Interlude ² 🎬
« Je suis là où tu m'as laissé, sur la route du néant.
Ici la lune n'éclaire jamais, elle jaunie avec le temps. »
Boîte en argent - Indila
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Plus nous nous éloignons de la ville, et plus le ciel se pointille de boules de feu. Elles s'enflamment dans l'obscurité affolante. Il me faut réguler ma respiration afin de ne pas laisser mes pensées déraper.
Parfois, ce qui se passe dans ma propre tête me fait peur. Parce qu'il y a tant de mots que je ne sais plus lesquels retenir. Je ne sais plus lesquels importent, et lesquels exprimer à voix haute. Je ne sais plus lesquels croire et lesquels suivre.
Dans l'habitacle de la voiture, l'insécurité règne. Avant, mon père aurait essuyé mes larmes.
Aujourd'hui, il les fait couler.
Nous sortons du véhicule et nous dirigeons vers le centre de la plaine. L'automatisme est marqué, tant nous avons pu faire ces gestes auparavant.
Il fait noir, ici. Si noir que j'ai l'impression que la nuit pourrait m'engloutir et ne faire qu'une bouchée de mon être.
"Je ne vais pas passer par quatre chemins." annonce mon père.
Ne pas laisser mes pensées déraper. Faire le tri.
"Je vais partir." achève t-il.
Une dague de panique s'enfonce en moi à sa révélation. Il m'est impossible de contrôler le flux des innombrables mots qui me traversent en même temps.
"Partir ? Comment ça ? Pour aller où ? Et... et Maman, et les autres ?"
L'affolement se perçoit dans le vibrement de mes cordes vocales.
Je ne voudrais pas lui porter autant d'attention dans le creux de ma voix, si précieuse pour ce que je veux en faire ; mon métier. Mais j'en suis incapable. Malgré tout ce qu'il a pu me faire subir, malgré ses gestes et ses paroles, malgré le poison qu'il a répandu dans mes veines et le chaos qu'il a engendré dans le développement de l'adolescent que j'étais et que je suis toujours, oui, malgré tout ça, l'imaginer m'échapper m'est inenvisageable.
Les muscles de mes épaules se contractent.
Mes mains tremblent, merde.
Lui, ses poings sont serrés. Sa tête se balance pour regarder d'un côté, puis d'un autre, comme pour m'éviter, fuir ses responsabilités de père, ou tout simplement parce que je le dégoutte trop pour que je ne daigne rester dans son champ de vision plus de cinq secondes. Mes artères se compressent, le sang pulse plus vite.
"On en a discuté avec ta mère. Ça ne sert plus à rien de faire des efforts. Je vais partir vers Séoul, plus proche de ma boîte, et elle m'a chargé de te le dire."
Ses yeux se lèvent au ciel.
Il est impatient. Agacé.
"Je ne supporte plus être à la maison, comme tout le monde dans cette putain de baraque, de toute façon. Et c'est inutile de te dire pourquoi. Ta mère et moi, nous envisageons le divorce. Tu as gâché notre mariage... Tu as tout gâché, jusqu'à ce que je sois obligé de prendre sur moi et de me sacrifier pour partir. Je n'aurais jamais cru que la vie de famille dont je rêvais soit bousillée par mon propre fils."
Je reste impassible, quand bien même je me déchire intérieurement. L'aiguille pointe le bout de son nez. Elle tente de me faire saigner. Je ne voudrais pas lui céder, et pourtant, des larmes font leur cascade le long de mes pommettes.
"Comment tu peux dire ça ?" je m'emporte, sous le choc. "Comment tu peux dire que je n'ai rien fait pour arranger les choses ? Comment tu peux même avoir espéré que je fasse une seule chose pour apaiser des tensions que je n'ai même pas engendrées ?! Je n'ai fait qu'être moi ! Je n'ai fait que vivre, et tu m'as détesté pour ça !"
"Taehyung." m'appelle-t-il de cette voix que je déteste, aussi froide que les abysses.
Cette voix que j'aimerais lui arracher pour qu'il n'use plus jamais de son pouvoir sur moi, et qu'il ne me donne plus jamais ainsi la peur de mourir d'angoisse et de culpabilité.
Putain, comment ses mots peuvent-ils encore m'atteindre autant ? Peut-être parce que je l'ai aimé. Et peu importe à quel point une personne se métamorphose, une part au fond de nous aimera toujours la personne qu'elle était initialement. C'est un sentiment assez horrible, que de me sentir raccrocher à lui autant que je voudrais le repousser.
Les contradictions en moi sont chaotiques.
Je me tais. Alors il continue.
"Je n'ai rien d'autre à t'annoncer que ça ; je pars. Je n'ai pas la force de perdre mon temps avec toi, dès qu'on essaie de discuter, tu ne vois le monde que par tes yeux. Tu a toujours été si égoïste, putain. Essaie de te mettre à notre place, un peu."
C'est affolant.
Affolant, la colère qui court dans mes veines, flotte dans ma tête et se recrache par mes lèvres.
"Pourtant, c'est ce que tu as toujours fait, ces dernières années, perdre ton temps avec moi ! Quand tu me criais dessus, quand tu me poussais, quand tu m'humiliais, et me faisais me sentir comme un moins que rien, tu prenais bien ton temps !" je hurle, hors de moi.
