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7. Kitashi (1/3)

« Tu as volé à l'université de Kyoto ? »

Les épaules affaissées et les sourcils haussés, Iwasaki regardait Kitashi avec un air de « j'en étais sûr », ce qui avait le don d'agacer son collègue.

« De tout ce que je viens de te raconter, tu n'as retenu que ça ?

— Tu as enfreint le protocole. Ça pourrait nous être gravement reproché. »

Accoudés au bar dans lequel Iwasaki l'avait trainé de force pour parler d'une « affaire urgente », son collègue avala une grande gorgée de sa bière Blue Moon en grimaçant avant de rétorquer :

« O.K., j'ai pigé, tu es en colère, mais je te répète que là n'est pas la question. Itou a risqué sa peau pour trouver une piste. Je crois qu'on lui doit bien de creuser de ce côté. »

Kitashi se massa les tempes. L'ambiance confinée de l'établissement dû à son emplacement souterrain et à son plafond bas commençait à lui donner la migraine. Sans parler de la musique. L'ambiance tamisée n'allait pas du tout avec les chansons piquantes et électros choisies par le DJ qui, derrière sa table de mixage, au fond de la salle, se dandinait au rythme d'un tube inconnu de Kitashi. Sa chevelure ample et parfaitement travaillée au gel tressautait au rythme des paroles sans âme.

Kitashi détestait le Kyoto «A»» s Bar. Iwasaki l'y avait déjà emmené après l'une de leur longue journée de travail. La même impression d'étouffement lui enserrait le crâne comme s'il était pris dans un étau. Quand il avait écouté son collègue lui raconter les événements survenus lors de sa visite à la fac où travaillait le professeur Ashigaka, son cerveau avait comme disjoncté. Même pour un bourreau du travail comme lui, quarante-huit heures de loopings émotionnels et de questionnements nébuleux sur sa propre santé mentale — il avait quand même fait appel à une adolescente de seize ans pour s'assurer qu'il avait bien vu un animal sortir du corps d'un homme — avaient eu raison de sa patience. La musique de fond lui semblait trop envahissante, en plus d'être de mauvais goût, les manivelles du baby-foot frappaient trop fort contre le bac de jeu en bois, les conversations étaient trop bruyantes, sa bière trop amère. Il la reposa avec fracas sur le comptoir.

« Tu appelles ça une piste ? Bon sang, Jun, tu étais le premier à me dire de me reprendre avec mes conneries de superstitions, et maintenant, tu veux qu'on pille un lieu sacré pour trouver à quoi correspond le masque d'un démon légendaire qui a supposément vécu il y a mille ans ? Kurotani s'est fait attaquer par une cinglée, rien de plus. »

Il ne se rendit compte qu'il avait apostrophé son coéquipier par son prénom qu'une fois qu'il l'eut prononcé. Ça ne lui était encore jamais arrivé. Sans doute l'alcool lui faisait-il perdre les bonnes manières. On n'appelait pas un collègue par son prénom. Ce privilège était réservé aux proches et aux amis. Si Iwasaki se permettait de l'appelait Kitashi, c'était simplement parce qu'il était des rares Japonais à se foutre éperdument des traditions, et surtout, Kitashi en était certain, parce qu'il aimait le provoquer, lui. Il s'y était fait. Ce manquement à la bienséance était confortablement entré dans sa routine. Mais que Kitashi se permette d'user de son prénom pour désigner Iwasaki, ça sonnait faux.

Il avait trop réfléchi, se rendit-il compte, sa bière à la main. Il en avait même oublié d'être en colère. Il jeta un coup d'œil à son coéquipier, l'air de rien, en prenant une gorgée.

« Ce n'était pas qu'une simple cinglée, fais-moi confiance. »

La voix d'Iwasaki s'était faite plus grave et il s'était rapproché de Kitashi. Trop près. Ça et l'intensité de son regard le forcèrent à se redresser sur son siège pour remettre de la distance entre eux, mais Iwasaki le suivit dans son mouvement et planta une main sur son épaule. Il n'avait apparemment pas l'intention de le laisser s'en tirer à si bon compte. L'électricité le traversa à son contact.

« Écoute-moi, déclara-t-il en plantant ses iris chocolat dans ceux de Kitashi, cette fille était prête à tuer Itou pour lui cacher ce bouquin. Et la gamine est formelle, la coïncidence est trop belle : le démon a vécu près du tombeau où ont été retrouvés les étudiants. Le masque de Ōni qu'Ashigaka a dessiné correspond aux estampes représentant le yōkai. Ma main à couper que ça a un lien avec la boîte du tombeau. Tu sais, la même boîte pour laquelle les prêtres sont prêts à tenir tête à la police criminelle pour la garder sous scellé. Tu veux que je continue ? Parce que j'ai encore deux ou trois arguments en faveur de la théorie. Tiens, regarde, Ashigaka a emmené ses élèves pour une excursion archéologique, ça ne serait pas étonnant qu'il possède des croquis de la relique en lien avec ce qu'il a voulu étudier, non ? »

Iwasaki était sérieux. Réellement sérieux. Aucune trace de sarcasme ou de moquerie dissimulée. Il y tenait vraiment, à son idée insensée.

