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Le Maître du Château - partie 1


C'est Yena qui découvre la première l'autonomat de Mouteblanc, en sortant de la forêt de Fraillard. Elle arrête son poney, qui était lancé au petit trot, et attend que son maître la rejoigne en contemplant le paysage qui s'étend en contrebas. L'autonomat est un vaste territoire situé à l'extrême nord du Royaume, la frontière que l'on cherche à faire reculer sans cesse, là où le climat est le plus propice à la culture et à l'élevage. Elle voit s'étendre devant elle une grande plaine herbeuse, d'un vert vif, sur laquelle sont éparpillées une poignée de maisons et, surtout, d'immenses troupeaux de moutons. Dominant les lieux sur sa butte, un château fort, gigantesque, semble surveiller les troupeaux comme le plus sévère des bergers. Derrière lui les collines s'élèvent peu à peu, d'une couleur terne, comme desséchées.

Messire Godoire rejoint son écuyère et s'arrête à ses côtés, examinant lui aussi les lieux. Il est chevalier errant depuis de longues années maintenant et sait, lorsqu'on l'envoie secourir les uns ou les autres, à quel point les apparences peuvent être trompeuses. Yena a à présent dix ans et elle commence à l'apprendre également, petit à petit. Le chevalier veille à lui faire travailler son sens de l'observation en toutes occasions.

« Yena, demande-t-il, qu'est-ce que tu en penses ?

– C'est un beau territoire.

Messire Godoire attend la suite. Il ne la frappe jamais en dehors des entraînements et ne lui dit jamais qu'elle se trompe quand elle répond à coté de la question. Certains prennent ça pour de l'indifférence. Ce n'est que de l'efficacité. La fillette continue :

– Les pâturages sont riches, les moutons doivent être de belles bêtes, donc le pays est riche aussi. Je suppose que les pauvres habitent plutôt dans les collines, là-derrière. On ne voit pas de cultures, mais la nourriture doit bien venir de quelque part. Vu qu'il n'y a pas de port près de la rivière ni de maison du partage près de la route, il doit y avoir des champs par-là. Il y a peut-être des disputes entre les paysans et les éleveurs pour avoir les meilleures terres. Si c'est le cas, ce sont les éleveurs qui gagnent. »

Yena se tait. Messire Godoire lui fait signe de continuer. Elle a l'air légèrement surpris, puis fixe avec intensité le paysage devant elle, tête penchée. Au bout d'un moment, elle poursuit :

« Il n'y a pas de village. Toutes les maisons sont éparpillées, il n'y a pas de centre où les gens se réunissent, même pas une place. En cas d'attaque, les gens doivent tout laisser derrière eux et monter se réfugier au château. Il est énorme, ils doivent être très soumis à son influence. Un bastion pareil, ça veut dire que le coin est dangereux, mais si il était dangereux, les gens seraient davantage regroupés... Peut-être qu'il était dangereux avant. Peut-être des pillards réfugiés dans les collines.

Elle hésite encore un instant, puis conclu :

– C'est tout ce que je vois.

– Bien, dit le chevalier. Tu as oublié un élément : des éleveurs riches vivant dans l'ombre d'un homme puissant. Ils ne doivent même pas se rendre compte de leur richesse. Tu peux parier ton couteau qu'ils sont prêts à se lancer dans n'importe quelle bêtise monumentale pour satisfaire leur orgueil et se sentir enfin fiers d'eux-mêmes.

– J'y tiens, à ce couteau.

– Tu veux dire que tu ne me crois pas ? Sale gosse !

L'homme fait mine de frapper l'enfant, qui rit. C'était une plaisanterie. Depuis cinq ans qu'il l'a prise comme écuyère, messire Godoire a finit par s'habituer avec son humour très particulier. Yena scrute à nouveau la plaine, pensive. Tout ça est trop bien arrangé. Elle a l'impression qu'il manque quelque chose, quelque chose d'important. Le tout ressemble à un beau tableau – on n'a pas l'impression que des gens puissent vivre là.

– Messire, que manque-t-il ici ?

– Qu'est-ce qui te fait croire qu'il manque quelque chose ?

