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La mort et les chevaliers - partie 3

J'émerge à nouveau. Yena est encore là, et je suis content de me rappeler de son nom. Je l'entends qui fait quelque chose avec du métal... Je ne saurais dire quoi, mais ce bruit m'est doux et familier, rassurant.

J'ai envie de m'asseoir. Sans aide. Je suis vieux et malade, mais pas mourant, par la Vieille Salope ! Enfin, je crois...

Je place mes coudes à hauteur de mes épaules, et je commence à me hisser. Mon corps est si lourd, j'ai l'impression de soulever une des Sept Pierres. Je sais pourtant que je dois être aussi léger qu'un souffle d'aile de papillon sur un squelette, et j'en convainc les maigres baguettes qui me servent de bras, qui finalement me soulèvent. Ouf. On a une belle vue de là-haut.

Le bruit de tout à l'heure, c'est Yena qui aiguise une épée. Elle est penchée sur son ouvrage, et pour la première fois dont je me souvienne, elle ressemble à une vraie femme : douce, précise, concentrée, d'une infinie patience. Ses cheveux longs sont attachés en tresse de guerrier, et je parviens à voir une cicatrice sur sa nuque... La peste emporte ma mauvaise vue ! Quand j'étais jeune, je distinguais jusqu'aux yeux des aigles qui guettaient leurs proies depuis l'azur. J'en suis sûr !

Épuisé, je me laisse retomber plutôt durement sur ma couche. Aussitôt, Yena est là, à me demander ce que j'ai, ce que je veux. Je suis vieux et je veux redevenir l'homme que j'étais, voilà tout, ma fille. Mais comment pourrait-elle le comprendre ? Moi-même, ai-je une seule fois compris les vieillards qui ne supportaient ni bruit ni lumière, qui se laissaient crever dans leur pourriture ? Elle tente de m'aider – mais elle n'a aucune aide à m'apporter. Me nourrir, veiller à ce que je ne prenne pas froid, ça ne m'aide en rien, ça ne fait que retarder un sort pire encore.


Un homme arrive. Je le vois de ma couche, il reste prudemment sur le seuil. Il parle à Yena :

« Êtes-vous prête, à présent, messire ?

‒ Non. Je t'ai déjà dit que je resterai tant que messire Godoire aura besoin de moi, alors file chercher de l'aide au lieu de me tourner autour comme un moustique attiré par une peau de jouvencelle !

Yena est encore penchée vers moi, et si j'étais vicieux, je penserai qu'elle est heureuse d'avoir quelqu'un sur qui se défouler de sa mauvaise humeur. Pourtant, rien dans ses mots n'indique sa colère. Son ton est froid et menaçant, sans plus.

L'homme doit se dire qu'il ne court pas grand risque à insister : il entre, timidement, et ôte immédiatement son bandeau de messager de son front. Je croirais avec plaisir que ces marques de respect me sont destinées, mais je vois bien qu'il garde les yeux braqués sur Yena. En fait, il ne me salue pas plus qu'il n'aurait salué un chat.

La femme réagit immédiatement : elle fonce sur l'intrus, l'attrape par le bras qu'elle tord affreusement dans son dos, et le jette dehors avec sa botte au fondement. Le messager gémit :

‒ Mais, messire, le Roi vous fait mander ! Vous êtes le septième Chevalier Blanc, vous vous devez de...

Et j'entend Yena lui gronder :

‒ Quand on est poli et maître des mots, on dit la septième Cavalière Blanche. Et quand on connaît les lois de l'honneur, on ne demande pas à un chevalier d'abandonner son maître dans le besoin – jamais, au nom des Sept-Esprits !

J'entend des bruits de corps qui se heurtent, la femme doit appuyer sa leçon par quelque démonstration physique. Le messager glapit une justification, elle le fait taire et rentre dans la maison, à peine décoiffée.

Elle voit que je la regarde et me sourit. Un vrai sourire de canaille, le sourire de quelqu'un à qui il vaut mieux ne pas confier son cheval. Elle a joué un sale tour à l'autorité, et ça m'amuse bien, je dois l'avouer. Si j'avais encore la maîtrise de mon corps, je crois qu'elle me plairait bien, cette fille. C'est une mauvaise soigneuse, voilà tout.