C'est déchirant, de balancer tout ça à quelqu'un dont le souvenir heureux et enfantin me hante. Mes poumons me font mal sous ma cage thoracique.
"Surveille ton langage, gamin." me prévient-il.
"Je ne suis plus un gamin, merde ! Et c'est bien pour ça que je te répugne ! Parce que je ne suis plus un enfant, parce que je ne suis plus ce petit garçon que tu pouvais modeler de tes préjugés stupides, je ne suis plus la personne avec qui tu aimais passer du temps parce que je n'avais pas encore de personnalité, pas encore de passion. Je n'étais que ton reflet et c'est pour ça que tu m'aimais !"
Il fait un pas vers moi.
"Tu mélanges tout, Taehyung. Ça n'a rien à voir, et tu le sais très bien !"
Il a crié. Jusque là, il était resté calme.
Je fais un pas également. Je ne suis pas du genre à me laisser me faire écraser, même lorsque je suis sur le point de m'éteindre.
Sur le point de dépérir.
Même sans lumière, je continuerai de me battre. Même sans éclat, je continuerai de faire perdurer mon jeu, de revêtir mon masque pour simuler une force que je rêve d'avoir. Alors qu'en réalité, dans le creux de mon ventre, je hurle à l'aide, je hurle à qui voudrait bien l'entendre que tout n'est que mascarade, et que je ne suis pas ce jeune homme éclatant et caractériel.
"Tu étais la personne que je respectais le plus, mais maintenant, je réalise que tu n'es juste qu'un connard !" je m'énerve.
Je reste stoïque. Pourtant, j'ai cru un instant que ma voix allait se briser, que mon masque allait s'effriter.
Il s'avance. Sa main se pose abruptement sur mon épaule. Il serre entre ses doigts, jusqu'à me faire mal, mais je ne recule pas. C'est là que je reconnais une odeur.
Il a bu.
Pourtant, il n'a pas l'habitude de le faire, et n'en a pas besoin pour s'emporter. Mais cela explique ses paroles un peu plus violentes, ses regards un peu plus assassins, ses propos un peu plus décousus.
"Tu oses dire ça à celui qui t'a élevé ? Je n'ai fait aucune erreur avec toi, je t'ai éduqué comme j'ai éduqué tes frères et ta sœur, et pourtant, aucun d'eux ne se sont comportés comme toi. Tout le monde s'entend bien dans cette famille. Tu es le seul à toujours t'embrouiller avec les autres, et tu ne te remets pas en question ?!"
Je me tais. Sa prise sur mon épaule se fait de plus en plus rude.
"Aïe."
Ses doigts s'enfoncent dans les muscles du haut de mon dos, et moi, je commence à faiblir.
"Je n'ai jamais rien fait." je me défends, mais je n'arrive même plus à savoir si je le pense ou si je tente de m'en persuader.
"Jamais rien fait ?"
"N-non."
Il sort quelque chose de sa poche arrière. Je m'éloigne, par réflexe. Mais ce n'est que son téléphone, qu'il déverrouille et dans lequel il fouille un moment avant de diriger l'écran dans ma direction.
Alors je me vois moi, à cette soirée, en train d'embrasser un autre garçon, avec ce sourire en coin que je veux m'écorcher. Mon cœur se met à battre plus vite. J'ai du mal à garder le regard fixé sur l'appareil. Je crois même que plus je m'observe, plus je me dégoute.
"Regarde toi."
Je détourne les yeux, incapable d'assister au spectacle. Incapable d'imaginer la répulsion sur le visage de mon père, la répulsion dans les yeux de Junghyun lorsqu'il a pris la vidéo. J'ai même cru apercevoir, sur le petit écran, l'expression dégoûtée de quelques étudiants à la soirée.
Mon père se déplace pour que la vidéo soit de nouveau dans mon champ de vision.
"Je t'ai dit regarde toi, Taehyung !"
"Non !" je crie, au bord de la crise.
La pointe est si proche. Si proche.
"Même toi, tu as honte. C'est pitoyable. J'aurais tout fait pour te relever. Mais ça n'a pas marché."
Je clos les paupières, si fort que j'en ai mal aux globes oculaires. Je voudrais repousser ces dernières loin derrière ma tête, pour ne pas avoir à affronter mon reflet.
Mais mes cheveux se font tirer en arrière. Dans le mouvement, mes orbes s'entrouvrent de nouveau, et je ne peux rien faire d'autre que de contempler ce qui se trouve devant moi. J'observe mes propres mains, celles du Taehyung du passé, se faufiler sous le t-shirt de mon vis à vis. Un flot incontrôlable ne se gêne plus pour dévaler la pente de mon visage.
"Tu es maudit, Taehyung. Une étoile maudite. Si tu m'avais écouté, alors rien de tout ça ne se serait passé, et on aurait pu continuer à s'apprécier. Si tu n'étais pas aussi égoïste, si tu te comportais mieux, si tu étais moins grossier, si tu te décidais à faire des efforts pour notre famille, mais ce n'est pas ce que tu as choisi. C'est triste, parce que parfois, j'ai encore l'espoir que tu changes, j'ai encore l'espoir de retrouver celui que tu étais avant de te perdre."
