Chapitre 17 🎭
Coucou, je fais juste une note pour prévenir que bien que l'histoire se passe en Corée du sud, j'ai décidé de me baser sur le système scolaire français
Donc ici les personnages commencent les cours en septembre et non en mars, ça vous le savez déjà, et ils ont tous deux spécialités en terminale en dehors du tronc commun et des options
Bonne lecture :)
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"Ce qui est sûr, c'est que les normes sociales influencent énormément sur le comportement des individus. Mais le vrai problème, ce qui est réellement intéressant, c'est de se concentrer sur la limite. À quel point pouvons nous être influencés ? Quelle est la limite de l'influence ? À partir de quand devons nous penser en groupe et à partir de quand devons nous penser par nous même ? Malheureusement, on peut considérer qu'il n'existe pas de limite précise, ce qui peut donc amener à des conflits sociaux, que nous avons évoqué au chapitre précédent."
Les mercredis, je ne vois pas Chaeyoung de la journée. Je n'ai que deux heures de cours entre huit et dix. Sciences économiques et sociales. Elle ne suit pas cette spécialité, contrairement à moi. Le social m'attire bien plus que l'économie, alors j'assiste au cours avec intérêt. Je suis détendu. Je digère encore mon petit déjeuner, et je suis prêt à m'endormir sur ma table tout en écoutant calmement les paroles de ma professeur.
Même si le sujet m'intéresse, je divague un peu. Je pense à des milliers de choses en même temps, intégrant simultanément les informations sur les normes sociales dont mon enseignante semble profondément passionnée.
Je ne sais pas ce qui m'arrive en ce moment. Le noeud dans ma gorge est de plus en plus fragile, sur le point de se délier à tout instant, c'est effrayant. Déroutant.
Je pense à ma famille, à certaines pages de mon carnet rouge que j'ai oublié tant ça fait longtemps que je n'y ai pas plongé le nez. Je pense à ces inconnus qui vivent dans la même maison que moi, à ce silence morbide qui nous recouvre et nous ronge de l'intérieur. Je me demande comment et pourquoi en sommes nous arrivés à un point de non communication aussi grave.
Je pense à Heechul. Il n'est pas dans ce cours, mais continue de me guetter dans les couloirs, dans les cours généraux. Les jours de théâtre, il me dévisage, comme s'il s'assurait que j'y aille vraiment. Il surveille sa réussite.
Je pense à Chaeyoung, à sa gentillesse, sa compréhension, sa douceur. Une bouffée d'oxygène dans l'air inhalable de ce monde.
Alors mes pensées dérivent vers le théâtre, vers les amis de Taehyung, puis vers Taehyung lui même. Je repense à toutes ses paroles, à ses gestes, à sa voix si particulière, à sa manière de froncer les sourcils ou encore de passer une main dans ses cheveux bicolores jusqu'à ce qu'ils ne ressemblent plus à rien.
Puis à mes doigts qui s'enroulent délicatement autour des siens, à sa proximité, à la chaleur de sa peau sur la mienne et-
"Nous allons procéder à des débats par groupe. J'ai besoin de la participation de tout le monde. Je veux des discussions construites, qui respectent l'avis de tous. Vous ferez des groupes de quatre, chaque rangée de deux se mettront avec une autre, en face ou derrière eux. La question est donc la suivante. Dans quelle mesure les individus devraient-ils suivre les normes sociales établies, et à partir de quand est-il justifié de les remettre en question ou de les contredire ?" explique la professeur, en écrivant à la craie la problématique sur le grand tableau noir.
L'adrénaline grimpe considérablement, c'est indéniable. Je ne peux pas l'éviter, l'angoisse me monte à la gorge et me donne soudain chaud. Je jette un coup d'oeil à la fille assise à côté de moi. Elle semble complètement désinteressée de ce que raconte l'enseignante, et fixe son téléphone caché dans sa trousse. Devant nous, il y a deux personnes que je commence à bien connaître avec le temps. Et la peur me submerge bien plus encore quand je comprends qu'ils vont se retourner, et se mettre en groupe avec nous.
Je baisse la tête, j'attends, je guette l'enclume qui va me tomber dessus. Et elle s'écrase violemment sur ma tête, alors que je sens une main m'ébouriffer les cheveux.
Comme un chien, je ne peux m'empêcher de remarquer.
"Tiens, Jungkook ! On va être dans le même groupe !" s'éleve une voix féminine parmi le brouhaha général.
