Avant de repartir, Alec insista pour laisser un message à Monsieur Gid. Le libraire l'avisa que Président Miaou s'était peut-être caché chez-lui et laissa son numéro, même s'il ne doutait pas qu'il le connaissait déjà par cœur.
Ce fut dans un lourd silence que les deux hommes revinrent en ville. Comme demandé, Andrew arrêta son véhicule devant la librairie. Il se tourna vers le noiraud qui regardait le magasin sans vraiment le voir. Le policier hésita, puis plaça sa main sur la cuisse du libraire qui s'éveilla immédiatement à son contact.
Alec plongea son regard sur la main du policier puis d'un geste dédaigneux, il la prit du bout des doigts et la laissa retomber d'un geste sec sur la propre jambe du blond.
— Ne recommence pas, gronda le jeune homme. Tu n'auras jamais une miette de mon âme. Elle appartient à Magnus, et personne d'autre.
— Tu es sous le choc, Alec, essaya de contrer le policier.
— Ta main sur ma cuisse, il n'y a rien de subtil là-dedans. Garde la à sa place et notre relation restera cordiale. Maintenant, je dois annoncer la mauvaise nouvelle à Raphaël. Je compte sur toi pour ne pas lui laisser voir ta joie. Il n'a pas besoin de ta condescendance. Cet enfant n'est pas idiot. Il a compris que tu n'aimais pas Président Miaou. On l'a tous saisi.
— Si tu crois que ma haine pour ce chat de gouttière peut transparaître tant que ça, je vais plutôt te laisser le lui apprendre sans moi, siffla l'agent entre ses dents. Je te rappelle dès que j'ai du nouveau.
Égoïste ! C'était le terme qui venait en tête du libraire. Brusquement, il sortit de la voiture et se dirigea vers la porte de la boutique sans même remercier Andrew. Alec entendit le véhicule quitter les lieux dans un crissement de pneus. Il savait qu'il s'était lui-même comporté comme un connard, mais c'était insupportable. Magnus lui manquait chaque jour un peu plus et Président Miaou venait de lui enfoncer un poignard dans le cœur. Le jeune homme arrivait à peine à mettre un pied devant l'autre sans s'effondrer de tristesse. La distance était pourtant courte, mais il lui sembla, qu'à chaque nouveau pas, que la porte s'éloignait davantage.
Ce fut Robert qui finit par lui ouvrir en compagnie de Raphaël. Le jeune garçon se jeta dans ses bras, heureux de le revoir.
— Alec ! Robert veut m'amener à l'entrepôt. Tu veux bien que j'y aille avec lui, supplia-t-il sans comprendre la lassitude du libraire.
Le noiraud se força pour lui faire un sourire factice. L'enfant semblait avoir oublié, pour une fois, que sa maman n'était pas là. L'aveu de la disparition du chat pouvait bien attendre un peu.
— Ça va, fiston, s'informa Robert en lui tapotant l'épaule.
— Oui, je vous raconterai tout à votre retour. Qu'est-ce que tu vas chercher là-bas ?
— Depuis quelques jours, j'ai concentré mes recherches sur les miroirs puisqu'on sait que c'est la base pour rejoindre l'autre monde. J'ai fait l'inventaire de nos objets anciens et on a au moins douze miroirs à l'entrepôt. Je vais prendre quelques photos et on pourra les comparer avec celui de Magnus.
— Je vais avec vous, répondit instantanément le jeune homme.
— Il faut quelqu'un pour tenir la boutique. J'y vais seul, fiston.
— Papa, tu ne comprends pas. Les hommes qui recherchent les médaillons, ils ne feront pas dans la dentelle. Tu as déjà goûté à leur médecine.
— Je cherche un miroir, pas un médaillon. Ne t'en fais pas. Ça fera aussi un divertissement pour Raphaël. Te souviens-tu, quand tu avais son âge ? Lorsque tu m'accompagnais, je pouvais voir des étincelles dans tes yeux. Cet enfant a grand besoin de se changer les idées.
À bout d'arguments, Alec laissa retomber ses bras le long de son corps. Bien qu'il lui en coûta, il ne put contredire son père. Raphaël reviendrait la tête remplie de beaux souvenirs. Cela pourrait au moins atténuer sa peine lorsqu'il apprendrait pour Président Miaou.
