Ma magie mit plusieurs jours à se remettre de son épuisement. J'étais décidée à affronter Roscoe à nouveau mais je ne pouvais plus me permettre d'utiliser autant de pouvoir. Si les humains commençaient déjà à attaquer de plein fouet, mieux valait pour tout le monde que je ne m'épuise pas en entraînement.

À défaut, je discutais souvent avec lui. Avoir révélé qu'il était en fait plus fort que le reste de la Cour Blanche semblait avoir libéré un caractère moqueur et une arrogance mal placée. Je n'aurais pas songé que je prendrais tant de plaisir à le remettre à sa place. À vrai dire, la seule chose où il se montrait sérieux, c'était le combat. Que ce soit en parlant de stratégie ou en travaillant les mouvements.

Il refusait de me dire pourquoi il avait été rétrogradé à un poste aussi insignifiant que garde alors qu'il avait une telle maîtrise de l'union force, arme et magie. Était-ce parce qu'il était dangereux ? Si c'était le cas, je doutais que la solution soit durable. La preuve en était que je passais plus de temps avec lui qu'avec le capitaine pour mon entraînement.

Les jours défilèrent à toute vitesse depuis le départ de Gallagher et la mort de Kaiser. J'avais le sentiment que quelque chose s'était enclenché au moment où le père de Nahl avait rendu son dernier souffle. Quand je voyais la liste que j'avais toujours sur moi, ce n'était pas pour me rassurer.

Nahl et moi travaillions sans arrêt sur la préparation de la guerre imminente. Que les Madsen s'épuisent contre les murs étaient parfait pour nous. Ils perdaient des munitions. J'avais l'impression que c'était bel et bien un test pour jauger la solidité de nos murs. Si le premier essai était aussi puissant, mieux valait gérer les problèmes internes au plus vite.

Par chance, il demeurait de bonnes nouvelles. Les progrès de la remplaçante de l'Ancienne faisaient partie de celles-là. Selon ses gardiennes, elle n'allait pas tarder à pouvoir passer le test. De ce que je compris, ils prenaient quelques jours pour vérifier qu'elle se souvenait de tout pour ne prendre aucun risque.

- Aucune nouvelle de BarrenLand ? questionna Harsa.

- Ni moi ni mon frère ne parvenons à passer la stérilité de la terre. Il n'y a plus de magie là-bas et ça rend impossible toute connexion. Et les habitants des environs n'osent pas s'en approcher de trop près. Le seul moyen d'en savoir plus, ce sont les vautours. Ils sont les seuls à pouvoir avoir une vue sur ce qu'il se passe dans BarrenLand.

- En parlant des Unseelies, dit Drenna, nous sommes arrivés à une décision.

Je redressai la tête pour étudier leurs visages. Comme toujours, Tmasen était fermé comme un donjon lorsque l'on parlait de la Cour Noire. Éméraldine arborait un petit sourire. Je devinais sa main dans celle de Drenna qui triturait la feuille devant elle sur la table. Vixsin et Harsa arboraient des expressions ouvertes, ce petit sourire de connivence auquel je m'étais habituée.

Quelques jours plus tôt, Nahl m'avait fait part de quelque chose qui le tracassait. Naseok appartenait à sa Cour quand bien même faisait-il partie de mon conseil. Au-delà d'être un simple conseiller, il faisait le lien entre nos deux Cours. Et Nahl avait soulevé l'inégalité dans le fait qu'il soit le seul à faire ce lien. Il avait exprimé son désir d'avoir quelqu'un de ma Cour participer à ses conseils pour créer une égalité entre les deux Cours qui rendrait l'alliance plus aisée à accepter si les deux côtés participaient à parts égales.

Je m'étais sentie idiote de ne pas y avoir pensé plus tôt.

- Vixsin s'était proposé puisqu'il est le plus à l'aise d'entre nous avec les Unseelies. Mais notre choix final s'est porté sur Harsa. Il est le plus diplomate des deux et il sera le plus à même de se faire accepter parmi eux. Sans compter qu'il prend de meilleures notes.

