Chapitre 5
Comment c'est possible qu'il puisse me cerner avec tant de facilité, ça me reste encore ancré dans ma tête, mais ça m'intrigue surtout. Je suis dans une remise en question la plus totale. Dans tous les cas il a appuyé au bon endroit pour me toucher émotionnellement. Mais je ne peux pas lui en vouloir, il a visé juste. Voyant mon regard, il comprend de suite quand mes larmes coulent abondamment. Moi qui a longtemps enfouit cette tristesse, la sentir remonter à la surface, j'ai l'impression d'être revenu à la première fois que j'ai perdu mon ouïe. L'horrible réalité me rattrape sur le coup et me rappel à quel point je suis si faible, je tente de me ressaisir sans vraiment y arriver. Mais le fait que Lyn me prend dans ses bras tout en me rassurant m'apaise. Personne ne m'a consolé comme ça auparavant. Sa façon de faire est si tendre et déborde de sincérité, je sais qu'il ne triche pas, il n'a pas pitié envers moi. Je crois qu'il vient de me toucher en plein cœur, pourtant ça ne fait même pas quelques jours que je le connais. Il se détache de moi avant de sortir son calepin.
- Je sais, j'ai appuyé là où ça fait mal, mais il fallait que ça sorte. Je l'ai vu tout de suite que tu n'étais pas serein, dès la première fois, a-t-il écrit.
- Tu veux dire quand tu m'as sauvé lors de ce fameux matin... Je lui demande, un peu surpris de sa révélation.
- Oui, mais je n'ai rien dis au début, car je ne suis pas du genre à juger les autres, mais en te parlant, j'ai compris tout de suite, a-t-il répondu sur son bloc-notes.
- Ça se voit tant que ça que suis triste ? je lui demande, totalement perdu.
- C'est flagrant même, c'est pour ça que les autres s'en prennent à toi. Tu es tout le temps triste et tu ne répliques pas dès qu'ils te disent ou font quelque chose, donc eux ils continuent. Mais il est grand temps que ça change. A partir de maintenant, le prochain qui ose te dire quoi que ce soit, je lui fous un coup de Démonia entre les jambes, bien placé pour ne plus se reproduire à l'âge adulte, a noté le garçon au look alternatif qui aborde un regard assez sérieux.
Je ne peux m'empêcher de rire face à la dernière phrase, il est vraiment prêt à tout pour me protéger à ce que je vois. Décidément il a eu au moins le mérite de faire sécher mes larmes, c'est vrai que ses chaussures sont balèzes quand même, c'est hallucinant. Je me demande comment il fait pour marcher avec. Une chose nous fait sortir de nos pensées qui est la sonnerie du bâtiment, on se dépêche pour aller à nos cours respectifs. Avant qu'il aille rejoindre sa classe, il m'a donné un bout de papier plié, je n'ai pas le temps de lui demander ce que c'est, vu qu'il est déjà parti très vite. Je déplie le papier pour voir son contenu qui me laisse un peu surpris.
"En sortant des cours, je t'invite chez moi, ma mère pourra te raccompagner en voiture si besoin."
Il m'invite chez lui, je ne sais pas comment réagir, moi qui n'est plus vraiment habitué aux sorties et surtout aller chez quelqu'un. D'un côté, j'avoue que c'est une bonne idée, mais je ne sais pas, j'hésite. C'est stupide, je sais, mais c'est plus fort que moi. Je ne suis jamais allé chez des amis hors de mon quotidien, suis une sorte d'ours qui ne sort pas de chez lui. Je dois prévenir ma tante lorsque je sors du lycée si elle est à la maison bien-sûr, à moins que l'hôpital décide de la retenir. Mon accompagnateur me rejoint près de l'entrée de la salle de cours, je le salue avant d'entrer dans la pièce de cours et de commencer à apprendre. Je vais avoir du mal à me concentrer sur les cours après ce que Lyn m'a dit, décidément, il m'obsède beaucoup. Ma journée vient à peine de commencer que je suis en pleine tourmente, ça promet pour suivre les cours correctement, déjà, que ça ne me passionne pas, malgré qu'il faille apprendre. Je vais devoir me forcer pour rester un brin attentif aux cours de la journée, ça ne va pas être une partie de plaisir.