J'ose lever les yeux face à Jennie, mais je déglutis devant son faciès enjoué. Junghwan, à côté d'elle, se retourne à son tour.
"Mais non, c'est pas vrai ! Trop bien."
La fille à côté de moi met en veille son téléphone, et s'intéresse enfin. Une certaine Eunji, je crois. Une fille que je n'ai jamais vraiment vu avec personne. Elle change de groupe d'amis comme de chaussettes, et semble porter une grande importance à son physique. Elle ne me viendra pas en aide. Comme personne. Qu'est-ce que j'espère ?
"Bon, faut qu'on fasse ça, là..." fait Jennie, en montrant vaguement la question inscrite au tableau. "Je propose qu'on dise ce qu'on en pense chacun notre tour, et ensuite on fait un bilan ?"
C'est pas vraiment ça, un débat, je pense intérieurement.
"Ça me va." acquiesce Eunji.
"Moi aussi." approuve Junghwan.
Les visages se tournent vers moi. Et j'ai l'impression de plonger droit dans les flammes, elles me lèchent, passent et repassent sur ma peau pour la brûler toujours plus loin, un degré de plus à chaque seconde. Je ne quitte pas Junghwan des yeux, enfin, plutôt ses mains, légèrement cachées sous la table. Il tient fermement son téléphone, et semble régler quelque chose dessus.
Putain, il n'est pas discret, je pense, une haine grandissante au fond de ma poitrine.
Je hoche la tête pour montrer mon accord, alors que mes doigts se referment sur le bord de ma chaise pour la serrer si fort que mes phalanges se font douloureuses.
"Cool ! ...J'ai pas envie de commencer, faut que je réflechisse encore..." Jennie continue, le regard de plus en plus malicieux, dévorant mes tremblements du regard. "Alors Jungkook..."
Elle me fixe. Je peux sentir cette colère incontrôlable prendre de plus en plus le contrôle de mon corps, de mon esprit, et de ma conscience même. Ça me brûle si fort que je commence à voir Jennie plus floue, plus instable.
"... tu commences ?"
Junghwan a cette lueur identique au fond des prunelles. Quand je regarde trop longtemps l'appareil dans ses mains, il le range sous la table.
"Le- le téléphone." je murmure, fixant le point précis sous la table.
Deux points. Je compte intérieurement. J'ai le coeur au bord des lèvres. Ou trois ? Est-ce que dans les règles, les bégaiements, ça compte ?
Jungkook, ferme là.
"Qu'est-ce qu'il y a, le téléphone ?" s'impatiente Jennie. "C'est un débat, tu nous dis ton avis, oui ou non ?"
Ferme là, Jungkook.
Un mélange explosif s'incruste dans chacune de mes veines. Une envie irrépressible d'éclater en sanglot et de me morfondre sur ma table, ou alors de prendre ce téléphone qui m'enregistre pour le briser contre les murs de la pièce, puis sous mes pieds, et dans mes mains. Je veux le sentir se craqueler jusqu'à ce qu'il n'en reste rien. Juste quelques miettes éparses, que je leur jetterais tous à la figure. Même à Eunji, qui regarde la scène d'un oeil amusé, comme lorsqu'on est devant une bonne série télévisée, qui nous sort de notre ennuie.
Et je crois que je vais le faire. J'ai tellement envie de le faire.
"Bon, Jungkook ? T'as perdu la parole ou quoi ? On a pas toute la matinée. Et la prof arrive vers notre table, si elle voit que tu dis rien, elle va pas être très heureuse je crois."
Jennie attend ma réaction, attend mes mots.
Mes doigts me font très mal à présent, tandis que je me tiens à ma chaise comme à ma vie.
Mais pas pour très longtemps. La haine l'emporte toujours. Et elle est dévastatrice. Encore une fois, c'est elle qui me protège, c'est elle qui me dicte les mouvements à adopter, qu'ils soient bons ou mauvais.
L'expression neutre, le coeur creux, je me lève sous leur regard ébahi. Je contourne la table pour être à la hauteur de Junghwan. J'ai la désagréable impression de n'être qu'un robot, une mauvaise copie de moi même. Je me sens évidé de tout, évidé de compassion, d'amour, de tristesse ou même de pitié. Et mon corps entier hurle. Il hurle si fort.
Il rêve si fort de s'exprimer, de tout briser autour de lui, de matérialiser et d'oraliser tout ce qu'il aimerait déloger de lui même pour toujours.