Je ne pus retenir un sourire. J'avais désormais l'impression de tous les connaître à travers ce que Weethe savait d'eux. Il les avait vus grandir. Les avait étudiés comme des animaux avant de les laisser entrer dans son conseil. Il savait comment les prendre pour obtenir d'eux ce qu'il voulait. Il connaissait leurs faiblesses et leurs forces. Les meilleurs points de pression.

Mais rien de tout cela n'était utile. Ils étaient comme une fratrie. Ils se méfiaient encore de moi parce qu'ils ne me connaissaient pas et que j'apportais de grands changements depuis que j'étais arrivée. Je ne me serais pas attendue à moins. Nonobstant, ils semblaient m'accepter sans trop de difficultés, pour l'instant.

- Si votre choix est fait, je le ferais parvenir à Nahl, répondis-je. Si jamais ça ne va pas, on peut toujours changer.

- Ça ira, assura Harsa. J'ai de la famille chez les Unseelies. Devenir le lien Seelie chez eux me permettra de renouer avec mes cousins.

Je hochai la tête. Qu'une même famille puisse être déchirée par l'appartenance aux Cours me dépassait. Combien de parents avaient dû renoncer à leurs enfants lorsqu'ils avaient réalisé qu'ils appartenaient à l'autre Cour ? Comment tout un peuple avait-il pu se scinder ainsi tout en demeurant complémentaire ? Il était plus que temps de réunir les deux parties et d'apaiser la nature.

Un oiseau entra par la fenêtre ouverte. Il laissa tomber un rouleau de papier avant de repartir de là où il venait. Je déroulai le message et souris.

- Qu'est-ce que ça dit ? interrogea Naseok.

Je lui passai le papier. Il comprit ce que ça signifiait. Si les gardiennes de la remplaçante disaient vrai, j'allais pouvoir me débarrasser de ma dette envers l'Ancienne et obtenir l'alliance vacillante des Démons. En plus de les faire partir de ma Cour.

Personne à part Naseok et Weethe ne savaient pour l'Ancienne et je comptais garder les choses en l'état. Personne n'avait besoin de savoir que la nouvelle Reine Blanche était endettée envers une humaine. Surtout pas celle qui dominait les Démons.

- Voilà au moins une bonne nouvelle, dit Naseok avec un sourire en coin.

- Il va falloir préparer le voyage.

- Attendons la confirmation que tout s'est bien passé pour ça. On ne sait jamais. Quelques jours ne changeront rien.

Je me sentis hocher la tête malgré ma frustration. J'avais envie d'en finir avec cette dette. Je ne pouvais pas prendre le risque de perdre l'alliance des Démons alors que la guerre était à nos portes. Ils avaient une force brute et ravageuse qui ne pourrait qu'être utile pour tenir un front solide. Ils pourraient être particulièrement utiles face à Brycen et ses sbires.

Le conseil se termina sans que personne ne pose de questions sur la missive que j'avais reçue. C'était étrange. Ils auraient dû demander ce qu'elle contenait. À moins qu'ils sachent déjà. J'ignorais quelle perspective était la plus inquiétante. Soit ils savaient déjà, soit ils se moquaient de ce qu'il se passait. Je doutais qu'il s'agisse simplement de suffisamment de perspective pour se douter que je ne répondrais pas aux questions. Ça aurait pu arriver pour un ou deux membres, peut-être trois. Mais tous ? Impossible.

Je me massai les tempes alors que les conseillers quittaient la pièce. Naseok posa une main sur mon bras, attirant mon attention.

- Ça ne va pas ?

- C'est juste que... Je ne sais pas... Quelque chose me taraude.

- Quoi donc ? Tu t'en sors bien, pour l'instant. La Faerie est protégée au maximum de sa capacité, tu vas pouvoir te débarrasser de ta dette envers l'Ancienne... Jusque là, les choses avancent dans le bon sens.

- Justement. Tout va trop bien. Je ne sais pas si ça vient de moi ou de ce que Weethe a mis dans mon crâne mais je suis état d'angoisse permanent. Et l'attitude des conseillers n'est pas pour me rassurer.

