pas beaucoup, vu les trois trous ornant la bouche de Zoé et la mienne pas moins édentée. Je pouffe légèrement. Je me souviens de cet après-midi : j'avais invitée plein de monde pour une fête gargantuesque et seulement trois personnes sont venues, dont Zoé. Au début du goûter, j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps, mais ma meilleure amie, bien décidée à me remonter le moral, nous a inventé des dizaines de jeux et d'activités : au final, c'était l'uns des meilleurs anniversaires de ma vie. A cette pensée, un mince sourire de mélancolie vient étirer mes lèvres. J'aimais bien cette époque.

Au fur et à mesure que je scrute les clichés, je me rends compte d'une chose : de un, qu'il n'y a pas une seule photo prise après mon arrivée au collège, et de deux, la majorité des photos sont de moi et Zoé. Il n'y a que très rarement d'autres enfants, ou alors des camarades de l'école situés en arrière-plan. C'est étrange, mais j'avais presque oublié qu'à l'ère de l'école maternelle et primaire, je n'avais pas beaucoup d'amis. Je crois que je m'en fichais : j'avais Zoé et cela me suffisait amplement. Je n'avais pas besoin d'autres copains puisque ma meilleure amie était toujours avec moi. Mon sourire s'efface. Cette période de ma vie était tellement simple, sans sentiments, sans d'autres amis, juste Zoé et moi, moi et Zoé. L'adolescence n'a pas tout gâché, mais elle nous a grandement changées. Nous avons commencé à nous faire d'autres potes, à tomber sur des désaccords, à se soucier de nos corps et de nos styles vestimentaires, Zoé a commencé à s'intéresser aux garçons et moi à Zoé. C'est tellement con, l'adolescence. Parfois, être une gamine de sept piges me manque. L'innocence enfantine, courir comme une folle dans la cour, se jeter dans la boue, se faire des amis en trois secondes, faire des grimaces et se foutre du jugement des autres... Tant qu'il y avait Zoé à mes côtés, je me foutais de tout, rien ne pouvait nous atteindre. Maintenant, elle n'y est plus et je suis plus vulnérable que jamais.

Je sens les larmes me piquer avant de perler au coin de mes yeux verts. J'avais Zoé et je l'ai perdu. Elle était tout ce qui comptait à mes yeux et j'ai agi comme une véritable connasse avec elle. Encore pire, j'ai commis l'impardonnable : je suis tombée amoureuse d'elle. Pourquoi, putain ? Pourquoi avoir quitté l'enfance, être entrées dans l'adolescence et être devenues les bâtards plein d'hormones que tous les jeunes sont ? Pourquoi ?

Je suis seule. Je suis tellement seule. Zoé m'en veut à mort à présent, et je m'étonnerais si elle voudra encore me parler un jour, après l'horrible dispute de samedi soir et tous les reproches qu'elle m'a fait. Si elle ne veut plus jamais entendre parler de moi, je la comprends, mais c'est tellement dur. J'ai besoin d'elle et elle a besoin de moi, et je ne remarque qu'aujourd'hui à quel point c'est vrai, ne m'en rendant compte qu'après mon abandon. C'est complètement idiot, mais on ne voit jamais à quel point on aime quelqu'un que lorsqu'on la perd. Le manque est la pire sensation qui puisse exister. Et puis il y a Edward, qui doit probablement me détester aussi. Avant-hier, je lui ai dit un tas de trucs horribles, je lui ai hurlé dessus, je lui ai rejeté la faute alors qu'il n'y était pour rien dans cette histoire, qu'il ne voulait que mon bien. Il doit me haïr. Je suis une horrible amie, et il doit bien rire à présent de me voir aussi seule et désolée. Et Iris... Je n'ai pas agi de façon juste avec elle non plus. Elle est si merveilleuse de gentillesse, c'est une personne incroyable et elle est digne de quelqu'un d'aussi fabuleux qu'elle, qui ne l'abandonnera pas sans un mot aux soirées où elle l'emmènera et ne fuira pas au beau milieu d'une danse. Je suis une lâche, méchante et détestable, et Iris mérite tellement mieux.

Je suis seule. Je sais que c'est de ma faute si je le suis, mais je ne peux m'empêcher de le constater et de pleurer sur mon sort. Je n'ai personne.