Tu es maudit, Taehyung.
La vidéo se coupe, la prise dans mes cheveux me relâche. Mes jambes ne me tiennent plus et je m'écroule à genoux dans l'herbe. La chlorophylle va certainement écorcher mon jean d'une couleur verdâtre.
Lui, ne fait que jurer dans sa barbe. Jamais il n'est allé aussi loin, J'imagine que la substance qui coule dans ses veines n'y est pas pour rien.
"Ne pars pas." je murmure.
Je suis faible, si faible. Parce que pendant les cinq minutes qui suivent, je ne fais que le supplier de ne pas me laisser. De ne pas m'abandonner comme si je n'avais jamais compté, comme si la relation fusionnelle qu'on a pu avoir n'était qu'un mirage dérisoire.
"Ne pars pas..."
Je ne tente pas de me relever, peu importe à quel point ma position est humiliante. La peine est trop puissante pour que je ne daigne me mettre debout.
Je ne peux que souffler ces quelques mots, emplis de toute ma peur bleue à l'idée de le voir disparaître. Ma main serre mon t-shirt au niveau de ma poitrine, tant l'aiguille fait mal ce soir.
Une étoile maudite.
***
Ce soir-là, j'ai écrit un poème.
Je l'ai exposé pour crier à l'aide.
Mais personne n'a su lire entre les lignes.
***
Je suis ailleurs, et ici à la fois. Je vacille entre le monde. Je ne sais plus ce que je voulais faire. Ou peut-être que si. J'en sais rien, mais putain, je me sens euphorique. Je me sens euphorique, et pourtant, lorsque j'apporte mes doigts à ma joue, je crois sentir une goutte déraper.
Bientôt, c'est moi qui dérape. Je me rattrape à un garçon, m'excuse, puis fronce les sourcils en apercevant son visage. J'aligne les informations visuelles dans mon cerveau éméché. Il me dit quelque chose, j'ai déjà dû le croiser dans les couloirs du lycée.
"Ça va ? Tu m'as l'air bien imbibé." rit-il. "Tu es seul ?"
Il n'attend pas de réponse pour ouvrir les lèvres à nouveau.
"Tu veux te ramener avec nous ? Taehyung, c'est ça ? Je t'ai déjà vu, Hoseok m'a déjà parlé de toi. Moi, c'est Namjoon. Ouhla, tu vacilles là, viens t'asseoir."
Je n'ai compris que la moitié de ce qu'il m'a dit, mais j'accepte son offre.
Mes fesses s'enfoncent dans un sofa. Ma tête tourne un instant, puis les objets autour de moi se stabilisent. Mes muscles se détendent, alors que ce Namjoon tente de m'intégrer au groupe.
Je sais que je n'aurais pas dû autant boire. C'est ce que je me dis à chaque fois, et pourtant, je recommence. Parce que ça me fait ressentir pendant quelques heures ce sentiment de vie que j'arrivais à atteindre si facilement avant.
Qu'est-ce qui a changé ?
Le garçon de tout à l'heure s'assure que je vais bien. Je le remercie vaguement, honteux de paraître aussi dépravé devant lui et sa bande d'amis.
Hoseok m'a déjà parlé de lui, je crois, me disant qu'il aurait émis l'hypothèse de rejoindre l'option théâtre l'année prochaine. Tant mieux, il manque toujours d'effectif. Et en plus de ça, il m'a l'air tout à fait gentil. Je regrette presque qu'il rencontre son futur professeur dans un état pareil.
Mon téléphone vibre. Je l'extirpe de ma poche, et me concentre pour lire les mots de mon meilleur ami s'afficher sur l'écran.
P4rkJ1min : Ça te dit qu'on se voit, demain, avec Hoseok et Soojin ? Ils veulent voir un film au cinéma.
Je cligne des yeux à répétition. J'ai toujours le cerveau retourné, et mes doigts semblent flotter au-dessus de mon clavier. C'est un peu drôle.
Kim_Taehyung : Okkj veux bie, mais c drole par contre mes doigt flottent mec
Je veux ranger mon téléphone, mais il vibre à nouveau.
P4rkJ1min : Ça va Taetae ? T'es où ?
Je fronce les sourcils.
Kim_Taehyung : Ben oui ça va bien ! Comme toujours, jvais toujours bienn de toute façon
Kim_Taehyung : Jsuis à la soirée de Hyein pouquoi ?
Pas de réponse cette fois-ci. Je hausse les épaules, et finis par m'intégrer à la discussion du groupe face à moi. Le temps passe. Je ne sais plus différencier une seconde d'une éternité.
Je suis à moitié endormi sur le canapé lorsqu'une main se pose sur mon épaule. Elle ne m'est pas inconnue. Je me retourne, et reconnais un visage d'ange, ainsi que des cheveux blonds. Jimin se bouche une oreille, tout en criant par-dessus la musique.
"Taehyung, s'il te plaît, viens !"
Je ne comprends pas ce qu'il me veut. Je me lève quand même, titube. Namjoon, qui observait la scène, me rattrape de justesse.