- Pourquoi ?

- Ils n'ont posé aucune question. Aucune ! Leur reine reçoit un courrier en plein conseil et ils ne posent aucune question ! Ne me dis pas que c'est normal.

- C'est vrai que ça m'a étonné aussi mais je ne serais pas étonné qu'ils soient déjà au courant. Les Seelies sont des espions grandioses. La plupart du temps, ils n'ont pas besoin de questionner quiconque pour tout savoir.

- Je ne sais pas. J'ai un mauvais pressentiment.

- Tu ne devrais pas. Tu es une bonne reine. Tu es bien entourée. Ton frère s'en sort tout aussi bien. Qu'est-ce qui pourrait aller mal ?

Je serrai les lèvres pour ne pas dire « des tas de choses ». Je ne savais pas pourquoi j'étais aussi mal, ces derniers jours. Peut-être parce que, après l'enchaînement infernal qui avait eu lieu depuis mon retour dans la Faerie, j'avais enfin eu le temps de me rendre compte de l'ampleur de ce qu'il se passait.

- Sauf que tu ne remarques pas quelque chose de bizarre ? Je n'ai pas vraiment eu le temps d'y songer jusqu'à maintenant mais tu ne trouves pas l'attitude des Rois Jumeaux et du Traître étrange ?

- Pas particulièrement, pourquoi ?

- Kaiser qui aide Nahl à prendre le trône et ne cherche soudain plus à me tuer, Weethe qui m'aide et me donne toutes ses connaissances, ton père qui débarque droit à la Cour pour te proposer d'effacer tout souvenir de... ce qu'il s'est passé... Tu ne trouves pas qu'ils sont trop... gentils ?

- C'est vrai que ça fait beaucoup d'un coup. Mais chaque cas peut s'expliquer. Après tout, les Rois Jumeaux savaient qu'ils ne pouvaient plus aller contre toi et Nahl. Les trônes vous avaient choisis donc ils devaient se rendre à l'évidence. Et si Kaiser t'avait demandé de revenir à la Cour Noire poliment et gentiment, tu ne l'aurais jamais fait. Ne le nie pas. Quant à Weethe, les Seelies amassent le savoir. Que leur reine ne sache rien de la Faerie aurait été... problématique. Et pour mon père... J'ignore ce qu'il veut. Toujours est-il qu'il n'a pas été très gentil quand il t'a attaquée.

- Je ne suis pas sa fille.

Naseok secoua la tête.

- Je ne vois pas où est le problème. Tu te montes la tête. En quoi accepter l'évidence ferait-il des Rois Jumeaux des comploteurs ou je ne sais quoi ?

- Je ne sais pas mais ça me semble être un peu trop de coïncidences à la même période.

- Tu crois qu'ils ont prévu quelque chose tous les trois ? En sachant que deux d'entre eux étaient certains de mourir rapidement ?

- Crois-moi, quand des monstres pareils ont des plans, la mort ne leur fait pas peur. Et puis, comme tu dis, il n'y en a que deux qui sont certains de mourir. Pas le Traître. Sa Renonciation serait l'occasion d'obtenir des réponses, non ?

- Et s'il n'y a aucun plan machiavélique ?

Je haussai les épaules. Peut-être allais-je chercher loin une menace inexistante mais je ne pouvais nier la sonnette d'alarme dans mon crâne. Quelque chose n'allait pas. Que ce soit l'attitude si désinvolte du conseil qui m'ait enfin fait ouvrir les yeux était étrange. Je m'étais toujours targuée d'être plutôt observatrice. J'avais été entraînée pour l'être.

Et pourtant, ça m'avait échappé jusque là. Ça ne rendait tout que plus suspect. Les doutes de Naseok ne m'aidaient pas. Je m'étais habituée à ce qu'il soit d'accord avec moi. Qu'il émette autant de doutes sur ce que je lui confiais... Ça me désarçonnait.