Puis, soudain, une photo tombe sur mes genoux. Je la saisis entre mes doigts, la scrutant de toutes parts. C'est un cliché de ma famille. C'était lors du voyage en Nouvelle Zélande qu'on avait fait il y a des années, lorsque je devais avoir neuf ans. Des hideuses lunettes roses vif sont posées sur mon nez, mes cheveux bouclés sont domptées dans une queue-de-cheval trop serrée et il me manque une dent de devant, mais je suis néanmoins radieuse, trépignant devant la sublime chaîne de montagnes que nous étions allés voir. Tout sourire, ma main droite agrippe fermement la hanse de mon sac à dos, tandis que la gauche serre celle d'Anne, ma mère, dans la sienne. Elle semble plus détendue qu'aujourd'hui, et aucune mèche argentée ne vient parsemer ses cheveux bruns. Pogno se tient sur les épaules de mon père, Patrick, le faisant se pencher légèrement en avant pour supporter le poids de sa fille : à l'époque, elle devait avoir six ans. Elle est prise en plein éclat de rire, s'esclaffant, son corps se penchant dangereusement en arrière. Ses boucles courtes sont coincées dans un bob beige et ses mains minuscules parcourent le reste des cheveux de Papa, ses petites jambes dans un pantacourt mauve se serrant autour de son cou. Ce dernier fait la grimace, étranglé, et louche en tirant de la langue. Il a un peu plus de cheveux, lui aussi, même si un début de calvitie est toujours visible, étirant son front comme ceux des sages. Sur cette photo, nous avons tous l'air heureux et détendus, unis. Un sourire nostalgique vient incurver la courbe de mes lèvres.

C'est là que je réalise : je ne suis pas seule. Certes, Edward m'en veut certainement, je ne mérite pas la compassion d'Iris et ma meilleure amie Zoé me hait, mais j'ai toujours ma famille. Mes parents, ma sœur, qui m'ont élevé avec amour dans un environnement sain et plein de tendresse, sans qui je ne serais pas la personne que je suis aujourd'hui. Ils ont forgé ma personnalité et mon caractère, et même si je suis une amie infâme et que je ne mérite actuellement aucun amour, ils seront toujours là pour moi, comme je serais toujours là pour eux. Je suis une connasse infinie, mais je crois que j'ai besoin de soutien et de quelqu'un à qui me confier, pour au moins savoir que je ne suis pas seule au monde et qu'il existe des gens qui tiennent toujours à moi.

Anne, Patrick, Pogno. Ils m'ont donné un prénom merdique à la naissance, mais bordel, je les aime, mes parents. Je ne vois pas pourquoi je n'ai jamais pensé à m'adresser à eux pour leur confier ce que je ressens, ce qui se passe dans ma vie. Etrange, mais je me soupçonne d'avoir préféré en parler à des personnes plus concernés, des adolescents de mon âge ou du moins des gens de moins de trente ans de plus que moi : Edward, Pogno, Zoé ou mes camarades du théâtre. Mais là, j'ai trop de choses à dire, des mots qui ne peuvent pas rester coincées dans ma gorge et autodétruire mon corps de l'intérieur, il faut que je parle, que j'avoue, que je confesse, je n'en peux plus de garder ces secrets pour moi. Tous mes meilleurs amis me détestent, alors je n'ai plus qu'une possibilité : m'adresser à mes parents. Après tout, c'est eux qui m'ont élevé et ils n'ont toujours pas eu leur mot à dire dans cette histoire, alors il serait grand temps de leur donner du temps de parole, non ?

C'est décidé. Dès ce soir, nous serons tous rassemblés autour de la table du salon pour goûter un des plats concoctés par mon père (ma mère va sûrement s'apprêter à le critiquer, en temps que cuisinière professionnelle qui n'a aucune envie d'exercer sa passion lorsqu'elle rentre tard du boulot le soir, puis se raviser au dernier moment au profit de l'ambiance générale). C'est là que je lâcherai la bombe : j'aime les filles, mes amis me haïssent et je suis – au passage – amoureuse de ma meilleure amie depuis des années, qui par ailleurs me déteste également. Peut-être, si l'occasion se prête, que je leur raconterai toute l'histoire qui secoue ma vie depuis maintenant un mois. Je n'ai pas prévu de plan précis, leur dire pourra déjà alléger le poids qui fait pression sur mon cœur sans interruption depuis mardi. On verra pour le reste.