L'heure du dernier cours s'est achevé, j'ai bien cru y rester une éternité. Entre les matières de plus en plus barbantes, l'accompagnateur qui me pose trop de question sur ma vie et de l'origine de ma surdité, j'ai la tête farcie. Il ne peut pas se mêler de ses oignons cet imbécile, il a beau m'accompagner en cas de difficulté par rapport à mon handicap, mais quel débile profond. Voir qu'il a souri en me posant ses questions montre clairement qu'il se paie ma tête, lui aussi est donc du genre à me casser du sucre derrière mon dos. Ça m'a bien fichu le moral à zéro tout ça. De plus, ça ne s'est pas arrangé lors de la pause du midi lorsqu'un des élèves m'a bousculé dans le couloir, prêt à me passer à tabac avec deux de ses amis. Heureusement pour moi Lyn est intervenu au bon moment, beaucoup plus énervé que ce matin, il a esquivé les coups des trois abrutis qui n'ont pas été assez rapide d'après ce que j'ai vu. Puis, il les a mis à terre après leur avoir mis un "coup de Démonia entre les jambes pour ne plus se reproduire" comme il l'a dit. Bien sûr ils ont dû faire un aller simple à l'infirmerie, d'après lui, ils vont s'en tirer. J'avoue que j'ai été content qu'il me défend, mais un peu triste car il peut avoir des problèmes avec les autres élèves et je ne veux pas en être le responsable. Même s'il m'a dit qu'il s'en fiche des autres, je pense qu'il ne doit pas négliger le domaine sociable, bien que je ne sois pas un exemple à prendre. Enfin, il sait se défendre, au moins, personne ne va oser lui chercher des ennuis.
Dix-huit heures, je me dirige vers la sortie du bâtiment, attendant que la petite tête rouge sorte. L'avantage c'est qu'il y a peu de classes qui finissent à cette heure-là, donc moins de chance de me faire agresser, du moins je l'espère. Je m'adosse au mur et attend mon défenseur, on peut dire qu'il a hanté mes pensées aujourd'hui. Après quelques minutes d'attente, je le vois enfin sortir, je le rejoins et on entame la marche. Je le suis tout en me retenant discrètement à son bras, la nuit est presque tombée et certaines zones ne sont pas éclairé. En m'accrochant à lui, je suis sûr de ne pas le perdre. Tout en continuant sa marche, il commence à écrire.
- Tu as peur de me perdre de vu ? Me demande-t-il par écrit.
- Comment tu le sais ? Je ne t'ai rien dit, je lui réponds, totalement surpris.
- Tes gestes parlent pour toi, écrit-il, alors que je me sens rougir légèrement.
Bon, ce qui est sûr, c'est qu'il n'est pas du tout dupe, mais surtout très perspicace, j'ai l'impression d'être mis à nu totalement et que toute défense est inutile. On continue d'avancer et nous voilà arrivé devant une belle maison, d'une taille correcte je pense. La façade est belle, totalement le genre de maison qui a été rénové, l'intérieur doit l'être également, enfin je vais voir de mes yeux. Lyn se met devant la porte avant de l'ouvrir après avoir sorti ses clés alors que je le suis. Il me dirige vers le salon, là ou deux personnes sont présente, une femme d'environ la trentaine d'années et un petit garçon. L'enfant en question dévie son regard en notre direction, oubliant son activité et se jette sur lui, j'en déduit que c'est son petit frère et que la femme présente est sa mère. La petite tête rouge les saluts tous les deux avant de me présenter à sa petite famille que je trouve accueillante. Sa mère m'envoie son sourire des plus sincères alors que son petit frère se content gesticuler partout en disant quelque chose, mais comme il est dos à moi, je ne sais pas ce qu'il a dit.
- Louan est atteint de surdité, il faut lui parler en face pour qu'il puisse lire sur vos lèvres, a écrit Lyn à l'attention du jeune garçon déjà parti vers son activité.
- Je suis contente de voir que tu t'entends bien avec Lyn. Il a des amies, mais c'est rare qu'il les invite chez nous, me dit sa mère, toujours le sourire collé aux lèvres.
Pour la première fois de ma vie, je n'ai pas peur d'être jugé, je me sens plutôt bien. Ce n'est pas que je me sente tout à fait à l'aise, mais je me sens beaucoup mieux que quand je suis au lycée. Les yeux bleus de sa mère sont juste magnifiques, le visage ovale, traits fins, cheveux blonds qui tombent jusqu'au épaules et un corps mince. Ses vêtements qui sont pull et pantalon, beige et blanc et des chaussures à talons émeraude, c'est assez lumineux je l'avoue. Elle dirige dans la cuisine préparer le dîner, Lyn m'invite à m'asseoir sur le canapé alors qu'il va dans sa chambre pour déposer ses affaires. Le petit garçon, qui est occupé à dessiner, porte son attention sur moi soudainement. Même yeux bleus, des cheveux blonds court, le visage légèrement carré et ovale, d'un physique mince aussi. Au niveau vestimentaire, il porte un t-shirt blanc, un pantalon noir et des baskets de la même couleur, le style d'un enfant de son âge.