"Tu peux m'aider à le faire sortir d'ici ?" lui demande Jimin.
Namjoon acquiesce sous les orbes suppliantes de mon meilleur ami. Les deux m'escortent en passant leur bras sous mes épaules. Nous nous retrouvons tous les trois dehors. Le vent frais fouette mon visage, mais je meurs de chaud. Ça doit être toute la boisson que j'ai ingurgitée. La musique résonne encore dans ma tête, mais le silence en dehors des murs calme mes neurones surexcités.
"Taehyung. Écoute moi, maintenant."
Jimin pose ses deux mains sur mes épaules, pour me forcer à le regarder dans les yeux. Mais je m'éloigne, mon cœur s'enfonçant au plus profond de moi. Des flash me viennent. Un souvenir d'une main sur mon épaule qui m'écrase, puis qui tire mes cheveux et me force à regarder droit devant moi. Jimin ne fait aucun commentaire face à ma réaction. Il recule, prend ma main à la place, en caresse la paume. Namjoon s'assure de loin que tout va bien.
"Putain, Taehyung, tu te détruis, est-ce que tu en as conscience ? Je t'en supplie, arrête de faire ça, ça ne va rien régler. La prochaine fois que tu as envie de sortir, appelle moi, et alors tu n'as qu'à venir chez moi et je ferai tout pour te changer les idées. Mais faire ce que tu as fait ce soir ne sert à rien, ça va t'enfoncer, et je déteste te voir t'enfoncer, Tae. Il est hors de question que je te laisse te mettre dans cet état. Maintenant, tu rentres avec moi, tu dors chez moi et je ne te lâche plus. Taehyung, merde, je te laisserai pas tomber. Tu as besoin d'aide, il faut que tu l'acceptes."
Je le dévisage, éberlué.
Qu'est-ce qu'il raconte ? Je n'ai jamais eu besoin d'aide...
Il me prend par le poignet, et à l'aide de Namjoon, il m'aide à faire le trajet jusqu'au prochain arrêt de bus.
"Merci, euh..." commence Jimin.
"Il s'appelle Namjoon." je souffle.
"Merci pour ton aide, Namjoon. Tu peux y retourner, c'est gentil."
"De rien ! J'espère que ton ami se portera mieux."
"J'espère aussi." murmure Jimin.
Namjoon nous quitte, et Jimin me ramène chez lui.
Ce soir-là, dans la familiarité de sa chambre et de son odeur, c'est la première fois que je m'autorise à pleurer devant lui. À laisser couler les mots qui m'arrachent le cœur depuis qu'il est parti.
***
Jimin et Namjoon sont les seuls à m'avoir vu réellement au fond du trou. Les émotions en sang. Le cœur entrouvert.
Je crois que j'ai fini par me remettre de son départ. Mais je ne pensais pas voir Seokjin, la même année, partir à son tour pour aller faire ses études à l'autre bout du pays. Alors chez moi, il ne restait plus que ma mère, amorphe, et mes frères et ma soeur, distants. Le monde s'effondrait placidement à mes pieds.
Je suis entré en seconde année de lycée. Namjoon s'est inscrit au théâtre. Su-ho n'est plus jamais revenu, lui, et nous nous sommes éloignés comme tant de gens s'éloignent. Je le croise dans les couloirs de temps en temps, et c'est un peu douloureux de voir que même un bonjour ne passe pas la barrière de nos lèvres. Nous ne sommes plus que des étrangers.
Puis il y a toujours ce garçon qui déambule comme un fantôme dans son manoir. Souvent, mes yeux glissent sur lui, avec tant de lenteur et d'appuie, que je me demande comment il fait pour ne pas le remarquer.
Comme si le monde autour de lui ne valait pas la peine d'attirer son attention.
Il m'arrive, pour une raison qui m'échappe, de vouloir l'aborder. Converser avec lui, rien que pour comprendre. Ou peut-être pour retirer sa main de son collier, ou encore pour remettre en place cette mèche qui lui gène tout le temps les yeux, si bien que je ne peux jamais bien déchiffrer l'expression dans ses orbes.
Il m'angoisse.
Et paradoxalement, il m'attire.
"Encore à l'observer ?" s'amuse Jimin.
"De qui ?" s'intéresse Namjoon, à ses côtés.
Je ne les écoute que d'une oreille.
Je continue de fixer ses yeux rivés au sol, ses vêtements bien trop amples, et la boule dans sa gorge.
"Ce garçon, là bas. C'est quand que tu vas l'aborder, Tae ?"
Je détourne mon attention de ses gestes minimalistes à contre-coeur, et me concentre sur Jimin.
"L'aborder ?" je m'étonne.
"Ce mec t'obsède depuis un bon bout de temps, je suis pas aveugle."
"M'obsède ? T'exagères."
"Pas du tout. Tu te vois pas, en train de le reluquer, d'analyser chacun de ses mouvements."
"Je tente juste de le comprendre." je me justifie.
"Ouais ouais..." s'amuse Namjoon, prenant le parti de Jimin.
"Il m'intéresse, c'est tout. En fait, c'est plutôt qu'il m'inspire. Je voudrais écrire une pièce de théâtre avec un personnage comme lui."