***

<the 1 ~ Taylor Swift>

Je dispose le couvert sur la table du salon, positionnant minutieusement les assiettes, les verres en haut à leur droite et les fourchettes et les couteaux s'alignant parfaitement à leur gauche (Oui, je suis très perfectionniste en matière de couvert. Si deux couverts ou deux verres ne sont pas les mêmes, je risque de stresser durant tout le long du repas). Ce soir est un peu exceptionnel, car ma mère rentre plus tôt du boulot pour dîner avec nous, vers vingt heures trois quart selon elle (Mais la connaissant, ça risque d'être dix minutes plus tard). Ce qui est parfait. Je ne suis pas une professionnelle de la cuisine, mais pour le dîner, j'ai décidé de mijoter un bon petit plat pour ma famille. Cet après-midi, je suis allée chercher tous les ingrédients nécessaires pour des spaghettis au pesto. J'ai même prévu de la salade à côté avec des tomates et du fromage de chèvre ! Tout est organisé pour la parfaite surprise. Mon père est rentré de son travail aux alentours de dix-huit heures, mais depuis, il est enfermé dans sa chambre pour répondre à des mails et est trop concentré pour regarder l'heure : il m'a demandé de l'appeler vers vingt heures pour préparer le repas, mais, bien évidemment, je n'en ai rien fait. Pogno n'a aucune idée non plus du dîner surprise, de toute façon, elle est trop occupée à discuter avec ses amis sur Discord, enfermée dans sa chambre, pour venir voir ce qu'il se passe dans la cuisine. Très fière de moi, je dispose élégamment la salade chèvre-tomate sur les côtés des assiettes, prenant le temps d'en mettre exactement la même quantité, puis retourne vers les fourneaux pour verser les pâtes encore crues dans l'eau qui bout dans la marmite. En attendant les huit minutes de cuisson demandée, j'allume une bougie que je pose au centre de la table et essaye de plier joliment les serviettes, n'y arrive pas, m'énerve et finalement abandonne. Alors que je mélange les spaghettis cuites au pesto, la sonnerie de l'interphone retentit dans le salon. Je me précipite pour ouvrir à ma mère.

Je ne sais pas vraiment pourquoi j'ai décidé d'organiser tout cela pour ma famille, presque comme si je voulais me faire pardonner de quelque chose. D'accord, j'ai beaucoup de gens à qui m'excuser, mais mes parents n'en font pas partie : eux, j'ai plutôt des choses à leur annoncer... Mais je dois avouer que la peur de leur réaction a grandement motivé ma décision de les surprendre avec un repas ce soir.

Alors que je répartis les pâtes dans chaque assiette, ma mère pousse la porte d'entrée de notre appartement. Je l'entends soupirer et poser ses affaires, enlever ses chaussures, puis se laver les mains dans la cabine de toilettes adjacente à l'entrée. Enfin, elle pénètre dans le salon. Son regard encore fatigué par sa longue journée de travail au restaurant parcoure machinalement la pièce, avant qu'il ne tombe sur la grande table. Ses yeux s'arrondissent en voyant la table magnifiquement dressée et le repas encore chaud dans les assiettes, moi souriante à côté.

« Woaw ! S'exclame t-elle. Patrick nous as vraiment gâté ce soir.

- En fait, c'est moi qui aie préparé le repas, » J'interviens.

Elle se tourne vers moi, les yeux écarquillés par l'étonnement.

« C'est toi ? Oh, merci, Beth... C'est magnifique... » Lâche t-elle dans un souffle.

Elle me serre brièvement dans ses bras. Je me blottis contre elle, heureuse et profitant de son odeur rassurante. Elle dépose un baiser sur mon front, avant de me demander d'un ton suspicieux, se séparant de moi pour me fixer, sourcil dressé :

« Dis, tu n'as pas fait ça pour atténuer notre réaction par rapport à tes notes, hein ? »

Je déglutis. A vrai dire, sa théorie est complètement hors de propos, mais après tout ce qu'il s'est passé dernièrement dans ma vie, j'avais complètement oublié de rattraper mes cours et de me concentrer sur mon travail scolaire. Heureusement, Anne et Patrick ne sont pas du genre à vérifier mes notes tous les jours et à suivre minutieusement mes devoirs, mais je dois tout de même me sortir de cette situation. Mon père débarque dans la pièce, me sauvant des questionnements de ma mère.

« Beth ! Gronde t-il. Tu ne m'as pas prévenu à vingt heures comme je te l'avais deman... Oh. »

Il se statufie en voyant la table mise et le repas encore fumant. Puis c'est au tour de ma petite sœur de sortir de sa chambre et de s'étonner de tous mes efforts. Elle n'a pas l'air aussi surprise que Papa ou Maman, se contentant de lever un sourcil et de commenter le dressage de table. Mon père m'ébouriffe mes boucles pour me remercier, me plantant un bisou sur la joue.

