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Chapitre 25 🎭

Les jours qui suivent, j'ignore les nombreux messages de Taehyung. Ils affluent, ils hurlent puis ils s'adoucissent pour devenir suppliants. Je suis incapable de lui répondre.

La semaine suivante, je sèche le théâtre. Après tout, je ne suis pas obligé d'y aller, puisque lorsque je m'absente, ce n'est ni notifié, ni envoyé à mes parents.

Tout se passe dans les non-dits.

Comme je hais ces non-dits.

Ils détruisent ma famille, puis maintenant ils détruisent ma relation avec Taehyung et celle que je commençais à construire avec les autres membres du théâtre.

De temps en temps, je croise Taehyung dans les couloirs, de loin. Parce que je fais toujours attention à ce qu'il ne soit pas trop proche, pour que je puisse l'identifier avant qu'il ne le fasse, et fuir en toute discrétion avant même qu'il n'ait remarqué mon existence.

Je suis agacé. Un des messages de Taehyung tourne et se retourne dans mon cerveau.

Kim_ Taehyung : Jungkook, tu fuis encore...

Il a raison, je fuis. Chaeyoung est là pour moi, mais je n'ai revu personne du théâtre depuis ce jour là. Enfin, j'ai pu les apercevoir de loin, mais nous n'avons pas parlé, car je détourne le regard, je m'éclipse au détour d'un couloir, je contourne les confrontations. Je prends la fuite.

Parfois, je croise aussi Jimin. Il me regarde d'un drôle d'air, comme s'il était déçu, et ça me broie. Peut-être est-ce parce que je lui avais promis de ne pas lâcher Taehyung si jamais on se nouait d'amitié. Il est son meilleur ami, je comprends sa volonté de protection.

Mon cœur me brûle.

Taehyung - 745 mots.

C'est étrange comme j'aimerais l'approcher. Pourquoi le voudrais-je encore ? Il m'a trahi. C'est un fait. Les preuves sont là. Il y a ce score, et il y a lui que je ne fais qu'éviter.

Nos regards ne se sont entrechoqués qu'une seule fois depuis. J'étais dans le bus, stoppé à l'arrêt juste en face du lycée, et ma tête s'écrasait mollement contre la vitre pour observer l'affluence des lycéens quittant l'établissement. Puis je l'ai vu passé, il allait prendre le bus juste devant le mien, qui l'amènerait à son quartier à lui. Je ne sais pas comment il a senti que j'étais là, derrière la vitre, mais son visage a pivoté. Et là, je ne pouvais plus fuir. Il a semblé surpris d'abord, s'arrêtant sur le trottoir, laissant la vague d'étudiants le bousculer légèrement.

Moi, j'étais tétanisé.

J'ai vu sur ses lèvres qu'il prononçait mon nom. Pas que je sache lire sur ses lèvres, mais parce que j'ai reconnu cette expression particulière qu'il a quand il le prononce. Sauf que cette fois ci, la lueur dans ses yeux était opaque, une averse dans ses pupilles. Ça pleurait de l'intérieur.

J'ai essayé de l'ignorer, de ne rien faire de cette information troublante.

Il a sorti son téléphone, et après quelques secondes, j'ai senti vibrer le mien. Il m'a envoyé quelques mots, qui m'ont fait douter.

Kim_Taehyung : Pourquoi me faire ça... Qu'est-ce que j'ai fait pour que tu m'abandonnes ?

Un instant, j'ai arrêté de superposer l'image d'un monstre à celle de son visage. Un quart de seconde, j'ai émis l'hypothèse de sa sincérité. Et puis j'ai eu envie de me foutre un poing dans la figure. Jungkook, arrête de vouloir trouver le bon en tout le monde. Il t'a trahi. Tu ne peux pas ressentir d'empathie.

Le souvenir de sa lettre m'a tordu le ventre.

Jungkook, je veux tes mots.

Bien sûr, qu'il les voulait. Sur ce coup là, il ne m'a pas menti.

J'ai gardé les yeux baissés sur mon téléphone, sans ne jamais les relever, un ressentiment puissant au travers de la gorge. Et mon bus a fini par démarrer. Du coin de l'œil, je voyais son corps rester au même endroit, ne bougeant plus d'un pouce, lasse. J'ai laissé une larme m'échapper.