"Tu vois, tu avoues qu'il t'intéresse !" s'exclame Jimin, fier de lui.
"Pas dans ce sens là. Seulement d'un point de vue artistique. Il y a quelque chose chez lui qui détonne, quelque chose chez lui que j'ai envie de puiser."
"Qu'est-ce que tu voudrais puiser ?"
"Ses mots." je réponds, sans réfléchir.
"Ses mots ?"
Jimin me regarde de travers.
"Taehyung, ne me dis pas que-"
"Non." je le coupe. "Pas ses mots dans ce sens là. Pas les mots qui lui sont comptés. Juste ses mots, c'est tout. D'ailleurs, pour le jeu, j'irai voir un professeur."
Jimin et Namjoon acquiescent.
Et moi, mon regard coule une dernière fois sur sa silhouette, avant qu'il ne disparaisse au coin d'un couloir et ne laisse derrière lui aucune trace.
Comme si la simple idée de se faire remarquer pouvait lui refiler une souffrance incommensurable.
Mais savait-il que, moi, je ne faisais que ça, le remarquer ?
***
Une année de plus. C'est ce qu'il m'a fallu pour panser les plaies. Pour réapprendre à respirer, afficher ce masque de confiance sur mon visage. Pour contrôler de nouveau mes actions, le timbre de ma voix, même en dehors de la scène.
Même au derrière du grand rideau rouge.
Une année de plus. C'est le temps que j'ai passé à nouer de profonds liens avec Jimin et tous les autres. Des liens qui, dans mes cauchemars, se brisent comme du verre. Des liens que je crains toujours de voir disparaître.
La peur noue le ventre, lorsque l'on a expérimenté un départ.
Parce que soudain, on réalise que tout peut s'échapper.
Une personne. Un objet. Même une putain d'émotion. Les choses filent entre nos mains, et alors il devient si dur de les chérir, de s'y attacher sans la peur de les voir s'effondrer à nos pieds.
Mais Jimin, Namjoon, Soojin, Hoseok, Mina et Jackson, ils éclairent ma peur d'un brin de lumière. Alors je me suis remis à briller.
Une année de plus. C'est le temps que j'ai passé à l'effleurer du regard à la moindre opportunité.
C'est le temps que j'ai passé à contempler son comportement, ses habitudes, minuscules. Elles sont presque invisibles à l'œil nu. Ses sourcils qui se froncent, ce petit mouvement des lèvres qu'il a lorsque des élèves viennent l'aborder encore, encore et toujours pour les mêmes raisons. Ses poings qui se serrent lorsqu'on lui adresse la parole. Sa façon de se gratter le nez lorsqu'il ne trouve pas quoi répondre en retour. Puis son silence qui en dit bien plus que s'il ne s'exprimait. Le langage de son corps qui s'efface dans le décor et ne laisse entrevoir que le noir profond de son obscurité.
Jungkook.
C'est son prénom.
Et Jungkook, je me dis qu'il est mon opposé.
Moi, je brille devant les autres alors qu'à l'intérieur, pas une once de lumière ne vit. Alors que lui, il n'est que l'ombre de lui-même, mais possède pourtant au fond de ses pupilles, si on s'approche assez, une flamme dansante qui ne cherche qu'à s'évader, prisonnière de son silence.
Tant est-il que je n'ai jamais osé l'approcher.
Mais une année de plus. C'est ce qu'il a fallu pour que ça change.
Mes yeux s'écarquillent devant la liste que je tiens dans mes mains. Je la serre si fort qu'elle se froisse. Ma respiration s'emballe. Elle envahit le vide du couloir.
"C'est pas possible..." je murmure.
Je reviens sur mes pas, et ne quitte pas des yeux la feuille au creux de mes doigts.
"C'est pas possible." je répète, pour moi même.
Mes pas me mènent à une pièce en particulier. C'est très rare que je m'y rende, mais cette fois-ci, c'est plus fort que moi. Les clés tintent lorsque j'ouvre la porte. Je m'y faufile. Il n'y a personne.
Je placarde à plat la fiche sur une table, faisant passer mon regard sur ce visage que je ne connais que trop bien. Il fixe l'objectif, et pourtant, il y a quelque chose de fuyant dans sa position. La photo est en noir et blanc, mais je devine le brun de sa chevelure, ainsi que l'argent de l'éternel pendantif autour de son cou. Il semble disparaître, se fondre au papier.
Il y a sa photo. Sa putain de photo. Sur la liste des inscrits au théâtre pour cette année. Et son prénom, juste en dessous.
Je me détourne de la table, m'enquiers de fouiller dans un tiroir en particulier. Un de ceux qui rassemblent les fiches personnelles des élèves. Je ne devrais sûrement pas mettre mon nez là dedans, j'en ai conscience.
Je veux seulement en savoir plus sur lui. Un indice. Quelque chose, n'importe quoi, qui m'expliquerait son comportement, son silence, qui m'expliquerait pourquoi chaque fois que je pose le regard sur ses deux billes profondes, j'ai la putain d'impression qu'il va s'évaporer.