Sans réfléchir, je saisis l'un des bras de Junghwan pour extirper le téléphone de sa prise. Je l'ai, il est là, dans ma main. Juste là.
"Mais t'es malade, rends moi ça !"
Sur l'écran, un enregistrement vocal est en cours. Je ne le coupe pas. Je me contente de balancer l'appareil de toutes mes forces sur le carrelage. Des morceaux de verre se dispercent autour de l'impact, glissent majestueusement sur le sol, et ça me donne envie de vomir.
"Espèce de connard ! T'as fait quoi à mon téléphone ?! Y a un truc qui va pas dans ta putain de tête, hein, le muet ?? T'es tarré ! Merde, t'as intérêt à me le repayer ! Tu sais combien ça coûte ?!"
J'ai- j'ai fais ça ?
Je sens les larmes me monter aux yeux. Je les empêche de m'inonder en plantant mes ongles dans mes mains. La culpabilité et la honte me prennent en un temps record.
Jamais je ne suis allé aussi loin. Qu'est-ce qui m'arrive ?
"Désolé... P-pardon." je marmonne, sous le choc.
J'étouffe, j'étouffe tant que ça en devient ingérable. Il faut que je sorte, il faut que je me distraie, avec de l'air, plus d'oxygène, un endroit où je pourrais prendre de longues et profondes respirations. Mais ici, j'étouffe, j'étouffe jusqu'à ce que je ne sente mes yeux me piquer, ma gorge me brûler, et mon coeur me pincer. Une douleur en pointe, aiguë.
"Mais Jungkook, enfin !" la professeur arrive à toute vitesse vers nous. "Qu'est-ce que t'as fait, ça va pas ?!"
J'ai envie de crier, mais ce ne sont que de vagues excuses chuchotées qui s'échappent. Je me retrouve dans la position du malfaisant, c'est terriblement injuste. Mais peut-être que je le mérite un peu. Si on s'acharne autant sur ma personne, c'est qu'il y a une raison. Au fond, c'est de ma faute, non ? Tout s'embrouille et mes poumons me lancent.
Sans réfléchir, dans le seul objectif de ne pas mourir, de ne pas m'étouffer ridiculement ici, j'atteins à grande vitesse la porte, et m'engouffre à l'extérieur. Je perçois toutes les oeillades étonnées des étudiants. Le sentiment de honte est suffocant.
Je me sens sale, et humilié.
Une fois dans le couloir, je me précipite. Où ? Je ne sais pas vraiment. Tout est vide pendant les heures de cours, je ne croise personne, et personne ne m'a suivi. Je sors mon téléphone, regarde l'heure : 9h51. Ok, de toute façon, le cours était presque fini, je ne vais pas rater grand chose. Et la professeur n'osera pas me mettre absent. Mes parents n'en sauront rien. Personne n'en saura rien.
Et le téléphone...? Et si je dois vraiment le repayer ?
N'y pense pas. Ne pense plus à rien.
Mes pas me mènent inconsciemment où ils le veulent. Je m'autorise quelques larmes, puis je retiens les autres. Je les enferme précieusement à l'intérieur de moi comme j'enferme tout.
Le couloir dans lequel je vais habituellement est à l'autre bout du lycée. Alors par fatigue, par manque de motivation, je me dirige ailleurs. Un endroit où je ne vais quasiment jamais. Jamais, en fait. Puisque je n'ai aucun cours ici. C'est au rez de chaussée du bâtiment dans lequel je suis. Et c'est vide de présence pour l'instant.
Pour l'instant.
Je me souviens de quelques mots.
"Je pourrais te montrer, tu peux même venir voir un entraînement si ça t'intéresse."
Je ne sais pas ce que je fais. Je ne suis plus à ça près. J'ai envie de précense humaine, d'âme bienveillante, qui ne me punissent pas pour mon silence. Instinctivement, je sais que Jimin en fait partie.
***
"Jungkook !! T'es venu !"
Jimin me dévisage avec de grands yeux surpris. Il ne s'attendait sûrement pas à ce que je prenne son invitation à la lettre. Moi non plus. Hoseok est à ses côtés, et affiche la même expression. Il suit aussi les cours de danse ?
"Oh, salut Jungkook. Tu fais quoi ici ?"
"Jimin m'a dit que je pouvais venir observer alors..."
