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11. Brendan


A nouveau, c'était la nuit.

Il n'en était pas certain, bien sûr, car il ne pouvait le voir, mais les oiseaux avaient cessé de chanter, l'âtre crépitait doucement, et il n'y avait plus personne, plus un bruit, plus un murmure, dans sa chambre comme à l'extérieur.

Au fin fond de lui-même, il avait peur, mais quelque chose l'empêchait de s'y livrer complètement. Une mixture bien dosée. Les Valgrians se jouaient de ses émotions pour le protéger, il le savait. Dans le même temps, son seul désir était de hurler jusqu'à ce qu'il ne reste rien en lui, rien du tout, un vide qu'il pourrait alors, peut-être, remplir à nouveau.

Ou mourir.

Jehannah était là à son réveil, il l'avait reconnue à son parfum, et deviné sa réticence au ton de sa voix. Elle s'était enfuie à la première occasion, peut-être bouleversée par l'état dans lequel il se trouvait, ou alors simplement dégoûtée. Les servants d'Hime ne supportaient pas la souffrance, ils la percevaient comme une insulte à leur déesse. Qu'on n'en soit pas responsable n'avait pas beaucoup d'importance pour eux, car toute flétrissure cachait quelque chose, et ils préféraient fermer les yeux.

Ha !

Il s'en voulut d'avoir formulé ce genre de pensées, alors qu'il n'avait plus à se soucier de voir quoi que ce soit. Mais Céleste avait promis qu'ils le régénéreraient, s'il le souhaitait. Il appréciait d'avoir le choix, car aucun sortilège n'était anodin, et son organisme paierait pour ce pied de nez à l'ordre naturel des choses, mais il n'avait pas tergiversé. Il allait avoir besoin de toutes ses facultés pour la suite : la vengeance obligatoire du mal qui avait été fait aux siens.

Personne n'était venu lui poser la moindre question sur ce qui s'était produit, sans doute parce qu'ils voulaient lui laisser le temps de se remettre. C'était stupide. Il avait besoin de tout dire. Garder la violence des derniers jours emprisonnée dans sa mémoire le rongeait.

Pourtant, quand Othon s'était assis près de lui, avait pris sa main dans la sienne, il avait fait semblant de dormir. S'il avait pu pleurer, il l'aurait fait, mais il ne lui restait rien dans les orbites, un gouffre sanglant. Il n'avait pas pu parler à son ami, ravagé par le chagrin, l'horreur et la honte. Othon n'avait peut-être pas été dupe mais il n'avait pas cherché à le réveiller. Il était resté là, stoïque, son aura formidable de chevalier divin agissant comme un baume, apaisant le pire, noyant les regrets, la haine, le désespoir, et le Mivéan avait fini par réellement s'endormir.

Quand il avait émergé, Othon était parti, et Brendan espérait qu'il lui pardonnerait sa lâcheté. Il ne comprenait pas vraiment qu'il puisse en douter, mais ce qui s'était produit avait balayé de nombreuses certitudes...

Comment, lui qui était l'Elu du Destin, avait-il pu ne rien voir venir ? Pourquoi n'avait-il pas songé à sonder le futur, à glaner un signe ? A quel moment s'étaient-ils reposés sur la certitude que rien ne pourrait jamais se produire, que Juvélys était revenue à elle-même, cette cité ensoleillée, tranquille, où la lumière de Valgrian éclaire les hommes et les femmes de bonne volonté ?

Stupidité !

Et il était responsable, parce qu'il était le chef, qu'il avait failli à protéger les siens. Dix-neuf survivants. Ils étaient trente-neuf. Il en manquait vingt.

Vingt.

Et il ne savait rien, sinon qu'ils avaient hurlé, et qu'ils étaient hors d'atteinte, tandis qu'il se tordait dans des liens trop serrés, aux pieds d'un homme, puis d'un autre, et encore d'un troisième, qui se relayaient pour s'assurer qu'il ne parvenait pas à se libérer.

Pourquoi ils l'avaient laissé en vie, il n'en savait rien. Ils ne lui avaient pratiquement pas parlé.

