Sébastien
Clary les attendait tous. Plus rien ne transparaissait de ce qui s'était produit entre elle et Alec. Quand tout le monde fut à portée de voix, elle les héla.
— Alors, vous venez ?
Alec fut sur le point de répondre. Il ouvrit la bouche, mais ne sachant trop quoi dire, il la referma simplement et la suivit ainsi que les autres.
Sébastien Morgenstern était dans une prison, oui, mais franchement, il aurait aussi bien put être dans un cinq étoiles. Son père avait joué du coude pour ne pas qu'il soit traité comme les autres prisonniers. Avec les Herondale, ils étaient la seconde famille la plus importante, descendant directement des chevaliers ayant servi les Lightwood jusqu'au départ de Gideon Lightwood, pour le monde des mortels.
Mêmes les visiteurs de Sébastien étaient traités avec plus de respect. La salle de visite ressemblait d'avantage à un salon où on aurait pu y prendre le thé.
— Clary ! Ma chère sœur ! Que me vaut l'honneur de ta visite? Cela doit être d'une importance capitale pour que tu viennes me voir. N'avais-tu pas dit, ne plus jamais vouloir me revoir ?
— Ne crois pas que je suis ici parce que mon idée a changé. Tu as laissé Magnus vieillir en revenant avec le livre, sans lui. Tu n'es qu'une ordure qu'on aurait dû condamner à mort.
— Mais je suis immortel...
— Et Magnus est revenu, continua Clary en se décalant pour laisser entrer Magnus.
Sébastien fut très étonné de voir que, effectivement, son « ami » avait trouvé le moyen de revenir sans le livre. Décidément, il était plus débrouillard qu'il ne l'aurait cru. À l'époque, il avait bien tenté de rester avec Magnus, mais l'idiot avec qui il avait fusionné détestait Maryse, la jeune femme dont Sébastien s'était entiché. Selon lui, elle était beaucoup trop fragile intérieurement et ne lui donnait aucune palpitation. Rien à faire! De plus, la vie de banquier que son hôte menait rendit Sébastien dépressif. Cet homme calculateur ne vivait que pour l'argent. Son ami Magnus, lui, travaillait dans la police et enquêtait sur des trucs intéressants. Évidemment il lui avait souvent répété que le miroir ne se trompait pas, mais il était plutôt du genre impulsif. Alors, se retrouver assis, dans un bureau de banquier, avait été catastrophique. Jonathan, son hôte, avait bien tenté de traverser le miroir avec lui pour vivre l'immortalité mais seulement un des deux était parvenu à traverser et avait gardé le pendentif. Malheureusement, le livre, lui, était resté entre les mains de Jonathan, de l'autre côté du miroir.
Tout le monde avait cru que Sébastien avait caché le livre pour le garder pour lui. En aucun cas il ne serait reparti sans laisser la chance à Magnus de revenir parmi eux. Il avait mis des années à comprendre que Jonathan était probablement parti avec le livre pour ne plus jamais revenir.
— Magnus ! Mon ami !
— Tu oses m'appeler ton ami après m'avoir enfermé dans le monde des mortels alors que tu savais qu'Alec et moi allions souffrir ?
Magnus chercha la main d'Alec. Il lui avait peut-être fait beaucoup de peine tout à l'heure, mais il restait son mari et il l'aimait malgré tout. Instinctivement, Alec attrapa sa main et la serra plus que nécessaire. Oui, ils avaient tous les deux galeré à vivre sans l'autre.
— Suis-je supposé te plaindre alors qu'on m'a enfermé ici sous prétexte que j'aurais caché le livre ? Je le répète, puisque tu n'étais pas ici, mais c'est Jonathan qui a le livre.
— Jonathan a disparu avec toi. C'est moi qui ai consolé Maryse. D'ailleurs, elle ne s'en est jamais remise. Elle est devenue froide et distante jusqu'à ce qu'un jour, je n'aie plus de ses nouvelles. Elle est probablement morte de chagrin.
— Tiens, elle porte le même nom que notre mère, s'étonna Alec. Il faut croire que les Maryse ne sont pas du genre joyeux.
Magnus souleva un sourcil en dévisageant étrangement Alec. Sébastien se releva aussitôt.
— Alec, ta mère ne s'appelle pas Maryse, tu délires, répondit simplement Sébastien.
— Ah! Hem ouais c'est vrai...
— Et toi Herondale, tu es venu me voir dans quel but ? Ta grand-mère m'a déjà mis en prison. Il me semble que tu ne peux rien faire de plus que ce qu'elle a déjà fait.
— Je veux partir d'ici.
— Mais je ne t'ai pas invité... Tu es venu ici de ton plein gré, à ce que je sache.
— Non ! Je veux dire partir d'ici, de ce monde.