Puis les lendemains, j'ai poursuivis cette routine. Mais pourquoi me paraît-elle si absurde ?

Le jeudi, je sèche encore le théâtre.

Ils se passeront de Roméo.

Et puis, ils n'ont qu'à donner le rôle à Jackson, et Juliette à Mina. Tout le monde serait heureux, et on en parlerait plus.

Ma raison me souffle,

Mais toi, Jungkook, toi, tu serais heureux ?

***

"Tu es sûr de prendre les décisions qui sont bonnes pour toi ?" me chuchote Chaeyoung, alors que le professeur de coréen récite mollement son cours.

Je relève la tête, auparavant enfouie dans mes bras. Je papillonne des paupières. J'ai failli m'endormir.

"Tu as l'air épuisé..." me souffle mon amie.

J'intègre finalement sa question, et me mords l'intérieur des joues.


"Plus je suis loin de lui, mieux c'est pour moi."

Chaeyoung acquiesce. Je joue distraitement avec le bouchon de mon bic, tordant la petite tige en plastique qui s'en échappe de mon index.

"Mais quand même... tu ne trouves pas que sa réaction est bizarre pour quelqu'un qui te voudrait du mal ? On dirait qu'il ne comprend même pas pourquoi tu lui en veux."

Sur ce coup là, elle n'a pas tord. Mais ça me tue de me l'avouer. Évidemment que je doute, je doute tellement. Mais j'ai tant douté dans ma vie, j'ai douté de la gentillesse de Heechul jusqu'au dernier moment. Il me faisait croire que je valais quelque chose, et le jour suivant, je n'étais plus rien. J'étais son ami le plus précieux, puis j'étais son jouet.

Mais Taehyung... Taehyung n'est pas Heechul.

Et c'est là toute la différence.

Néanmoins, si je doute, si j'empêche cette haine de me recouvrir tout entier, c'est lui faire potentiellement confiance à nouveau. C'est risquer de tomber d'encore plus haut.

Voyant que je ne réponds rien, Chaeyoung reprend la parole.

"Vous avez l'air tous les deux dans un sale état. Je ne sais pas exactement ce qui vous liait avant... avant cette histoire, mais ça vous affecte. Tu penses pas qu'il pourrait y avoir un malentendu ?"

J'encre mes yeux dans les siens, et ne peux pas empêcher cette lueur d'espoir de se répandre dans ma poitrine, pour l'enflammer.

Non, il ne faut pas.

"J'aurais aimé, mais il y a son prénom et son score écrits noir sur blanc, comment ça pourrait être un malentendu ?"

Chaeyoung s'apprête à ouvrir la bouche, mais la voix sèche et lente de monsieur Baek met en pause son mouvement.

"Vous deux, au fond, ça vous dérangerait de prendre en note ce que je dis ? N'oubliez pas que vous avez des examens en fin d'année. Moi si je suis là c'est pour vous, pas pour moi."

Le professeur nous lance un regard noir, et je baisse les yeux entre les lignes de mon cahier, honteux. Je sais que si je les relève, je verrai les pupilles malveillantes de Heechul et de tous les autres.

Monsieur Baek reprend son discours. Chaeyoung me donne une tape sur l'épaule. Elle pointe discrètement le coin d'une feuille qu'elle tend vers moi. Je l'interroge du regard, et elle me répond par son index posé sur des phrases écrites au crayon de papier.

Je lis, soucieux.

Ce que je voulais dire, c'est que ce score, il n'y est peut-être pour rien. Peut-être que c'est un autre Taehyung, ou même, n'importe qui aurait pu se faire passer pour lui.

Le mouvement incessant de mon doigt contre le bouchon cesse. Je hausse les épaules, l'air indifférent.

En réalité, à l'intérieur, je bouillonne.

D'espoir.

***

Chaeyoung fait spécialité art. Dans les couloirs, elle me salue avant de filer. Moi, j'ai deux heures de trou, comme tous les vendredi à dix heures sonnantes. En général, je passe mon temps libre au cinquième étage du bâtiment des sciences, là où il n'y a jamais personne, là où il n'y a jamais cours, et où le soleil tape contre les vitres et réchauffe le carrelage habituellement gelé en hiver.