- Dit, ce n'est pas toi qui a dessiné le portrait de mon grand-frère ? Me demande-t-il, alors que je ne me suis pas préparé à cette question.
- Euh... Oui, il te l'a montré ? je lui demande un peu perdu et surpris en même temps.
- Oui, c'est trop beau, tu dessines trop bien, me dit le petit garçon avec un grand sourire d'admiration qui m'est destiné.
Un compliment dont je ne suis pas habitué à recevoir, sauf de la part de ma tante. Mon portable vibre, je le sors de ma poche, je vois que j'ai eu un message justement de ma tante. L'hôpital a décidé de la retenir plus longtemps que prévu et elle ne veut pas que je me retrouve seul. Pour ma part, je peux me débrouiller, quoique si je loupe mon réveil, ce qui peut arriver, ou autre chose, vaut mieux que quelqu'un soit avec moi. Lyn revient et je lui explique le message que j'ai reçu et si possible que je puisse dormir exceptionnellement ce soir. Je vois son visage s'illuminer avant de partir à la cuisine rejoindre sa mère et lui expliquer ce que je lui ai dit. J'espère de tout cœur que je ne vais pas la déranger avec mes histoires. J'attends avec le petit garçon dans le salon alors qu'il est totalement occupé à dessiner, intrigué je le regarde faire. Certes il est en dessous de mon niveau, mais ça reste un dessin d'enfant assez sympa. Il lève la tête et me regarde, un peu gêné sur le moment.
- Mon dessin n'est pas aussi beau que le tien, me dit-il alors que je regarde attentivement la feuille.
- Ne soit pas trop dur avec toi-même, c'est comme ça qu'on débute tous, même moi j'y suis passé par là, je lui explique, ce qui a l'air de le rassurer.
- Mais comment tu as fait pour dessiner aussi bien ? me demande-t-il, surpris.
- Dessiner le plus souvent possible, il n'y a que comme ça que tu progresseras. Enfin moi c'est ce que j'ai fait, je lui réponds, je me sens à l'aise, je ne me reconnais pas sur le coup.
Je prends mon sac et commence à sortir mon grand carnet de dessin et me met à dessiner. L'enfant intrigué s'assoit à côté de moi me regarde dessiner, puis je sens qu'on me tapote l'épaule. Je lève la tête et voit le rouge assis à côté de moi et sa mère face à nous, toujours avec cette aura chaleureuse. Je ne sais pas pourquoi mais je suis extrêmement à l'aise chez lui, tous mes démons du quotidien ne sont pas là.
- Lyn m'a dit que ta tante travaillait ce soir et qu'il n'y a personne chez toi. Si tu veux tu peux rester dormir ici, ça ne me dérange pas, me dit-elle avec un sourire sincère.
- Merci beaucoup, pour qu'elle me le demande c'est que c'est plutôt sérieux, c'est rare que ça arrive, je la remercie alors que l'embarras m'envahit.
- Voyons, ne te justifie pas, mon garçon, Lyn va partager sa chambre avec toi, me dit-elle.
- Maman, Louan il dessine trop bien, regarde, dit le garçon, enthousiaste en allant rejoindre sa mère.
Tous les deux me regardent dessiner alors que je me concentre sur cette petite esquisse. Après avoir fini de dessiner un paysage avec des montagnes, de la neige sur les cônes et ajouter les ombres et les lumières, je vois le regard de la maman changer. Étonné et intrigué de ce changement soudain, je lui demande si tout va bien, cette dernière hoche la tête de haut en bas. Elle me dit qu'elle aime beaucoup mon coup de crayon et que je peux aller loin si je décide de m'orienter vers l'art, chose à laquelle je n'ai jamais songé. J'apprends en même temps qu'elle est professeur d'art et que j'ai un véritable don pour le dessin, ça me rappelle ce que m'a dit ma tante sur le coup. Je reste surpris face à la réaction très positive que j'ai eu par rapport à mes dessins, j'avoue que je ne m'y suis pas attendu. J'ai encore du mal à me faire à cette idée je l'admets, cependant ce compliment me met du baume au cœur. Après avoir fini mon dessin, je le range dans mon sac et part suivre Lyn qui m'entraîne vers un couloir lumineux qui oscille entre beige et blanc. Je pense plus ou moins savoir où il me guide, mais je vais le voir de moi-même. On s'arrête devant une porte qu'il ouvre et je découvre sa chambre aux couleurs acidulées et pastels. Mon dieu je crois halluciner, il a des peluches partout, sur les armoires, sur le bureau et partout sur le lit, mais comment il fait pour dormir ? C'est incroyable d'avoir autant de peluche de toute taille et dormir avec, je reste encore surpris de cette découverte.