— Et moi donc ! Je ne rêve que de repartir retrouver Maryse. Elle était si adorable. Mais toi, mon presque beau-frère, ta dulcinée est ici. Qu'est-ce qui pourrait bien t'attirer dans l'autre monde ?
Jace arrêta de respirer. Si ce Sébastien rêvait de repartir, il pourrait l'aider à exaucer son souhait... En échange, il faudrait qu'il l'amène avec lui, loin de tous ces cauchemars.
— Clary a bien changé, et moi aussi. J'aime quelqu'un d'autre qui ne m'aime plus. Alors, rien ne me retient ici, répondit-il les larmes aux yeux.
— Si j'avais su que Jonathan-Christopher Herondale chialerait un jour, devant mes yeux, j'aurais pris une photo, s'exclama Sébastien. Ta grand-mère doit être ravie que tu aies enfin lâché ma soeur. Quelle honte s'était d'être en lien avec la famille d'un « traître». Par contre, elle doit être furieuse de savoir que tu ne veux pas lui succéder.
— Elle n'en sait rien...
— Oh ! Un Herondale qui trahit sa propre grand-mère ! Cette personne que tu aimes autant doit être très spéciale pour que tu deviennes aussi... mou.
— Je t'interdis de parler à Jace comme ça, cria Clary. Tu n'as aucune idée de ce qu'il vit en ce moment. Même si je ne sais pas pourquoi exactement, je le déçois sans arrêt, Lewis le déçoit sans arrêt et sa mère est froide comme une pierre. Ça, c'est sans parler de sa sœur.
— Et de son frère, lâcha Jace.
— D'abord, qu'est-ce qu'un certain Jace vient faire dans notre conversation, répondit Sébastien de plus en plus irrité.
— Tu as mal compris. Elle a bien dit Joch, reprit Magnus.
— Disons que Clary parlait de Joch. Peut-on me dire alors, depuis quand Joch a un frère et une sœur ? Surtout, comment sa mère peut le décevoir à ce point alors qu'elle est morte depuis plusieurs siècles ? Et Lewis, c'est qui exactement ?
Voyant qu'il était inutile de tenter de cacher tout cela à Sébastien, qui avait déjà réussi à découvrir une partie de la vérité, Alec était resté saisi par ce que venait de dire Jace. Il semblait qu'il l'ait déçu, mais il ne comprenait pas comment c'était possible alors qu'il tentait de retrouver le livre manquant pour qu'il puisse repartir.
— Jace ? Tu peux me dire comment je t'ai déçu à ce point, demanda le libraire.
— Demande à ton très cher mari. Il saura très bien de quoi je parle. En fait, tu l'as probablement bien plus déçu que moi. Je ne croyais pas que tu aurais pu me voler l'amour de ma vie et faire autant de ravage dans votre couple.
Alec se retourna étonné vers Magnus. Mais de quoi parlait Jace ? Sébastien s'était relevé en penchant la tête de côté. On voyait qu'il tentait de déchiffrer les paroles de ses visiteurs. Ses yeux pétillants, ne les lâchaient maintenant plus de vue.
— Magnus ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
— Viens par ici Alec ! Je ne veux pas que Sébastien nous entende.
L'asiatique tira la manche du libraire jusqu'à ce qu'ils soient hors de portée. Alec tenta de rencontrer les yeux de Magnus, mais ne put voir qu'un visage triste. Jace avait dit vrai. Il lui avait fait de la peine. Mais qu'est-ce qui pouvait être aussi catastrophique pour ne plus qu'il ose le regarder en face, de ses yeux si amoureux d'ordinaire ? Il répéta le prénom de son époux, essayant de le faire parler, mais cela ne fit qu'accentuer la sensation de tristesse qui se dégageait de la posture de Magnus. Pour essayer de l'aider, il prit les deux mains de son époux. Comme si cela l'avait brûlé à vif, l'asiatique secoua ses mains et se libéra de l'emprise de son mari.
— Magnus, je ne peux pas comprendre si tu ne m'expliques pas ce qui se passe. Je vois bien que j'ai fait quelque chose qui t'a déplu, mais je ne peux rien t'expliquer en retour, sans savoir contre quoi je me bats.
— Tu... tu as... embrassé Clary !
— Quoi ? Non ! J'ai failli le faire, mais je ne l'ai pas fait. Je n'ai pas pu parce que je me disais que toi et Alec vous méritiez que je fasse un effort supplémentaire.
— Je t'ai vu... et Jace aussi. Comment tu peux me mentir alors que nous t'avons tous vu ? Même Président Miaou vous a vus.