« C'est bien ma fillette, ça !

- Papa, j'ai seize ans ! » Je grommelle, mais intérieurement je suis ravie.

Nous nous mettons à table avant que les pâtes ne refroidissent et commençons à dîner. L'ambiance est plutôt joyeuse, Pogno raconte sa journée avec enthousiasme, ma mère nous donne des anecdotes de sa journée en cuisine et mon père nous conseille des articles « super intéressants » qu'il a lu aujourd'hui. J'ai de la chance, car en général, nos repas ne se passent pas trop mal, nous les passons – presque – tout le temps en famille et il y a rarement des silences gênants où personne ne sait quoi dire. Je ne dis pas que nous sommes une famille parfaite : cela arrive régulièrement que nous nous disputions à propos de broutilles et que l'un de nous se mette à gueuler ou à pleurer – ou les deux – avant de terminer sa soirée seul dans sa chambre, et j'avoue que bien trois soirs par semaine, nous nous installons sur le canapé, nos assiettes sur nos genoux, pour mater un film ou une série toute en mangeant et éviter les questions hypocrites sur comment s'est passé notre journée. Mais, selon ce que me racontent parfois Zoé ou Willow, nos repas en famille pourraient être bien pires.

Nous mangeons, nous rions, nous discutons. Ma mère fait même l'effort de ne faire aucune remarque sur ma cuisine : pourtant, je vois bien à son expression faciale parfois grimaçante qu'elle se retient de m'envahir de conseils comme « moins longtemps, la cuisson des pâtes » ou « la salade est trop salée ». Malgré la bonne ambiance, je ne peux pas m'empêcher de stresser. Au fur et à mesure que les spaghettis et la salade disparaissent dans les assiettes, ne laissant place qu'aux tâches vertes du pesto et aux restes de pulpe de tomate, les battements de mon cœur s'accélèrent et mes mains tremblent légèrement. Le moment approche pour les aveux, les révélations que je vais leur faire. Je suis terrifiée, j'ai peur de leur réaction, j'ai peur qu'ils ne m'acceptent pas, ce qui est complètement idiot puisque je sais qu'ils le feront, ils acceptent bien Edward, mais peut-être que ce sera différent pour moi car je suis leur fille, et si ils me détestaient, et si ils refusaient de m'aider, et s'ils disaient que je me suis mise dans cette situation toute seule, ce qui est vrai, et si, et si, et si. Je secoue la tête. Je suis mortifiée par le trac, mais il faut que je le fasse, que je leur confie tout – à propos de ma sexualité, de mes sentiments, de mon histoire. J'ai besoin de leur soutien, de leur aide et de leurs conseils. Je ne peux pas – et je ne veux pas – aller à travers cela toute seule. J'ai besoin de ma famille.

« Papa, Maman... »

Mes mains tremblotent. Le silence se fait à table, je sens leurs regards curieux posés sur moi. Pourtant, je garde le visage baissé, mes yeux verts fixant les trois pâtes restantes se tordant comme des vers de terre dans mon assiette.

« Oui ? M'apostrophe la voix douce de ma mère. Tu as quelque chose à nous dire, ma chérie ? »

J'hésite, me demandant si tout ceci est nécessaire et si je ne peux pas me débrouiller seule, finalement. Soudain, une petite main se pose sur mon genou. Surprise, je relève mon regard vers Pogno, placée à côté de moi, qui me scrute d'un air concerné. Un sourire encourageant s'esquisse sur son visage, et je sais qu'elle a compris ce que je m'apprêtais à annoncer. Je parviens à lire sur ses lèvres ses propos silencieux : « Je t'aime ». Mon cœur se réchauffe, et soudain, avouer tout à mes parents ne me semble plus si compliqué. Je serre la main de Pogno dans la mienne.

« Oui. Ou plutôt, j'ai beaucoup de choses qui se passent dans ma vie en ce moment, et je voulais vous en faire part, car vous êtes ma famille. Je vous aime et j'ai besoin de votre soutien. »

Mon père et ma mère s'échangent un regard étonné. Je ferme les yeux, prenant une grande inspiration, puis les rouvre pour confronter mes parents du regard, prête à lâcher la bombe.