Je monte les escaliers, en contre sens. Je tente de faire abstraction du bruit insuportable, des pas tonitruants des autres étudiants, de quelques élèves de seconde qui élèvent bien trop la voix, ou encore de la sonnerie sifflante qui retentit encore dans ma boîte crânienne, même après s'être diluée dans l'air.

Je suis fatigué et j'ai mal à la tête. Mais plus je monte, plus les lieux deviennent calmes. Et le chaos devient une vague bande son en arrière plan, tandis que les battements de mon coeur, rassurants, sont bien plus proches. J'ai les oreilles en feu, et chaque son me revient amplifié de plusieurs décibels. C'est pourquoi je recherche le silence et le calme.

C'est aussi pourquoi, à l'avant dernier étage, je me retourne brusquement lorsque je déchiffre un très léger crissement de chaussure derrière moi. Mais il n'y a rien, alors je continue ma route.

J'ai hâte de m'isoler, de sentir les rayons sur ma peau fraîche, fermer les yeux et n'écouter rien d'autre que le cliquetis lointain des salles de classe actives.

J'atteins la dernière marche, m'engage dans le couloir, jusqu'à ce qu'un son différent des autres ne s'invite contre mes tympans sensibles. Des pas, une respiration, et l'instant d'après, une main qui m'agrippe le poignet. Paniqué, je tente de me retourner, de trouver la source de cette approche.

"Qu'est-ce que-"

Je me tais soudainement, la gorge nouée. C'est sûrement Heechul, il ne faut pas que je lui donne mes mots.

Je n'ai pas le temps de voir le visage de l'individu tandis que je me fais tirer dans ce qui me semble être une salle de cours vide, plongée dans le noir. Je veux à nouveau me retourner, mais la porte claque et le noir recouvre entièrement ma vision. J'ai juste le temps de voir une main baguée fermer la pièce à clef.

Heechul, portant des bagues ?

La peur me noue le ventre. Par réflexe, je veux demander qui es tu ? pourquoi ? mais je me retiens de justesse, les mains tremblantes. Je fais quelques pas à reculons, jusqu'à ce que mon dos ne rencontre une table.

Le tintement de clefs m'indique qu'il les range précieusement dans sa poche. Sûrement pour que je ne puisse pas les récupérer.

Mes pupilles se dilatent, commencent à s'habituer à l'obscurité. Je ne vois que l'ombre de mon vis à vis, placé juste devant la porte. C'est plus fort que moi, ma parole se délie et ma peur s'accroît avec elle.

"Dégage, Heechul." je lance, sentant mon mal de tête s'intensifier.

L'ombre me répond. Mais le timbre de sa voix me fige.

Ce n'est pas Heechul.

"Jungkook, tu vas m'écouter."

L'ombre se déplace sur le côté, laissant l'interstice de la porte apporter un peu plus de lumière. Sa silhouette se dessine plus clairement. Sa chemise dans son pantalon, son manteau à la main, son sac de cours sur l'épaule opposée, ses bagues aux doigts, de fines boucles d'oreilles pendantes comme il a l'habitude d'en porter, des mèches méthodiquement embrouillées. Je peux même voir la bosse de son téléphone qui ressort de sa poche droite, et celle des clefs dans l'autre.

Sa silhouette s'approche minutieusement de moi, comme si je pouvais m'envoler à chaque instant. Moi, j'ai la respiration difficile, et le cerveau en ébullition. Il me faut un moment pour comprendre qu'il est vraiment là, ce qu'il vient de faire, ce qu'il s'apprête à faire.

Je ne dis rien, effrayé.

Il va me prendre mes mots.

"Je suis vraiment désolé, c'est pas la meilleure façon d'aborder la conversation avec quelqu'un, j'en ai conscience... mais tu ne fais que me fuir. Tu fais ce que tu veux, tu en as le droit, mais moi je refuse. Je refuse juste pour une fois, je refuse juste le temps d'avoir des explications."