"Oui, c'est trop biennn ! Je pensais pas que t'allais venir. Il faut que je prévienne monsieur Lee, mais ça passera tout seul. On fait ça régulièrement, y a toujours des gens de passage."
"O-ok." je réponds, un sourire timide au visage.
Je compte juste m'assoir dans un coin de la salle de danse, et regarder les mouvements des élèves. Ça va me détendre, juste observer, dans l'ombre, et ne plus penser à rien. Ils ne sont pas beaucoup si j'en crois tout ceux qui viennent à peine d'arriver. Une quinzaine, pas plus, et personne que je ne connais vraiment. Alors ça va, à peu près.
Lorsque le professeur arrive, Jimin cours vers lui. De loin, je l'observe parler, avec toujours ces grands gestes et cette surexcitation qui le définit. Il est admirable. L'enseignant sourit, et hoche la tête. Puis il ouvre la porte de la salle de danse et Jimin nous rejoint à nouveau.
"Viens. Tu peux t'assoir sur les bancs. Le cours dure qu'une heure et demi, mais après le prof nous laisse les salles si on veut continuer de s'entraîner. Si tu veux je pourrai t'apprendre un peu. Et Hobi aussi."
Un grand sourire mange la moitié de son visage, et sa bonne humeur se transmet d'une manière étonnante.
"Pourquoi pas." je réponds, un sourire sincère aux lèvres cette fois ci.
C'est si facile, avec Jimin, même si j'ai toujours du mal. Je n'ai pas à me forcer. Je peux être silencieux, et ça ne le dérange pas.
Nous franchissons la porte et je découvre la salle de danse, très propre, spacieuse, un long miroir couvrant le mur gauche de la pièce, une barre en bois contre celui ci, des bancs à ma droite, et en face, des fenêtres hautes donnant sur la cour. Il y a une odeur de bois poncé, mélangée à celle de nombreux passages, de la colophane ou encore de la sueur. La pièce est belle.
Il y a vraiment tout, dans ce lycée.
"Coucou toi."
Je sursaute. C'est l'enseignant qui vient de me saluer. Il est jeune, sort probablement tout juste des études, un diplôme frais dans la poche, et il a l'énergie d'un acharné.
"Tu t'intéresses au cours de danse ?" me demande t-il, alors que Jimin et Hoseok m'ont déjà laissé seul pour s'échauffer avec les autres. De loin, j'observe leurs mouvements, j'analyse chaque geste.
"Oui, un peu... Jimin m'a proposé de venir regarder."
Je ne sais pas du tout dans quoi je m'embarque. En réalité, je suis surtout venu pour me calmer.
"Pas de soucis. Tu sais, tu peux même rejoindre mon cours si ça te dit. Embarquer des élèves en plein milieu de l'année, c'est ma spécialité. Il faut croire que j'ai un don..."
Sur ce, il me fait un clin d'oeil.
"D'accord, je verrai... eh bien euh... je peux m'assoir sur le banc ?"
Je sais déjà que je ne verrai pas. Bien que la danse m'intéresse, je ne me vois pas prendre des cours, alors que le théâtre occupe déjà beaucoup de mon temps. Mais c'est gentil de sa part.
Je me surprends à vérifier qu'il ne possède pas de téléphone ou n'importe quel appareil électronique sur lui. Réflexe.
N'importe quoi, Jungkook, c'est un professeur, il ne ferait pas ça. Détend toi.
"Of course !" il me répond, avec un accent anglais douteux.
Je retiens un petit rire qui a failli s'échapper. Il aurait pu le prendre pour de la moquerie. En tout cas, ce professeur est particulier, ça ne m'étonne pas que Jimin se plaise autant ici. Ils doivent bien s'entendre.
Je rejoins le banc, alors que monsieur Lee, lui, rejoint ses élèves.
Pendant toute la durée du cours, je ne fais que regarder. La danse contemporaine est fascinante, parce qu'elle n'a pas vraiment de règles. Ils travaillent une danse collective, et je me plais à les contempler se mouvoir sur la musique, tantôt calme, tantôt affolée. Le contrôle du corps, la souplesse, les émotions, le rythme, et les mouvements de jambes, de bras, de hanches envahissent un coin de mon cerveau. Dans ce coin, quelque chose y fleurit, quelque chose de nouveau, d'indéscribtible...
J'ai envie d'essayer. De sortir de ma zone de confort.
De tenter quelque chose de nouveau.