« Déjà, j'aimerais que vous sachiez que j'aime les filles. Je n'ai encore aucune idée sur ma sexualité et je ne suis pas sûre de vouloir mettre un label dessus, mais... C'est qui je suis. »

Mes parents me dévisagent. Je vois bien qu'ils sont surpris, et qu'ils ne savent pas trop comment réagir. Puis mon père se lève pour aller me prendre dans ses bras. Ma mère le rejoint rapidement, tout comme Pogno, et je me fonds dans leur étreinte. Des larmes commencent à perler le long de mes joues – de tristesse, de joie, de soulagement ? Je l'ignore, mais ça fait du bien.

« On t'aimera toujours, ma chérie, qui que tu aimes. Toujours, toujours, toujours...

- Même si tu deviens une criminelle, » Ajoute mon père en me serrant contre lui.

Je lâche un rire pathétique à travers mes larmes.

« Ca tombe bien, remarque malicieusement Pogno, car si Beth aime les filles, c'est une criminelle dans soixante-douze pays. »

Nous rions tous doucement. Le câlin s'éternise un peu, ainsi que nos « Je t'aime » répétés inlassablement, puis nous revenons nous asseoir à table. Ma mère, hésitante, prend la parole :

« Alors... Comment as-tu découvert que... Tu aimais les filles ? Si ce n'est une question trop inappropriée, ajoute-elle aussitôt, soucieuse de ne pas me blesser, et je suis reconnaissante de son tact. Tu as une petite amie ? Ou tu as des sentiments pour une des tes copines ? »

Je me tortille sur ma chaise, gênée, et remets une boucle derrière mon oreille. J'ai l'impression d'avoir déjà fait énormément pour ce soir, et après tout, mes sentiments pour Zoé ne les concernent pas, mais j'ai besoin de leur parler de toute l'histoire et de recevoir leurs conseils.

« En quelque sorte... » Je dis dans un souffle, embarrassée, en fixant mes genoux.

Ma mère échange un regard entendu avec mon père, puis se tourne à nouveau vers moi, l'air concernée. Elle me saisit la main et me regarde avec toute la tendresse du monde. Je relève mes yeux vers elle, l'incompréhension se lisant dans mon regard.

« C'est Zoé, n'est-ce pas ? » Demande t-elle doucement.

Mes yeux verts s'arrondissent. Stupéfaite, je balbutie, ne savant que dire :

« Comment... comment tu le sais ? Ca se voit tant que ça ?

- Il y a des choses qu'une mère sait. A vrai dire, avoue t-elle, je n'avais pas de certitude, mais parfois, quand je t'entendais parler de Zoé ou que je vous voyais ensemble, j'avais des doutes sur la nature de votre relation ou sur tes sentiments à son égard.

- Génial, je grommelle sarcastiquement. Alors tout le monde savait que j'étais amoureuse de ma meilleure amie avant même que je ne le découvre ?

- Yep, confirme ma sœur. Même moi ! »

Je me tourne vers elle et l'étudie, l'œil noir, réfléchissant à divers moyens pour faire taire son regard insolent par la torture. Ma mère intervient, me ramenant à la réalité :

« Et... Est-ce que Zoé sait ? »

Un ricanement sec traverse mes lèvres.

« Non. Mais ça ne servirait à rien de lui dire. De un, elle est hétéro et de deux, elle me déteste.

- Comment ça ? (Mon père fronce des sourcils, les faisant presque se joindre dans une barre sombre et épineuse). Vous êtes meilleures amies. Pourquoi te détesterais-t-elle ?

- C'est une longue histoire, soupiré-je, rejouant les scènes dans ma tête.

- Nous avons tout notre temps, décrète ma mère, implacable. Tu n'es pas obligée de nous la raconter, bien sûr, mais tu disais plus tôt avoir besoin de nos conseils. Nous pouvons t'écouter, te soutenir et t'aider. Nous sommes tes parents, nous sommes faits pour ça. »

Mon père acquiesce. J'hésite le temps de quelques secondes : devrais-je ou non leur narrer les évènements qui ont bouleversé ma vie dernièrement ? Puis je prends ma décision. Je n'ai pas préparé tout ce repas et suis allée jusque là pour rien. Il est grand temps que je m'ouvre à eux. J'ai été une personne néfaste ces dernières semaines, et ait pris de nombreuses mauvaises décisions, mais je sais que mes parents ne me jugeront pas, me soutiendront et m'aimeront malgré tout. J'ai besoin d'eux et de leurs conseils. Et si je ne leur dis pas mon histoire maintenant, quand le ferais-je ?

Je prends une grande inspiration et débute mon récit.

« Bien. Pour tout vous dire, ça a commencé lorsque Zoé s'est intéressée à ce gars, Théo... »

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