Il s'approche toujours, je suis silencieux. Il dévie sur le côté, pour appuyer sur un bouton au mur. Les volets électriques s'ouvrent délicatement, dans une sonorité pourtant infernale.

Il y a soudain tant de stimulations extérieures sur mes tympans que j'ai envie de me boucher les oreilles, de me mettre en boule sous une table et de recroqueviller mon corps en moi même. Je veux me protéger, me fondre et me faire petit comme un enfant. Revêtir ma carapace et ne plus jamais en sortir.

La carapace, c'est un système de défense généralement extérieur. Mais moi, ma carapace est d'autant plus tenace, il est dur de l'abandonner pour faire face à ce qui me terrifie, parce que ma carapace, elle est à l'intérieur.

La lumière s'infiltre progressivement dans la pièce, mais je n'y fais pas attention. Je ne peux plus détourner mon attention de lui, que les rayons révèlent au grand jour.

La dernière fois qu'il se tenait aussi clairement devant moi, il était au sol et avait l'air grossièrement vulnérable. Les sensations me reviennent, mes jambes qui picotent, les fourmis dans ma tête. Je tente de les calmer. Le pire, je crois bien, c'est que cet état là me force à donner mes mots sans même que je ne m'en rende compte.

"Laisse moi sortir. Je ne veux pas parler, je ne veux pas te voir. Je te déteste."

Chaque syllabe me déchire.

Taehyung s'avance, je recule entre les tables pour l'éviter, alors il arrête, et me dévisage de loin.

"Tu ne sortiras pas d'ici tant que tu ne m'auras pas expliqué, Jungkook. Tu ne penses pas que j'ai le mérite d'avoir des explications ? Tu peux partir, tu peux me fuir, tu peux m'abandonner, mais je t'interdis de le faire sans me dire pourquoi !"

Sa voix s'élève au fur et à mesure de son discours, comme quelque chose de trop retenu. Ses yeux me déstabilisent, et il ne s'arrête pas là.

"Tu te rends compte ? Tu me violentes, tu me dis des choses atroces à la gueule, sans même me donner une seule explication ! À moins que tu fasses ça par simple sadisme, mais j'ai du mal à y croire."

Ses pupilles me traversent tant leur puissance est forte. Ses paroles me donnent envie de croire à son innocence. Je suis déchiré entre l'envie de le voir comme un monstre ou celle de creuser plus loin.

Sans réfléchir, c'est moi qui m'approche habilement. Dans ma tête, il n'y a que de la brume. J'arrive à sa hauteur et sors son téléphone de sa poche, sous sa sidération. Je l'allume pour vérifier ; rien. Mais je ne ne suis pas soulagé. Qu'est-ce qui me dit qu'il n'a pas autre chose qui m'enregistre dans son sac ?

"Jungkook, qu'est-ce que tu fais ? Pourquoi tu-"

"Tu m'enregistres ?" je demande froidement, brouillé.

Il m'interroge dans un froncement de sourcils. J'ai encore son téléphone en main, je le presse de toute mes forces, pour me tenir à quelque chose.

"Est-ce que tu m'enregistres ?" je répète plus fort.

"T'enregistrer ?" s'étonne t-il. "Mais pourquoi faire ? Putain, tu penses vraiment que je ferais ça, Jungkook ? Tu penses que je participe au jeu ?"

J'entrouvre les lèvres, sidéré. Depuis que je me suis avancé, nous sommes bien plus proches, assez proches pour que les détails de son visage m'apparaissent. Tout y crie l'incompréhension. Taehyung s'agite, et je surprends une peur démesurée en lui, qui me fait vasciller tant elle est profonde, et tant il tente de la cacher.

"Attends, vraiment ?!" s'exclame t-il, en écho à mon vide de réponse. "C'est vraiment ce que tu penses de moi ? Tu ne me fais pas confiance à ce point ? Alors à tes yeux je suis dégoutant, pitoyable, un monstre... C'est pour ça que tu m'abandonnes, c'est ça ? C'est pour ça que tu me laisses tomber ? Tu n'as pas le droit de faire ça !"

Sa dernière phrase se répercute en moi, parce qu'elle a été traversée par ce genre de tréssautement qui trahi quelque chose de trop grand. Trop grand pour que je ne le comprenne encore.

