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– Tu m'as brisé le coeur l'autre jour et l'histoire avec Pierre... ça a juste fait imploser le peu qui restait encore en place. C'est même pas de ta faute. C'est de la mienne. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris de t'embrasser alors que j'ai été amoureuse de toi plus longtemps que je ne me suis aimée moi-même. Ça a ramené une foule de sensations et... tu es juste un teenage dream.

Je relève les yeux. Il est choqué.

–Tu es mon teenage dream et je me suis laissée embarquer comme une ado. Et Pierre... qui butine une rousse dans le lit où il m'a redemandé de vivre avec lui juste avant que je parte... C'était la goutte d'eau. J'ai le coeur brisé et... je me sens vraiment faible. Si je ne l'étais pas autant, je ne me serai pas enfuie en courant et je l'aurais giflé. Regarde !

J'agite mon portable devant Luke.

–Il m'a envoyé un message, je me suis contentée de ne pas répondre. Je suis incapable de me dresser contre qui que ce soit. Je suis un fake. Je regarde et je parle aux gens de manière hautaine pour cacher ma propre incompétence. Je... je ne vois pas les choses comme elles sont réellement.

Luke tente de me toucher et je recule pour ne pas qu'il me touche. Je file dans mon coin cuisine où je prends un vase. Je pose mes roses dedans juste après en avoir coupé les bouts. Être occupé me fait du bien, mais mes mains se mettent à trembler.

–Je suis une grosse idiote. Pierre... il doit me tromper depuis des mois, voire des années. De toute façon, qu'est-ce qu'il peut bien trouver à une fille comme moi ? Je ne suis pas une bombasse, je ne suis pas sympa... Je suis si... ordinaire. On n'a jamais cessé de me le dire après tout.

–Tu es bien des choses, mais ordinaire ? Certainement pas.

–Ah oui, c'est vrai. Je suis une traîtresse sans conscience morale qui te fait honte et qui te dégoûte, c'était ça ?

–Je ne le pensais pas !

–Tu as dit le contraire pourtant. Deux fois si je ne m'abuse.

–J'étais ivre , souffle-t-il. Et... je ne t'ai pas écouté. Je t'en demande pardon. Je ne savais pas que ton projet était si...

–Oh sérieusement Luke ? J'ai pas envie de t'entendre dénigrer mon travail en plus. J'en ai suffisamment bavé ! m'exclamé-je.

–Ton projet est exceptionnel. Je suis passé à la mairie une fois que Thea m'a engueulé en me disant que j'étais le roi des cons. J'ai tout regardé. Les plans, les projections en 3D. J'ai demandé à Tony de m'envoyer une copie et j'ai tout lu. Je le finissais que tu m'as laissé ce message sur mon répondeur. Tu as sorti tout ça de ta tête et ça démontre à n'importe qui à quel point tu es brillante, Angèle.

–Alors pourquoi je n'ai rien vu avec Pierre ? sangloté-je.

Luke se rapproche de moi et me tient contre lui.

–Parce qu'il a tout fait pour le cacher. Tu as été manipulé, ça arrive à tout le monde. Tu n'as pas à me présenter des excuses, Angèle. En revanche, moi je le dois. J'ai brisé ton coeur. Je t'ai fait du mal alors que je t'ai promis que tu pourrais toujours te réfugier chez moi, et dans mes draps si jamais tu dérivais.

Il me sert un peu plus contre lui si c'est possible.

–J'ai brisé ton coeur alors même que...que...

Il se recule un peu et je vois son regard si sincère. Il caresse ma joue tendrement.

–Alors même que j'ai été amoureux de toi si longtemps que j'ai oublié quand ça a commencé. Alors même que je n'ai réussi aucune de mes relations parce que dans le fond, il n'y a jamais eu que toi. Alors même que le fait de t'embrasser, m'a rappelé que cet amour n'était jamais parti. Je suis amoureux de toi Angèle, et je t'ai fait du mal. Je suis buté comme mec et quand je me suis mis dans l'idée que le projet All Nature était de la merde, je n'ai écouté aucun argument allant dans le sens inverse du mien. Je me suis senti trahi par toi parce que je pensais que nécessairement tu serais de mon avis. Et je me suis senti désemparé, parce que je pensais que tu serais toujours la même fille qu'au lycée, mais en vérité... tu es tellement plus que cette fille que j'aimais à l'époque. Je t'aime tellement, Angèle.