« Je vais te citer, ce qui ne m'arrive pas souvent, alors écoute bien : tu t'entends ? Je l'avoue, j'ai craqué à un moment, mais, comme tu me l'as si bien fait remarquer, ce que j'ai cru avoir vu est impossible.

— Et ton histoire d'enlèvement ? Tu m'as dit ce matin au téléphone que tu pensais avoir trouvé quelque chose.

— Quelque chose qui ne mènera probablement à rien, c'est ce que j'ai dit. »

Iwasaki balaya l'air d'un revers de la main, envoyant son haleine alcoolisée en direction de Kitashi, qui soupira franchement.

« Peu importe. L'enlèvement du patron du concessionnaire et du bureau d'avocat semblent liés, pas vrai ?

— Peut-être bien, mais ça ne concerne pas notre affaire.

— Bien sûr que si ! Tu as oublié que le talisman d'Itou nous a menés jusqu'au lieu du crime ? »

Iwasaki perdit un peu de sa fougue sous le regard sévère de Kitashi. Ce dernier se tortilla sur son tabouret pour se positionner face à lui, sa bière toujours à la main. Un mal de tête avait définitivement pris Kitashi en otage, mais son esprit était pourtant très clair.

« Il y a quelque chose qu'il faut que tu m'expliques : pourquoi est-ce que tu te mets tout à coup à croire à ces histoires de forces mystiques et de démon alors que tu étais le premier à rembarrer Kurotani à cause de ses croyances ? T'aurait-elle lavé le cerveau en l'espace d'une journée ? Hum ? Peut-être qu'en fait, elle est le gourou de la secte. Qui sait ? Avec tout ce qui se passe, ça n'a rien de délirant. »

Le sang quitta le visage d'Iwasaki. Jamais Kitashi ne l'avait vu avec une tête pareille. Il était le genre de gars que rien n'ébranle, ou, en tout cas, qui porte en permanence un masque de nonchalance répugnante sur la figure. Là, Kitashi avait le sentiment que son collègue avait baissé sa garde un instant de trop, et qu'il en avait profité pour lui asséner une droite dans les côtes. Mais ils n'étaient pas sur un ring, et le but de Kitashi n'était pas de le mettre K.O. Aussi, il le laissa reprendre ses esprits. Iwasaki répliqua :

« Comme tu es une vraie tête de mule, commença-t-il avec de l'amertume dans la voix, je vais te dire ce que j'ai vu dans ces putains d'archives. Cette fille qui a attaqué Itou, elle s'est métamorphosée en renard dans mes mains. Alors, soit on est tous les deux bons pour l'hôpital psy, soit il se passe quelque chose de plus important que notre petite enquête de routine. » Il pointa de l'index Kitashi, courbé, le regard verrouillé à celui de son collègue. « Je crois que ce qu'on a découvert, ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. On pensait qu'on avait soulevé un lièvre, mais là, c'est plutôt un T-rex. Ce que j'essaie de te faire comprendre, c'est qu'on est vraiment dans la merde. »

Devant un Kitashi qui ne savait pas comment réagir face à ce genre de déclaration, Iwasaki se laissa retomber dans son siège. Il fixait son propre reflet dans le miroir derrière le bar. Le goulot de la bouteille collé contre ses lèvres ouvertes, il ajouta :

« Mais, après tout, ce n'est pas un peu le boulot de la police de remuer la merde pour que la pourriture en sorte ? Et après, BAM, on attrape les méchants. »

Kitashi ne bougea pas pendant que Iwasaki finissait sa boisson.

« Tu es bourré ?