**********
Clarissa se réveilla dans son lit qui se trouvait dans l'appartement qu'elle occupait depuis deux ans. Venait-elle de passer à travers un miroir ou bien tout cela n'était qu'un rêve fou dans lequel Jace était charmant ? Rapidement, elle passa une main sur sa poitrine et y trouva le médaillon magique. Tout cela n'était pas un rêve et sans plus attendre elle se redressa. La jeune femme jeta un œil autour d'elle pour repérer le roi Gideon, mais évidemment, il n'était pas là. L'histoire se répétait. Comment allait-elle retrouver le souverain alors qu'elle ne connaissait que son corps immortel ? La rousse plongea le bras vers son armoire et en sortit le premier t-shirt venu. Au diable la mode. Elle savait très bien où retrouver Alexander et c'est au pas de course qu'elle sortît de la maison pour rejoindre son ami, à la boutique.
Elle était peut-être pressée de le revoir, mais elle savait aussi qu'elle lui avait fait une scène digne d'Hollywood la dernière fois qu'ils s'étaient vus. La jalousie l'avait menée par le bout du nez, mais maintenant qu'elle y repensait, debout devant la boutique, elle se trouvait immature d'avoir réagi ainsi. La rousse se demandait même ce qui avait pu lui passer par la tête alors que ses pensées étaient toutes dirigées vers Jace depuis deux mois.
Elle soupira longuement puis ouvrit la porte. La clochette tinta au dessus de sa tête et la voix d'Alexander s'éleva au loin.
Il discutait avec un homme dans la quarantaine à propos d'un livre qu'il venait de lui vendre. Son ami avait beaucoup maigri et ses traits semblaient crispés. Par contre, elle le sentait toujours aussi passionné par les recommandations qu'il donnait au clients. Clarissa s'approcha tout près et discerna même une certaine mélancolie dans la voix grave du libraire. Il semblait être aussi malheureux qu'elle. Peut-être que sa présence lui redonnerait le sourire. La jeune femme attendit le départ du client et frappa tout contre l'une des étagères pour attirer l'attention d'Alexander. Ce dernier souleva les yeux d'un geste automatique, vérifiant si tout allait bien. En la reconnaissant, il s'exclama joyeusement.
— Clarissa !
Il releva le comptoir qui le séparait de la jeune femme et se précipita dans ses bras en pleurant à chaudes larmes.
— Alexander ! Tu m'as manqué. Comment vas-tu?
— Tu veux la vérité ou les paroles d'usage ?
— Tu n'es pas du genre à pleurer pour un rien, alors j'imagine que je veux la vérité, répondit-elle en lui passant une main sur la joue.
— D'accord, j'espère juste que tu ne me jugeras pas trop et que tu seras compréhensive.
— J'ai bien changé, mon ami. Quand tu sauras pourquoi je suis de retour, tu seras probablement celui qui me jugera le plus, répondit-elle avec un sourire triste.
La jeune femme entoura l'homme de ses bras pour le serrer comme si elle ne croyait pas qu'il était bien devant lui. Un sourire finit par accompagner le couple qui se raconta avec détails les mésaventures des deux derniers mois. Quelques sourcils se soulevèrent d'étonnement, mais au bout du compte chacun savait très bien que leur vie d'avant ne serait plus jamais ce qu'elle avait été et que d'habiter en permanence avec une autre âme les avait changés à tout jamais.
— Il me manque, souffla la jeune femme alors qu'elle lui parlait de Jace. J'aurais jamais cru dire ça un jour, rigola-t-elle avec un regard gêné.
— Je sais, Clarissa. Comment crois-tu que je me sens alors que je suis maintenant bisexuel et que mon mari est dans le corps d'une femme ?
Elle éclata de rire en imaginant son ami embrasser le vieil asiatique.
— Heureusement qu'il n'a plus son premier corps. Là, j'aurais complètement flippé de te voir le bécoter.
— Hé ! Jace n'a pas changé physiquement. C'est moi qui devrais rire de toi, s'esclaffa l'homme.
