Shi-Waer entra sans même prendre la peine de frapper à la porte et me dit simplement :
-Suis-moi.

Intriguée et pas vraiment en mesure de refuser, je le fis. Progressivement je devins excitée et un peu terrifiée. Nous traversâmes un dédale de couloirs et aussi un certain nombre de chambres vides, avant qu'elle ne s'arrête devant une immense porte en bois taillé.
-Entre, me dit-elle.

Puis, elle tourna les talons et s'en fut, sans me lancer un regard ou un mot de plus.

Eh ben, c'est qu'elle est avare en parole, la vieille, pensai-je, amère.

Curieuse, je poussai la porte et vis... ben beaucoup de choses, en fait. J'étais arrivée dans une immense cour avec des espèces de gigantesques canons, plantés à même le sol en une sorte de cercle. Des gens couraient dans tous les sens et j'entendais des ordres hurlés de toutes les directions. Et au milieu de ce vacarme, moi, j'étais plantée dans le décor, complètement bluffée par ce que je voyais.
-Hum.

La voix grave d'Alexandre me fit sursauter. Bon dieu, il était dans un état (des blessures de la tête aux pieds, dont une énorme balafre sur la joue droite. Pas joli-joli).
-Suis-moi, fillette.

Quoi ! Qu'est-ce qu'ils avaient tous avec les "suis-moi" ? Syndrome des Libérateurs ?

Mais, pourtant, je ne regrettai pas de l'avoir suivi. Tout en marchant, il m'expliqua deux ou trois trucs :
-Nous sommes peu, c'est vrai, mais cela fait quarante années que nous tenons tête à ces usurpateurs. On vit en comptant sur les autres. Chacun à un boulot et pas question de buller. On a besoin de tous les bras que ce soit pour faire la cuisine ou armer les canons. Regarde, là-bas !

-Ho, fis-je (oui, je sais, c'est pas très classe comme phrase).

On aurait dit un des camps de jadis, romain, si je me souviens bien de ce que me racontait maman, et la légion juste à côté. Bon, peut-être en un peu moins bien organisée. Mais quel spectacle tout de même, pour quelqu'un qui sort de trois ans d'esclavage sous les ordres de robots !

-Tiens, mais qui voilà, notre petite malade préférée (évidemment vous l'avez tous reconnu c'était Kilian qui approchait d'un pas souple dans notre direction) ! Salut, Al le grand, désolé, je t'avais pas remarqué, se moqua-t-il. Bienvenue dans la famille, sœurette.

Il dut voir combien j'étais fascinée par le camp et les soldats parce qu'il poursuivit :
-Et t'as même pas vu nous autres, les combattants en pleine action. De vraies machines à tuer des robots. Sans me vanter je ne suis pas mauvais, mais la compagnie de notre meilleur pote Rayan, c'est juste la meilleure de la galaxie. Bon je me casse, dit-il en voyant la tête que faisait Alexandre, c'est à dire pas loin de l'explosion.

Et il repartit d'où il était venu, un sourire en coin plaqué sur le visage. Y a pas à dire il était...
-Incorrigible, celui-là, mais il détend l'atmosphère, lâcha Alexandre, approuvant ma pensée.

-Si vous le dites, dis-je en en opinant du chef.

-Bon voilà, j'ai promis de te laisser faire ton choix alors le voilà. Veux-tu rester avec nous ou bien partir en fillette libre et vivre tranquillement ta vie ?

Sympa. Je n'avais même pas eu le temps de voir quoi que ce soit et on me demandait déjà de choisir si je voulais rester et me battre dans une guerre qui ne me concernait pas directement et mourir potentiellement ou de fuir pour tenter de me faire reprendre par MJC65 en tentant de sauver mon frère. Super.