Mes doigts passent d'un dossier à un autre, puis s'arrêtent net à la vue de son nom. Je récupère les quelques feuilles qui constituent ce que le lycée a d'informations sur lui.
Je parcours du regard sa classe, sa date de naissance, ses bulletins, ses notes, ses appréciations. Un fin sourire s'affiche au coin de mes lèvres ; c'est un très bon élève. Je n'en doutais pas une seule seconde. Mais certaines des appréciations me font froncer les sourcils.
On lui demande plus de participation en classe. On lui reproche de ne pas s'intéresser à ce qu'il se passe en cours, ou encore de ne pas s'intégrer aux travaux de groupes.
Je ne suis pas étonné, seulement heurté par ce que de tels mots ont du causés en lui. Car j'ai l'impression que cette façon dont il rejette les autres autour de lui et ce problème de communication ne sont pas anodins. Il y a quelque chose derrière tout ça, de bien plus sombre.
Il y a quelque chose, dans la boule compacte au niveau de ses cordes vocales, dans son silence qui ne cherche qu'à exploser, son vide qui ne cherche que le chaos, qui le rend si attrayant.
Et moi, je vais enseigner ma passion à ce garçon.
Je vais enseigner le théâtre à Jeon Jungkook.
Je ne pouvais pas rêver mieux.
J'inspire longuement, avant de tomber sur des informations un peu plus personnelles. Son adresse, que je survole sans trop d'intérêt, son numéro de téléphone, que je contemple avec l'envie de l'inscrire dans le mien, ce que je ne fais évidemment pas. J'échoue sur le nom de ses parents, accompagnés de leur profession et de leurs coordonnées. En dessous, il y a les noms de la fratrie.
Il a deux sœurs.
Ça, je ne m'y attendais pas. Il paraît si souvent dans sa bulle et seul, que je l'aurais cru fils unique.
Mais soudain, je fais un pas en arrière.
Ma main s'écrase contre mes lèvres, alors que la culpabilité s'invite sournoisement dans mon corps pour venir enserrer mes membres.
J'ose m'avancer, puis saisir à nouveau le feuillet entre mes doigts. Je peine à lire.
Mais c'est clair comme de l'eau de roche. Aussi vif que la douleur d'une percée de l'âme. Aussi violent qu'une mauvaise nouvelle. Ça tombe sans qu'on s'y attende.
Jeon Somi
Âge : //
Études/Profession : //
Décédée à l'âge de 15 ans.
Cause du décès : Suicide.
Merde, je m'en doutais.
Je me doutais que quelque chose clochait.
***
"Salut Jimin, à demain !" je clame.
"Tu rentres pas avec moi et Hobi ?"
"Non, je vais rester ici un peu. On se voit demain."
Jimin ne me pose pas de questions, mais m'envoie un regard curieux.
Il a de quoi. D'habitude, je rentre avec lui, mais là, quasiment tout le monde a déjà déguerpi, et il ne reste que Jungkook dans mon dos. Je peux presque sentir son angoisse d'ici, et sa façon de se tenir droit, ses bras le long du corps, comme s'il ne savait pas quoi en faire.
Nous nous retrouvons seuls.
Je me retourne, un sourire plaqué sur mon visage.
Je le contemple un moment. Il fuit mon regard. Ses yeux passent partout sauf sur moi, et ses doigts le démangent. On dirait qu'il se retient de saisir son collier. Ça me donne envie d'attirer son attention, de faire enfin coulisser son regard dans le mien.
À la place, je me contente de ranger mon calepin et mon stylo dans mon sac, histoire de le laisser respirer. Il vient d'apprendre qu'il jouera Roméo, ce n'est pas rien. J'ai peur d'aller trop vite, avec lui. J'ai toujours peur de faire un pas de travers et qu'il m'échappe. Peur de battre des ailes trop fort et de le faire fuir.
Je l'ai enfin entendu.
Sa voix, je veux dire.
La première fois, c'était il y a plusieurs semaines déjà. Elle était exactement comme je l'imaginais. Hésitante, douce, mélodieuse et repliée sur elle-même. Mais j'ai été trop loin, j'ai été trop avide, je lui ai posé trop de questions, pour l'entendre et l'entendre à nouveau, alors il s'est renfermé aussi solidement qu'un coquillage.
Il y a même un moment où nous n'avons pu communiquer que par messages, même lorsqu'il était face à moi.
La torture, pour moi.
Mais maintenant, nous sommes là. Et si avant, il était inatteignable, à présent, il me semble voir une brèche dans laquelle m'engouffrer.
"Tu n'as pas oublié." je fais.
Au début de la séance, je lui ai demandé de venir me voir à la fin.
"Non." répond-il, et sa voix tremblote un peu.
Je m'attends à devoir prendre les devants de la conversation, mais je suis coupé dans mon élan.
"J'ai aussi quelque chose à dire, hyung. Par rapport à mon rôle."
Je me désintéresse de mon sac et de mes affaires. Cette fois-ci, je m'approche de lui. Je déteste tenir une conversation en étant aussi éloigné de mon interlocuteur. Mais Jungkook, il me pousse toujours à reculer, à changer mes habitudes, à prendre sur moi même pour m'adapter à ses besoins. Je n'arrive pas à savoir si j'aime ou déteste ça.