Cela faisait du bien de retrouver sa meilleure amie. Ses conseils, pas très avisés, lui avaient manqué plus que ce qu'il s'était imaginé. Ils étaient enfin réunis, envers et contre tous. Alec savait qu'il pourrait compter sur elle pour le soutenir et il en ferait autant. Elle avait tellement fait pour lui lorsque sa mère avait commencé à devenir si rigide. Leur amitié tiendrait le coup. Il en était certain.
Ils riaient encore de leur situation quand le tintement de la clochette de l'entrée les arrêta. Alec, tout comme il avait demandé à Clarissa de l'appeler, se tourna vers le client et son sourire se crispa. Devant lui se tenait son meilleur client. Monsieur Gid se dirigeait vers lui de son sourire franc. Avait-il retrouvé Président Miaou ? Alec chercha dans ses bras et même par terre, mais aucune présence du chat n'était détectable. Le jeune homme s'avança avec espoir, mais le client donna simplement une poignée de main au libraire avant de le saluer.
— Ah! Ma petite Clary, vous êtes déjà ici ! J'espérais bien que vous viendriez voir Alexander.
Les deux amis se regardèrent simultanément, ne comprenant pas pourquoi Monsieur Gid connaissait le nom de la rousse.
— Excusez ma confusion, mais on se connaît, demanda la rousse à l'homme dans la soixantaine qui l'observait avec un sourire complice.
— Depuis des siècles ma chère. C'est moi, le roi Gideon Lightwood.
Alec s'étouffa de surprise alors que Clarissa comprit enfin que le souverain avait évidemment changé d'apparence en entrant dans ce monde. Maintenant qu'elle le détaillait du regard, elle se souvenait d'avoir déjà vu cet homme, ici-même, au cours des dernières années.
— Alors les enfants, on a encore quelques surprises, s'amusa le roi.
— Si vous êtes Gideon Lightwood, finit par répondre Alec, cela veut dire que ma soeur et son enfant ne sont plus en danger. Vous allez reprendre le pouvoir de votre univers ?
— J'ai conscience que j'ai été égoïste de laisser Imogene aux commandes aussi longtemps. Je dois m'assurer qu'elle ne nuira plus à notre monde. Pour cela, il me faut ramener Magnus, Sébastien et ma descendance pour qu'elle comprenne que son tour est terminé. Ton mari ne dois pas être très loin, Alexander. Il ne me manquera que ton frère, ma petite Clary.
C'est à cet instant que le libraire flancha. Son mari, il ne savait même pas où il se trouvait et, vraisemblablement, Sébastien y était aussi. Le roi n'était pas au courant et il ne saurait pas plus ce qu'ils devaient faire.
— Magnus a disparu avec Sébastien, il y a deux mois. On les a enlevés pour une rançon. Les ravisseurs veulent les médaillons, mais nous ne pouvions pas les laisser entrer dans votre monde. Ils ont tenté d'assassiner mes parents. On a donc caché que nous avions quelques clefs. Dites-moi que vous savez quoi faire, supplia le libraire.
— C'est embêtant, songea le roi.
— Nous menons une enquête en collaboration avec la police. Je n'ai pas eu d'autre choix que d'aviser l'enquêteur principal. Je vais lui demander de vous présenter le dossier dès que possible. Mais avant tout, je me demandais si vous aviez vu le message que je vous ai laissé. Président Miaou a disparu dans votre maison.
— Je n'ai pas porté attention, mais si le lion avait été là, je m'en serais rendu compte.
— Dans ce monde, il a plutôt l'allure d'un chat. Enfin, j'imagine que vous sauriez s'il était chez-vous. Je vais appeler l'enquêteur Underhill immédiatement.
— Le plus tôt sera le mieux. Il faut arrêter tout cela, dès que possible.
Alec était sur le point d'appeler Andrew quand il reçut un appel de Robert. Il décrocha et ne comprit pas immédiatement ce qui se passait. Son père hurlait et lui déchirait les tympans.
— Papa ! Respire et répète-moi ce que tu as dit.
— Alec ! C'est Raphaël ! Il a disparu devant mes yeux. Je ne le trouve plus !
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