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86. Kerun

Plus tôt dans la journée, quand Kerun était rentré au quartier général des services secrets, il avait eu la très mauvaise surprise de découvrir Nora Felden, assise au petit bureau de sa chambre.

Le concept de vie privée était très flou, quand on était agent secret, et l'elfe était peu territorial, mais la présence de leur cheffe dans son refuge personnel, était un cran au-dessus de ses habitudes.

Sans lui laisser le temps de reprendre son souffle, elle l'avait vertement interrogé sur ses activités de la matinée. Il avait brodé sans mal, distordant la vérité, très légèrement, en parlant de contacts à reprendre dans la diaspora mélandienne. Elle lui avait rappelé qu'il était officier, qu'il disposait d'une quinzaine d'agents directement sous ses ordres, qui pouvaient se charger de ce travail de terrain. L'accusation était douloureuse car Nora n'ignorait pas que Kerun ait toujours préféré, de loin, être dans les rues que derrière un bureau, mais elle avait insisté, et devant ses protestations — il ne parvenait pas à s'en empêcher — elle lui avait donné une dernière chance : soit il se reprenait, soit elle serait forcée de sévir en le consignant dans leurs locaux.

Il en était resté tellement estomaqué qu'il n'avait rien trouvé à répondre sur le moment, et elle en avait profité pour sortir en claquant la porte.

L'elfe était resté assis sur son lit, d'abord stupéfait puis furieux. Depuis quand le menaçait-on de le priver de sortie, comme un gosse ? Il savait que Nora était inquiète de ses initiatives, et qu'elle doutait de son obéissance. Pourtant il avait toujours – toujours – placé le bien commun avant toute autre considération. Et il n'était pas connu pour des faits d'insubordination... seulement pour une tendance à agir sans en informer ses collègues.

Heureusement, il n'avait pas prévu de revoir Martin et Iris avant le lendemain. Comme il l'avait craint, l'échange d'informations avait été limité : les deux Griphéliens avaient peur d'être suivis par les cultistes et ils avaient raison de se montrer prudents. Heureusement, Iris avait pu conjurer sa fameuse bestiole, qui s'était révélée — stupeur et signe — prendre la forme d'une colombe immaculée. Kerun ne savait pas si la magicienne était capable d'impulser une forme à sa créature, mais le résultat était parfait. Discret et symbolique. L'elfe avait décidé de la surnommer Lumière.

Le petit message qu'Iris avait accroché à sa patte avait indiqué à Kerun une cachette où la jeune femme avait pu déposer de plus amples informations. Un récit de l'entrevue de la nuit, bien sûr, mais aussi trois esquisses de portraits, dont un particulièrement détaillé, d'un certain Conrad, qu'elle pensait le chef de la cellule. Ces visages ne disaient absolument rien à l'elfe, mais ils étaient d'une qualité indéniable. La jeune dame de Vainevie se révélait avoir plus d'un atout dans sa manche.

Iris avait discuté – très évasivement – avec ce Conrad. Le nom des Obscurs n'avait pas été prononcé, mais il avait abordé la question de la magie de mort, ainsi que la nécessité de bousculer les Juvéliens, en utilisant de grands moyens, illégaux, dangereux, mortels. Suffisamment d'allusions avaient été faites pour qu'Iris soit persuadée d'avoir affaire aux bonnes personnes. Martin, de son côté, avait « patienté à l'extérieur en compagnie d'un autre homme, originaire de Griphel en passant par Belhime ». Sa capacité à identifier les accents était une bénédiction.

Quoi qu'il en soit, les deux Griphéliens en savaient désormais trop, ce qui signifiait qu'ils étaient en danger, et Kerun n'avait qu'une idée très vague de ce dont Iris était capable, s'ils venaient à devoir se défendre... Le groupuscule ne leur avait pas fixé de nouveau rendez-vous, mais savait où les trouver, et il ne tarderait pas à les recontacter.

Kerun s'en voulait de ne pas avoir anticipé que les choses puissent progresser aussi rapidement, mais il prendrait le temps d'interroger et de préparer ses deux apprentis espions. Pas aujourd'hui : les chances que Nora le fasse filer étaient trop élevées.

Comme pour marquer le coup, elle lui avait d'ailleurs rempli l'après-midi d'activités diverses : il avait discuté avec deux agents coincés dans leur mission, relu le rapport d'un troisième, participé à une réunion traitant de la cellule de Frimal, et une autre sur le dispositif à prévoir pour les élections prochaines, donné son avis sur les comptes de l'année précédente, évalué les besoins de l'armurerie, puis étudié les dossiers de huit candidats au recrutement. La nuit était tombée et il s'était arrêté un quart d'heure dans le réfectoire, où Jen était venue le couvrir de remerciements pour l'intervention de la veille, avant que Willhem ne l'entretienne des derniers ragots qui circulaient en ville, évitant curieusement le sujet des Obscurs et des Temples.