— Magnus, je te jure sur tout ce que tu veux que c'est Clary qui voulait que j'essaie, pour voir si je ressentais encore quelque chose pour les femmes. Et quand j'ai senti, à peine le bout de ses lèvres, j'ai tout arrêté, parce que je me sentais comme si je te trompais. Alec t'aime beaucoup, et c'était bien plus difficile que je l'avais cru au départ. Pourtant Magnus, je t'avais dit que j'aimerais voir des femmes. Pourquoi tu réagis aussi mal ?
— Le dire et le faire sont deux choses extrêmement différentes. Alec est mon mari. Comment crois-tu qu'on peut réagir quand on voit l'amour de notre vie se jeter dans les bras d'une autre personne ? Je comprends, mais cela ne veut pas dire que je l'accepte pour autant dans mon cœur. Je t'aime Alec. Qu'est-ce que j'étais sensé faire ? Me réjouir et sauter de joie pour toi alors que mon cœur s'est fendu en vous voyant ? Non ! Je ne pourrai jamais partager Alec.
— Pourtant, il te partage avec moi.
— Tu sais très bien que ce n'est pas pareil.
— En quoi est-ce différent ? Il t'aime et tu fais l'amour avec moi. Tu crois vraiment qu'il aime ça ?
— On en a discuté sérieusement et il a compris pourquoi je l'avais fait. Sérieusement Alec, tu as plus d'affinité avec ton hôte que je n'en ai jamais eu avec le mien. Tu vas fusionner, je le sais, mais tu ne veux pas l'admettre, mais moi, j'ai vu des signes.
— Ce n'est pas parce que nous avons fait l'amour que je suis amoureux de toi. Je te l'ai dit qu'Alec avait besoin que tu saches comment il t'aimait.
— Oui ! C'est ça ! Voile toi la face. Tu ressens ses émotions, mais tu t'entêtes à te dire que ce sont seulement les siennes. Regarde Jace ! Lui, il ne ressent rien pour Clary et est encore très amoureux de Lewis. Il ne fusionne pas aussi rapidement que toi et ta soeur. Le jour où tu comprendras que ses émotions sont aussi les tiennes, là, on pourra reparler de ce qui peut faire mal ou pas.
Sans le vouloir, le couple s'était mis à discuter de plus en plus fort, donnant encore plus de questionnement à Sébastien. Même Jace avait été surpris que Clary prenne autant sa défense. Avec tout ce qu'il lui avait fait subir depuis les dix dernières années, ils ne s'attendait certainement pas à une telle fougue de la petite rousse, qui regardait, du coin de l'œil, son ami Alec. Elle s'en voulait quand même un peu de l'avoir mis dans cette situation avec Magnus. Clary avait beau avoir le béguin pour son ami depuis l'enfance, elle ne s'était jamais interposée dans aucune de ses relations. Il fallait dire qu'elles n'avaient jamais été très longues. Même elle, n'avait pas réussi à le retenir bien longtemps.
Elle soupira longuement et se mit à examiner Jace plus attentivement. Cela faisait près de trente-six heures qu'il n'avait pas tenté de lui faire un de ses coups tordus. Bien entendu, son hôte le retenait probablement à deux mains, mais il ne l'avait pas fait. Et pour vrai, qui n'aurait pas le goût de faire subir des atrocités quand son monde s'écroulait comme le sien. Elle pencha la tête de l'autre côté et rencontra les yeux de son frère qui l'a sondait jusqu'au plus profond de son âme.
— Je vois que ma petite sœur a encore des sentiments pour toi, Joch. Qu'est-ce qu'elle a bien pu te faire pour que tu la détestes autant ?
— Mon frère et elle, ils ont...
— Tu n'as jamais eu de frère ! Est-ce que tu serais un voyageur du miroir ?
Clary tira Jace jusqu'à elle et planta ses yeux dans ceux de l'archéologue. Il n'était pas question qu'il raconte tout à son frère. C'était beaucoup trop dangereux qu'il aille tout dévoiler. Elle plaqua ses deux mains de chaque côté du blond et marmonna entre ses mâchoires crispées.
— Ne dis rien. Il va tout tenter pour savoir. Arrête immédiatement !
Tout aussi crispé, Jace lui répondit de façon presque rageuse.
— La vie ne m'a jamais fait de cadeau. Pourquoi je ne pourrais pas exprimer, enfin, ce qui me rend si mal ?
— Parce que ce n'est pas vrai que tu étais malheureux avant que Jace arrive ici.
— Je suis arrivé ici et ma vie n'a fait qu'empirer. Je n'ai rien qui me retienne ici et, si Sébastien peut nous donner le livre, je lui dirai tout ce qu'il veut savoir.
— Ce n'est pas vrai, Jace. Tu as quelque chose qui te retient ici!
— Il va falloir être plus précise Clary car là, maintenant, je ne vois rien du tout.
-Tu m'as moi, minet.
— Ah ! Ah ! Toi ?
— Je t'aime Jace, répondit la rousse en l'embrassant immédiatement après.
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