Je gagnai la cellule où était gardé le Traître. Les ronces que mon trône avait craché pour le ceinturer étaient encore en place. Ses vêtements étaient lacérés et maculés de sang. Son teint était d'une pâleur maladive. Son regard fatigué accrocha le mien lorsque je poussai la porte.

- Enfin je reçois l'honneur d'être vu par la Reine Blanche, ironisa-t-il. Mon sort aurait-il été décidé ?

- En effet. Avant cela, j'ai des questions.

Son sourcil se haussa, seul signe d'une invitation à continuer. Mon seul problème était que j'ignorais comment poser mes questions sans rentrer directement dans le vif du sujet. Les interrogatoires n'avaient jamais été une discipline très élaborée par Jon.

- Y a-t-il quelque chose dont je devrais être au courant ? finis-je par demander.

Il m'observa en silence, si immobile que j'aurais pu croire qu'il s'était changé en statue s'il ne m'avait pas déjà parlé.

Un sourire en coin apparut lentement sur ses lèvres. Avant qu'il n'éclate purement et simplement de rire.

- Je n'en reviens pas ! Il a échoué ! Il a perdu contre une gamine élevée comme une humaine ! Pas étonnant qu'il ne soit pas venu se vanter !

- De quoi parlez-vous ?

- De ton très cher père, bien sûr !

Un sentiment de victoire me remplit. Je dus lutter contre mon envie de me tourner vers Naseok qui demeuré caché à la vue de son père. Il avait refusé de me croire et j'avais eu raison.

- Qu'a-t-il voulu faire ?

- Te contrôler, tout simplement. Te faire ce que j'ai presque réussi à lui faire.

- Il n'a pas d'affinité avec l'esprit...

- Il n'en a pas besoin, m'interrompit-il. Il est roi. Il a suffisamment de puissance pour utiliser n'importe quel élément. Et cette cérémonie que font tous les Seelies était l'occasion pour lui d'agir. Après tout, pour te donner ses connaissances, il fallait que tu lui ouvres ton esprit.

- Vous voulez dire qu'il a voulu faire de moi son pion ? Mais pourquoi ? Il va mourir ! Ça n'a aucun sens !

Pour quelle obscure raison Weethe aurait-il choisi de s'épuiser à tenter de me contrôler ? Il savait qu'il n'avait plus longtemps à vivre depuis que j'étais montée sur le trône.

- Pour rester en vie, répondit le Traître dans un sourire. S'il avait réussi à attacher une chaîne mentale à ton esprit, il aurait pu remplacer le lien de mentor qui fait tenir les anciens rois jusqu'à ce que leurs enfants soient confortables dans leur rôle. Or, il a échoué donc il va mourir.

- Mais qu'est-ce que vous avez à voir avec ça ? Et Kaiser ?

- Il a utilisé son frère pour moins essouffler son propre pouvoir. Cet idiot s'est fait avoir. Il aurait dû savoir qu'on ne joue pas avec les Seelies quand on est Unseelie. Ne me demande pas quel mensonge ton père a inventé pour convaincre son frère d'épargner ton frère, je n'en sais rien. Je sais juste que vous êtes la famille royale la plus tordue de toute l'histoire de la Faerie.

- Comment ça il a convaincu Kaiser d'épargner Nahl ? répétai-je, perdue.

- Il fallait une jolie histoire, je suppose. Il est plus simple de pénétrer les défenses mentales de quelqu'un lorsqu'il se sent en sécurité. Or, si tu avais trouvé ton frère en petits morceaux, je doute que tu te sois sentie calme et disposée. Donc, ton père a dû broder une jolie histoire pour tromper son frère. Et puis, il a sucé son pouvoir jusqu'à la moelle pour qu'il meure et que personne ne sache jamais ce qu'il a fait.

- Comment le savez-vous ?

- J'ai passé des décennies dans sa tête à tenter d'en prendre le contrôle. Ne crois pas qu'une telle connexion cesse un jour complètement. Et bien sûr, il est venu se vanter de son plan pour ne jamais mourir.

- Il aurait fini par mourir avec moi, même si son plan avait fonctionné, objectai-je.