La danse, ou n'importe quoi. J'ai envie de me sentir vivre. Mais vivre, c'est bruyant.
À la toute fin, j'ai la respiration calme, je me sens bien plus apaisé, et l'épisode du téléphone s'est quasiment évaporé. Les étudiants quittent petit à petit la pièce, essouflés. Jimin et Hoseok, eux, me rejoignent. Jimin s'écroule au sol face à moi, alors que je suis toujours assis sur le banc. Il a la respiration saccadé par l'effort. Hoseok, lui, se pose à mes côtés.
"J'ai plus d'énergie." soupire Hoseok, reposant sa tête contre le mur derrière lui.
"Jimin, je te laisse les clefs ?" demande monsieur Lee, alors qu'il s'apprête à sortir lui aussi.
"Oui, comme d'hab."
"Ok, mais à midi vous devez être sortis, hein ? Sinon je vais avoir des problèmes, je ne suis pas censé laisser la salle à mes élèves trop longtemps."
Jimin acquiesce, et se relève pour se mettre en tailleur. Il atrappe mes mains.
"Moi, j'ai encore de l'énergie. Ça te dit toujours de danser, Jungkook ?"
"Oui...?" je fais, peu sûr.
Alors sous le regard amusé de Hoseok, Jimin me tire derrière lui, jusqu'à ce qu'on soit en face du miroir. Je suis mal à l'aise, ne sachant pas trop quoi faire de moi même. Mais Jimin s'en fiche.
"Je peux essayer de t'apprendre la chorée qu'on travaille en ce moment. Elle est pas si compliquée."
Il me montre les pas, je tente de suivre en silence. Il modifie parfois mes mouvements, réajuste un de mes bras ou ma position entière. Et je me surprends à aimer voir la chorégraphie prendre forme petit à petit dans tout mon corps. Dans le miroir, je ne me reconnais pas, j'éxécute les mouvements en essayant de faire de mon mieux. Et plus le temps avance, plus j'arrive à faire en sorte que ce ne soit pas trop ridicule. Mais Jimin ne juge jamais, il ferait un très bon professeur, vraiment. Il est patient, bienveillant, un peu envahissant mais ce n'est pas dérangeant.
Au bout d'un certain temps, Hoseok annonce qu'il doit rentrer, nous laissant seuls.
Nous continuons à danser, nos gestes s'accordant ensemble avec de plus en plus de facilité.
Je me surprends à rire avec lui lorsque je me trompe de mouvement.
"Taehyung avait raison, t'es génial !" il me dit, lorsque midi approche et que nous devons quitter la salle.
Je ne sais pas quoi répondre, je suis profondément surpris. Moi ? Génial ? Je ne me souviens plus de la dernière fois qu'on a pu penser ça de moi. Le penser vraiment.
"Merci... toi aussi." je souris vaguement.
Et...
Attendez.
"Comment ça, Taehyung avait raison...?"
Ah.
Je l'ai dit à voix haute.
"Oui, il a souvent raison. C'est un vrai radar à bonnes personnes. Je ne sais pas comment il fait, mais il analyse toujours le monde autour de lui, et quand il trouve quelqu'un de bon, il se trompe rarement. Il me parle beaucoup de toi... en bien. Je ne sais pas ce qu'il lit en toi, mais ça lui plaît."
Une agréable sensation se répand dans ma poitrine. Jimin saisit son sac à dos et nous sortons dans le couloir.
"... vraiment ?"
"Hm."
Le silence revient. Puis Jimin le coupe.
"En fait, je voulais te dire quelque chose, mais je ne savais pas comment l'amener, et euh... Je ne suis pas sûr que je suis censé te dire ça mais..."
La curiosité me pique. J'attends patiemment la suite. Le son de nos pas résonne dans le bâtiment.
"Je veux juste que tu saches. Si jamais tu te noues vraiment d'amitié avec lui, et bien..."
Son ton est sérieux, contrastant avec son engouement habituel.
"...ne le lâche pas." termine t-il. "Ou ne lui fait pas entrevoir que tu pourrais le lâcher."
Le lâcher ?
"Pourquoi ça ?"
"Il déteste perdre les choses." explique t-il. "Tu me promets que tu feras attention ?"
"D-d'accord." je réponds, essayant de comprendre, de lire au travers de tout ça. Mais je ne vois rien, rien du tout.
Dans ma tête, je fais vite le rapprochement avec les mots de Taehyung, mais ça n'ajoute pas tant de sens.