J'ai de plus en plus du mal à le voir en monstre. Cette image se décompose au fil de ses mots. Elle se brise et fond à mes pieds. En face de moi, il n'y a plus quelqu'un qui m'a trahi, ou que je détesterais.

Il y a juste Taehyung.

Je garde le silence, tout contre moi, comme un doudou que l'on serrerait dès que ça ne va pas. Je l'attire à moi et ne le quitte plus. Sans lui, je vais craquer.

Je lui rends son téléphone, sors le mien. Les doigts tremblants, j'envoie à Taehyung le compte Instagram qui s'occupe du jeu et des scores. Alors qu'il sent vibrer son appareil, il le dévérouille.

Un moment s'écoule.

Puis l'incompréhension de Taehyung s'évanouit.

"Oh mon dieu..." comprend-il, la voix plus frêle.

"Maintenant, laisse moi sortir." j'ordonne, mais une part de moi me hurle de rester là, avec lui.

Je me détourne pour atteindre la porte, mais Taehyung pose sa main sur mon épaule pour m'arrêter. De dos, je l'écoute.

"J-jungkook. Ce n'est pas moi. Je n'ai jamais fait ça. Jamais. Je ne suis jamais allé sur ce compte, je n'ai jamais même pensé à y aller. Et si je le pouvais, je l'aurais fait supprimer. Ce n'est pas possible... Jungkook, ne pars pas, je t'en supplie, écoute moi."

Quand je me retourne, il lâche mon épaule, et je me fige de stupeur.

Un frisson me traverse et me paralyse.

Sur le coin de son oeil, juste là, il y a une larme.

Une seule.

Elle me va droit au coeur, elle le compresse comme rien ne l'a jamais fait. Elle est puissante. Elle m'effraie. Je tends la main, comme pour l'essuyer, mais je m'avise au dernier moment.

"... pourquoi ?"

Ma question, sortie de nulle part, demande l'origine de cette larme. Ça semble faire sens pour lui, puisqu'il me répond.

"Je te l'ai dit, Jungkook. J'ai peur de perdre les choses. Tu ne peux pas m'abandonner."

Sa tournure de phrase me fait froncer les sourcils. Il ne la formule pas comme tout le monde le ferait, en disant je ne veux pas que tu m'abandonnes. Ça ressemble plus à une supplication.

"Si ce n'est pas toi, si tu n'as rien fait, alors pourquoi il y a ton nom ?" je reprends, essayant de faire abstraction de la vulnérabilité qui s'échappe de lui.

"Je n'en sais rien, je te jure que j'en sais rien, merde. Voir mon nom là, ça me dégoute. Et me dire que tu as pu penser ça de moi ça me- ça me retourne complètement. C'est la dernière chose que je veux."

Son ton est sincère, empli d'inquiétude et d'empressement fragile.

"Je suis désolé que tu ais eu à penser ça de moi."

Son regard devient dur à supporter, maintenant que l'atmosphère s'est calmée, alors je le contourne pour m'approcher des grandes vitres contre le mur du fond.

J'observe un instant la poussière qui se bouscule et vole calmement sous les rayons d'un soleil d'hiver. La cour et les lycéens grouillants, vus d'en haut, m'ont l'air insignifiants, lointains.

Et puis je réalise mes actes, à quel point j'ai été dur, complètement fermé sur moi même. À quel point je n'ai pas remis en question une seule fois sa culpabilité, contrôlé par ma peur et ma colère.

Cette larme... cette larme à son oeil gauche me lacère. Je ne sais pas exactement pourquoi, ni comment, mais je l'ai profondément blessé. Et ça n'a pas seulement un rapport avec le fait de me perdre, au fond je le sais.

"C'est moi qui suis désolé. Si j'avais su..." ma voix se coupe, tandis que je repense aux propos affreux que je n'ai eu aucun scrupule à lui jeter à la figure. "Si j'avais su je n'aurais jamais dit tout ça. Je ne t'aurais jamais poussé, ni insulté, ni évité. C'est moi... qui ne te faisais pas assez confiance."