- Tu le sous-estimes. Tant que tu n'auras pas d'enfants pour reprendre les trônes, tu ne mourras pas, Sixtine. Et s'il avait pu contrôler ton esprit, tu n'en aurais jamais eu.

Je faillis me laisser emmener par le tourbillon de pensées que ces révélations déclenchaient. J'étais abasourdie par l'ampleur de ce à quoi j'avais échappé sans le vouloir.

- Et votre rôle, là-dedans ?

- Assister à la destruction de mon fils. Il comptait se venger de moi en me gardant prisonnier et en me relatant toutes les souffrances qu'il aurait infligé à Naseok à travers toi.

- Vous saviez ce qui s'est passé sur le bateau. Comment ?

- Ne crois pas que je ne garde pas un œil sur mon fils où qu'il aille. Ne compte pas sur moi pour te dire comment mais je n'ai jamais abandonné mon fils. Jamais.

Je demeurai silencieuse. Si j'y réfléchissais, tout ce qu'il m'avait raconté avait l'air logique et en accord avec ce qu'il s'était passé. Toutefois, pouvais-je accepter ce qu'il me disait sans preuve ? Sans rien pour corroborer ce qu'il venait de me dire que la chronologie des faits ? Il était le Traître. Il pouvait parfaitement tenter de me tromper. Sans compter qu'il m'avait donné les informations un peu vite. Un peu trop facilement.

- Pourquoi tout me dire ? Pourquoi ne rien exiger en échange de ces informations ? Ça ne vous ressemble pas d'être aussi obligeant. Surtout dans la position dans laquelle vous vous tenez. Après tout, il ne manque qu'un ordre pour que l'on prépare votre Renonciation.

Un éclat brilla dans son regard, rapide et presque imperceptible. Il disparut aussi vite qu'il apparut mais je fus certaine que c'était de la peur.

- Justement. Je n'ai plus rien à perdre. Et assurément rien à gagner. Je me suis rendu à l'évidence, jeune Aderleen. Mes erreurs m'ont rattrapé. Et tes paroles me confirment qu'il n'y aura aucune possibilité de rédemption pour moi. Si tu as accepté l'idée d'une Renonciation, c'est que mon fils a donné son accord. Je t'ai cernée, poursuivit-il, m'empêchant d'intervenir. Ton amitié avec Naseok est trop forte pour que tu acceptes de donner un tel ordre sans l'avoir consulté auparavant.

Je gardai les lèvres serrées. Évidemment qu'il savait. S'il avait réussi à être au courant du viol de Naseok, comment aurait-il pu ignorer que je lui avais demandé son avis sur la sentence de son père ?

- Pourquoi ne parlez-vous jamais de votre autre fils ? Raneok ?

Il bougea, comme s'il cherchait à mieux se placer, et grimaça de douleur.

- Raneok n'est pas mon fils. Il est le demi-frère de Naseok. S'il l'avait été, il n'aurait pas été un tel idiot.

Du coin de l'œil, je vis Naseok serrer les poings. Il avait aimé son frère. J'ignorais ce qu'il était devenu depuis le moment où nous l'avions croisé deux ans plus tôt. Je ne me souvenais plus s'il avait été l'une des innombrables victimes dont j'avais croisé la route. J'avais honte de ne pas avoir plus prêté attention au sort de Raneok. Toutefois, à ce moment-là, je prenais encore Naseok pour un ennemi... Bien que ça ne soit pas une excuse.

- Il est bien mort, dit le Traître, lisant fort probablement dans mes pensées. Ça a été rapide. Presque sans douleur.

Son détachement faisait froid dans le dos. Raneok avait beau ne pas porter son sang, il demeurait le demi-frère de Naseok. S'il se préoccupait tant de l'un, il aurait dû s'inquiéter un peu plus de l'autre.

- As-tu d'autres questions, jeune Aderleen ? Ou pouvons-nous passer à ma sentence ?

Je le regardai droit dans les yeux. Soudain, la Renonciation ressemblait trop à un suicide pour que je sois à l'aise.

- Non.

Je tournai les talons et quittai les donjons.

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