L'amour brille sous les étoiles, qui illuminent leur chemin dans un ciel sans nuages.

Le garçon marche en tête en tenant la main de la fille.

La fille chemine derrière en suivant les pas du garçon.

Tous deux foulent légèrement le sentier sablonneux qui longe le petit bois de grands pins et borde le précipice surplombant une plaine.

Au loin, si loin des deux jeunes gens, brillent les lumières de Toulouse.

Tout montre qu'ils sont heureux de demeurer ensemble.

Rien ne montre qu'ils ont souffert.

Rien, à part les blessures sur le visage de le fille.

Rien, à part l'air inquiet et protecteur du garçon.

Ils sont bien.

Malgré son long manteau beige et épais, la fille frissonne, alors le garçon ôte son tour de cou bleu sombre et le passe autour de la nuque de la fille.

Elle le remercie avec reconnaissance, du regard.

Ils reprennent leur route, qui s'enfonce en une bifurcation entre les conifères assombris par la nuit, déjà tombée en ce mois de janvier.

Une main dans celle de la fille, l'autre passée dans son dos pour l'aider à marcher, le garçon avance pas après pas.

Une main dans celle du garçon, l'autre autour de ses épaules pour soutenir son propre poids, la fille marche.

Unis contre les ombres, ils ne font plus qu'un au cœur de la nuit.

Rien ne pourrait briser ce moment merveilleux.

Épuisée, la fille s'arrête, une main sur ses côtes.

Elle est fatiguée, elle ne peut plus continuer et a besoin de s'arrêter.

Attentionné, le garçon la porte à moitié jusqu'en bordure du sentier, là où la terre s'arrête sur un vaste espace bas légèrement boisé.

Il l'installe tout contre lui, les yeux à l'encontre des petites lumières célestes qu'elle aime tant.

Elle sourit.

Ce moment est magique.

Si fantastique qu'elle ne l'aurait jamais espéré.

La fille pose sa tête brune sur l'épaule du garçon.

Le garçon caresse de sa main foncée les cheveux de la fille.

Jamais les deux ne se sont dit qu'ils s'aimaient.

Mais c'est comme s'ils le savaient depuis longtemps.

Ils s'aiment depuis leurs premiers jours.

Ils s'aiment sous le doux ciel de velours.

Et ils s'aimeront depuis aujourd'hui jusqu'à toujours.

Aucun d'eux ne parle, mais ils n'en ont pas besoin.

Car le silence le fait pour eux.

Le silence, et le contact de leurs deux corps.

Le fin visage blanc de la fille se lève vers celui du garçon.

Le garçon la regarde aussi, inclinant son petit chignon.

Les yeux bruns plongent dans les yeux gris.

Les yeux gris plongent dans les yeux bruns.

Les cœurs battent à l'unisson.

Et les esprits entrent en fusion.

Avec la plus grande précaution, comme pour ne pas la briser, le garçon caresse la joue empourprée de la fille.

La fille sourit, et l'on croirait voir un mouvement léger de sa petite tête, tel le balancier d'une vieille horloge qui se fait d'avant en arrière, de haut en bas.

Alors, le garçon y voit un signe, prend délicatement son menton et dépose ses lèvres sombre sur ses lèvres rosée.

Ce fut un doux baiser.

Un baiser aimant, passionné, mais aussi léger qu'un papillon qui se pose sur un brin de lavande, sans en abîmer une seule fleur.

Un baiser furtif et éphémère.

Aussi éphémère que la vie.

Tout deux, ils en ont conscience.

Puis ils s'écartent pour mieux se rapprocher.

Et ils s'effleurent à nouveau des lèvres.

Et ils recommencent, encore et encore.

Ayant conscience du prix de cet instant.

Du prix de ces doux baisers.

Du prix de leur amour.

Enfin, ils finissent par se séparer, et leurs regards se décrochent l'un de l'autre pour contempler le magnifique ciel étoilé.

Leurs doigts s'entremêlent et se lient étroitement, dans un doux mélange de lait et de cannelle.

Un curieux mélange de blanc et de noir, que les plus fermés d'entre nous n'acceptent guère, à tort.

Car c'est le plus beau mélange de la Terre.

Un mélange d'amour et de soutien.

Un mélange de belles couleurs sous le ciel piqué de mille lumières.

Ils se connaissent à peine et sont pourtant si proches sous l'immensité nocturne !

Ils ne se sont parlé que quelques fois, mais on dirait deux fiancés qui connaissent tout l'un de l'autre.

Car elle a besoin de lui et lui a besoin d'elle.

C'est ensemble qu'ils lutteront contre l'idiotie du monde, ligués contre toutes les injustices qu'il contient.

En ce soir d'hiver, assis au bord de ce gouffre paisible, leur amour est plus fort que tout.

Plus fort que l'horreur.

Plus fort que la haine.

Plus fort même que les lueurs célestes qui persistent dans l'obscurité, malgré les éclats aveuglants de Toulouse.

—Je t'aime... murmure le garçon. 

Elle ne répond rien, mais tout dans son regard reflète ce qu'il vient de lui dire.

Ils se blottissent l'un contre l'autre, émerveillés par le spectacle que leur offrent la nature et la nuit, compagnes et aimantes à leur image.

Ils sont blottis pour se protéger du froid.

Blottis face à l'adversité, à la cruauté et aux discriminations.

Blottis contre l'idiotie humaine.

Et blottis pour toujours, jusqu'à la fin de leur existence.

Mais ils savent que la vie et le bonheur ne tiennent qu'à un fil.

Ainsi, ils profitent de ce miracle, de cet instant précieux, le temps d'un court mais merveilleux moment.

Le temps d'un soir.

Le temps d'un rêve...