Il n'y avait qu'une cause possible à cela : Nora avait briefé tout le monde pour qu'on ne lui dise rien. Se savoir un point à l'ordre du jour d'une réunion à laquelle on ne l'avait même pas convié avait empli l'elfe d'un sentiment dont il avait eu du mal à faire sens. Mais ce n'était peut-être pas ça. Peut-être Nora avait-elle simplement fait passer un message, ou parlé à quelques-uns des proches de Kerun, pour s'assurer qu'ils minimisent sa frustration.

Mais quoi qu'elle fasse, quoi qu'elle ordonne... Il ne pouvait pas ne pas agir.

Iris lui avait fourni des dessins précis, les premiers portraits fiables des Obscurs, il n'avait pas le droit de les garder pour lui, et dans le même temps, s'il en parlait à Nora, il risquait d'avoir des ennuis monumentaux. Il serait aussi forcé d'éventer l'existence de sa paire de Griphéliens, ce qu'il ne pouvait se résoudre à faire : l'un et l'autre étaient illégalement à Juvélys, après avoir échappé au Cageot de manière non réglementaire. Pour récupérer Iris, Kerun avait fait pression sur le capitaine Valtameri sans aucun mandat officiel, et la situation de Martin était encore bien pire. Rayer leurs noms de la liste des déportés demanderait une opération subtile, et l'elfe n'avait pas le temps de s'y consacrer dans l'immédiat.

Tout frein à leur action représentait un danger, à la fois dans leur traque des Obscurs, mais aussi pour leur propre sécurité. Or Kerun refusait de leur faire à nouveau payer sa maladresse, ils avaient assez pris durant la rafle. Il les garderait dans la clandestinité le temps nécessaire, et ne les révélerait que lorsqu'ils auraient prouvé qu'ils étaient des atouts pour la capitale. En d'autres temps, la parole de l'elfe aurait suffi, mais il n'était plus en odeur de sainteté, il en faudrait davantage.

Après le repas du soir, Kerun avait essayé de s'esquiver vers sa chambre, mais ses collègues n'en avaient pas fini avec lui. Glenn avait une intervention prévue dans les hangars d'un armateur rhyvan et voulait discuter avec lui de la bonne manière d'aborder les aspects diplomatiques. Puis Mayra, qui cherchait à décrypter des messages échangés par des Esprins basés à Novogal, lui demanda conseil sur ses méthodes de décodage. L'elfe finit par se replier dans son antre alors qu'il faisait noir depuis longtemps. Il boucla la porte, éteignit les lumières, et attendit une dizaine de minutes. Puis il ouvrit précautionneusement la fenêtre, dont il entretenait les charnières avec méticulosité, et sortit. Plutôt que d'emprunter le chemin le plus court, vers la terre ferme et la remise à bois, il s'éleva dans les hauteurs et passa par le toit. Il suivit les tuiles faitières d'un muret qui surplombait la rue, se laissa tomber sur la plateforme qui coiffait le bâtiment voisin, puis glissa le long de la gouttière jusqu'au sol.

Une fois sur les pavés humides, il mit son capuchon et adopta un pas rapide pour gagner la caserne. Il était tard et son contact était probablement endormi, mais il faudrait bien qu'il le réveille pour discuter de la marche à suivre. Ces portraits ne pouvaient pas être disséminés n'importe où et n'importe comment, ils devaient être utilisés tout en en protégeant les sources et, avec son réseau étendu, la garde était la meilleure organisation susceptible de le faire avec efficacité et célérité. Bien sûr, Kerun n'ignorait pas que ses confrères en uniforme gris avaient été écartés de l'enquête, eux aussi, mais ils pouvaient chercher ces intrus sans révéler qu'il s'agissait d'Obscurs. Toutes les informations qui avaient été livrées aux mercenaires de Maelwyn avaient disparu sans faire de vague et il était impossible de savoir ce qu'ils en avaient tiré.

L'espion contourna le Fort par le sud, repérant les sentinelles aux portes principales et celles qui occupaient les hauteurs des tours. Il se glissa d'ombre en ombre, de porche en allée, de chariot en muret, soucieux de ne pas être repéré. A pareille distance, en pleine nuit, les chances étaient maigres, mais il y avait quelques elfes dans l'armée, et les exploiter dans l'obscurité aurait été la chose logique à faire. Il arriva devant la façade éclairée de la caserne, qui ne dormait jamais. Une demi-douzaine de personnes s'éparpillaient sur le porche et aux alentours, et un groupe de quatre gardes filtrait les entrées. Kerun dépassa l'animation pour poursuivre son parcours jusqu'à la façade est du bâtiment, se dirigea vers l'entrée des livreurs, et commença son escalade.

Il en était arrivé au deuxième étage et négociait un passage un peu difficile, sous une fenêtre brillamment éclairée, lorsqu'il y eut le regard attiré par un éclat provenant du Parc. Il vit très distinctement une vague de lumière blanche s'étirer entre les arbres, au sud, fourmiller comme l'écume sur la plage, puis s'estomper. Une seconde plus tard, une étincelle rouge fusa, à peine détectable. Puis de petits frémissements argentés. L'elfe demeura pétrifié de surprise.

Un déferlement magique, en plein coeur de la ville, en pleine nuit...

Le coeur battant, il se laissa glisser jusqu'au sol et se mit à courir vers le Parc.

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