Juste pour lui dire que ce n'était pas personnel.

Pas personnel. Peut-on torturer un homme, le laisser dans le noir, et lui dire que ce n'est pas personnel ?

La rage l'étreignit, ou du moins il supposa que c'était ce qu'il ressentait, car comme sa terreur, elle était molle, muselée par la bienveillance de Céleste.

Ces braves Valgrians.

Il était reconnaissant et furieux, car leur omnipotence en ces lieux éclipsait toutes les autres lueurs divines. Mivei n'avait jamais été une puissance majeure, pas en Tyrgria, du moins, ce qui était une absurdité : tous les hommes sont soumis à leur destin. Mais quand ses serviteurs étaient à terre, immanquablement, on faisait appel aux Valgrians. Nombreux, solides, blessés.

Songeaient-ils au mal qui leur avait été fait, autrefois ? Un seul homme avait péri, alors. C'était la dernière attaque religieuse en date. Sous le couvert d'excuses, les autorités avaient blâmé les Valgrians pour leur manque de prévoyance. Que diraient-elles en réalisant que les Mivéans n'avaient pas fait mieux ? Vieilles incantations défaillantes, portes ouvertes, tradition d'accueil nécessaire, mal inspirée. Car les agresseurs étaient entrés en toute simplicité, pour chercher une table et un lit. Brendan devinait l'expression du général Maelwyn, son mépris.

Tout est de ma faute, songea-t-il.

Je les tuerai tous.

Dérive.

Il songea à ses collègues, à ses amis, hommes et femmes, qui lui avaient fait confiance, qui devaient le maudire.

Le Temple. Son Temple.

Du sang répandu.

La mort.

Cinq pies criardes, volant en cercles dans l'air glacial, autour de sa carcasse meurtrie.

Elles jacassent, jacassent encore, promesse de bouleversements majeurs et dramatiques. Juvélys en a tant vu, ces dernières années, coup d'état, massacres, tyrannie, révolution, du feu partout, des hurlements, le trépas.

Valgrian lutte mais Casin habite le coeur des hommes, toujours tapi, en embuscade, à Juvélys aussi. Griphel n'a pas le monopole des âmes noires, même si elles y prolifèrent en toute liberté.

Mais les visiteurs n'étaient pas griphéliens. Ou du moins, ils n'en avaient pas l'air. Comment savoir ? Il les avait entrevus, il n'était pas responsable de l'accueil des pèlerins, il ne l'avait jamais été. C'était Anton qui s'en chargeait cette sixaine, Brendan l'avait vu passer, une poignée de voyageurs sur les talons, au moins une femme, il avait entendu leurs rires, le murmure de leur conversation. De la nef vers le couloir des invités, deux petites salles, une pour les hommes, l'autre pour les femmes, à deux pas des dortoirs des novices.

Vingt disparus.

Les enfants en faisaient-ils partie ? Etait-ce là que le pire avait commencé ?

Il entendait Sonia répéter que placer des inconnus juste à côté des gosses était stupide et dangereux, mais la réorganisation nécessaire pour déménager les uns et les autres passait toujours à la trappe de leurs bonnes résolutions. Il y avait tant d'autres priorités, comme la réfection du toit, le remplacement des vitraux du frontispice, les bénédictions à distribuer, la déesse à chérir.

Mais lui, le grand prêtre, le Fils du Destin, leur maître à tous, avait passé la journée à peindre une fresque sur le plafond de la bibliothèque.

Une putain de fresque sur le plafond.

Sombre crétin. Criminel. Alors que des tueurs s'immisçaient au coeur même de la ruche.

Pourquoi suis-je en vie ? songea-t-il, les orbites en feu.

Aveugle, il ne pourrait plus jamais peindre. N'était-ce pas une punition appropriée pour ce dont il était responsable ?

Non.

Le Destin exigeait rétribution et non résignation. Aveugle, il ne pourrait frapper.

Il fallait d'abord qu'il traque et massacre les coupables.

Ensuite, il pourrait se crever les yeux.

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