"Dis moi tout." je m'amuse.
Il baisse le regard. Je me retiens de bouger pour attirer de nouveau ses orbes sur ma personne.
Il a besoin d'espace, de tant d'espace. Et il me paraît loin, tellement loin. C'est étrange. Je devrais fuire ce sentiment au creux de ma poitrine, celui qui me dicte que nous avons bien plus en commun que ce qu'il ne laisse paraître. Mais je n'y arrive pas. Il y a une douleur en lui qui colle à la mienne, peut-être par leur intensité, ou bien par leur opposition, leur compatibilité.
Il recule, pose une main sur l'un des sièges en velours derrière lui.
Il recule toujours. S'échappe toujours. Fuit toujours. Chaque parcelle de son âme, chacune de ses cellules se replient sur elles-mêmes, comme s'il voulait se retirer du monde. Il me glisse sans cesse entre les doigts, se tasse pour s'évader au moment où je m'y attends le moins. Et ça me rend dingue, parce que ça me donne envie de le rattraper, de le tirer à moi, et de m'acharner pour extirper tous ces mots qu'il tait.
"Je ne veux pas de ce rôle. Je ne veux pas jouer Roméo. Donne le à Namjoon ou- ou à Jimin, ou même Hoseok, n'importe qui... mais pas moi."
Je fronce les sourcils. Il échappe à mon regard insistant. Je le vois se concentrer sur mon torse puis le côté droit de mon visage. Sûrement mes boucles d'oreilles.
"Bien sûr que si, tu vas jouer ce rôle, Jungkook. J'ai tout prévu, t'en fais pas. C'est même de ça dont je voulais te parler maintenant."
"N-non ! Je ne veux pas jouer ce rôle !"
Je me mords la lèvre, embêté.
"Je t'assure que tu es capable de le jouer. Si je te l'ai donné, ce n'est pas pour rien, je sais ce que je fais, comme je l'ai dit à Mina. Je suis expérimenté, et ce n'est pas la première fois que je monte un spectacle sur scène, ni la dernière. Tu n'as qu'à me faire confiance. Je t'ai observé, et je suis certain que ça te va à merveille."
Je t'ai vu jouer, Jungkook. J'ai vu la hargne que tu dissimulais au fond de toi. J'ai vu tout ça, et je ne peux pas l'ignorer, putain. J'ai vu comme tu mourais d'envie de crier tes émotions au monde. Et j'ai aussi deviné que le moment de l'explosion était proche, et que si je ne t'y accompagnais pas, alors peut-être que tu t'effondrerais.
Mais pourquoi ça m'importe autant, hein ? Rien n'a plus de rationalité lorsqu'il s'agit de Jungkook, et le contrôle m'échappe aussitôt qu'il m'apparaît. Je hais ça.
Pourquoi es-tu si dur à atteindre ?
"Encore, j'aurais pu jouer Juliett- Julian, mais Roméo, c'est bien trop. Tu ne comprends pas."
"Non, je ne comprends pas." je réponds, frustré.
Non, je ne comprends pas.
Je ne te comprends pas.
Je comprends beaucoup de choses, mais toi, je ne te comprends pas. Tu t'effaces de jour en jour, tu glisses entre les doigts de tout le monde et je ne comprends pas.
Est-ce à cause de sa sœur ? Merde, je n'en sais rien. Il n'a jamais rien évoqué d'elle jusqu'ici, et s'il devait le faire, j'attendrai que ça vienne de lui. Je ne suis pas censé savoir.
Ses doigts se crispent contre le siège.
Je ne le quitte pas du regard.
Je voudrais tant qu'il fasse le pas. Qu'il saute dans le vide, pour une fois, et se laisse aller.
"Hyung... je n'ai jamais brillé."
Je me fige. J'empêche tout juste à temps certaines émotions de peindre mon visage. À la place, je reste impassible, et réponds.
"Tu sais, je n'ai jamais brillé non plus."
Je cherche son regard, le trouve, m'appuie dessus.
Est-ce que tu comprends, Jungkook ? Sauras tu déchiffrer, toi, ce que je tente d'exprimer et qui échappe à tous ?
"Tu dis n'importe quoi. Tu brilles tellement..."
"Non." je réfute. "Non, Jungkook, je ne brille pas."
Je ne brille pas, putain.
"Bien sûr que si. Partout où tu vas, au lycée, et- et surtout sur scène, tu attires naturellement toute l'attention."
"Ça ne m'intéresse pas tant que ça. Parfois, l'important n'est pas de briller pour le monde. Je m'en fiche de briller pour des inconnus."
Sa main lâche le dossier derrière lui pour saisir la lanière de son sac. J'ai toute son attention. Il ne semble plus prêt à fuir. Ça me perturbe, mais surtout, c'est une sensation qui me plaît bien trop.
"Moi, je n'ai jamais réussi à briller auprès de ceux pour qui je l'aurais voulu... alors ça n'a aucun intérêt. Tu ne peux pas prétendre que tu es le seul dans le noir."
Je n'ai jamais réussi à briller assez pour mon père. Pour ma mère. Puis pour mes frères. Pour ma sœur.
Je n'ai fait que périr à leurs yeux.