- Toi, tu adores les peluches je me trompe ?
- Les peluches sont des objets trop mignons et j'adore ça, il a écrit sur son bloc-notes avec des smileys qui sourissent et pleins de cœur.
- Comment ne pas le remarquer ? je constate sous la surprise.
- Dès que j'en vois une trop mignonne, je ne peux pas résister je la prends tout de suite, écrit-il sur son calepin avec pleins de smileys et de petits dessins marrant, ce qui me fait sourire.
J'ai envie de rire, mais je me retiens, ce gars est en fait un grand enfant, j'ai du mal à le croire, et pourtant c'est le cas. Je vois beaucoup de panda, pas mal de nounours de toutes les couleurs, des animaux de tout sorte, même une licorne assez grande. Pourtant quand on regarde Lyn, comment il se comporte, on ne pense pas qu'il peut encore avoir l'âme d'un enfant. Sa personnalité me surprend de plus en plus, son look nous induit totalement en erreur sur ce qu'il est, c'est surprenant. J'ai un peu de mal à me remettre de ma découverte, c'est fou quand même cette petite tête rouge à une très grande joie de vivre, ça me déstabilise beaucoup. Moi qui a toujours pensé que ma vie n'a plus aucune importance depuis mon accident, maintenant, je doute. Il sort de la chambre et me fait signe de rester en l'attendant, je suppose qu'il va prendre sa douche. En voyant l'heure je pense que c'est ça, vu qu'il est presque vingt heures, j'observe sa chambre un peu plus en détail. Une pièce bleu ciel avec des meubles blanc, violet, vert, jaune, rouge et orange, c'est vraiment très coloré une vraie chambre pour enfant en matière de couleur. Je m'approche d'un de ses bureaux et je vois des jeux vidéo et des albums de métal et pop/rock empilés les uns sur les autres. Il y a même cinq étagères de mangas au-dessus du bureau, ça me rappelle quand j'en ai lu étant gamin. Une bonne vingtaine de minutes plus tard, Lyn revient de sa douche, je crois que je ne suis pas au bout de mes surprises. Habillé d'un simple t-shirt blanc, d'un short léger gris et des chaussons énorme à l'effigie des nounours. Je pense que je peux le dire, ce garçon est un accro des peluches. Ça change de son look habituel, ça surprend.
- Nounours jusqu'au pied à ce que je vois, je lui dis en voyant ses chaussons assez marrants.
- Elles tiennent chaud, sont confortables et il y a des nounours dessus, de quoi me faire craquer, il écrit sur sa feuille, avec pleins d'étoiles dans les yeux.
- Je crois que tu es une personne avec une personnalité unique en son genre, je lui dis, en constatant ce que j'ai vu dans sa chambre.
- Et tu n'as encore rien vu de moi, écrit-il avec un smiley.
Je laisse échapper un rire léger, je n'en doute pas une seconde, loin de là. Avec ce que j'ai vu je sais qu'il n'est pas comme les autres, c'est un enfant caché en fait. Soudain il me prend la main et entame le pas, je le suis dans son élan et on arrive au salon. Il met la table avec son petit frère, d'ailleurs je ne connais pas son nom maintenant que j'y pense. Sa mère arrive avec les plats, table prête, elle m'invite à prendre place alors que la petite tête rouge s'amuse à chatouiller son petit frère. Ce dernier doit être mort de rire, je le vois à sa mine joyeuse, une ambiance que je découvre pour la première fois. Avoir un petit frère ou une petite sœur est une idée qui ne m'a jamais traversé l'esprit étant fils unique. J'imagine qu'il y a beaucoup de bons moments à partager. Ça me rappelle quand j'ai été avec mes parents et qu'on a fait beaucoup de sortie et d'activités, ils me manquent tant. La maman de Lyn me regarde, un peu inquiète, je crois que je viens de tirer une mine pas très joyeuse.
- Tu penses à quelqu'un en particulier, me demande-t-elle.
- Comment vous le savez ? Je n'ai rien dis, je dis sous l'étonnement, je sais d'où vient la perspicacité de Lyn maintenant.
- Je connais ce regard, tout simplement parce que je travaille sur les expressions dans mon métier, m'explique-t-elle.
- Donc vous savez pourquoi je suis triste ?
- Je le sais effectivement, c'est lié à tes parents. Je te comprends car je suis aussi passé par là, me raconte-t-elle, alors que mes yeux s'agrandissent alors qu'elle me révèle une partie de sa vie.
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