"Je déteste quand les choses m'échappent."
***
Je me sentais bien avec Jimin, mais il a fallu rentrer.
Et l'euphorie est éphémère.
Ça vous prend, puis on vous l'arrache. C'est différent du bonheur, celui qui reste. L'euphorie, elle, est douloureuse, parce qu'on sait qu'elle ne va pas rester longtemps.
C'est ce que je me dis, en fixant le message que j'ai reçu.
"Bonjour,
Suite à l'intercation qui a eu lieu aujourd'hui entre vous et l'élève Junghwan, en classe de sciences économiques et sociales, nous vous prierons de vous rendre dans le bureau du directeur ce jeudi 6 octobre, dans la matinée.
Merci de votre compréhension,
Administration du lycée Hongil, Gwangju"
Juste après la danse, je suis rentré chez moi. Habituellement, j'arrive deux heures plus tôt. C'est rare que je change mes habitudes, ça n'arrive en fait même jamais. Mais mon absence n'a semblé inquiéter personne, alors mon coeur s'est serré. Puis ce message.
Lorsque je sens que le repas du midi est prêt, je descends les escaliers. Je n'ose regarder personne dans les yeux, ni mes parents, ni ma soeur. De toute façon, çe ne change pas grand chose de d'habitude. Est-ce que mes parents ont été mis au courant de ma conduite...? Je crois que je n'ai même pas envie de le savoir. Je me sens honteux. Terriblement honteux.
Je mets la table machinalement, dans des mouvements coordonnés. Je n'aime pas cette danse. Je préfère celle de ce matin, avec Jimin. La bouteille d'eau est vide. Je la jette à la poubelle et me rends dans l'arrière cuisine, là où sont stockées toutes les bouteilles d'eau ainsi que la nourriture.
Lorsque je prends une des bouteilles du pack, quelque chose attire mon attention. Dans la pièce, il y a un grand meuble, avec une étagère dédiée aux pâtes, une dédiée aux confitures, une dédiée aux légumes, etc... Et il y en a une dédiée à l'alcool.
Je repense à la soirée, à la sensation agréable et douce qui coulait dans mes veines. Je fixe l'endroit. J'ai envie de me sentir à nouveau ainsi, libre, sans rien dans la tête, excepté une fine brume adoucissante.
Et si je prenais une bouteille, juste une, ça se verrait...?
Je secoue la tête. Honteux à une pensée pareille. Je ne le ferai pas, et plus jamais.
Je retourne dans la salle à manger, et nous nous installons tous. Le vide règne dans la pièce. Il n'y a plus que le son de nos respirations, des couverts et des légumes qui continuent de frémir imperceptiblement dans la poêle.
Le repas prend fin, je remonte dans ma chambre, le pas lent, m'apprête à contacter Yoongi, mais de petits coups à ma porte me figent dans mon élan.
"Oui...?" je prononce, ne comprenant pas.
Jamais personne ne toque aux portes de personne, ici. On se contente de s'ignorer. On a rien à se dire.
La porte s'ouvre lentement, et mon père apparait dans l'entrebaillement. Il a l'air mal à l'aise, ne sachant plus comment on utilise son corps et sa voix pour communiquer après tant d'années.
Puis il prend la parole.
Et la confusion s'invite à une vitesse fulgurante.
"Jungkook, il y a quelqu'un à la porte, en bas."
"...Qui ça ?" je demande, encore perturbé par la voix de mon propre père.
Ça fait si longtemps que je ne l'ai pas entendu.
"Un garçon. Il dit que vous avez rendez vous."
**•̩̩͙✩•̩̩͙*˚ ˚*•̩̩͙✩•̩̩͙*˚*
Cette fin de chap- 🕴
J'ai hâte de tout développer dans cette histoire. Et j'ai hâte d'écrire le prochain chapitre 🤸♂️
L'amitié naissante avec Jimin ? Ce qu'il dit sur Taehyung ? Le fait que y ait quelqu'un à la porte de Jungkook (flippant mdr) ? Junghwan et Jennie ? (Carrément je pose plus de questions précises dites moi juste tout ce que vous voulez 😭)
Merci de liiiiire aaahjhxessjij
J'ai l'impression de régresser à chaque chapitre je sais pas pourquoi c'est désagréable comme sensation mais j'imagine que c'est le manque de confiance habituel des auteur.es
-Elise-
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