Dire cela m'arrache une grimace. J'observe le reflet de Taehyung dans la vitre. Lui fixe mon dos, sans le lâcher, les épaules plus soulagées qu'au début de notre conversation.

"C'est moi qui n'arrive pas à te faire confiance. J'aurais dû me douter dès le départ que tu n'y étais pour rien. Dans ma tête, c'est sans cesse brouillon, et je t'avoue qu'en ce moment même, j'ai encore... j'ai encore du mal à te croire. Je ne te fais pas confiance entièrement."

Toujours dans la vitre, je suis hypnotisé par son regard qui ne me quitte pas. A t-il conscience de la profondeur de ses iris ?

"Il y a toujours une part de moi qui se méfie. Et l'autre qui sait très bien que c'est faux. C'est tout le temps comme ça, le bien et le mal, le chaud et le froid, le silence et le bruit. Je suis un champs de bataille, je suis désolé..."

Taehyung se fraie un chemin entre les tables, se plante à côté de moi à une distance raisonable.

"Tu n'as pas à t'excuser. Si j'avais été à ta place, j'aurais eu la même réaction."

J'acquiesce délicatement.

Mon crâne me lance toujours, mais l'apaisement est revenu. Les secondes s'écoulent sans que ni lui ni moi ne prenons la parole. Seul le chahutement lointain des étudiants nous parvient.

"Jungkook." m'appelle t-il, brisant le silence.

Ma vision se concentre à nouveau sur son reflet. Sa peau paraît douce sous la lumière matinale. Il passe une main dans ses cheveux, dégageant son front et ses yeux perçants.

"Hm ?"

"J'ai vraiment aimé t'embrasser."

Oh.

Mon corps est parcouru d'un frisson dévastateur. À travers la vitre, son regard a rejoint le mien, il m'emprisonne, m'empêche de réfléchir correctement.

Il fait un pas.

"Je n'ai fais qu'y penser après. Sans cesse. Je te revoyais toi, tes lèvres, tes mains, ton regard, ta respiration, tout."

Mon ventre se tord violemment. Il est... honnête, franc. Et ça me rend encore plus fébrile. Sans que je ne le contrôle, ma respiration devient plus instable. J'essaie de la réguler, comme la rougeur de mes joues, que je sens chauffer imperceptiblement. Ses pupilles cherchent quelque chose dans les miennes, toutes les informations que je voudrais bien lui donner. La manière dont il me décrypte sans gêne me plonge dans une bulle réconfortante.

Cette bulle m'a manqué.

Les bras le long du corps, mes doigts torturent le bas de mes manches trop longues. Je déglutis, et réponds, les lèvres tremblantes.

"Moi aussi. Je t'imagine s-souvent recommencer."

Ses traits s'assombrissent, et je crois pour la première fois l'avoir déstabilisé de manière visible.

Je ne fais plus un geste, embarrassé. Lui tourne la tête pour observer mon profil, intensément.

Un temps qui me paraît interminable s'écoule, durant lequel je sens mes mains devenir moites et inutiles. Elles pendent sans que je ne sache quoi en faire.

Je me gratte le nez, mal à l'aise.

Il faut que je change de sujet avant de succomber sous mon propre poids.

"C-comment tu as pu avoir les clefs de la salle ?"

Un sourire éclaire son visage.

"J'y ai accés en tant que professeur, même si rares sont les fois où j'en ai besoin."

Une question me taraude. Une question que je veux lui poser depuis très longtemps. Je pivote vers lui pour lui faire enfin face.

"Comment se fait-il que tu sois professeur ?"

Il remonte les manches de sa chemise d'un geste nonchalant. Je suis le mouvement docilement des yeux, sans en prendre conscience.