– Une impression.

– Alors cherche et trouve par toi-même. Il faut creuser ses intuitions et ne pas parler sans avoir quelque chose à dire.

– Bien messire. »

Le chevalier et son écuyère repartent, l'homme montant un véritable cheval de bataille d'âge plus que vénérable, la fille son poney, et leur maigre bagage installé sur une ânesse. Leur équipage n'est pas glorieux, mais personne n'attend mieux de la part de chevaliers errants.

Ils ont malgré tout de l'allure. Messire Godoire sait se tenir d'une manière rappelant qu'il est de maison noble, et qu'il est inconcevable qu'on n'obéisse pas à ses ordres. C'est un homme bien bâti, qui a été très beau dans sa jeunesse et qui a gardé un charme certain, malgré les rides d'âge et de soucis qui marquent son visage. Ses cheveux noirs virent au gris, et il refuse d'admettre que ce fait le préoccupe de plus en plus, alors qu'il devrait plutôt se soucier de son corps vieillissant.

A ses cotés, Yena fait de son mieux pour imiter sa posture et sa morgue, en vain. C'est une gamine toute en jambe, vive et nerveuse, toujours vigilante. Droite et fière, oui, sans aucun doute, mais il lui manque l'assurance aveugle des puissants.

Il faut dire que tout son apprentissage, son rôle même dans la société, est basé sur un mensonge. Une femme ne peut pas être chevalier des Sept-Esprits. En la prenant pour écuyère et en lui faisant prononcer devant les Sept Pierres les vœux qui ne peuvent être déliés, messire Godoire a placé toute la noblesse dans une situation très délicate : comment respecter leur parole tout en admettant dans leurs rangs quelqu'un qui y était interdit ?

Pour l'instant, la question est à moitié réglée par une tromperie : Yena a les cheveux coupés courts, un pantalon et est priée de répondre au nom de Yenon. A son jeune âge, avec son caractère plutôt teigneux, l'illusion est parfaite. Sa seule marque de féminité est d'avoir des yeux immenses et dévorants, d'un marron pailleté de vert, souvent réduits à deux fentes méfiantes lorsqu'elle jauge son interlocuteur.

Les princes du Dragon, ceux qui ont estimé que leur maison serait couverte de honte si on savait qu'ils ont accepté une femme dans leurs rangs, ne peuvent pas se débarrasser d'elle si facilement : l'honneur interdit de la tuer comme de la renier. Alors, envoyer Godoire et son encombrante écuyère accomplir les basses besognes dans les coins les plus reculées du Royaume devrait, un jour ou l'autre, éliminer le problème. On est tout proche des Terres Sauvages par ici, et le message de détresse demandant le secours des chevaliers était assez obscur. Ils pourraient rencontrer n'importe quelle créature surnaturelle par ici. Et ils le savent très bien.

Mais toujours, rester droit et sûr de soi, quand on traverse un territoire. Messire Godoire connait les lois de l'honneur et les règles implicites. En tant que chevalier et écuyer, lui et Yena sont des serviteurs armés des Sept Esprits, des héros, et ne doivent allégeance qu'aux nobles de plus haut rang. Dans un autonomat, le territoire est dirigé par un président, qui a obtenu les pleins pouvoirs en rendant un service ou un autre à la couronne, mais qui n'est pas de sang noble. La loi donne toute autorité à Godoire sur ces terres.

Malgré tout, messire Godoire est trop expérimenté pour abuser de cette règle. Il sait très bien que les présidents n'apprécient guère de plier l'échine devant des chevaliers errants trop arrogants. Le chevalier estime que ce n'est pas la peine de rappeler à Yena d'être prudente et de respecter l'orgueil des dirigeants de ce territoire. La petite a un instinct de survie extrêmement développé, la seule chose apparemment capable de fermer son clapet.

Traversant la plaine entre les moutons et les saluts respectueux des bergers, ils finissent par arriver au gigantesque château, grand ouvert, et pénètrent sans hésitation dans la cour d'honneur. Les immenses portes du Château se referment derrière eux, dans un claquement retentissant. 

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