"Enfin bon, je sais pas pourquoi je te dis tout ça. Être un bon acteur, ça s'apprend. Et je vais t'apprendre. C'est pour ça que je voulais te parler. En fait, j'ai quelque chose à te proposer..."
Je chasse la pointe désagréable qu'a laissé notre précédente conversation en affichant un sourire neuf.
Ce n'est pas grave, de toute façon. Non, ce n'est jamais très grave.
"Bien que je te sente capable de jouer Roméo, et bien... Tu aurais quand même besoin d'entraînement, de quelque chose en plus que les autres. Tu as un potentiel fou, et je veux vraiment que tu puisses l'exploiter, et t'en rendre compte toi-même. Mais les cours en groupe comme ça, même si c'est un moyen de s'améliorer, ce n'est pas forcément le meilleur. Alors je me suis dit que..."
Je m'arrête. Jauge ses réactions. Mais rien d'alarmant, alors je continue.
"Je me suis dit que tu pourrais prendre des cours particuliers. Un truc du genre tous les mercredi ou samedi après-midi ? Ce sera plus simple pour moi de parfaire ton jeu en tête à tête que dans un groupe, et je sais que les autres n'auront pas besoin de ce genre d'aide. Si tu es d'accord, alors on pourrait se rejoindre chez toi par exemple ? Évidemment, c'est que si tu es d'accord, mais vraiment, ce serait pratique. Je la sens bien, la pièce de cette année. Je veux que tout soit parfait, c'est dans ma nature, je suis un perfectionniste jusqu'aux bouts des ongles, mais si ça ne te va pas, je vais pas non plus te forcer. Mais bon, ce serait bien..."
"... chez moi ?" est la première chose qu'il répond, l'air affolé.
Pourquoi ce détail semble t-il tant l'ébranler...?
Je n'ai pas le temps de m'attarder sur ce détail, puisque la sonnerie de mon téléphone retentit lourdement entre nous.
Je m'excuse, décroche en voyant le nom de Jongho. Je baisse le son de mon téléphone, pour être le seul à l'entendre.
"Taehyung, tu savais que papa venait pour le week-end ?"
Mes membres se figent. Je retiens un tremblement de me parcourir.
"Ah bon ? Non j'en sais rien."
"Je te préviens, parce que tu sais... tu devrais peut-être pas rentrer à la maison à ce moment-là. Mais Junghyun m'a dit qu'il avait un truc à te dire avant."
"Ok, je vais l'appeler."
Je raccroche. Les battements de mon cœur m'écorchent. Putain, qu'est-ce que Junghyun me veut ? Et pourquoi mon père vient, merde ?
Je retourne vers Jungkook. Ce dernier a les yeux grands ouverts, la respiration courte et tente de me partager ses peurs.
"Je veux bien pour les cours mais-"
Je me déteste à l'instant même où je lui coupe la parole. L'urgence me fait agir sans réfléchir.
"Ok super ! Excuse moi, je dois vraiment y aller. Si tu changes d'avis, dis le moi par message !"
Son visage se décompose, alors je tente de lui dire par les yeux que je regrette, mais il ne semble pas comprendre. Nous sortons et nous saluons alors que je me précipite pour sortir du lycée. Une fois cela fait, je compose immédiatement un numéro.
"Ah, Taehyung, salut. Je voulais te dire-"
"Putain, Junghyun, c'est toi qui a fait ça, pas vrai ?"
"Écoute moi s'il te p-"
"J'en étais sûr, c'est toi qui a arrangé ça, toi qui l'a forcé à revenir ce week-end ! T'as du encore lui dire un tas de trucs pour espérer que je me rabiboche avec lui !?"
"Écoute, Taehyung, fais un effort, juste pour cette fois, je t'en supplie ! Si tu te comportes bien, si tu tentes de vous réconcilier, alors il reviendra peut-être et ce sera comme avant. On est tous d'accord pour ça sauf toi. Pense à nous, pour une fois, s'il te plait..."
"Je ne peux pas." je murmure. "Je ne veux pas. Jamais. Je ne veux plus jamais le revoir. J'irai chez Jimin."
Je n'attends pas plus longtemps avant de raccrocher. Je manque de trébucher sur un caillou, et jure avant d'envoyer un message à mon meilleur ami.
Il n'y aura jamais de réconciliation.
Jamais.
Je me persuade que c'est parce que j'ai bien trop de rancune pour que ça arrive.
En réalité, je serais seulement incapable de le regarder dans les yeux sans que la pointe ne tente de me tuer.
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COUCOU
J'ai mis mille ans à update wtf ?
Ceci est la seconde partie de l'interlude, mais il y en aura trois :) (parce que c'était beaucoup trop long et j'aime pas les chap giga longs...) on se retrouve très bientôt sur la troisième donc ! (demain ou après demain sûrement)
Que pensez vous du pdv de Taehyung maintenant qu'il y a quelques scènes Taekook ?
J'ai peur que cette longue interlude vous ennuie je vous avoue, même si elle est très importante 😀 J'espère que non 😭
ILY À + ♥︎♥︎♥︎♥︎♥︎♥︎♥︎♥︎♥︎
-Elise-
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