— Moi ? Après seulement une bière ? s'indigna-t-il. Tu plaisantes, j'espère. Si j'étais vraiment bourré, je me serais déjà avachi sur toi comme un sac. »

Au grand désespoir de Kitashi, il joignit le geste à la parole. Son torse musclé s'étala sur le sien tandis que sa tête s'enfonçait dans son épaule. La foudre le foudroya quand il sentit le nez de son coéquipier frotter contre la peau fine de son cou et remonter jusqu'à l'arête de sa mâchoire. Il devait bouger, le repousser. Qu'allez penser les gens ? Tous les regards étaient braqués sur eux, il en était certain. Sans vraiment le vouloir, il avala une grande goulée d'air, comme un apnéiste remontant à la surface, pour que l'odeur d'alcool mêlé au déodorant aux plantes d'Iwasaki l'assaille. La fragrance lui piqua le nez quand elle prit les teintes âcres de la fumée de cigarette. La tête lui tourna. Il ne fallait pas qu'il replonge dans ces eaux, ou c'était la fin. Iwasaki ne lui rendit pas la tâche facile, au contraire. Ses lèvres se mouvèrent tout contre son épiderme qui fut parcouru de frissons alors qu'il parlait tout bas.

« Tu sens bon. C'est quoi ton parfum ? Je parie que c'est Naho qui te l'a acheté. »

Le prénom de sa sœur le sortit de sa torpeur avec la force d'une main qui l'aurait tiré vers la surface. Il saisit Iwasaki par le col de sa chemise déjà en sale état et l'envoya valser contre le dossier de sa chaise. Il dut se rattraper au bord du bar pour ne pas s'étaler par terre. Honteux d'avoir réagi aussi tard, Kitashi faillit le cogner quand il aperçut le sourire mutin de son collègue.

« Laisse ma sœur en dehors de tes délires. »

Surtout qu'elle n'avait rien à voir avec le choix de ses parfums, plutôt mourir, mais il se retint de le préciser. Iwasaki se redressa lestement, l'air enjoué, comme si rien de gênant ne s'était passé.

« Pourquoi ? Elle m'aime bien ta sœur. Platoniquement ! ajouta-t-il précipitamment sous la menace du regard tueur de Kitashi. Au premier sens du terme, on s'entend plutôt bien.

— Tu ne l'as vue que deux fois.

— Faux. Depuis qu'elle est revenue de son programme aux États-Unis, on se fait des apéros tous les mois. Tu ne le savais pas ? »

Kitashi passa sa main sur son visage.

« Comment tu veux que je le sache ?

— Ben, je ne sais pas, moi. En discutant avec elle. »

La main toujours sur les yeux, car il était bon d'être plongé dans le noir au beau milieu de ce bar de mauvais goût, Kitashi soupira de tout son être. Non, il y avait longtemps qu'il n'avait pas eu de réelles conversations avec Naho. En réalité, la longue nuit qu'ils avaient passée à parler juste après son divorce, il y avait trois ans de cela, avait sonné le glas de leur relation fusionnelle. La faute à qui ? se demanda amèrement Kitashi. Avec sa foutue manie de s'éloigner de tous, même de ceux à qui il tenait, dans les moments de troubles, il avait envoyé valser sa meilleure amie et confidente. Leurs échanges se résumaient à présent à de rapides messages pour s'assurer que l'autre était toujours en vie.

« On ne se parle plus autant qu'avant », avoua-t-il et il termina lui aussi sa bière, qu'il s'empressa de payer.

Il se leva, enfila sa veste et se dirigea au pas de course vers les escaliers. Iwasaki le rejoignit dans la rue animée en sautant les marches trois par trois.

« Attends ! Naho, tu ne voudrais pas l'appeler pour lui demander de nous aider avec cette histoire d'arbre généalogique ?

— Celui qu'on a trouvé sur les murs de l'appartement ? »

Iwasaki enfila à son tour sa veste. Les lumières des néons de l'enseigne affinaient les traits du visage de son collègue. Ce dernier acquiesça, un élastique coincé entre les lèvres. Il plaqua ses cheveux en arrière pour en attacher le maximum. Les mèches de devant, trop courtes, retournèrent encadrer son front rendu rouge par l'éclairage.

« Pourquoi tu ne le fais pas, toi, si vous êtes si proches ? » déclara Kitashi alors qu'un groupe de jeunes passa si près d'eux en braillant qu'ils manquèrent de les bousculer.

Iwasaki renversa la tête pour rire.

« Ne sois pas comme ça ! C'est l'occasion de lui dire que tu n'as pas oublié que tu as une petite sœur. Tu as peur qu'elle t'engueule ? »

Kitashi haussa les épaules. Naho lui martelait de venir manger à son appartement depuis qu'elle était rentrée au Japon, six mois plus tôt. Il avait toujours réussi à esquiver l'invitation. Après tout, pourquoi pas. Alors qu'il sortait son smartphone pour taper un début de message, somme toute trop impersonnel, à sa sœur, Iwasaki consulta le sien après qu'une notification l'eut alerté.