"Disons que... je suis assez reconnu dans le domaine du théâtre. Il y a deux ans, il manquait d'un professeur pour faire l'option. Au début, l'équipe de l'administration voulait donc abandonner les cours. Mais moi, j'avais déjà joué dans des troupes de renommé, je vagabondais déjà ici et là, et j'étais venu dans ce lycée spécialement pour cette option. On m'avait dit que la salle de théâtre était magnifique, et c'était mon rêve d'étudier ici... Il était hors de question que je ne fasse pas théâtre à cause d'un manque de professeur. Alors je me suis proposé. On a accepté que je fasse les cours, puisque de toute façon, les notes des options ne comptent pas pour l'examen final, alors pas besoin de quelqu'un avec un réel diplôme. C'était toujours mieux que de ne pas faire option du tout. Et depuis, personne ne s'est plaint de ma présence à ce poste. J'ai toujours organisé à la perfection mes cours, alors ils m'ont gardé... Et ça m'a fait réaliser que c'est ça que je veux faire plus tard. Je veux pouvoir jouer sur scène et en faire mon métier, mais j'aimerais aussi enseigner. Et même écrire des pièces qui sait..."

"Je t'admire." je laisse échapper à la fin de son discours.

"Pourquoi ?"

Un nuage s'entrecroise au soleil et une ombre passagère prend possession de la pièce.

"Tu es bien entouré, quasiment déjà dans un environnement professionnel. Tu as un caractère bien à toi. T-tu sais parler aux autres, tu sais comment t'y prendre, tu es toujours franc et... tu oses être qui tu es, dire ce que tu as à dire, faire ce que tu as à faire."

"Moi aussi je t'admire."

Ça me fait l'effet d'un caillou jeté dans une eau calme. J'esquisse un faible sourire, ayant du mal à le concevoir. On peut bien m'aimer, sûrement, mais de là à m'admirer ?

"Comment tu pourrais m'admirer... ?"

"C'est pas compliqué... Tu as toujours cette expression indéchifrable qui donne envie de creuser derrière. Tu es à la fois imprévisible, et organisé. Tu ne fais pas aussi facilement confiance aux autres, tu ne te laisses pas faire, tu es intriguant, et même si tu ne parles pas beaucoup, quand tu le fais, ça a toujours bien plus de valeur que les mots de quelqu'un de plus spontané."

"Je ne savais pas qu'on pouvait penser tout ça de moi." je murmure presque.

"Jungkook. Tu as bien plus que tu ne le crois."

Sous son regard appuyé, mon souffle se perd dans ma gorge. L'horloge au dessus du tableau à craie de la salle de classe se fait entendre par dessus le silence soudain.

Jusqu'à ce que Taehyung prenne de nouveau la parole, plus sérieux.

"Ce soir, c'est les vacances. Tu as loupé les derniers cours de théâtre, mais j'ai demandé d'apprendre par coeur les répliques du deuxième acte. On commencera à le travailler à la reprise des cours."

"D'accord..." je réponds, honteux d'avoir manqué plusieurs séances.

J'hésite à lui parler de Mina et Jackson, de ce qu'ils disent dans son dos, mais pour une raison que j'ignore, je me retiens.

Taehyung passe une main dans ses cheveux, l'autre se cachant dans l'une de ses poches.

"Je compte acheter les costumes la semaine prochaine. C'est quelque chose qu'on a l'habitude de faire. On va tous en ville et on recherche les vêtements parfaits pour nos personnages. Tu viendrais avec nous ?"

Je suis étonné de la facilité avec laquelle j'accepte. Taehyung arbore un sourire en coin, redresse son manteau qu'il tient dans le creux de son coude.

"Alors on se revoit pendant les vacances. Je t'enverrai un message."

J'acquiesce, respirant de nouveau normalement lorsqu'il romp le contact visuel pour se diriger vers la porte, clefs en main. Je réalise que mon mal de crâne n'est plus qu'un lointain souvenir. Le calme est revenu.

Et mes vacances ne seront peut-être pas aussi vides et désespérantes que d'habitude.















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Je vous jure que faire tomber amoureux mes personnages sans même que eux s'en rende compte, c'est la chose la plus douce au monde. Quand j'écris ce genre de scène ça me transporte dans un autre monde.

Que pensez vous de cette réconciliation ? Si ce n'est pas Tae, comment se fait-il qu'il y ait quand même son nom ?

Merci pour votre soutien ksbdosbsidn, à bientôt

C'est les vacances omg enfin (c'est d'ailleurs aussi les vacances pour nos petits protagonistes le soir même, si ça c'est pas le destin)

-Elise-

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