–Tu crois que c'est le moment opportun de me faire une déclaration d'amour ? Vraiment Luke ?

–Oui, c'est le moment, parce que plus que jamais, tu as besoin d'avoir une personne sincère en face de toi. Je le suis. Sache que je ne te demande pas de te mettre en couple avec moi et je ne te mettrai aucune pression. Peut-être qu'on ne vivra jamais une grande histoire d'amour tous les deux, ou une histoire tout court. Ton bonheur est la seule ligne que j'inscris sur ma liste de Noël, depuis des années. C'est pour ça que plus que tout, je veux que tu sois heureuse, même si ça implique que je te vois avec d'autres hommes que moi.

Il se détache de moi soudainement et j'ai froid tout à coup.

–Je vais te laisser, tu as besoin de te remettre d'aplomb et je dois me trouver un hôtel.

Luke tourne les talons et attrape son bonnet sur le canapé.

–Tu plaisantes ? Tu ramènes un putain d'arbre dans mon salon et tu comptes me laisser le décorer toute seule ? Retire ton blouson Lucky Luke et mange le repas de Pierre, je t'ai dit que je refuse de gaspiller.

–Je...

–Fais ce que je te dis. Je vais changer les draps pour que tu t'y installes. Pas question que tu ailles à l'hôtel, ma mère ne me le pardonnerait jamais.

Je ne lui laisse pas le temps de répondre que je pars dans ma chambre où je ferme la porte. Je suis amoureux de toi, Angèle. Il l'a dit et mon coeur bat la chamade depuis ces paroles. Je retire mes draps pour les changer rapidement. Je les emmène dans la salle de bain où je me fixe un instant dans le miroir. Je ne me vois pas, je vois le visage plein de ferveur de Luke qui me déclare sa flemme. Je t'aime tellement Angèle.

Je retourne dans le salon où il est entrain de décorer mon sapin de manière consciencieuse. Il a relevé ses manches, retiré son blouson et il sifflote.

–Je ne plaisante pas. Mange, je vais continuer.

–Je mangerai après. Tu peux m'apporter une autre guirlande ?

Son téléphone sonne et je vois la tête de Suzie qui s'affiche. Il ne répond pas et le lance sur le canapé où il continue de vibrer. J'observe Luke à la dérobée. Est-ce qu'il aurait pu mentir pour me redonner de l'espoir ? C'est bien son genre. Nous finissons la décoration et je recule. Mon sapin n'est pas le plus beau que j'ai vu, mais je l'aime beaucoup. Je tends ma main vers Luke pour toucher son avant-bras.

–Merci. Pour ce sapin. L'ambiance de Noël me manquait. Je l'ai remarqué à Dustfall.

Je recule pour lui réchauffer sa nourriture et je prends moi-même du bouillon. Nous restons silencieux pendant un moment à regarder le sapin.

–C'est... tu le penses vraiment ce que tu m'as dit ?

–Que je t'aime ? Tu en doutes ? J'en suis désolé si c'est le cas, soupire-t-il. J'ai été un piètre ami alors... je ne t'en veux pas. Je vais vraiment prendre un hôtel.

–Non. J'ai aucunement envie de rester toute seule.

Il me contemple pendant de longues secondes pendant que je me mords l'intérieur de la bouche pour ne pas pleurer.

–Je resterai alors. Mais uniquement si je peux aller prendre une douche. Je sens mauvais.