« Ah, la mère d'Itou vient de rentrer à la maison. Elle travaille drôlement tard, dis donc. »

Agacé par son incapacité à rédiger un message digne de ce nom, Kitashi effaça les quelques caractères qu'il avait tapés. Énervé, il tourna sur lui-même à la recherche d'un endroit réservé aux fumeurs. Ce n'était pas dans ses habitudes depuis qu'il avait été promu inspecteur, mais son mal de tête ne faisait qu'empirer et l'envie de sentir la nicotine calmer ses nerfs et la fumée lui piquait la gorge ne faisait que croître. Il s'approcha du cendrier géant à côté d'une poubelle et sortit son paquet de cigarettes. Il ne se rappela que son briquet avait rendu l'âme la semaine dernière que lorsqu'il coinça le bâtonnet entre ses lèvres. Il jura.

« Laisse. Je vais le faire. »

Iwasaki s'empara de la cigarette. Il se tourna, dos à Kitashi, concentré sur ses mains, de ce que ce dernier pouvait voir. Toujours tourné vers l'effervescence de la rue, Iwasaki souffla finalement la fumée vers la lune. Il tendit ensuite son bien à Kitashi qui, après une brève hésitation à le porter à ses propres lèvres, le remercia et coinça la cigarette entre ses dents. Il ignorait que son collègue ait jamais possédé un briquet. Il inspira avec satisfaction. Son visage se détendit et il ferma les yeux un instant pour savourer la sensation retrouvée.

« Franchement, si cette histoire de renard est vraie, dit-il alors qu'Iwasaki le scrutait d'un air indéchiffrable, je ne pense pas qu'une simple équipe de police puisse faire quoi que ce soit. »

Iwasaki sourit fugacement.

« Alors tu sors enfin du déni ?

— Venant de toi, c'est l'hôpital qui se fout de la charité.

— C'est vrai, avoua-t-il tandis que son corps commençait à se mouvoir, peut-être malgré lui, sur la musique d'un tube rétro que le bar d'en face passait à fond. Mais j'avoue que voir une fille se transformer en animal sous mes yeux m'a fait revenir sur mes préjugés. »

Kitashi le désigna de sa main qui tenait la cigarette, indigné.

« Comment tu peux être comme ça ?

— Comme quoi ? J'adore cette chanson ! »

Il s'accorda quelques pas de danse bien placés.

« Aussi... normal ! Tu n'as même pas l'air perturbé. Je veux dire, tu n'as pas eu à passer par la case "j'implique une adolescente innocente dans une enquête sanglante parce que je crois que j'ai pété un plomb". Comment tu fais ? »

Iwasaki arrêta de se trémousser pour redevenir sérieux.

« C'est peut-être parce que tu es passé par cette phase-là pour nous deux que je réagis aussi bien. Ou alors tu avais raison, je suis un peu bourré. Bon, je rentre. Tu m'appelles si tu changes d'avis pour cette histoire de masque. Après tout, si on ajoute les choses sans aucun sens dans cette enquête, l'équation devient plus vraisemblable que sans elles. Oh, et ne t'inquiète pas pour Itou, je passe la chercher demain matin. »

Kitashi lui attrapa le bras alors qu'il s'éloignait.

« Pour quoi faire ? »

Iwasaki haussa les épaules.

« Tu l'as dit toi-même, ça ne sert pas à grand-chose de la faire surveiller si on doit se méfier de trucs dont on ne connaît pas l'existence. Je préfère l'avoir à l'œil.

— Ah, parce que toi, tu es plus à même de la protéger ? »

L'expression d'Iwasaki se durcit. L'avait-il blessé ?

« Tu peux me faire confiance sur ce point. Je l'ai déjà fait une fois, je recommencerai. »

Ils se sondèrent l'un et l'autre. Ce que Kitashi décela dans les pupilles incandescentes de son collègue titilla son instinct. Il connaissait ce regard plein de défi.

« Tu comptes aller au tombeau avec Itou, pas vrai ?

— Pourquoi ? Tu veux venir ? »

Kitashi soupira. La fumée qu'il retenait de sa dernière taffe remplit le mince espace qui les séparait. C'était malheureusement bien ce qu'il avait redouté. Et quand Iwasaki avait une idée dans la tête, un choix s'imposait : se ranger de son côté et s'assurer que les dégâts soient les plus minimes possible, ou bien lui mettre une balle dans chaque genou pour l'empêcher d'agir. Et encore, se dit-il en contemplant les contours de la silhouette filiforme de son collègue éclairée par les lumières de la rue, même sans ses jambes, il serait capable de ramper.

« On se retrouve demain matin à dix heures chez Itou », déclara finalement Kitashi.

Un sourire sauvage souleva les lèvres d'Iwasaki. Ses mâchoires se refermèrent en claquant sur la fumée qui s'élevait paresseusement dans l'air.

« Ça devient intéressant. Ça me plaît ! »


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