Elle s'approche de mon lit. A nouveau, je me sens mal à l'aise. Je crois qu'elle cherche quelque chose à me dire. Je ne sais plus trop ce qu'elle m'a dit, mais je n'avais guère aimé. Heureusement, elle finit par se redresser sans un mot.

Une idée bizarre me trotte dans la tête... L'homme a bien parlé de Chevalier Blanc, non ? Suis-je un Chevalier Blanc ? Ça expliquerait que je ne me souvienne ni de mon nom ni de ma terre. Les sept Chevaliers Blancs sont les meilleurs guerriers du Royaume et ne se consacrent qu'au Royaume, ils doivent abandonner leur nom et leur terre et servir le Roi de leur force et de leurs conseils. Même si certains riches seigneurs refusent de postuler, c'est l'honneur suprême de tout chevalier, et plus d'un troisième fils noble a tout perdu en cherchant à passer l'épreuve...

Moi, l'aurais-je réussi ?

Cette idée m'empli de plaisir. Chevalier Blanc... Oui, aucune vie ne peut être vaine ni absurde, si on a été, au moins pendant une année pleine, un Chevalier Blanc, luttant pour le Royaume, son roi, son peuple et sa terre. Je demande à la femme – je suis si faible qu'elle ne m'entend pas tout de suite :

« Yena... Yena... fille, viens...

Enfin, elle arrive, intriguée.

‒ Oui, messire ?

‒ Yena, suis-je... un Chevalier Blanc ?

Son visage est absolument immobile tandis qu'elle me répond :

‒ Oui, messire, vous l'êtes. Vous avez passé l'épreuve à la troisième année du règne de notre bon Roi Entrix, dont vous aviez été le chevalier attitré durant dix années. Je vais chercher votre manteau. »

Elle repart dans un coin de la masure, et reviens avec une épée, un bouclier blanc, une armure sans blason ni cimier, et un splendide manteau blanc, agrafé sur le devant par la broche du Royaume, en forme de dragon s'élevant vers les cieux... Quelle merveille ! Oui, j'ai été Chevalier Blanc, sans nul doute – comment ai-je pu l'oublier ?

L'épée est quand même petite, et l'armure étroite d'épaule... N'étais-je pas un colosse ? Non, ça doit être ma vue qui me joue des tours.


Je tends la main pour les toucher. Elle tremble, elle est si lourde et pourtant si frêle... La fureur me prend contre ma faiblesse. Elle brûle en moi le temps d'un battement de cœur, et s'arrête. Je n'ai même pas la force de m'insurger contre mon sort.

Je caresse le manteau. Je ferme les yeux et m'imprègne de sa douceur. Il est tissé avec la fourrure des yénotes blanches, les plus rares. Ce simple manteau vaut à lui seul la rançon d'un roi barbare. C'est le symbole de la valeur des Chevaliers Blancs pour le Royaume : ils ne possèdent rien, pas même un sou de bronze, et vivent dans le luxe, car la puissance du Royaume s'évalue à la richesse des cadeaux qu'il leur fait. Si pauvre que soit un village, il sera prêt à se priver pour leur offrir un peu d'or ou un met délicat... parce que si pauvre que soit un village, il sera défendu par les Chevaliers Blancs. Tous les chevaliers doivent être prêts à défendre un mendiant face à un seigneur, eux défendent des poignées de hameaux aussi bien contre les envahisseurs barbares que contre les villes aux sombres pouvoirs et les Tours qui servent d'école aux magiciens.

Et moi j'ai été tout cela. J'ai défendu le peuple, le sang du Royaume. Et l'on m'a béni pour cela, et des lèvres reconnaissantes ont baisé l'ourlet de mon manteau...

La femme l'enlève, je m'y accroche par le peu qu'il me reste de volonté. Non, pas lui, c'est la seule trace de mon passé. Elle me le laisse alors et même me couvre avec. Elle me borde presque tendrement, elle qui n'était qu'une boule de nerfs et de mauvaise humeur. Elle sait ce que ce manteau signifie. Elle sait combien de sang se cache sous sa blancheur immaculée – aujourd'hui, elle le sait même mieux que moi.

Je m'endors, et pour la première fois, je respire légèrement. L'odeur des poils de yénote m'enivre et m'apaise. Confiant, je me laisse guider par la fée du sommeil, et je rêve de chevaux et de batailles glorieuses.




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