J'acquiesce et il se lève en posant sur ma cuisine sa barquette. La déclaration de Luke me perturbe plus que je ne le pensais au premier abord. Je ne sais pas comment le gérer tout de suite. Tout est embrouillé dans ma tête. J'entends la douche et je file dans ma chambre. Ma valise est là et je retire mon pyjama... je vois ma nuisette sexy façon mère Noël. Je m'assieds sur mon lit, la nuisette en main. Je l'ai acheté pour que nous passions une soirée sympa et ça n'arrivera pas. Je la lance dans un coin de la pièce et j'entends des pas derrière moi. Luke a une serviette enroulée autour de ses hanches.

–J'ai oublié mon sac dans le salon.

Quand il revient, il avait enfilé un bas de pyjama uniquement.

–Hum... Tu peux passer dans la salle de bain si tu en as envie. J'ai terminé.

Je passe par mon lit pour aller dans la salle de bain. J'ai toujours ma nuisette dans un coin et je l'enfile. Luke est avec son portable à regarder par la fenêtre. Il tend son téléphone vers sa bouche.

« C'est bon Papa, j'ai compris à ton premier message que je n'étais pas quelqu'un de fiable. Pas besoin d'en rajouter une couche. Tu peux me virer si tu veux. Je m'en bas les couilles. Par contre, tu comprendras que dans l'état actuel des choses, je ne viendrais pas à Noël. Ciao. »

Il a un ton amer et il ne m'a pas remarquée. Il se retourne tout à coup et me voit.

–Je vais appeler ton père.

–Non. Il va me rappeler de lui-même.

Son téléphone sonne et il le brandit comme pour démontrer sa théorie. Il décroche immédiatement et Luke « tête de con » débarque. J'attrape immédiatement le téléphone de Luke et je m'éloigne dans le salon. Mon beau-père est entrain de hurler sur son fils.

–Derek ?

–... Angèle ?

–Oui, excuse-moi de t'avoir volé Luke. J'ai eu un coup de blues et il a pris le premier avion pour... me remonter le moral.

–Comment ça un coup de blues ? Qu'est-ce qu'il se passe Angèle ?

– Je suis désolée que tu te sois inquiétée pour Luke. C'est de ma faute, ne lui en veux pas, s'il-te-plaît. Il sera bien évidemment là à Noël.

–Angèle, je sens à ta voix que tu ne vas pas bien. Dis-le moi ou je te passe ta mère.

–Sans vouloir te vexer, j'ai pas trop envie de t'en parler. Pas tout de suite en tout cas.

Luke rattrape son téléphone et il s'écarte de moi.

–C'est moi Papa.

J'en profite pour ranger mes affaires dans la chambre.

–Je vais prendre ton canapé Angie, lance la voix grave de Luke derrière moi.

–Mais non, j'ai changé mes draps.

–J'insiste. Tu ne te sens pas très bien, dors dans tes draps.

–Tu n'auras pas le dernier mot alors fais pas chier, Marshall. Ton père a dit quoi ? finis-je par demander.

–Il s'est excusé.

Luke a l'air fatigué et je lui embrasse la joue après avoir récupéré un oreiller et une couverture pilou pilou.

–Passe une bonne nuit.

Je n'arrive pas à m'endormir, mais je ferme la porte et il comprend qu'il ne doit pas venir. J'ai l'impression d'être dans un océan mais je vois un phare au loin. Je tente de sombrer dans le sommeil, en vain. J'ai faim en réalité. Je me relève pour me faire un chocolat chaud et j'entends du bruit dans la chambre. Luke ouvre la porte, hagard.

–Chocolat chaud ?

J'hoche la tête et je lui tends ma tasse avant d'en faire une autre. Il s'installe autour de ma cuisine. Nous faisions ça ado, en cachette de ses parents.

–Par rapport à ce que tu m'as dit...

– Je n'ai pas envie de me retrouver dans une histoire compliquée. Règle ta vie d'abord et si jamais tu ressens de l'amour pour moi un jour, dis-le moi. J'ai compris en te revoyant que... tu étais la femme de ma vie. Je t'attendrais, peu importe le temps qu'il faudra. Et en attendant, je serai ton ami et juste ça.

De la franchise : voilà ce que je peux lire dans ses prunelles. Je t'attendrais, peu importe le temps qu'il faudra.