Chapitre 27
Je levai les yeux vers l'astre lumineux. Cela faisait maintenant presque trois jours que les autres nous avaient quittés. Quand le professeur s'était réveillé, on s'était empressé de le menacer de réaliser un nouveau remède sous peine de le torturer. Je n'avais plus à rien perdre et j'étais prêt à tout pour obtenir ce que je voulais. Ce scélérat méritait pire que la mort. Mais mon père s'était montré très persuasif. Il pouvait devenir relativement menaçant quand il le décidait...
Je soupirai, le cœur lourd. Hélas le professeur avait dit que le délai de trois jours était trop court... Je n'avais pratiquement pas dormi ces derniers jours. Le temps défilait à une vitesse folle. Il s'était écoulé beaucoup trop rapidement à mon goût. Les heures tournaient mais nous avions beau le faire travailler jour et nuit, si l'antidote n'était pas prêt en quelques heures, tout serait fini. Ma gorge se noua à cette idée. Je ne voulais surtout pas y penser. Ce maigre espoir de sauver Kim me donnait de la force chaque jour. Mais le temps nous manquait. Et plus nous nous rapprochions de l'heure fatidique, moins j'étais serein. Je commençais même à paniquer à vrai dire...
- Alex ? me héla tout à coup mon père.
Assis sur un rocher en hauteur, je baissai les yeux vers lui, le cœur battant. Je savais ce qu'il allait m'annoncer. C'était l'heure, le moment de quitter cette fichue île était arrivé. Je hurlais intérieurement. Non... Ça ne peut pas se finir comme ça... Une larme solitaire roula sur ma joue.
- Alex ! répéta-t-il d'une voix plus forte, légèrement agacée, probablement dûe à la tension qui régnait depuis ces trois jours entre nous.
J'inspirai profondément, m'attendant au pire.
- Quoi ? maugréais-je d'une voix monocorde.
Je fermai les yeux, pour encaisser le choc de sa réponse.
- Le professeur a fini !
- Quoi ?! criais-je de surprise, en ouvrant brutalement.
J'ai mal entendu, ce n'est pas possible... Je n'en croyais pas mes oreilles. Ma lèvre inférieure se mit brutalement à trembler. Je n'osais tout simplement pas réaliser que le miracle s'était produit.
- J'arrive ! lançai-je presque en hurlant.
Je descendis du rocher sur lequel je m'étais assis, à une vitesse surhumaine. Je courais comme un fou vers notre petit campement. Ma gorge brûlait sous le manque d'oxygène. Mais ça m'importait peu. Tout ce qui comptait se trouvait dans la main du Professeur. Je me dirigeais vers lui d'un pas plus que décidé. Ses yeux brillaient intensément.
- Je ne pensais pas pouvoir le faire en si peu de temps. C'est un progrès phénoménal ! s'extasia-t-il en regardant la gourde attentivement.
Je n'écoutai pas ses propos insensés et dénués d'humanité. Je m'étais arrêté à quelques dizaines de centimètres de lui. Je ne lâchai pas la gourde des yeux, qu'il tenait dans les mains.
- L'antidote est là-dedans ? s'enquit mon père méfiant.
Le professeur hocha vivement la tête avant de froncer les sourcils.
- Mais il y a quand même un problème.
Mon cœur loupa un battement. Ca ne s'arrêtera donc jamais ?!
- Quoi encore ? grommelais-je sur le point de lui envoyer mon poing dans sa figure de scientifique modèle.
Je levai les yeux vers lui, craignant d'entendre le pire.
- Il n'y a qu'une toute petite dose d'antidote, la moitié de ce que je fais habituellement.
Je me pétrifiai. Ce n'était pas une très bonne nouvelle. Ça va quand même fonctionner ?
- On n'a pas le choix de toute façon, répondit mon père en s'emparant de la gourde. On fera avec.
- Vous voulez vous en servir pour qui ? nous interrogea tout à coup le professeur.
Depuis que nous l'avions forcé à créer ce remède, mon père avait insisté pour qu'on ne lui parle pas de Kim. Il avait peur qu'il s'en serve contre nous. Notamment par rapport à l'attachement que je lui portais. Son visage s'éclaira brusquement quand il comprit.
- C'est pour la louve c'est ça ? Elle n'en a pas pris... comprit-il en souriant de plus belle.
Je sentis une boule de haine m'envahir. J'avais envie d'une seule chose, lui faire avaler son visage malsain. Une veine saillante apparut sur mes avant-bras, tellement je serrai fort mes doigts contre ma paume. Avec la fatigue qui s'accumulait de plus en plus, j'avais du mal à ne pas lui refaire son visage.
- Bon, je vais vous aider, reprit-il à notre grande surprise.
Je lui lançai un regard empli de haine et ricana sourdement. Ce serait une grande première.
- Ne faites pas cette tête. Je souhaite juste voir une dernière fois mon plus beau spécimen et voir ce que ça donne.
Je tressaillis lorsqu'il mentionnait celle que j'aimais... Il se pencha vers nous, les yeux pétillants.
- Je vais vous expliquer comment la capturer.
Je n'aimais pas le regard qu'il prenait. Il a quelque chose derrière la tête, mais quoi ?
*
Cachés derrière un buisson, retenant notre souffle, nous attendions. Je sentis une goutte de sueur glisser de mon front. Je commençais à avoir des crampes. Le professeur avait éparpillé des feuilles sur le sol. D'après lui, elle permettait aux personnes ayant été transformées de gérer mieux leur transformation, elle apaisait la douleur de l'esprit humain qui se faisait écraser par celui de l'animal. Et Kim viendrait donc les récupérer. Cependant cela faisait bien trop longtemps que nous attendions. Je commençais sincèrement à perdre patience.
Tout à coup je perçus un mouvement sur ma droite. Mon père, caché à côté de moi, me jeta un coup d'œil. Il semblait tendu. C'est alors qu'elle apparue. Mon cœur battait à tout rompre. D'un pas hésitant, elle s'approchait de notre piège. Allez, encore un petit peu. Tu peux le faire Kim. Je me redressai alors prêt à intervenir.
Soudain elle s'immobilisa et huma l'air. Je retins mon souffle, angoissé. Mais finalement elle continua sa marche. Je soupirai, soulagé. On s'était enduit de de boue, d'herbe, de feuilles pour effacer un maximum notre odeur. Je serrai les poings - dans lesquels je tenais un canif - quand la louve blanche approcha sa truffe du sol, comme si elle sentait que quelque chose se tramait. Allez, vas-y, priais-je en silence. Et alors c'est ce qu'elle fit.
Aussitôt qu'elle marcha entre les feuilles, mon père tira sur la corde qu'on avait dissimulée, et le professeur fit de même en face de nous. Je ne perdis pas de temps. Je bondis hors de ma cachette. La louve venait de trébucher sur la corde et de s'écrouler sur le sol. Malheureusement elle commençait déjà à se relever et elle semblait furieuse. Elle gronda férocement face à moi, les babines retroussées. Sans y prêter attention, je brandis vivement le canif et coupa une ficelle qui était attachée à un rocher, se perdant dans les arbres. Immédiatement un filet tomba sur la louve. Je passai mon regard dans la clairière et retins mon souffle. La louve se débattait avec hargne mais elle semblait prise au piège. On a réussi, pensais-je sans trop y croire.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro